Chapitre 4. Le Réveil
Le lendemain matin, Miles peina à se lever. D'horribles acouphènes l'empêchait d'entendre quoi que ce soit. Ses sens étant décuplés par ses pouvoirs, le volume de la musique qu'il avait entendu la veille lui avait complètement bousillé les oreilles et ce pour plusieurs jours. Il songea à faire le trajet jusqu'au lycée en voltigeant, mais en voyant les gants de son costume, blancs, couleur cocaïne, il se résigna. Il alla donc au lycée en bus. Il mit son casque et écouta "Theme From New York" de Frank Sinatra à mesure qu'il approchait de l'île de Manhattan. Un fois son bus arrivé, il pris le métro jusqu'à Midtown. Qu'est ce que cette journée allait bien pouvoir lui réserver.
Il se dirigea vers sa salle de cours quand il fut interpellé par quelqu'un derrière lui qui semblait crier son nom. "Miles, eh !" disait-il.
Miles se retrouva et fut surpris de voir son ancien ami de classe de seconde, Antoine. L'ami Californien avec qui il avait perdu contact. Il était vêtu d'un pull et d'un jogging qui étaient tous deux bien trop grands pour lui. Un accoutrement que Miles avait déjà pu découvrir sur la page instagram d'Antoine.
"Comment ça va mec, dit Antoine d'une voix tout enjouée.
-Eh, ça va et toi, répondit Miles en faisant semblant d'être content.
-Ton accent s'est amélioré à ce que je vois, alors tu réponds plus à mes messages...
-Ouais désolé, c'est juste que je ne suis pas souvent sur instagram en ce moment.
-Ah je vois, t'essaie de décrocher, j'avoue que moi aussi j'ai un peu ce problème là. Mais sinon tu racontes quoi, t'as rencontré une fille ?
-Euh, non toujours pas.
-Ohh c'est pas vrai ! s'exclama Antoine. Mais tu les évite ou quoi, t'as qu'à aller les voir et elles demanderont à sortir avec toi.
-Non je crois pas, dit Miles en riant.
-Mais si un petit beau gosse comme toi, ça m'étonne que t'ai encore rencontré personne vraiment. Je sais que tu sors pas beaucoup mais quand même.?? "
Miles eut du mal à digérer cette remarque mais dû reconnaître qu'Antoine avait raison. Miles ne sortait pas beaucoup mais Spider-Man lui...
"Eh alors c'est quoi cette tête de déterré que tu nous fais là, on dirait que tu sors de soirée.
-Ah, euh oui en quelque sorte, répondit Miles se passant la main dans le cou.
-J'étais en soirée moi aussi hier près de Harlem, ça a mal tourné, les flics sont entrés alors que tout le monde dansait. Il paraît que Spider-Man nous a dénoncés."
En entendant cette phrase, Miles ouvrit grand les yeux, mais se mit à rire pour cacher sa gêne.
"Pourquoi tu rigoles, c'est pas drôle, dit Antoine en riant. Je pensais que ce mec était cool mais en fait c'est qu'un simple flic de plus.
-Nan je rigole parce que j'ai entendu cette histoire à la télé comme quoi Spider-Man était intervenu dans une fête. Alors c'était là que tu étais ? Mais j'ai aussi entendu dire qu'il y avait de la drogue là-bas. Plein de drogue.
-Ah, t'es toujours un fan du type araignée à ce que je vois. Je me rappelle que tu regardais tout le temps des articles à propos de lui quand on traînait ensemble."
Miles rit, confus. A l'époque, il surveillait sans cesse ce que l'on disait de Spider-Man dans les journaux, pour voir ce que le monde pensait de lui. Une habitude qu'il n'a pas perdu, encore aujourd'hui.
-Eh ça te dirait qu'on mange ensemble aujourd'hui, reprit Antoine. Comme au bon vieux temps à la cantine.
-Ouais d'accord ça marche, répondit Miles content d'avoir l'occasion de manger avec quelqu'un.
Ils se rendirent tous deux à la cantine et discutèrent longuement. Ils se remémoraient tous les deux des souvenirs datant d'il y a 2 ans et se racontaient leur vie respective de puis. Même si Miles n'avait pas grand chose à raconter qui ne mentionne pas les mots crime, toiles et costume. Antoine quant à lui n'avait pas tant changé que ça. Son image sur les réseaux sociaux n'était en fait qu'une petite partie de la personne qu'il était devenu. Il avait multiplié les rencontres amoureuses et avait fait la fête dans presque tous les quartiers de New York. Il était en ce moment en couple avec une certaine Jenny qui ne se trouvait même pas dans le lycée. Antoine passa de longues minutes à décrire comment ils s'étaient rencontrés tous les deux et les choses qu'ils faisaient ensemble en s'étalant également sur les sujets les plus gênants. Miles, bien évidemment, n'avait pas d'histoire de ce genre à raconter, alors il se contenta d'écouter.
Antoine fut incroyablement choqué d'apprendre que non seulement Miles n'avait rencontré aucune fille, mais qu'il n'avait adressé la parole à aucune en un an. Excepté la conversation qu'il avait eue avec Eva Grant, la veille, mais il se garda de mentionner ce détail.
Et ces conversations là durèrent pendant des jours. Antoine et Miles mangèrent à la même table tous les jours qui suivirent. Miles était content de retrouver son ami, ami qui semblait vouloir l'inviter à plusieurs soirées à venir. N'étant pas dans la même classe ils ne pouvaient se voir qu'à la pause déjeuner et pendant les récréations, mais cela suffit à raviver leur amitié. Un jour, Antoine proposa à Miles de sortir après les cours, il comptait l'emmener dans un endroit dont il parlait sans cesse. La Taverne. Il s'agissait d'un lieu de New York où Antoine avait l'habitude de se rendre pour acheter du cannabis à moindre prix. Miles n'était pas très emballé à l'idée d'entrer dans un repère de drogués mais si cela pouvait faire plaisir à Antoine, alors autant tenter l'expérience. Durant le trajet jusqu'à la Taverne, Antoine, qui s'était vêtu d'une tenue encore plus décontractée que d'habitude, expliqua à Miles le fonctionnement de la Taverne.
"La Taverne, en fait, dit Antoine, c'est une grande ruelle qui débouche sur un ancien bar. Elle se trouve dans la 116ème rue. Seuls les habitués y sont admis. En fait, la particularité de la Taverne, c'est qu'on a un Chaman à l'entrée.
-Un Chaman ? s'étonna Miles.
-Ouais, un Chaman, répondit Antoine en riant. Un jour il nous à dit son nom mais personne n'a réussi à le retenir alors on l'a baptisé Francis. Chaque nouveau client de la Taverne doit s'asseoir devant Francis avant de pouvoir entrer. C'est un test de passage. Il te regarde droit dans les yeux pour voir si ton âme est digne d'entrer. Plusieurs junkies se sont fait recaler de la Taverne après être passés devant Francis. Il nous a dit qu'il avait réussi à voir leurs mauvaises intentions. Alors bon, on le croit. Mais pour Mike, le boss de la Taverne, Francis est juste un bon moyen de faire partir les flics. Eh ouais, parce que les flics se prêtent au jeu à chaque fois qu'ils viennent inspecter la ruelle. Ils s'assoient tous devant Francis, ça prend pas mal de temps et Mike en profite pour planquer discrètement la came. C'est pour ça qu'on ne s'est jamais fait prendre. Francis c'est notre protecteur. Tiens tu vois c'est lui."
Antoine pointa du doigt un vieil amérindien, qui regardait dans le vide assis devant une ruelle sombre. Il avait tout l'air d'un sans abris. Miles et Antoine avaient donc voyagé depuis Midtown High jusqu'au fin fond de Harlem et ils se trouvaient maintenant devant un repère de drogués. Tout dans cet endroit empestait la transpiration, la fumée de tabac et du cannabis. Des tonneaux brûlants étaient disposés un peu partout dans la ruelle autour desquelles se regroupaient des dizaines de personnes cherchant à se réchauffer. La ruelle se trouvait entre deux bâtiments imposants, ce qui la rendait terriblement sombre. Cet endroit n'était pas du tout rassurant mais Miles se doutait bien qu'il allait arriver dans un lieu comme celui-ci tôt ou tard avec Antoine comme ami. Et puis ce n'était pas la première fois que Miles avait affaire à un rassemblement de drogués, seulement les fois précédentes, il était masqué.
Le garçon sentit quelque chose lui gratter la jambe tout d'un coup. Il baissa la tête et vit le vieil ermite Francis lui faire signe de s'asseoir sur un petit tabouret.
"Désolé mec, c'est le rite de passage." dit Antoine en posant sa main sur l'épaule de Miles.
Le garçon prit alors place sur le tabouret et Francis dirigea soudain son étrange regard vers lui. Depuis que les deux garçons étaient arrivés, Francis semblait plongé dans une sorte de transe mais le contact du regard de Miles lui rendit la vue. Il se mit alors à scruter longuement les yeux du garçon. Il chercha plus loin, il vit son esprit, plein de vivacité, plein d'amour pour sa mère, plein d'excitation à l'idée de revêtir une certaine tenue, Francis ne parvint pas à décrypter ce détail là. Puis il chercha plus loin encore au-delà de l'esprit et du corps, il chercha l'énergie émanant du corps de Miles. Une énergie très positive, néanmoins troublée par un deuil semble-t-il inachevé. Une âme seule, qui cache son malheur derrière un masque. Francis tout d'un coup sourit et Antoine interpréta cela comme un signe que Miles allait pouvoir entrer mais l'ermite leva soudain un doigt, et Antoine qui s'apprêtait à emmener son ami, s'arrêta net.
Le sourire de Francis s'effaça. Cela faisait bientôt une minute que Miles et lui n'avaient pas cligné des yeux. Les tests de Francis ne duraient jamais aussi longtemps. L'ermite plongea encore plus profondément dans le regard de Miles, là où il n'était plus rien censé se trouver. Francis distinguait un abîme qui envahissait cet espace métaphysique auquel il avait accès. Un abîme qui semblait vide au premier abord mais qui en fait renfermait une horrible créature. Ce monstre, Francis ne pouvait pas le distinguer en entier. Il était de dos mais semblait se tourner lentement vers lui. Puis un sentiment de désespoir envahit l'homme peu à peu, à mesure que la créature se retournait. Il pouvait sentir ce qu'elle ressentait, une énergie chaotique dénuée de tout amour, de toute compassion et de cœur. Une créature noire de haine, retenue dans une prison astrale depuis semble-t-il une éternité. Elle était depuis quelque temps endormie, ne déversant plus sa malfaisance sur l'âme du jeune garçon avec qui elle était forcée de cohabiter. Mais la visite de cet intrus dans sa prison l'avait sorti de son sommeil. Et sa colère se déversait de nouveau sans répit. L'ermite à la vue de ses yeux jaunes perfides, perdis tout contrôle, tout espoir, tout amour, toute volonté, et toute confiance en ce en quoi il croyait depuis toujours. L'amour de la vie et de la nature, comment y croire alors que la vie avait été donnée à un être aussi mauvais. Pourquoi vivre dans un monde où un telle âme subsiste. L'ermite Francis tomba alors de son tabouret, sans vie. Son âme était déjà loin, le plus loin possible de cette infamie.
"Qu'est ce qui s'est passé, cria Antoine. Francis ! " Il secoua alors le corps inerte de l'ermite mais sans rien pouvoir faire.
"Qu'est ce que tu lui as fait, il allait bien." Mais Miles ne répondit pas, il était toujours assis, à fixer le vide à l'endroit exact où se situaient les yeux de Francis quelques secondes plus tôt. Lui aussi avait senti la présence du monstre, pour la première fois depuis deux ans. Némésis, qui avait dormi, tapis dans son abîme noire, s'était réveillé. Miles sentit tous les poils de sa peau se dresser, son sixième sens s'activait, sentant le danger, mais la menace était intérieure. Il avait terriblement peur, il ressentait de nouveau toute les émotions de cette horreur soudainement ravivée comme une maladie depuis trop longtemps assoupie. Il tenta de contrôler cet afflux d'émotions comme Aaron lui avait appris, mais ne savait plus comment faire. Les yeux jaunes grandirent jusqu'à pénétrer dans l'esprit même de Miles, se substituant à lui et prenant peu à peu sa place. Mais tout à coup, il entendit la voix d'Antoine et se réveilla.
"Eh Miles qu'est ce qui se passe, Francis s'est évanoui, c'est bizarre. Enfin, on dirait que son cœur ne bat plus !"
Mais Miles encore troublé, n'entendait pas les paroles d'Antoine. Il se leva en regardant tout autour de lui et se mit à courir dans la direction opposée à la Taverne, sous le regard effaré d'Antoine.
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