Chapitre 7
Je retourne aux vestiaires pour déposer mon portable et enfile la tenue que la gérante du restaurant a posée devant mon casier. Je vais voir le serveur et lui demande de me briefer très brièvement. Il m’explique très rapidement les numéros des tables, l’endroit où se trouve le nécessaire pour dresser une table, l’accès rapide à la plonge et me donne un carnet de prise de commandes.
Le reste de mon service se passe bien, la directrice garde un œil sur moi mais elle a l’air plutôt satisfaite. Minuit, le restaurant ferme ses portes. C’est l’heure du rangement et du ménage. Une fois effectués, je me dirige vers les vestiaires pour envoyer un texto à Max, comme il me l’avait demandé avant mon embauche. La patronne vient me voir.
- Angie, le chef de cuisine a été impressionné par votre rapidité, tout comme Enzo, notre serveur. Quand à moi, je vous ai observée et vous ne laissez transparaître aucune fatigue, vous avez juste un sourire franc que vous adressez à toute notre clientèle. C’est une qualité importante. Vous êtes prises, bienvenue au Régent ! Donc on se voit demain à dix-huit heures pour les formalités administratives. J’aurai besoin d’un RIB et d’une attestation de sécurité sociale. C’est bon pour vous ?
- C’est parfait, merci beaucoup ! A demain !
- A demain Angie.
La vache ! J’ai un boulot ! Je sors du restaurant, la tête ailleurs. J’ai enfin un travail, voilà une nouvelle vie qui approche à grands pas ! Max arrive et je monte dans sa voiture. Il a l’air préoccupé.
- Max ?
- Oui ?
- Qu’est-ce que tu as ?
- Rien, ça va passer. Comment s’est passé ton service ?
- Super bien, je suis prise ! Je dois revenir demain à dix-huit heures pour lui apporter de la paperasse.
- Voilà au moins une bonne chose.
- Bon, dis-moi tout.
- Je suis allé parler à Marine.
- T’as fait QUOI ?
Quel idiot ! Lui qui me dit de ne pas lui prêter attention, il va carrément la voir ! Quel culot !
- Calme toi Angie. Je suis allé la voir concernant le texto qu’elle t’a envoyé. Je lui ai bien fait comprendre que si elle s’avisait de te refaire du tort ou de me menacer à nouveau, ça aurait de lourdes conséquences judiciaires. Elle vient peut-être d’une grande famille, mais c’est tout ce qu’elle a. Contrairement à elle, je n’ai pas besoin de chialer dans les jupons de mes parents quand quelqu’un prend la confiance. J’ai besoin de personne pour me défendre ou me cacher. C’est facile de se planquer derrière un écran ou même derrière son mec, mais cette nana ne vaut pas un clou face à moi.
- Je vois… Et elle t’a répondu quoi ?
- Qu’elle avait compris et qu’elle n’aura plus jamais de contact avec toi.
- C’est une bonne chose, même si je n’apprécie pas trop ta façon d’arranger ça, je t’en remercie.
- De rien, les amis c’est fait pour ça tu sais. Dit-il en esquissant un sourire. T’as mangé ?
- Non, j’ai pas eu le temps, j’étais à fond sur le boulot.
- J’ai bien fait d’aller acheter des pizzas alors !
- PIZZAAAAAAAAAAAA ! Dis-je en explosant de rire. En plus j’ai une faim de loup, ça tombe merveilleusement bien !
Il rit en me voyant aussi extasiée. Son doux rire cristallin le rend encore plus craquant ! On arrive devant la maison et je vois de la lumière à l’intérieur.
- Il y a quelqu’un chez toi ?
- Rentre et tu verras !
J’ouvre la porte et vois Jess.
- Mais qu’est-ce que tu fais là ? Max devait pas te raccompagner tout à l’heure ?
- Si, mais Pascal m’a dit que puisque c’était d’accord pour demain, je n’avais qu’à dormir ici. Il a vite fait discuté avec Max, il l’apprécie beaucoup !
- Eh bien dans ce cas, à table !
Jess va chercher les pizzas et les ramène sur la table basse. Je lui dis que je suis prise au restaurant, elle explose de joie pour moi et décide de trinquer à mon embauche. Max va chercher des verres et le whisky qu’on a entamé la veille puis nous sert. On discute de tout et rien, le temps passe à une vitesse incroyable ! Je regarde mon portable et vois qu’il est déjà six heures du matin ! On n’a pas vu la nuit défiler.
Je file à la douche et me prépare pour aller récupérer mes affaires au lycée. Jess me dit d’y aller le temps qu’elle se prépare, ce que je fais. Max enfile ses chaussures et on part pour aller récupérer mes affaires. Plus je sais qu’on se rapproche de l’établissement, plus j’angoisse à l’idée de croiser Marine et Quentin. Max pose une main sur ma jambe.
- Angie, calme-toi. Tout va bien se passer. Si quoi que ce soit foire, tu me fais sonner et j’arrive dans les dix secondes. D’accord ? Me dit-il d’un ton rassurant.
- Merci. Je n’ai vraiment pas envie de les croiser…
- Je comprends, mais n’oublie pas ce que m’a dit Marine. Ils ne s’approcheront pas de toi et n’essaieront même pas de te parler. Souffle un bon coup et déstresse.
- J’essaie.
On est devant le lycée. Évidemment, la voiture de Max attire les regards. J’aurai dû y réfléchir avant. Je descends du véhicule et vais droit vers les casiers, la musique à fond dans les écouteurs. J’évite tout contact visuel avec qui que ce soit. J’arrive devant mon casier quand quelqu’un me cache les yeux. Je me retourne brusquement, prête à frapper, quand je réalise que c’est Alicia. Je baisse ma garde et retire mes écouteurs.
- Alicia, ça va ? Tu m’as fait une peur bleue !
- Oui ça va, mais je mets ma main à couper que toi, ça ne va pas. Pourquoi t’es autant sur la défensive ? J’ai bien crû que t’allais me frapper !
- Désolée, je suis un peu anxieuse ces derniers temps.
- Oui, je vois ça. Ça te dit d’aller prendre un café ce midi ?
- Ça aurait été avec plaisir, mais je viens juste chercher mes affaires. Je ne pense pas revenir au lycée.
- Attends, quoi ? Comment ça tu penses pas revenir ? Je fais comment sans toi moi ?
- Tu as ton frère, non ? Lui demandé-je en récupérant mes fournitures.
- Faut pas que je compte sur lui ! Il a annoncé à nos parents qu’il sort avec Marine ! J’ai halluciné, comment il peut être avec ce genre de fille ? C’est dingue, tu trouves pas ?
- Si, en effet. C’est dingue. Bon, j’y vais. A plus tard ma puce.
Je récupère mon cadenas et laisse le casier vide. Je me presse de sortir du lycée pour rejoindre Max, il est bientôt huit heures et quart. Les deux traîtres ne devraient plus tarder. Je sors enfin de l’établissement et remonte dans la voiture. Je dis à Max que j’ai croisé Alicia.
- Et donc, ça s’est passé comment avec elle ?
- Visiblement, elle n’est pas au courant de tout ce merdier. Je lui ai dit que je ne comptais pas revenir au lycée.
- Elle a réagi comment ?
- Pas hyper bien, mais j’ai contourné la question pour ne pas avoir à lui expliquer toute l’histoire.
- D’accord. On rentre ? Jess m’a envoyé un texto pour me dire que son assistant familial nous attend à dix heures.
- Alors en plus ça s’envoie des textos ! T’aurais pas un penchant pour ma sœur ?
- Disons juste qu’elle est aussi craquante que toi, donc son charme m’attire !
- Arrête un peu tes conneries, sérieusement il y a un truc entre vous ?
- Non, rassure-toi. C’est juste qu’on s’entend bien et que je lui ai demandé de me prévenir pour l’heure où on doit se rendre là-bas. Rien d’ambigu, promis !
- Ouais, juste une chose Max. Ne fais pas ton Quentin.
- Aucun risque !
- Mmh. Bon, on y va ?
- Let’s go !
Max démarre et se prépare à faire une marche arrière pour sortir du parking quand quelqu’un toque à la fenêtre du conducteur. Quentin ! Je vais lui faire la peau à celui-là, quel culot de se pointer comme une fleur ! Max ouvre sa portière et attrape l’escroc par le col et le plaque contre l’arrière de la voiture.
- Qu’est-ce que tu veux encore ? Lui demande mon ami sur un ton agressif.
- Rien, je veux juste parler à Angie.
Je sors de la voiture et dis à Max de le lâcher. Il s'exécute, sans réellement comprendre pourquoi je lui demande ça.
- Bon, t’as trente secondes pour me convaincre de ne pas t’exploser la gueule contre le bitume. Je t’écoute.
- Je suis vraiment désolée Angie, pardonne-moi, je ne voulais vraiment pas que ça en arrive là. Je n’ai jamais eu l’intention de te faire du mal//
Le crochet du droit part tout seul. En moins de dix secondes, il a réussi à me faire sortir de mes gonds. Je le plaque au sol en lui disant de ne plus jamais m’approcher, je ne répondrai plus de rien. Une foule de lycéens commence à se rassembler autour de nous. Max me saisit le bras et me dit de me calmer. Je remonte dans la voiture, furieuse, suivie de mon ange gardien. Lui aussi est en rogne.
Il part en trombe et allume le jukebox qui fait raisonner du AC/DC dans tout l’habitacle. On arrive chez lui, il klaxonne et Jess sort en lui remettant les clés de la maison. Elle monte dans le véhicule et s’installe sur le siège central de la banquette arrière. L’ambiance est pesante.
- Je risque de me faire taper si je demande ce qu’il s’est passé au lycée ? demande ma sœur d’une petite voix toute mignonne.
- Non, rassure-toi, on tapera plus personne pour aujourd’hui. Lui répond Max.
- Comment ça “plus personne” ? Vous avez tapé qui ?
- Angie s’est passé les nerfs sur l’autre salaud. Il est venu taper à ma fenêtre quand on allait partir. Je voulais lui régler son compte mais ta sœur s’en est chargé gentillement.
- Il l’a bien cherché celui-là aussi ! Répondé-je agressivement.
- Calme toi Angie, il est parti. Tu ne le reverras plus, je crois qu’il a bien compris ce qui l’attendait s’il venait te voir à nouveau.
- Qu’il revienne pas, parce que j’hésiterai pas à lui refaire le portrait à ce connard.
- Dis donc jumelle, tu ne veux pas souffler un coup ? N’y pense plus, c’est juste un crétin qui s’est jouée de toi. Il ne mérite pas autant de considération ! Dis-toi juste que c’est un sombre idiot. Le karma fera son affaire, il le fait toujours !
Sa réaction me fait rire de bon cœur. Le karma, sérieusement ? Quelle connerie tiens… Bref, ça m’a détendue cette petite remarque. Max aussi rigole, c’est tellement beau à voir. Ça le rend tellement craquant ! Angie, concentre-toi, c’est pas le moment pour ça ! On arrive devant un petit chemin gravillonné. Max ralentit pour ne pas glisser sur le sol.
Il s’arrête devant une maison qui a le charme des résidences de campagnes. On descend de la voiture et un homme d’environ trente ans nous accueille avec un grand sourire.
- Salut les jeunes ! Entrez, j’ai préparé le café. Nous dit Pascal en nous ouvrant la porte d’entrée.
Jess et moi lui faisons la bise et Max lui serre la main. On entre et découvre un salon simple où sont disposées quatre tasses sur une table basse en bois et en faïence. Notre hôte nous invite à nous asseoir.
- Dis-moi Jess, c’est un joli petit couple que tu m’as ramené là !
- Ils ne sont pas ensemble, ce sont juste de bons amis papa !
- Ouais, ça commence bons amis et ça finit dans le lit ! Trêve de blagues, je suis ravi de te rencontrer Angeliqua. Jess m’a beaucoup parlé de toi !
- Vous pouvez m’appeler Angie.
- Tu peux me tutoyer, je ne mords pas !
- Ca marche ! Donc, Jess vit chez toi depuis neuf ans ?
- Oui. Je la considère comme ma propre fille, elle est l’enfant que je n’ai jamais pu avoir.
- Vous avez l’air d’avoir un lien très fort en tout cas. Pascal, permets-moi de te remercier d’avoir pris soin de ma soeur jusqu’à aujourd’hui. Elle a beaucoup de chance d’avoir quelqu’un comme toi dans sa vie.
- Tu sais, je suis loin d’être parfait, mais j’ai toujours fait de mon mieux pour que Jess se sente bien ici. Et toi, Jess m’a dit que tu vis avec vos parents biologiques. Tu veux bien m’en dire un peu plus sur eux ?
- Oui, bien sûr. Pour être honnête, ils sont loin de la figure parentale. On ne représente absolument pas une famille.
- Je vois, ça n’a pas dû être facile pour toi de grandir avec eux. Comment tu as appris l’existence de Jess ?
-Ca n’a pas été facile, mais s’il y a un point positif à ce manque de parentalité, c’est ma débrouillardise. J’ai appris que j’avais une soeur au cours d’une discussion entre mes parents. Ils disaient que tu les avais appelé pour leur signaler l’hospitalisation de Jess à Concarneau. J’ai décidé d’aller la voir le lendemain et c’est ce jour-là qu’on s’est rencontrées. On a échangé nos numéros et tu connais la suite.
- Je vois, ça fait pas mal de péripéties en quelques jours.
On continue à discuter tout en buvant le café.
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