43-Elle
La nuit est passée très lentement. Je m'en suis voulu d'avoir aussi mal réagi envers Dohän, je n'ai pas compris mon comportement que je qualifie de puéril. Pour ma peine, il va falloir que je lui présente des excuses en bonne et due forme. C'est la moindre des choses.
J'ai eu beaucoup de mal à résister à l'envie d'aller lui parler durant la nuit, car il ne dormait pas. Après lui avoir tourné le dos et fuit dans ma chambre, Dohän est longuement resté dans le salon, la télé allumée. Je l'ai ensuite entendu se rendre dans la salle de bain, prendre sa douche et ensuite la porte de sa chambre s'est refermée.
Malgré cela, je sais qu'il est resté éveillé très tard, car les problèmes de la première nuit ont refait surface. Je voulais aller le voir, mais ma fierté est réapparue de nulle part.
Ce matin, je déjeune donc toute seule sur la terrasse de la maison. Il est très tôt, le jour est à peine levée, les oiseaux chantent tandis que le silence humain règne.
– Salut, me surprend une voix derrière moi, tu es matinale.
Dohän me fait face, un léger sourire aux lèvres et le visage toujours aussi parfait. Si je n'avais pas entendu ses gémissements nocturnes, jamais je n'aurais pensé qu'il est passé une nuit blanche.
Ce dernier s'assied près de moi sur le banc que je squatte depuis une heure maintenant. Des dizaines de questions me taraudent, mais la principale reste la même : comment m'excuser ?
– Tu as encore mal dormi ? Lancé-je maladroitement en évitant de le regarder.
– Je t'ai dérangé ? Si c'est le cas, je m'en excuse.
– Depuis quand tu t'excuses d'être malade ?
– Tu crois que je me soucie du bien-être des gens, Riva ?
– Non, tu as raison.
Celui-ci ricane avant de reprendre :
– Je devrais plutôt me faire pardonner pour la mésaventure d'hier soir.
– Oublie ça.
– J'insiste et je tiens à me rattraper.
– Ne te force pas, Dohän. Toi et moi savons que ce n'est pas ton fort de te préoccuper des autres.
Loin de moi l'envie de continuer cette discussion gênante, je me lève prête à y mettre un terme, mais c'est sans compter la ténacité de Dohän qui m'empoigne, me prenant de court.
– Attends !
Nos yeux se rencontrent enfin pour ne plus se lâcher. Cet homme est trop dangereux pour moi, je dois à tout prix mettre plus de distance avec lui.
– Lâche-moi. N'oublie pas que je suis seulement ta danseuse, Dohän.
– Tu crois que je ne m'en souviens pas ? De quoi as-tu peur, Riva ?
– D'absolument rien. Ce que je déteste par contre, c'est ton comportement.
– Mon comportement ? Répète-t-il les yeux froncés.
– Oui. Tu ne cesses d'être capricieux.
– Je ne vois pas le rapport !
– Tu penses que tout ce que tu exiges va te tomber dans les mains, mais tu te fourvoies totalement sur moi.
Ça y est, c'est dit et Dohän a enfin compris. Son sourire enjôleur, qui fait battre mon cœur, s'est évanoui tandis que ses doigts quittent mon poignet.
– C'est toi qui ne comprends pas, Riva.
Remontée à bloc, je reviens vers lui alors que je m'étais éloignée.
– Explique-moi ?
– À quoi bon ? Tu me détestes. Tout ce qui vient de moi t'est insupportable ! Nous devrions rester cordiaux et cohabiter avec respect. Tant que nous y sommes, le vouvoiement serait de nouveau préférable.
Bon sang ! Mais à quoi il joue ? Je suis en train de me faire prendre à mon propre piège !
– Tu vas trop loin, Dohän.
– Nous devons reprendre l'entraînement incessamment sous peu afin de ne pas perdre de temps. Du moins, votre temps. Je vous libérerai de votre contrat dès que vous me le demanderez si vous en sentez le besoin.
Suite à ces paroles, ce dernier se lève et tel un courant d'air, il s'éloigne de la maison et sort dans la rue.
– Qu'est-ce qui vient de se passer ? me dis-je, déstabilisée.
Est-ce que je l'aurais vexé ? Suis-je allé trop loin dans mes mots ? Moi qui voulais m'excuser, je viens de m'enfoncer encore plus dans le sol. Décidément, je ne suis vraiment pas douée quand ça concerne mes sentiments.
Je me ronge les ongles d'angoisse. Je dois à tout prix rattraper le coche. Je me fiche pas mal qu'il me mette à la porte ou qu'il rompt le contrat, la seule chose qui m'effraie, c'est de le perdre lui.
Comment j'en suis arrivée là, bordel ? Je m'étais promis de rester professionnelle avec lui. Durant toute ma vie de danseuse, je faisais passer mon sport avant tout le reste. D'une parce que personne ne me donnait envie de faire le contraire, de deux parce que j'ai tellement été déçue que la danse est devenu ma bouée de secours, mon unique échappatoire face à mes désillusions.
Sans plus réfléchir, je dévale les escaliers de la terrasse, passe le portillon de la propriété et accours dans la rue comme si ma vie en dépendait.
Je suis littéralement en train d'abandonner toutes mes bonnes résolutions que je m'étais juré de respecter jusqu'ici.
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