Chapitre 37 : Funérailles

Giyu était incapable de réfléchir, alors que le cercueil vide passait près de lui. Gravé de papillons, il était fort beau, mais le pilier de l'eau était incapable de l'apprécier, alors qu'il signifiait la mort de sa compagne. Totalement anesthésié, il ne pouvait que serrer les main d'Aoi et de Nezuko en retenant ses larmes.

Le cimetière des pourfendeurs était immense, empli des tombes de tous ceux qui s'étaient battus pour exterminer les démons. Le cercueil de Shinobu reposerait à jamais à côté de Kanae. Giyu avait pensé que c'était ce qu'elle aurait souhaité. Il avait hâte que les funérailles soient terminées, même s'ils étaient en petit comité, il voulait retourner au domaine et se retrouver seul avec les sœurs de Shinobu et les Kamado. 

Le cercueil fut lentement descendu dans le trou. Aoi renifla et Giyu serra sa main un peu plus fort. Tengen et Kyojuro scellèrent la tombe avec une dalle marquée du nom de Shinobu Kocho. Giyu commença à avoir du mal à respirer. Non, il ne pouvait pas s'effondrer maintenant ! Pourtant, en entendant les sanglots de Mitsuri et Kanao, en voyant les mines atterrées des autres piliers, en sentant Aoi serrer sa main de plus en plus fort pour se retenir de pleurer, il céda.

Il se précipita sur la tombe de sa compagne en gémissant. Ses larmes s'écrasèrent sur la pierre, toujours plus nombreuses. Secoué de sanglots convulsifs, il laissa échapper un long cri de douleur qui résonna longtemps après sa fin. Le pilier serrait désespérément la dalle contre lui, comme si elle pouvait lui ramener Shinobu.

Il finit par sombrer dans un état de demi-conscience alors que les invités se dispersaient peu à peu. Giyu sentit confusément Aoi et Nezuko le prendre dans leur bras, puis Kanao, Tanjiro et Muichiro se rajouter au câlin.

Giyu ne se souvenait pas bien des jours suivants. Il flottait dans le brouillard. Il se forçait à se lever après une longue nuit de cauchemars, à manger avec les résidents du domaine, il aidait Aoi à faire la lessive, à préparer à manger, et évitait de rester seul. Le maître leur avait accordé deux mois pour se reposer avant de repartir en mission. Kanao se préparait à devenir pilier de la fleur, puisqu'elle était la successeur de Shinobu.

Tanjiro et Nezuko s'entraînaient du matin au soir avec une ardeur renouvelée, et Aoi et Giyu leur apportaient régulièrement des boulettes de riz, de l'eau, et tout ce qu'il leur fallait. Giyu n'avait pas touché à son sabre depuis la mort de Shinobu, ni à son uniforme, d'ailleurs. Il songeait à faire de Tanjiro son successeur et à démissionner de son poste de pilier. Il n'avait plus le cœur à se battre et préférait rester au domaine avec les filles et soigner les pourfendeurs blessés. 

Lorsqu'il fit part de ses projets avec Aoi, elle parut comprendre la situation du pilier.

- Si c'est ce que tu veux, fais-le. Personnellement, je serai ravie d'avoir un coup de main autre que les trois petites. Et je comprends que tu sois écœuré des démons après ça. Tâche juste de ne pas trop te renfermer, d'accord ? 

- D'accord. De toute façon, je vais attendre que Kanao devienne pilier et qu'elle s'intègre. Je pense qu'elle n'aura pas de difficultés, mais je veux l'épauler.

- Bonne idée...

Soudain, un petit papillon rose et vert vint se poser sur le doigt de Giyu.

- Oh, il est joli ce papillon ! s'exclama Aoi.

Soudain, le pilier de l'eau eut une certitude.

- Elle est vivante.

- Qui ça ? demanda distraitement la jeune fille en observant l'insecte sous toutes ses coutures.

- Shinobu. Shinobu est vivante.

Aoi soupira tristement.

- Giyu, je sais que c'est difficile, mais elle est morte. Elle ne reviendra pas.

- Écoute, je... Je ne peux pas dire comment je le sais, mais je le sens, c'est tout. Elle n'est pas morte.

- C'est peut-être le papillon...

- Comment ça ?

- Tu ne trouve pas qu'il ressemble beaucoup à celui sur la bague de Shinobu, celle qui avait appartenu à Kanae ?

- Si, un peu, mais il doit y avoir des dizaines de papillons roses et verts ici, non ?

Aoi secoua la tête.

- Non, aucun. Kanae disait que cette bague était spéciale...

- Spéciale comme de transmettre un message ?

Ils se regardèrent, éberlués.

- Non, c'est quand même pas... commença Giyu.

Aoi se leva.

- Il faut aller voir Tamayo !

- Pourquoi ? 

- C'est elle qui a le plus de connaissances sur les démons ! Si quelqu'un connait les pouvoirs de Muzan, c'est bien elle !

- Au risque de me répéter, pourquoi ?

- Mais c'est évident ! Shinobu a été absorbée par Muzan après avoir été blessée mortellement, et si en l'absorbant, Muzan l'avait gardée en vie et soignée ?

- C'est en train de partir loin, là...

- C'est la SEULE explication possible !

- Mais pourquoi Muzan aurait-il fait ça..?

- Je ne sais pas trop... Pour qu'elle lui donne des informations ? Ou qu'elle le retransforme en humain, comme Nezuko... hasarda Aoi.

- Le connaissant, il voudrait plutôt qu'elle le rende résistant au soleil...

Ils échangèrent un regard.

- Bon sang, il veut qu'elle le rende résistant au soleil... marmonna Aoi.

- Mais elle ne sait pas comment faire ! Elle ne sait même pas comment elle a retransformé Nezuko en humaine !

- Et même si elle le savait, elle n'accèderait jamais à la demande de Muzan !

- Le truc, c'est qu'il peut se montrer très persuasif... 

Les yeux de la jeune fille s'agrandirent.

- Pitié, dis-moi qu'il est persuasif en mode faire changer d'avis ou hypnotiser !

- Non, murmura Giyu en palissant à vue d'œil, non, il est persuasif de manière plus violente...

- C... C'est à dire ?

Le pilier de l'eau se leva.

- De toutes façons, on n'est même pas sûrs que Shinobu soit vivante, et que ce soit ce qu'il veut !

- Oui...

- Mais allons voir Tamayo au plus vite !

- Oui !

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- Hum... C'est possible, je dirais même que c'est fort probable. Ce serait bien le style de Muzan, de duper tout le monde ainsi... réfléchit Tamayo.

- Alors qu'est-ce qu'on peut faire ? demanda Aoi. Vous pensez que Shinobu tiendra assez longtemps pour s'échapper ou un truc comme ça ?

La guérisseuse émit un petit rire sans joie.

- Crois-moi, Aoi. Peu importe la force de sa volonté, Muzan la fera plier. Et si elle résiste trop, il la brisera aussi sec qu'une brindille. Peut-être même est-ce déjà le cas.

La jeune fille commença à trembler et Giyu mit sa main dans son dos.

- Comment ? murmura t-elle. Giyu n'a pas voulu me le dire.

- Honnêtement, il a eu raison, même si heureusement pour lui, il ne sait pas toute la cruauté dont Muzan est capable.

Tamayo se tourna vers le pilier.

- À voir ta pâleur, cependant, je vois que tu te fais tout de même une idée pas trop éloignée de la vérité.

- Il faut la sortir de là au plus vite.

- Oui, mais encore faut-il la retrouver ! s'exclama Aoi.

- Je pense que le papillon nous conduira à elle. intervint Giyu. Tamayo, tu pourrais nous ouvrir un passage vers la Cité des démons ?

- Je pense, oui. Mais il faudra rassembler d'excellents combattants et beaucoup de remèdes.

- Ça en vaut la peine ! Shinobu est l'élue !

- Oui, mais je dois te prévenir, elle ne sera plus jamais la même.

- Comment ça ? demanda Aoi.

- Il se peut qu'elle décide de mettre fin à ses jours.

- Pourquoi ?

- Aoi, commença Tamayo, il arrive qu'on souffre tellement qu'on ne ressente plus le désir de vivre et qu'on préfère mourir. Tu en sais quelque chose, Giyu.

Le pilier de l'eau acquiesça, la bouche sèche. Aoi réfléchit quelques instants.

- Raison de plus pour la tirer de là au plus vite ! Nous ne savons rien en dehors du fait qu'elle est vivante et prisonnière de Muzan, si ça se trouve, elle va très bien !

Giyu était convaincu du contraire, mais il garda ses pensées pour lui et dit :

- Je vais voir le maître pour convoquer une assemblée des piliers.

- Demande aussi à Tanjiro, Kanao et Nezuko, ils voudront sûrement venir ! dit Aoi.

- Je vais commencer à préparer des remèdes. annonça Tamayo. Vous en aurez besoin.

- Ok, alors allons y !

Giyu s'élança vers sa chambre, le papillon voletant derrière lui. Il se saisit de la barrette de Shinobu et la glissa dans sa poche.

- Tiens bon, Shinobu. J'arrive !

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