Chapitre 1 - Boulversé par un inconnu

La vie est injuste. Ceux qui disent qu'elle est belle sont soit riches, soit profondément plongés dans le déni. La vie n'est pas belle, elle n'est pas douce. La vie est une succession d'épreuves, d'obstacles dont on se passerait bien. Ceux qui vivent bien ont de l'argent. On peut dire ce qu'on veut, on peut dire que l'argent ne peut pas tout acheter, mais la vérité c'est que l'argent résout tous les problèmes.

Voilà ce que mon existence m'a appris du haut de mes 25 ans. Je m'appelle Kim Seokjin, Jin, pour les intimes (et ils sont pas nombreux). Je viens d'une famille pauvre, ma mère est caissière en supermarché et mon père est ouvrier. Ils ont souffert toute leur vie pour m'offrir un avenir meilleur mais les miracles sont réservés aux contes de fées. Nous sommes toujours aussi pauvres qu'au jour de ma naissance et j'ai renoncé à faire des études pour aider mes parents à payer les factures, car si leurs salaires n'ont pas beaucoup augmenté avec les années, le coût de la vie lui ne cesse de s'élever.

Je suis donc devenu serveur dès l'âge de 16 ans, changeant souvent de lieu de travail, toujours à la recherche du meilleur salaire. C'est à cause de cette recherche désespérée d'argent pour subvenir aux besoins les plus primaires que je me retrouve désormais dans cette situation totalement absurde.

Quelle situation me direz-vous ? Et bien il se trouve qu'un client régulier du dernier bar chic pour lequel j'ai travaillé se trouve actuellement dans le petit appartement que ma famille loue dans les bas quartiers de Séoul. Et ce fameux client complètement allumé vient de demander ma main à mes parents. Il dit qu'il veut m'épouser, moi, un homme alors qu'il est lui aussi un homme. Et il dit ça sans aucune gêne à mes parents, il ne voit pas où est le problème. Il a même poussé le bouchon encore plus loin, il est arrivé avec des cadeaux pour mes parents et une dot. Le mec arrive avec un chèque au montant exorbitant, il y a tellement de zéros sur ce chèque que j'ai mal au crâne rien qu'en imaginant cette somme sur le compte de mon père.

Honnêtement, quelle réaction suis-je censé avoir ? Ça doit bien faire cinq minutes que je le regarde comme s'il était un alien. Il débarque chez un parfait inconnu pour le demander en mariage en brandissant son fric le sourire aux lèvres. Est-ce qu'il s'attend à ce que je pleure de joie et lui promette l'amour éternel ?

- Excusez-moi, Monsieur, commençais-je prudemment, je ne sais vraiment pas quoi répondre à cette demande pour le moins inattendue.

- Tu n'as pas besoin de me parler aussi formellement Seokjin, sourit le milliardaire, et appelle-moi Namjoon, Kim Namjoon.

- Oui, si vous voulez Namjoon. Je ne m'attendais pas à ce que vous me demandiez ma main. Je ne veux pas vous paraître offensant mais je ne pense pas être attiré par les hommes. Je ne peux pas accepter votre proposition, désolé.

- En es-tu sûr ? Je pourrais te rendre tellement heureux, mon mignon petit Seokjin. Tu aurais tout ce que tu pourrais vouloir avec moi.

- J'en suis sûr, il n'y a qu'à regarder le chèque pour deviner que vous avez les moyens de tout m'offrir, pour autant, je ne me vois pas faire ce que font les couples avec un autre homme. Vous voyez ce que je veux dire ?

Namjoon ne me répondit que par un sourire amusé, il se tourna vers mes parents pour leur préciser qu'ils devaient garder les cadeaux qu'il venait de nous offrir et qu'il allait prendre congé.

- J'ai été ravi de te revoir Seokjin, prends soin de toi et réfléchis bien à cette proposition. C'est une promesse que je te fais, je te rendrais heureux.

Après cette dernière phrase, il quitta notre appartement. Ma mère toujours aussi abasourdie se mit à ranger les cadeaux par automatisme. Elle mit la boite de chocolat hors de prix dans le placard, les boites repas provenant de restaurants dans lesquels nous ne pourrons jamais mettre les pieds trouvèrent leur place dans le frigo. Quant au costume Dior qui m'avait été offert, il prit place dans mon armoire à côté d'un vieux costume que je n'ai mis que pour la cérémonie funéraire de mon grand-père.

Le repas ce soir-là fut très silencieux, chacun étant perdu dans ses pensées. Je n'en voudrais pas à mes parents s'ils me disaient que la proposition de ce jeune milliardaire leur paraissait alléchante. Il s'agit d'une très grosse somme d'argent, elle changerait la vie de toute ma famille. Elle nous mettrait à l'abri du besoin sur plusieurs générations. Il y avait tout de même 10 milliards de won sur ce chèque. Mais ça ne veut pas dire que je vais accepter pour autant. Et c'est vraiment dommage car si Namjoon avait été une femme alors je pense vraiment que j'aurais pu mettre ma fierté de côté et me laisser acheter par cette proposition.

Cette idée tournait en boucle dans ma tête maintenant, s'il avait été une femme j'aurais pu dire oui. J'aurais certainement dit oui. Et je regrette amèrement qu'il ne soit pas une femme. J'aurais adoré lui dire oui et vivre la grande vie sans souci que nous vendent la télévision et tous ces dramas romantiques où l'amour impossible trouve toujours le moyen de naître et de résister aux épreuves.

Le lendemain, je partis au travail avec de beaux cernes, j'avais eu du mal à dormir à cause de toutes ses pensées. Mon imagination a passé la nuit à me montrer ce que pourrait être ma vie si j'étais moins scrupuleux, si je jouais de ses sentiments (en partant du principe qu'il est sincère, après tout je ne le connais pas, comment peut-il aimer un inconnu aussi facilement ?).

J'arrivais donc fatigué au boulot et pas au maximum de ma concentration. Il aurait peut-être fallu d'ailleurs que je me montre plus concentré. Ça m'aurait évité de foncer tête baissée dans les abdos de Namjoon qui manifestement n'avait pas jugé bon de me prévenir que je lui fonçais dessus. Je relevais donc les yeux sortant de mes pensées pour découvrir l'objet de ces mêmes pensées.

- Oh pardon, je ne vous avais pas vu.

- J'ai remarqué, répondit-il amusé, c'était incroyablement mignon.

- Ce genre de remarque est incroyablement gênante.

Cette fois-ci il rigola franchement devant mon embarras et se permit un geste encore plus gênant. Il me caressa la joue et non seulement c'est un geste très intime mais en plus il le fait avec une infinie tendresse que je n'ai jamais ressentie avec les rares petites amies que j'ai pu avoir entre deux petits boulots. Ce geste me mettant encore plus mal à l'aise que tous les mots qu'il avait pu déjà prononcer, je me reculai pour échapper à son touché.

Il laissa sa main retomber le long de son corps avec un sourire contrit cette fois, une expression déçue se peignit sur son beau visage. Car il faut l'avouer, c'est un jeune homme tout ce qu'il y a de plus charmant, de plus attirant. C'est d'ailleurs ce qui est le plus perturbant. Il pourrait avoir qui il veut, il n'a surement qu'à faire un de ces sourires pour faire tomber dans ses bras n'importe qui alors pourquoi ? Pourquoi me demander en mariage ? Pourquoi moi ? Pourquoi le mariage ? Ce n'est pas n'importe quoi un mariage tout de même.

- Tu ne pourras pas éviter que je t'approche chaque fois, tu sais ?

- Comment ça ? demandais-je en me reconcentrant sur mon vis-à-vis.

Il fit un pas vers moi, qui me poussa automatiquement à reculer d'un pas. Il fit un second pas et j'eus le même réflexe. La scène se répéta jusqu'à ce que je me retrouve acculé contre le mur.

- Voilà ce que je veux dire Seokjin, tu ne peux pas te défiler lorsque je veux te démontrer mon affection. Il n'y a aucun lieu où je m'interdirais de t'approcher. Personne pour m'en empêcher, surtout pas toi. Je te désire comme j'ai rarement désiré quelqu'un, à la différence que je ne peux pas imaginer qui que ce soit prendre ma place à tes côtés. Je ferais ce qu'il faut et je t'épouserais. Je te ferais mien par n'importe quel moyen. Alors ne recule plus quand je t'approche, laisse-moi juste venir à toi.

Sa main vint de nouveau caresser ma joue avec la même douceur que précédemment et je me sentis presque défaillir. Comment quelqu'un peut-il dégager tant de force, de détermination et de douceur à la fois ? J'ai l'impression d'être sous son emprise, je n'arrive pas à détourner le regard de ses yeux, je ne pense même plus à bouger pour éviter son contact comme je l'ai fait tout à l'heure. Je me contente de rester là, inerte, attendant que le charme soit rompu. Je ne sais pas quoi répondre à sa tirade. Y a-t-il même quelque chose à répondre à ça ? Peut-être est-ce l'heure de lui faire part de mes interrogations ?

- Pourquoi moi ? Pourquoi le mariage ? Pourquoi maintenant ? Il y a tellement de pourquoi.

Je ne pensais pas prononcer à voix haute ces questions mais elles m'échappèrent.

- Pourquoi pas toi ? Répondit-il doucement, ce sera toi parce que c'est ce que je ressens, ta simple existence me fait de l'effet. J'ai toujours fait confiance à mon instinct et il me cri que c'est toi, alors c'est toi. C'est la seule explication que je puisse te donner. Pour toutes tes questions, je laisse parler mon instinct.

- C'est complètement insensé.

- Peut-être mais quelle importance ça a ? Les sentiments n'ont pas vocation à être rationnels, le cœur a ses propres raisons.

Il se recula et me prit la main, m'entrainant vers l'entrée du restaurant où je travaillais.

- Je t'ai assez mis en retard comme ça. Je ne veux pas que tu te fasses engueuler par ma faute. Je te laisse aller bosser.

Il me laissa devant l'entrée et parti avec un signe de main. Ce mec me paraissait encore plus fou qu'hier mais aussi plus intéressant, plus attirant, plus mystérieux. Il était réellement captivant et intimidant. Après cet épisode pour le moins déconcertant, j'usai du peu de force mentale que je possédais pour me concentrer sur ma soirée de travail à venir. J'enchaînais les commandes en refusant de repenser à Namjoon jusqu'à la fin de mon service. Dur challenge que je perdis lamentablement. Je confondis plusieurs commandes cette soirée-là. Je n'eus même pas la force de m'offusquer quand une femme manifestement éméchée me mit la main aux fesses. Je fis juste comme si de rien n'était, je me suis retourné vers elle en lui demandant avec mon sourire de façade habituel ce qu'elle désirait commander. Lorsqu'elle me répondit que je serais un dessert tout à fait approprié pour finir son repas, je répondis avec le même sourire que les serveurs ne sont pas sur la carte. Cette blague vraiment nulle ne fit que me rappeler la proposition de Namjoon et je me fis la réflexion que si j'avais été sur la carte, cette femme n'aurait certainement pas eu les moyens de m'acheter, à moins qu'elle soit prête à mettre 10 milliards sur la table pour le dessert. Cette réflexion était sur le point de me faire rire mais mon hilarité se coupa nette quand je vis Namjoon arriver vers moi telle une fusée à travers la salle.

- Ton service est fini. Décréta-t-il.

Le ton de sa voix était froid, son visage fermé et le regard qu'il lança à la cliente aux mains baladeuses me fit froid dans le dos bien qu'il ne me soit pas adressé. Il me tira par la main jusqu'au fond de la salle, me trainant jusqu'au vestiaire, me demandant d'aller me changer.

La surprise de le voir intervenir comme ça au beau milieu du restaurant m'avait paralysé mais je retrouvais peu à peu mes esprits. Je me dégageai alors de sa poigne pour retourner à mon poste et prendre la commande de cette cliente car c'est ce pour quoi j'étais payé et j'avais besoin de cet argent.

- Je suis désolé Namjoon mais mon service n'est pas terminé et une cliente m'attend. Vous avez l'air de connaître les lieux donc je ne vous raccompagne pas.

- Tu vas retourner voir cette perverse alcoolique ? Sérieusement ? C'est pour mener cette vie que tu te lèves tous les matins ?

- Ai-je le choix ? Je mène cette vie parce que c'est la seule que je puisse vivre.

- Je t'en offre une autre. N'oublie pas ça. Tu n'aurais plus jamais à subir les attouchements publics d'une inconnue mal polie et alcoolisée. Tu n'aurais plus à travailler comme un acharné. Tu pourrais juste profiter de ce que la vie a de plus beau à t'offrir.

- Et je vous ai déjà dit pourquoi ce n'est pas possible.

- Au contraire, je pense ça tout à fait possible. Je t'attire, tu t'en rendras compte bientôt. Je suis plus lucide que toi quant à tes réactions en ma présence visiblement.

Je me raclai la gorge, gêné car je savais qu'il n'avait pas totalement tort. Aucun homme ne m'avait attiré jusqu'ici mais lui avait ce quelque chose de spécial. Au-delà de son argent, il y a dans son regard, sa voix, sa carrure dominante, la tendresse qu'il m'avait témoignée plus tôt. Quelque chose dans tout ça avait fait réagir une partie de moi, peut-être tous ces éléments se sont-ils combinés pour me faire douter. Peu importe la bonne réponse aux raisons de ce petit truc qui est apparu en moi tout à l'heure, mon instinct aussi me parle et il me dit que cet homme est trop beau, trop parfait pour être vrai. L'espoir est cruel, lorsque l'illusion tombe, il ne reste rien à quoi se raccrocher. Et la vie que Namjoon me fait miroiter est un espoir que je ne peux me permettre d'avoir car il n'y a pas que l'argent et la vie facile dans sa proposition. Il y a aussi cet amour complètement fou et sorti de nulle part. Cet amour auquel on aspire tous, cet être qui peut nous aimer de manière inconditionnelle, avec passion, tendresse et sincérité. Ce genre de perfection, ai-je même le droit d'en rêver ? Tout d'un coup, un homme apparaît dans ma vie et me dit de me laisser aller à ce genre de rêve fou et irréalisable.

Peu importe la manière dont j'y réfléchis, la réponse reste la même. Je ne peux pas approcher cet homme. Je ne peux m'empêcher de douter de sa sincérité. Comment peut-il juste tomber amoureux de moi au point de vouloir m'épouser sans même avoir cherché à me connaître avant ?

- Je dois retourner travailler.

Je pensais pouvoir me défiler, mettre fin à cette conversation aussi perturbante que les deux premières et retourner à ce monde si familier avec ses faux sourires et son travail harassant. Mais je ne connaissais pas Namjoon et monsieur a toujours tenu les rênes dans notre début de relation atypique.

Il attrapa fermement mon bras et me poussa dans les vestiaires. Il me fit asseoir sur le banc et se positionna debout face à moi, les bras croisés sur son poitrail ferme. Intimidant, il dégageait tant de force à ce moment-là que je ne fis rien pour le contredire. J'attendis qu'il parle, qu'il bouge, mais rien.

Il me regardait de haut et pour la première fois, je ressentis une réelle appréhension, presque de la peur quant à la suite des évènements. Son immobilité dura une éternité, chaque seconde faisant monter mon stress. Lorsqu'il se décida enfin à ouvrir la bouche, je commençais lentement mais surement à paniquer.

- Quand je dis que ton service est fini, je ne parle pas juste de ce soir. Je ne te laisserais pas travailler dans un lieu où tu te fais toucher comme ça. Tes collègues n'ont même pas réagi. Comme si la situation était normale. Mais je te l'ai dit tout à l'heure, je n'imagine pas une seule seconde voir quelqu'un d'autre près de toi. Il s'agit de ma place et je ne partage pas.

- J'ai besoin de ce travail.

Malgré mon appréhension, je tentais de lui tenir tête avec des arguments terre à terre mais j'étais trop intimidé et lui trop lancé dans son délire pour m'écouter.

- Tu n'as pas besoin de ce travail, ni d'aucun autre d'ailleurs. C'est de moi que tu as besoin. Tu me crois arrogant ? Je peux être bien pire. Mais tu le sens toi aussi, n'est-ce pas ? Tu sais que j'ai raison. Tu as juste peur. Tu as peur de me suivre et de ne pas pouvoir revenir en arrière en cas d'erreur. Et quelque part tu as raison car tu ne peux déjà plus retourner en arrière. Je vais continuer d'apparaître dans ta vie, de la chambouler et tu auras encore plus de craintes. Ton monde va continuer d'évoluer pour te rapprocher de moi, ton corps va me vouloir, tes pensées te dirigeront toutes vers moi et tu te sentiras surement piégé. Mais quand tu arrêteras enfin de lutter contre ce destin, tu seras heureux, nous serons heureux, ensemble.

Sa tirade finie, il déposa un baiser sur mon front et sortit de la pièce. Il me laissait là pantelant et perdu avec l'ordre de quitter les lieux et la seule pensée cohérente que je pouvais avoir était que je me devais d'obéir à cet ordre. J'allais effectivement emballer mes affaires et rentrer chez moi avant la fin de mon service. Sans même avoir un autre emploi pour remplacer celui-ci et bien que cette idée me donnait la boule au ventre, je m'exécutais. Il avait déjà bel et bien l'ascendant sur mon esprit. Son dernier monologue bien qu'arrogant s'avéra prophétique.

Toute la semaine qui suivit ce fameux soir, Namjoon se présenta à moi avec son sourire charmeur, ses caresses tendres, sa voix envoutante et des cadeaux à n'en plus finir pour mes parents. Il se fichait de nous gêner par l'étalage de son argent, il me répétait que je devais m'y habituer car il me ferait vivre la grande vie. Mes parents aussi devaient s'adapter à une vie de luxe.

Namjoon nous emmena au restaurant sans que nous osions lui refuser quoi que ce soit. Il faisait la discussion à ma mère et plus ils se voyaient, plus maman avait l'air de l'apprécier. Elle me le confirma le soir en rentrant à la maison. Je voyais dans ses yeux qu'elle n'osait pas croire en ce qui nous arrivait. Cet homme qui se montre toujours charmant devant mes parents, il crée chez eux l'espoir d'une vie meilleure. Il leur promet en les regardant dans les yeux que leur fils unique, la prunelle de leurs yeux sera l'être le plus précieux et aimé que la Terre pourrait porter. Et mes parents ont envie d'y croire. Ils ne veulent pas me vendre mais je ne suis pas assez aveugle pour nier que Namjoon me fait de l'effet et ça ma mère a dû le remarquer. Et ça ne fait qu'alimenter son espoir de nous voir sortir de notre misère actuelle, de me voir heureux, lié à lui.

Toutes les nuits, je me rejoue chaque scène, chaque conversation. Je cherche le signe de la supercherie dans chaque détail mais je n'arrive à me souvenir que de son sourire, de son regard qui paraît si bienveillant. Et malgré moi, mon corps frissonne au souvenir de ses gestes tendres qu'il multiplie depuis une semaine déjà.

Puis, toutes ses sensations disparaissaient pour laisser place à la panique. Je n'avais toujours pas retrouvé de travail. J'avais contacté d'anciens patrons, passé des entretiens avec des recruteurs à première vue impressionné par mon expérience professionnelle, mais dès le lendemain, je recevais une réponse négative. Je commençais à penser que Namjoon jouait peut-être de son influence pour m'empêcher de travailler. L'idée me dérangeait, je ne pouvais pas m'en convaincre. Qui pourrait être aussi manipulateur et possessif pour se permettre ce genre de comportement ? Je finissais donc toujours par repousser cette théorie ridicule sans jamais réussir à me départir de ce pressentiment qui me tenaillait depuis quelques jours.

Après ces sept jours de repos forcé, je me décidai à faire quelque chose que je m'étais promis de ne jamais faire quand j'ai compris que Namjoon comptait réellement s'installer dans ma vie. Je composai le numéro de Namjoon. Pour la première fois, c'est moi qui le contactais. Il répondit dès la première sonnerie me donnant l'impression qu'il attendait cet appel.

- Bonjour Seokjin, comment vas-tu ? demanda-t-il directement de sa voix chaleureuse.

- Bonjour Namjoon... Je me déteste déjà assez de faire ça alors je vais être direct. J'ai besoin que vous me rendiez un service.

- Bien sûr petit ange, de quoi as-tu besoin ?

Je soupirai, me permettant d'hésiter encore un instant avant de lui répondre.

- Je... Je n'ai pas encore retrouvé de travail et il m'en faut un, n'importe lequel. Pouvez-vous m'aider ?

- Seokjin, mon cœur, j'ai un travail tout indiqué pour toi. Que dirais-tu de devenir mon fiancé, l'organisation d'un mariage représente beaucoup de travail mais je te sais travailleur. Je te fais confiance pour faire du bon boulot.

Je n'en revenais pas de ce que je venais d'entendre et en même temps ça ne m'étonnait pas tant que ça. Aucune de nos conversations n'a jamais échappé au sujet sensible du mariage, notre mariage, aussi irréaliste qu'il pourrait être. Cette réponse qui finalement était prévisible m'agaça. La légèreté de sa réponse me décevait grandement et j'avais la ferme intention de le lui faire comprendre.

- Je vous parlais sérieusement Namjoon, si vous ne voulez pas m'aider, vous pouvez vous contentez de refuser.

- Mais je suis très sérieux aussi. Je vais t'épouser et l'organisation d'un mariage, c'est du travail. Le seul que je puisse consentir à t'attribuer.

- Laissez tomber dans ce cas. Je vais continuer de chercher par moi-même. Je ne sais pas pourquoi je vous ai demandé ça. Vous devez être occupé, je suis désolé de vous avoir dérangé inutilement. Bonne journée.

- Seokjin. Premièrement, tu ne me déranges jamais. Deuxièmement, ne te déteste jamais de me demander quelque chose, quoi que ça puisse être. C'est moi qui veux tout t'offrir. Ne te sens jamais coupable d'accepter ce que je t'offre ou d'en user. Enfin, au risque de me répéter, tu n'as pas besoin de travailler. Arrête de perdre ton temps à chercher en vain.

- Comment savez-vous si je cherche pour rien ou non ? demandais-je suspicieux.

- Je dois partir en réunion, parlons de tout ça ce soir mon ange, OK ?

- Oui, parlons-en. Dis-je froidement avant de raccrocher.

Toutes mes pensées se bousculaient dans mon esprit. Est-ce qu'il sabote vraiment mes recherches de travail ? Il n'oserait pas, n'est-ce pas ? Il n'irait pas aussi loin tout de même ? Plus je me posais la question, plus j'avais peur de la réponse. J'essaie de me rassurer, de me dire que je me fais des plans sur la comète. Mais dans le fond, je crois que je le sais déjà.

Il peut le faire et il le fait justement. Il crée le besoin, il m'oblige à m'accrocher à lui. Je ferme les yeux et me remémore chaque mot. Et ce fameux soir au restaurant, n'a-t-il pas dit qu'il était prêt à tout ? Le voilà, ce fameux mot-clé qui fait tomber l'illusion. Il dit vouloir me rendre heureux mais il ne peut l'envisager qu'à travers ses yeux. Il se fiche de ce que je peux considérer comme important. C'est lui qui décide ce qui est important, ce qui rend heureux, ce dont j'ai besoin. Il essaie de régenter ma vie selon son bon désir et ses principes à mille lieues des miens. Et je l'encourage par ma passivité. Il m'envoute avec ses belles promesses mais finalement, il n'a jamais cherché à cacher qu'il voulait m'enfermer dans une prison dorée. Je l'ai idéalisé malgré ma méfiance, il avait juste besoin de me faire un sourire, une caresse sur la joue et j'oubliais toute idée de résistance. Je suis l'imbécile dans cette histoire et je dois rectifier le tir très vite où je finirais vraiment en cage.

Toute la journée, je me suis raccroché à cette pensée en vue de ma confrontation imminente avec Namjoon. Je m'exhortais à la concentration la plus extrême et surtout à faire preuve de fermeté avec lui. Je devais réussir à faire ça au moins une fois.

L'heure du diner arriva et Namjoon n'avait pas encore donné signe de vie. L'attente devenait insupportable et je me fis violence pour ne pas l'appeler tel un être désespéré. J'attendis donc, prenant mon mal en patience jusqu'à vingt-trois heures. Est-ce vraiment une heure pour rendre visite aux gens ?

Je mis cette réflexion de côté et alla lui ouvrir.

- Désolé mon cœur d'arriver aussi tard, j'ai dû diner avec un client et ça s'est éternisé. Comment vont tes parents ?

- Ils iraient mieux si vous ne leur donniez pas de faux espoirs. Répondis-je sur le ton du reproche.

- Ce mariage est loin d'être un faux espoir et la nouvelle vie que je vous promets non plus. Dit-il en fronçant les sourcils.

- C'est bien ça le problème. Vous tournez en boucle sur cette histoire de mariage que vous avez décidé seul, vous nous imposez vos cadeaux, votre argent, votre style de vie selon vos petits désirs personnels et maintenant vous m'empêchez de travailler pour ce mariage que j'ai déjà refusé plusieurs fois. Jusqu'où allez-vous encore insister ? Que dois-je faire pour que vous arrêtiez ?

Ma réponse le laissa sans voix un instant puis il se reprit. Son aura imposante et dominatrice refit son apparition faisant disparaître dans le même temps la lueur de tendresse qui lui allait si bien. Il ferma les yeux quelques secondes et j'appréhendai sa réaction. Lorsqu'il rouvrit les yeux, j'y vis de la colère et de la détermination. Il m'attrapa le poignet et me traina à l'extérieur. Mes parents s'étant couchés, je n'osai pas crier et ainsi les réveiller. Après les journées éreintantes qu'ils vivaient, le sommeil devenait sacré. Je le laissai donc m'emmener. Il me fit monter dans sa voiture et nous partîmes.

Le trajet se déroula dans le silence pendant trente bonnes minutes avant que je n'ose lui poser la question qui me brulait les lèvres.

- Où m'emmenez-vous ?

- Je n'en sais rien.

Son visage me parut las un court instant avant qu'il ne se rende compte que je le regardais, puis toute émotion quitta son visage. Le masque de l'indifférence, voilà ce qu'il m'offrait ce soir. Je ne savais plus quoi lui dire, ni même comment réagir face à cette situation. Je n'avais pas peur, il ne me ferait pas de mal. C'est bien la seule certitude que je possédais en cet instant. Alors encore une fois, j'attendis que la voiture s'arrête, qu'il me parle, qu'il agisse. J'attendais un signe de sa part, n'importe lequel. Et il finit par s'arrêter sur le parking d'un cinéma. Il ne fit pas mine de descendre alors, je continuai à attendre de voir quelle serait la suite des évènements.

- Quelle est la chose que tu aimes le plus au monde ? demanda-t-il soudainement.

- Mes parents, il n'y a rien de plus important qu'eux au monde.

Ma réponse le fit sourire.

- Si je me montrais assez cruel pour les enlever, tu finirais par me suivre ?

- Cette blague est tout sauf drôle, répliquais-je la boule au ventre.

- Pardon, c'est la fatigue qui parle. Je ne ferais jamais rien qui te ferait du mal. J'espère que je ne suis pas aussi diabolique à tes yeux.

Je tournai la tête vers lui, il me regardait droit dans les yeux, cherchant une réponse et jamais il ne m'était apparu aussi fragile, aussi humain. Le masque indifférent de tout à l'heure s'était envolé et son regard transmettait toutes ses incertitudes.

- Vous êtes assez diabolique pour me priver de travail mais je n'ai jamais imaginé une seconde que vous me feriez du mal, rassurez-vous.

- Je sais que je passe pour un fou à tes yeux, admit-il. Je ne peux pas expliquer mon comportement et je sais qu'il est très excessif mais je ne cherche pas à te nuire. Je ne peux pas t'expliquer à quel point tu comptes à mes yeux et ce n'est pas parce que je ne dis rien que je ne souffre pas de tes rejets. Je sais que c'est toi, je le ressens. Et ne me prends pas pour un idiot, je vois tous tes regards sur moi, la manière que tu as de te mordre les lèvres en me matant quand j'ai le dos tourné. Tu oublies trop souvent l'utilité des miroirs. Alors je sais aussi que le fait que je sois un homme n'est pas un problème insurmontable. Tu m'as demandé quand est-ce que je mettrai fin à tout ça, je te renvoie la question, Seokjin quand comptes-tu enfin me laisser une chance de t'approcher ?

Ça recommençait, il me désarçonnait avec ses mots, son regard si sincère accélérait déjà les battements de mon cœur. Je considérai sa question un moment avant de répondre. Sauf que je ne savais pas quoi lui répondre. Combien de temps vais-je encore me demander si je suis capable de l'aimer alors que je réagis déjà comme une collégienne face à lui ? Combien de temps vais-je encore me trouver ridicule à débattre ainsi avec moi-même ? Je veux lui dire oui, peut-être même depuis le premier jour. Qu'est-ce qui me retient ? Le fait que ce soit une relation homosexuelle ? Ce frein ne le convainc pas et pour être tout à fait honnête, je n'arrive plus à m'en convaincre non plus. Peut-être a-t-il raison, j'ai peur, peur du bonheur qu'il veut m'offrir. Peur surtout de la chute que je prédis en grand pessimiste que je suis. Ma peur de la désillusion me pousse à le fuir et le reste de mon être me pousse vers lui. Seule cette peur me bloque, je refuse de prendre le risque parce qu'il est trop beau, trop parfait et que mon estime de moi-même ne me permet pas de me dire que je mérite ce qu'il souhaite m'offrir. Un jour, lui aussi s'en rendra compte, il verra que je ne le mérite pas et que se passera-t-il alors ? Désillusion et souffrance, retour à la réalité, voilà ce qui m'attend au bout du chemin.

- Oui, c'est forcément ce qui m'attend...

- Quoi ?

Reste concentré Seokjin, il attend une réponse et tu te parles encore tout seul et à voix haute en prime.

- Rien... J'ai pensé à voix haute...

- Parle-moi, dis-moi ce qui t'effraie t'en. Je veux bien te rassurer mille fois sur mes intentions envers toi mais il faut que tu m'en parles.

Qu'est-ce que je suis censé lui dire à présent ? Je ne sais même pas ce que je veux ou ce dont j'ai réellement peur. La seule certitude que j'ai c'est que la vie qu'il me promet est trop belle pour être vraie et que rien n'est jamais gratuit dans la vie. Alors quel est le prix à payer pour vivre cet amour qu'il me propose ? Suis-je même capable de payer un tel prix ?

Toutes ses réflexions me mènent à un constat que j'occulte régulièrement, il me demande en mariage et me promet l'amour mais je ne sais rien de lui. Que fait-il de ses journées ? Que pense sa famille de cette union folle et précipitée ? Qui est-il au fond ? Je n'ai la réponse à aucune de ces questions. Peut-être devrais-je commencer par savoir tout cela pour pouvoir parler d'égal à égal avec lui sur cette question du mariage qui lui tient tant à cœur.

- Namjoon, je viens de me rendre compte que je ne sais rien de vous, ni votre âge, ni votre profession. Que pensent vos parents de tout ça ? Je ne sais pas qui vous êtes et vous insistez pour m'épouser. Pour moi, vous êtes juste un homme riche, arrogant, complètement fou et impatient.

- Je n'ai pas beaucoup de qualités à t'entendre ! sourit Namjoon, un air plus détendu sur son beau visage.

- Je n'ai pas fini la liste, vous êtes un beau parleur aussi.

- Ça ne te vient pas à l'esprit une seconde que je puisse être sincère ?

- Si mais il n'y a aucune logique dans tout ça. Parlons franchement, rien est gratuit ici-bas alors où se trouve l'arnaque ?

Il prit un petit moment pour réfléchir à ma dernière phrase sans doute, puis me répondit :

- Tu as raison, il y a un prix à payer pour toute chose. Je veux ton cœur. Rien de plus que cela. Je veux t'avoir dans ma vie, à mon bras, dans mon lit aussi. Je veux être heureux avec toi.

- C'est ça qui me fait peur. Je n'ai rien à offrir à personne. Je suis une personne occupée à survivre depuis l'adolescence. Je suis peu démonstratif et solitaire. Et vous me demandez ce que j'ai de plus difficile à offrir.

Je le vis hocher la tête à mes dires, songeur. Sans un mot, il redémarra sa voiture et nous repartîmes en sens inverse.

- Je comprends ce que tu veux dire. Je ne cesse de te brusquer et tu as besoin de temps pour t'ouvrir aux autres. Je vais changer d'angle d'attaque. Ne crois pas une seule seconde que j'abandonne le mariage. Mais pour que tu sois plus à l'aise, je peux le repousser à plus tard. Je vais t'envoyer une adresse par texto quand nous arriverons. Tu dois y être à 9 heures pile. Tes vacances prennent fin.

Je me retournais surpris vers lui mais je n'eus pas le temps d'en placer une.

- Je t'ai donné l'impression de te mettre en cage, n'est-ce pas ? Je rectifie le tir. Je ne te mets pas en cage, ton bonheur sera le mien mais il est hors de question qu'une ivrogne te tâte le postérieur alors tu vas travailler près de moi. Comme ça, tu apprendras à me connaître aussi.

Ce changement radical d'attitude me désarçonna, une fois de plus. Il trouve toujours le moyen de me laisser sans voix. Mais cette fois-ci, j'entrevois dans son discours une véritable lueur d'espoir. Et je me dis enfin que peut-être je vais pouvoir lui faire confiance et me laisser aller à rêver.

Je lui répondis par un hochement de tête, trop déboussolé pour le remercier du travail qu'il m'offrait ou même lui demander de quel travail il pourrait s'agir.

Le reste du trajet se fit dans un silence confortable. Il me déposa au pied de mon immeuble et me raccompagna jusque devant ma porte. Il déposa un baiser sur mon front tout en caressant rapidement mes cheveux. Puis il partit avec un léger sourire et un « À demain » aussi tendre que ses gestes.

Cette nuit-là fut la plus reposante de toutes les nuits que j'avais vécue depuis l'arrivée de Namjoon dans ma vie. Oui, j'ai le sentiment que je verrai bientôt la fin du tunnel. Namjoon a raison sur un point, l'instinct nous parle et il se trompe rarement. Le flux constant de questions et d'inquiétudes qui parasitent mes nuits depuis maintenant 8 jours commence enfin à se tarir.

8 jours... j'ai pourtant l'impression qu'il dérange toutes mes habitudes et toutes mes certitudes depuis des mois déjà.

Le lendemain comme demandé, je me trouvais au pied de mon nouveau lieu de travail à 9 heures pile. Je me retrouvais donc à l'entrée de l'une des plus grandes entreprises du pays, KimCorp. Namjoon est donc bien un Chaebol. Le stress monta en moi tandis que je me dirigeais vers une hôtesse d'accueil.

Je ne sais même pas comment je dois me présenter à elle. Dois-je lui dire que Monsieur Kim Namjoon m'a ordonné de venir ici ? Je ne sais même pas quel service demander.

- Bonjour Mademoiselle, je suis Kim Seokjin. On m'a demandé de me présenter à 9 h.

- Bonjour Monsieur Kim, nous avons été prévenues de votre arrivée. Veuillez remplir ce formulaire puis vous présenter au local de sécurité sur votre gauche. Ils vont vous créer un badge d'employé, lorsque vous l'aurez, vous devrez vous rendre au 22ème étage.

- Très bien, merci.

Je suivis ses instructions à la lettre et une fois le badge en poche avec une photo prise par le service de sécurité, je me dirigeai vers les ascenseurs de l'autre côté des portiques d'entrée. Je fus littéralement emporté par la foule de travailleurs dans le premier ascenseur qui ouvrit ses portes. Je ne vis personne appuyer sur le numéro 22 et je ne pouvais pas l'atteindre par moi-même alors j'en fis la demande aux personnes plus proches. Tous les regards se tournèrent vers moi, des regards surpris, envieux, hostiles aussi.

C'est avec cette ambiance oppressante que j'arrivai à mon lieu de rendez-vous. Je fus accueilli par une belle jeune femme brune et souriante.

- Bonjour Monsieur Kim, je suis Jang Minah, la secrétaire du Directeur Kim et votre responsable.

Elle me tendit une main parfaitement manucurée sans se départir de son sourire. Elle enchaîna rapidement en me présentant mon bureau près du sien. C'est le moment que choisit Namjoon pour sortir de son bureau.

- Bonjour petit ange ! lança-t-il gaiement.

- Namjoon ! répliquai-je sèchement, gêné du surnom inapproprié.

- Ne t'en fais pas, Mademoiselle Jang est au courant. Comment crois-tu que j'aie obtenu ton adresse sinon ?

Je lançai un regard surpris à la secrétaire et Namjoon enchaîna :

- Les hommes comme moi ne sont rien sans leur secrétaire. Nous ne savons rien faire sans elles.

Je ne sais pas pourquoi mais cette réflexion piqua quelque chose en moi, ça m'énerva, ça me faisait mal. Mais je ne pipais mot. Je n'ai aucun droit de m'énerver dans cette situation. Je ne peux pas lui reprocher de complimenter une femme alors que je le repousse tout le temps. Et puis de quoi pourrais-je le blâmer réellement ? D'avoir une bonne secrétaire ? D'avoir besoin d'elle, même pour des sujets personnels ? Ou peut-être juste de lui avoir souri ?

Peut-être est-ce le regard complice qu'il lui a lancé qui me reste en travers de la gorge. Inconscient de mon trouble, Namjoon poursuivit :

- Suis-moi dans mon bureau mon cœur. Je vais t'expliquer ton rôle et te faire signer ton contrat.

Je lui envoyai un regard désapprobateur pour le surnom mais le suivi tout de même. Je découvris un immense bureau au design moderne dans les tons marron plutôt chaleureux. Il me désigna un canapé en cuir confortable et luxueux pour qu'on s'y installe. J'obtempérai une fois de plus mais hors de question de le laisser mener la danse plus longtemps.

- Avant qu'on signe quoique ce soit, je tiens à mettre certaines règles en place. Commençais-je avec détermination.

- Je t'écoute mon cœur. Me répondit-il avec le sourire.

- Première règle : plus de mon cœur, mon ange, ou tout autre surnom gênant. Vous êtes peut-être à l'aise avec tout ça, mais pour moi, c'est un lieu de travail. Je vous demande donc d'avoir un comportement professionnel envers moi quand nous sommes au bureau.

- Je choisis la seconde règle dans ce cas, enchaîna-t-il sans se départir de son sourire, j'en ai marre de t'entendre me vouvoyer comme si j'étais encore un parfait étranger. J'exige donc que tu me tutoies.

- Elle vous tutoie aussi ? Secrétaire Jang ?

- Non, nous ne nous tutoyons pas.

- Alors votre règle ne peut pas être acceptée. Elle contredit la première règle. J'agirais avec vous comme le fait ma responsable.

Il m'observa en silence un moment. Il n'avait pas l'air déçu ou énervé, juste pensif. Puis il se leva pour rejoindre son bureau, il en revint avec un porte-document. Il s'installa de nouveau face à moi mais son sourire avait laissé place à une mine très concentrée.

- Écoute Seokjin, je ne pourrais jamais avoir le même comportement avec toi qu'avec la secrétaire Jang. Tu es spécial à mes yeux et je te chérit énormément alors je veux bien limiter les surnoms gênants comme tu dis mais ne m'en demande pas trop. Je veux qu'on apprenne à se connaître mais tes premières phrases visent à mettre le plus de distances possible entre nous. Alors je te propose un compromis.

- Qu'est-ce que vous proposez ?

- Je m'efforce à faire preuve de professionnalisme avec toi durant toute la journée de travail, soit 8 longues heures par jour. En échange, tu passes tes soirées avec moi. On apprend à se connaître et tu fais de vrais efforts pour t'ouvrir à moi. Tu poses toutes les questions qui te passent par la tête, tu me fais part de tes doutes et tes peurs. Tu me laisses te rassurer. Est-ce qu'on a un accord ?

Son regard me transperçait et je n'arrivais pas à douter de sa sincérité en cet instant. Mon cœur loupa un battement puis accéléra de manière incontrôlée. Je ne pus que hocher la tête. Il signa alors le contrat puis me le tendit. Je signai par automatisme, résultat je ne sais toujours pas quelles sont mes tâches. Je détournai les yeux de lui, gêné par l'intensité de son regard.

- À partir de maintenant, tu es mon second secrétaire. Tu aideras Mademoiselle Jang à organiser mon planning, préparer les réunions, etc. Bienvenue parmi nous, Soekjin.

Je le remercia, me leva et me courba avant de prendre congé comme le ferait n'importe quel employé. Je rejoignis ma supérieure le cœur battant avec mon contrat à la main.

Mademoiselle Jang ne perdit pas une seconde et démarra ma formation pour faire de moi le secrétaire parfait.

Et c'est ainsi que démarra ma nouvelle vie.



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