Le Diable est dans les détails
- Par quoi veux-tu que je commence, mon ami à cornes ?
- Comme il te plaira, vieux sac d'os !
Ral'kh et moi étions confortablement assis dans nos fauteuils respectifs. C'était la première fois que nous allions essayer de respecter les termes de notre accord. Une confidence pour lui, une réponse pour moi. Je savais, sans vraiment pouvoir expliquer comment, que cet échange allait être le premier d'une longue série.
- Il n'y a pas un élément parmi d'autres que tu aimerais que je te confie ? Une question personnelle, un anecdote gênante ? Juste quelque chose que tu ais envie de savoir ?
- Non, rien du tout, me répondit-il avec un sourire innocent. En réalité, tout ce que tu peux me dire m'intéresse. Tu peux même inventer une histoire si ça te chante, du moment que tu ne figure pas dedans. Je veux juste que tout ce qui TE concerne soit exact.
- Mais... Quel intérêt pour toi ?
- Ce qui compte, c'est de te faire parler. Imagines ça comme une thérapie. Tu as le droit de te lâcher complètement, de me raconter de tout ce qui tu as sur le cœur. Mais tout ce qui te concerne doit être véridique. Toi tu sentiras mieux, et moi j'aurais une distraction bienvenue.
À ces mots, il se leva, se dirigea vers le minibar et en sortit un mojito et un autre de mes cocktails favoris. Il se rassit après m'avoir offert une boisson, et reprit avec amusement :
- À ce sujet, je compte ça comme une question ! Ce qui veut dire que tu m'en dois une.
Évidemment. J'en étais sûr. Je commençais à cerner le personnage au bout d'un moment quand même...
- Très bien. Je commencerai donc par une anecdote, veux-tu ? Eh bien figures-toi qu'un jour, je me suis coupé avec une banane ! Voilà, à moi de poser une question...
- Premièrement, c'est beaucoup trop court. Tu ne respectes pas les règles du jeu. Et puis je ne t'ai pas demandé de me raconter n'importe quoi, je t'ai demandé de te confier à moi. Et deuxièmement... avec une banane ? Mais comment c'est possible d'être aussi nul ? Non attends, pas la peine d'entrer dans les détails, finalement.
- Elle était particulièrement agressive, bougonnais-je.
Ral'kh haussa un sourcil sans dire un mot. Je soupirai. J'allais devoir me prêter au jeu.
- Je... Je ne m'appelle pas vraiment Bavard-Sournois. Mais mon vrai nom n'a pas d'importance, bien qu'il soit chargé de signification. J'ai 20 ans. Un âge auquel je n'aurais jamais pensé arriver, pour des raisons que je ne saurais détailler ici et maintenant. Je n'ai, assez mystérieusement, aucun véritable souvenir qui remonte à avant mes 7 ans.
- Aucun souvenir ? Comment est-ce possible ? m'interrompit Ral'kh.
- Je ne sais pas. Tous les gens à qui je parle me disent qu'ils se rappellent de leur enfance. J'ai... J'ai juste des bribes, par-ci par-là, des tranches de savoir oubliés. Par exemple, je sais sans le moindre doute que le jour où j'ai découvert Harry Potter et l'Ecole des Sorciers, je l'ai lu d'une traite, caché sous ma couette avec une lampe torche comme seul éclairage. Bien sûr, je ne pouvais pas me douter que je venais de créer un monstre de lecture, drogué aux mots et aux romans, qui se réveillerait toutes les nuits jusqu'à mes 16 ans.
- Et plus maintenant ? s'amusa mon diable préféré.
- Ça Ral'kh, c'est une autre histoire. Pour en finir avec ma... mon... ma présentation, je dirai juste que durant mon temps libre, et j'entends par là "quand je ne suis pas enfermé dans une pièce sans issue avec un monstre folklorique et une tête de mort", j'étudie l'informatique dans une école d'ingénieur dans laquelle je suis arrivé par hasard.
- Par hasard ? Hahahahaaaa... C'est intriguant ça ! ricana Ral'kh.
Je lui souris d'un air complice. Il m'avait demandé la vérité, mais j'avais encore le droit de la présenter de manière alléchante. J'espérais, bien sûr, qu'il claque ses questions sur ce genre de détails. Ces détails qui, au fond, ne comptaient pas tant que ça... mais lui ne pouvait pas le savoir avant de les connaître.
- C'est fait exprès, mon ami, c'est fait exprès.
- Ouuuh... sournois ! dit-il avec un frisson exagéré et une voix moqueuse.
- A mon tour, démon. Et j'ai déjà choisi ma question !
A ces mots Ral'kh se figea et fronça les sourcils. Il avait l'air d'un boxeur sur le point d'entrer sur le ring, et ça valait mieux pour lui, parceque j'avais l'intention de lui en mettre plein la tronche...
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