Day 7 : Free Theme
Les plaines verdoyantes du Japon regorgeaient de surprises. Les vallonnements pouvaient cacher une forêt ou une ville. C'était toujours excitant de grimper tout en haut d'une petite colline pour contempler l'environnement. Pas très loin de la grasse herbe se situait une immense falaise donnant sur la mer. Les zones sablonnés avaient été envahis par les hommes, créant des plages et des ports. Surtout des ports. Car c'était le domaine de prédilection de l'influence de Mori Ougai, le gérant de la Mori Company et de la Mafia Portuaire en parallèle.
Il se servait de ses bateaux partant pour l'Occident pour effectuer ses transactions aussi bien légales que douteuses, mais, paradoxalement, il était celui qui faisait le plus travailler les habitants et développait l'économie de Yokohama. La ville en elle-même était plutôt calme, le climat marin atténuait le froid de l'hiver et permettait aux habitants de pouvoir se rafraîchir l'été. Cependant, le seigneur de la ville et des terres, qui était autrefois respecté de ses citoyens bien qu'un peu violent, devint peu à peu fou avec l'âge. Il devenait paranoïaque, voyait des ennemis partout, une rumeur disait même qu'il avait voulu faire brûler la ville entière. Il entravait aussi un peu trop les affaires de la Mafia Portuaire et de la Mori Company, faisant plonger peu à peu la ville portuaire dans une dépression économique alarmante et augmentant le nombre de violences dans les rues.
Ainsi, Mori Ougai lui-même s'aventura hors de son territoire et alla rencontrer le seigneur dans son château traditionnel. Les tentatives de discussions et de négociations furent infructueuses et le parrain compris vite que s'il ne faisait pas quelque chose, Yokohama plongerait dans le chaos. Suite à l'entretien, il forma un petit groupe et fomenta bien vite une vendetta dans les rues. Bientôt, la ville entière était en émoi. En effet, Mori voulait tuer et remplacer le seigneur actuel. L'idée fut vite approuvée ; la gestion d'une ville ne devait pas être si différente de la gestion d'une entreprise internationale.
C'est ainsi que moins d'un mois plus tard, le seigneur des terres fut assassiné, empoisonné par de l'arsenic. Personne n'avait su comment le parrain avait versé le poison dans la nourriture contrôlée du seigneur. Une rumeur circule sur le fait qu'il se serait fait passer pour un médecin très reconnu dans le pays et que le seigneur, avec sa sénilité, avait oublié le parrain et l'avait accepté à ses côtés, accélérant de ce fait le processus de sa mort.
Mais une chose était sûre, le commerçant soulageait la population d'un poids immense en le tuant. En conséquence, un vote eut lieu entre tous les habitants de la ville, le seigneur légitime des terres n'ayant aucune famille. Mori fut nommé nouveau seigneur de la ville au contentement général et à légère surprise de ce dernier. Il pensait que le peuple aurait penché pour les partisans royalistes et conservateurs. Yokohama, bien que moderne, restait très dépositaire de ses coutumes.
Il choisit son gouvernement avec soin ; piochant des ministres consciencieux qui lui avait juré fidélité et qui ne cherchait que le bien être des habitants. Il eut également le cran de désigner Fukuzawa Yukichi, dit le loup solitaire, un royaliste sévère et impartial comme chancelier. Étonnamment, la paire gouverna d'une main de maître Yokohama ; le bras-droit de Mori, Fukuzawa, qui était aussi à la tête de l'opposition, veillait précieusement à ce que les lois et les excentricité de son maître ne favorise pas une classe ou mette la ville à feu et à sang.
L'une des excentricités du jeune seigneur était de ne pas prendre de femme et de ne pas avoir d'enfants. A la place, il ramena avec lui au palais deux enfants qu'il avait adopté bien avant son coup d'état. Un jeune adolescent de dix ans au regard mort, Dazai Osamu, et une petite fille malicieuse qui ne semblait pas avoir deux ans, Elise. La petite qui n'avait pas de nom et qui portait ainsi celui de son père adoptif, Mori, marchait à peine sur ses jambes et avait un visage d'ange ; deux grands yeux bleus entourés d'une chevelure d'or. C'est pourquoi tous ses caprices passaient auprès de son père adoptif qui lui offrirait le monde sur un plateau d'argent si Fukuzawa ou Osamu n'étaient pas là pour l'arrêter.
Dazai Osamu, lui, était bien plus calme que sa sœur. Son éducation avait été en partie confié à Fukuzawa, prouvant la confiance que portait Mori envers son chancelier. Réservé, observateur, intelligent et un brin manipulateur, l'enfant menait par le bout du nez les personnes naïves ou innocentes qui gravitaient autour de lui. En tant que fils aîné, il savait tout sur l'étiquette noble, la gestion d'une ville sous toutes les coutures, les subtilités de la finance et du management pour s'occuper de la Mori Company, et s'est même fait un nom assez connu pour être respecté dans la mafia portuaire. Tout cela en moins de deux ans. Il avait toutes les qualités d'un fils qui hériterait du flambeau familial, si ce n'est qui lui manquait quelque chose d'important, d'après les dires de Mori qui attendait avec impatience le moment où son fils sortirait de son cocon.
Au fur et à mesure des années, la nouvelle famille noble essuya plusieurs tentatives d'assassinats, toutes échoués, au plus grand soulagement de Mori. En effet, si le nouveau seigneur était apprécié par la plupart de ses pairs, il restait quelques factions anarchistes ou royalistes qui voulaient renverser le pouvoir actuel. Même la présence de Fukuzawa aux côtés du seigneur ne semblait pas calmer l'ardeur des plus extrémistes. Le chancelier était même devenu un traître aux yeux de certains. Sans compter que la place privilégiée de Mori attisait bien des convoitises, et quoi de mieux pour le faire tomber de son trône doré que de faire disparaître son fils et sa fille tant chéri ?
Suivant les sages conseils de son chancelier, le boss de la Mafia décida d'assigner à son fils un garde du corps et garda avec lui Elise à ses côtés, augmentant la garde rapproché qui le protégeait. Pour son héritier, on chercha dans toute la région, que dire, dans tout le pays, la crème de la crème des gardes pour protéger le jeune maître Mori Osamu, né Dazai. Et il fut enfin trouvé.
Il ne venait pas de l'autre bout du pays ou d'un autre continent comme les rumeurs le disent si bien, bien qu'il ait des traits légèrement occidentaux. Il venait d'une succursale de la mafia du port situé à quelques rues du palais. Les craintes de Fukuzawa furent confirmés quand il entendit le nom de l'enseignant du garde, bien qu'il accepta de mauvaise grâce de le mettre à l'épreuve. En effet, il répondrait à tout les critères à la perfection, affirmait dans sa lettre sa préceptrice, Ozaki Kouyou.
La jeune femme d'une vingtaine d'année à peine était une assassin de renom et considérée comme l'une des plus grandes courtisanes du pays malgré le fait qu'elle sortait peu de la maison close qu'elle gérait. Une fleur rare, sublime et empoisonnée. Habillée d'un kimono aux teintes roses et rouges qui rappelait ses cheveux roux, elle fut accueilli au palais avec l'intérêt qu'ont les humains pour un animal particulièrement précieux.
Dazai l'observait en train de saluer la noblesse assis sur les marches de l'escalier menant au trône, analysant sa grâce féline, ses mouvements si élégants et meurtrier. Le chancelier la salua d'un signe de tête, Elise lui accorda à peine un regard, jouant au pied du trône avec de nouvelles poupées, et Mori lui adressa juste un sourire amusé. Derrière elle, un enfant en kimono noir et blanc avec des touches de rouges, comme des tâches de sang éparpillés sur le tissu fin, toujours incliné.
Il pourrait aisément se faire passer pour le frère de Ozaki avec sa chevelure feu. Ses vêtements orientaux paraissaient trop grand et trop large pour lui, bien au contraire des vêtements plus près du corps de Dazai, et surtout du col qui étranglait le brun, lui donnant une impression de suicide incomplet.
Un silence prit place dans la salle, les membres du gouvernement et de la noblesse attendaient avec impatience l'arrivé du fameux « prodige » tant vanté par l'assassin. Finalement, c'est Fukuzawa qui interpella la jeune femme :
« Kouyou, je ne vois pas votre garde promis. Où se trouve-t-il ? »
Les deux invités s'entre-regardèrent jusqu'à ce que la rousse pousse l'enfant devant elle, le rapprochant des regards acérés des hôtes, le montrant sous toutes les coutures. Le jeune garçon avança à petits pas, ses mèches cachant toujours ses yeux, traînant presque des pieds et s'arrêta à deux mètres des marches.
« Mais ici messieurs. »
Dazai éclata immédiatement de rire sitôt les paroles prononcées, se moquant ouvertement de lui. L'enfant gardait la tête basse, respectueux et attendant patiemment le verdict des adultes. Beaucoup de courtisans et nobles rirent avec le jeune maître, prenant cela pour une blague.
Le chancelier se pencha à l'oreille du seigneur, lui murmurant quelques mots. Le parrain sembla considérer quelques instants les paroles avant de se lever, faisant taire les gloussements, et dévisagea Kouyou.
« Tu n'as jamais été une personne qui prononçait ou faisait les choses à la légère, Ozaki. C'est pourquoi je vais te donner une chance de t'expliquer, ne la rate pas. »
Il se rassit, laissant le temps à Kouyou de s'incliner une nouvelle fois. Elle s'avança, posant ses mains sur les épaules frêles de l'enfant qui releva la tête par ce geste. Ce mouvement lui fit dévoiler le reste de son visage. Quelques mèches rousses tombaient sur le visage juvénile, encadrant de grands yeux aussi bleus que l'océan. Personne ne sentit que le regard innocent était sanguinaire envers ceux qui s'étaient moqués de lui.
Posément, la préceptrice prit la parole :
« Je vous présente un garçon que j'ai recueilli il y a bien longtemps. Contrairement aux apparences, c'est un assassin accompli et protégé par la maison Golden Demon. Il maîtrise parfaitement plus d'une dizaine d'arts martiaux et je lui ai apprit moi-même le maniement des couteaux. Vous ne le connaîtrez probablement pas sous son véritable nom, Nakahara Chuuya, mais peut-être que vous le jugerez mieux si je vous donne le nom de... »
-0-
« Corruption... Répéta le seigneur de la ville pensivement.
– Je n'arrive toujours pas à croire que cet enfant soit le responsable du meurtre de plus d'une centaine de personnes.
– Mon palmarès est plus grand, professeur Fukuzawa~. Répliqua Dazai mollement à l'intention de son précepteur. »
Le loup solitaire lui jeta un regard aigu mais ne répondit rien. A quatorze ans, Dazai avait probablement plus vu que n'importe qui de son âge.
« Mais il a quoi ? Dix ans ce chibi ? Je n'arrive même pas à le dire avec ses vêtements trop grand, on aurait dit qu'il allait s'effondrer sous leurs poids. Il gloussa. Et vous voulez me laisser ça ?
– Je crois qu'il a le même âge que toi, Osamu.
– Quoi ?! Pas possible... Il poussa un soupir à fendre l'âme et se laissa tomber sur un fauteuil en velours rouge.
– Et pourtant, je me souviens d'une conversation que j'avais eu avec Kouyou-kun un jour. Elle était venu me voir pour m'annoncer qu'elle avait recueilli un gamin dans les rues qui avait tenté de la tuer. Le regard que lui lança ses deux interlocuteurs le fit sourire. Elle l'avait prise avec lui et attendait mon aval pour en faire son apprenti. Il avait apparemment un potentiel énorme. »
La réflexion silencieuse domina la salle, seul la respiration endormi d'Elise dans la pièce à côté le brisait. On avait assigné une suite pour Ozaki et son... protégé le temps que les dirigeants décident du sort du « garde du corps ». Cela permettrait aussi d'évaluer les capacités et les talents de l'enfant. S'installant derrière un bureau, Mori leur parla de son intention de simuler une situation où son fils serait en danger de mort. Le test devait commencer le lendemain s'il n'y avait pas de complications.
Si, dans la salle d'étude de Mori, le complot était roi, dans la suite d'Ozaki, c'était plutôt les voix.
« Il est tout simplement hors de question que je travaille pour lui ! Assena Chuuya, furibond, se déshabillant dans la salle de bain et parlant à travers le papier de riz qui séparait la chambre de la salle d'eau.
– Si le roi décide que ce sera toi, je serais dans le regret de te dire que tu n'auras pas le choix. Répondit la jeune femme en se brossant délicatement ses cheveux mouillés.
– As-tu entendu comme il a ri en disant que je n'étais qu'un chibi à ramener au bac à sable ? Il est hautain à souhait, je le déteste. »
Kouyou ne répondit rien, puisqu'elle n'en pensait pas moins et qu'elle savait qu'il ne servait à rien de chercher à raisonner son apprenti. Quand il était excité à ce point, les mots ne suffisait plus. C'est pourquoi elle laissa à Chuuya ses problèmes de savon trop glissant et commença à lui sortir des affaires pour le lendemain. Elle avait prévu ce cas de figure et elle refusait que son protégé soit dans une tenue inadaptée pour le test que Mori risquait de lui faire passer.
Quelques minutes plus tard, Chuuya sortit de la salle de bain plus calme. Ses cheveux mouillés semblaient encore plus long et collaient à son torse nu. S'il paraissait chétif et brisable comme du cristal sous les lourdes couches du kimono, sa musculature saillante et ferme assurait le contraire. Elle le laissa mettre son kimono de nuit et aligna des couteaux de lancé, des poignards et d'autres lames plus affûtés les unes que les autres avant d'en choisir quelques uns méticuleusement pour la nuit, les plaçant dans les plis de son kimono.
L'aurore à Yokohama a toujours été calme, les yakuzas rentraient chez eux, les premiers commerçants installaient leurs stocks, les policiers sortaient de leurs casernes pour commencer leur travail. L'aurore et le crépuscule étaient les seuls moment de paix dans la ville portuaire, un moment que personne n'osait briser sous peine d'être lynché par les habitants.
C'était un moment que Dazai appréciait tout particulièrement ; la quiétude ambiante avait un effet reposant sur son esprit et il ressortait de ce moment toujours apaisé et son esprit lavé de toute pensée inutile.
C'était peu après l'aurore que le repas du matin était apporté. Le petit déjeuner était prit dans les chambres, bien sûr testé par un goûteur auparavant pour éviter toute tentative d'empoisonnement. Habillé d'un costume occidental plus décontracté, composé d'un pantalon sombre long et une chemise beige sans manche, le jeune maître descendit aux alentours de neuf heures dans le hall, là où était fixé le rendez-vous.
Il était le dernier arrivé mais personne ne lui en fit la remarque. Ses yeux chocolats détaillèrent un instant les deux invités. Si Kouyou portait encore un kimono, moins éblouissant cependant, Chuuya avait troqué son vêtement traditionnel japonais pour un pantacourt de coton plus serré, une chemise marron clair plutôt large pour son cadre fin et un haori vert bouteille. On ne changeait pas aussi facilement de comportement et de vêtements.
Dazai, en le voyant, alla directement à sa rencontre, ignorant la révérence de Ozaki. Il fixait droit dans les yeux cet enfant qui était plus petit que lui et qui semblait sur le point de se briser. Le chocolat rencontra le ciel et un arc électrique se déplaçant entre les deux adolescents pouvait se voir à l'œil nu. La posture décontractée du rouquin se fit agressive et celle du brun, joueuse.
Ils ne s'aimaient pas. Ils ne s'étaient pas appréciés et ne s'apprécieront probablement jamais. Du premier regard, ils avaient su que l'un d'eux devait s'incliner face à l'autre. L'un prenait de haut l'autre et le deuxième ne pouvait pas supporter la suffisance du premier. Ils avaient trouvés un adversaire. Un ennemi qu'ils devaient abattre. Un rival qu'il fallait dépasser à tout prix et prouver sa supériorité pour que l'autre courbe l'échine face à lui. Tout les deux savaient que s'ils devaient se battre, cela se terminerait dans le sang. Mais cela leur était égal, parce qu'il aurait alors prouvé sa puissance.
Le jeune maître se pencha, se mettant à la hauteur du rouquin et jacassa une conversation sans queue ni tête et le « convainquit » à coups d'arguments contradictoires de l'accompagner à l'écurie pour qu'ils aillent faire un tour dans la campagne le temps d'attendre le repas. En réalité, il le traîna de force à l'extérieur du palais sans se soucier du regard suppliant que l'enfant lançait à sa préceptrice. Celle-ci brossa juste sa mèche d'un revers de main, frôlant au passage la baguette qui maintenait ses cheveux en un chignon.
Dazai sentit que le comportement snob de la préceptrice touchait l'enfant. Ils laissèrent les adultes entre eux, les laissant discuter de choses ennuyeuses.
Dans l'écurie, l'odeur chaude du foin et des chevaux réchauffèrent les enfants. La saison printanière donnait toujours des matinées et des soirées fraîches. Le jeune maître présenta tous les chevaux un par un, énonçant leurs caractères, leurs forces et leurs faiblesses, lançant parfois des piques à son interlocuteur qui fulminait sur place. Ils sortirent un instant de l'écurie réservée aux chevaux pour aller dans un autre bâtiment, cette fois rempli de poney.
« Lequel penses-tu qu'il te failles ? Demanda Dazai tout en marchant dans l'allée. Personnellement, je pencherais pour Cacahuète bien qu'il soit toujours trop haut pour toi. Annonça-t-il en montrant un poney d'un mètre vingt au garrot. Il te faudrait alors... »
Et bla bla bla. Au bout d'une minute du discours du brun, Chuuya baillait déjà et tentait vainement de ne pas répondre aux provocations de l'enfant, ils étaient encore dans l'enceinte du palais. Il promena son regard dans l'écurie, continuant de marcher à la suite de Dazai. Ses yeux furent attirés par un couloir annexe, protégé des rayons du soleil.
Laissant le brun à sa conférence, il s'approcha de ce corridor sombre. C'était en réalité un box enfoncé dans le mur, le cachant des autres. Une grille au-dessus de la porte de la stalle empêchait l'animal de sortir sa tête. Le rouquin s'approcha, prudent. Il n'entendit pas l'immédiat silence du jeune maître.
L'assassin posa une main sur les barreaux fins de la grille et observa le jeune bai brûlé qui le reluquait. Il ressemblait à un arabe avec ses naseaux retroussés, ses yeux intelligents et son dos cambré. Il pourrait caracoler sans problème.
« Tainted Sorrow. Lui apprit Dazai soudainement à ses côtés. Il est jeune, certes, mais trop sauvage. Nos meilleurs dresseurs n'ont rien pu faire. Personne n'a réussi à le monter, Mori lui-même a abandonné l'idée. Il va être abattu dans un mois s'il n'est pas capable d'accepter quelqu'un sur son dos. Les conséquences d'un entêtement trop important.
– Il est entier ?
– Même pas ! S'exclama Dazai en ouvrant les bras. Ce cheval est un mystère à lui seul. On ne peut même pas le relâcher dans la nature, Fukuzawa craint qu'il n'ait la rage. Ce qui serrait étrange en soi puisqu'il ne bave pas et n'est violent que quand on le monte. Il se retourna et s'apprêtait à continuer son chemin quand un reniflement amusé l'arrêta. Quoi ?
– Rien, c'est que... Chuuya ricana et entra dans le box, veillant à refermer la porte derrière lui, sous le halètement déconcerté de Dazai avant de poser sa paume de main sur l'encolure. Il n'a pas l'air si sauvage pour moi. »
Le brun ne répondit rien, observant avec attention le rouquin qui caressait la robe sombre de l'animal. Variant entre paumes lourdes et touches aussi légères qu'une plume, il murmurait quelques mots dans une langue étrangère que Dazai ne reconnu pas. Les doigts de Chuuya jouaient sur les poils comme un pianiste expérimenté, alternant entre caresses, grattouilles et chatouilles. Il s'arrêtait quelques fois, enlevant un brin de paille emmêlé dans les crins, tâtonnant l'encolure, le poitrail, et jouant avec les crins noirs de la nuque.
Il continua ses massages sans se soucier du regard inquisiteur du brun avant de s'arrêter sur le dos du cheval et de froncer les sourcils. Précautionneusement, il frôla de la pulpe des doigts une zone qui fit frémir le cheval. Il le rassura d'une voix douce dans sa langue inconnue tout en massant la robe. Il finit par entourer la zone de ses doigts sous l'œil vigilant de Tainted Sorrow qui s'était redressé, aux aguets. Chantonnant, l'œil saphir était rivé sur un point situé sur le dos.
Brusquement, il pinça la peau et retira quelque chose coincé dans le dos du cheval. Hâtivement, il se recula devant la porte préalablement rouverte par le brun qui avait senti le coup venir à des kilomètres. Il le tira hors du box d'une main et referma la porte d'un coup sec avant de remettre les loquets en place de l'autre.
Pantelants, ils regardèrent l'équidé qui se cabrait dans son box, l'adrénaline retombant peu à peu.
« Laisse-moi deviner. Commença Chuuya en s'écroulant par terre, encore haletant. Vous avez reçu ce cheval en cadeau d'un anonyme en offrande au seigneur Mori. La lettre qui l'accompagnait spécifiait que Tainted Sorrow était pour toi et qu'il était déjà dressé. Fou de joie, tu aurais dû l'enfourcher dès que c'était possible. Mais merci à ton père et à sa prudence, il a fait en sorte que d'autres personnes le montent avant toi. Comme il était violent dès que quelqu'un lui mettait une selle ou le montait à cru, le seigneur a décidé qu'il devait être castré. Mais cela n'a rien changé, n'est-ce-pas ? »
Dazai acquiesça en silence, s'asseyant aux côtés de l'enfant, stupéfait de l'esprit hypothético-déductif du rouquin. Chuuya éclata de rire instantanément et regarda les yeux noisettes du jeune maître, hilare.
« C'est la technique d'assassinat la plus grossière que j'ai jamais vu ! S'exclama-t-il en montrant une aiguille longue de plusieurs centimètres et recouverte de sang. »
La réalisation traversa le regard du brun qui éclata de rire à son tour. Ce sont les gardes qui les retrouvèrent couchés sur la paille, en train de rire aux larmes sous le regard perdu des équidés.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top