25. Les dragonnets

Le petit groupe franchit les portes du monde royal. À partir de là, il savait se repérer.

- Océana, où est-ce que tu vas ? demanda Clément lorsqu'il constata que la jeune soigneuse partait en direction du monde commerçant, et non de SOS dragon.

- Ce n'est pas moi ! se défendit-elle. Speranto ne veut pas m'écouter.

Elle lui donna plusieurs coups de talon mais son corps massif ne sentait rien.

- Speranto ! maugréa-t-elle. Où comptes-tu aller ?

Le dragon lui adressa un regard par dessus son aile gauche et couina longuement.

- Qu'est-ce qu'il y a ? s'enquit Océana.

Speranto ne s'était jamais comporté de cette manière. Ce n'est que lorsque le regard de Violette se posa sur ses pattes avant qu'elle comprit.

- Océana, s'exclama-t-elle, le sortilège ne va bientôt plus faire effet ! Ses pattes commencent déjà a rétrécir.

Le visage d'Océana se décomposa.

- Il faut qu'on rentre au refuge au plus vite, décréta-t-elle : s'il retrouve sa taille normale, il tombera sous l'effet du poids des dragonnets !

- Je vais t'aider, dit Violette en se positionnant de l'autre coté du dragon démesuré. Clément, rapproche-toi de lui, il faut le diriger vers l'ouest.

Un bruit sourd s'échappa de la gorge de Speranto. Il se mit à tourner, petit à petit.

- SOS dragons ne doit plus être loin, maintenant, affirma Clément, on voit la fontaine centrale.

En contrebas, un puissant geyser propulsait de l'eau aux reflets colorés à des dizaines de mètres. La plupart des dragons habitant au monde royal se lavaient dans cet endroit.

Un bruit soudain - qui ressemblait à celui que fait un ballon quand il éclate - tira Océana de ses pensées. La queue de Speranto avait reprit sa forme normale, ce qui donnait au dragon une allure extrêmement étrange. Violette désigna trois bâtiments, à quelques centaines de mètres d'eux.

- C'est juste là-bas, dit-elle autant pour rassurer Océana que elle-même.

La jeune soigneuse passa sa main le long de l'encolure de son dragon. Il fallait qu'il tienne encore un peu. Il gémissait mais gardait une allure stable. Ses ailes repoussaient le vent qui régnait en altitude. Sa respiration se faisait plus lente, comme ralentie par sa métamorphose. Les trois dragons se rapprochaient de plus en plus de SOS dragons. Le refuge n'était plus qu'à quelques battements d'ailes, à présent. Une rafale de vent percuta Clément et il manqua de tomber à la renverse. Il parvint tout de même à se relever. Il se frotta les yeux et distingua la grande volière du centre de soins. Étoile commença à ralentir pour se préparer à atterrir.


Les oreilles de Speranto rétrécissaient elles aussi. Heureusement, ils étaient arrivés. Océana se pencha sur lui et il inclina sa tête sur la droite puis se mit à descendre lentement.

Lorsque ses pattes touchèrent le sentier de pierre qui menait à la volière, un frisson parcourut l'échine d'Océana : le refuge avait radicalement changé : l'herbe semblait trois fois plus verte qu'à l'habitude et les fleurs, qui bordaient le bâtiment central, plus ravissantes que jamais. Le trio posa pied à terre. Speranto continuait de rétrécir ; aussi, Océana décida de ne pas s'attarder et se mit immédiatement à détacher les petits dragons, de peur que la charge ne devienne trop lourde.

Clément fit un tour sur lui-même.

- C'est vraiment chez nous ? demanda-t-il. Je ne reconnais rien.

- N'exagère pas non plus, rétorqua Violette.

- Ne me dis pas que c'est... commença-t-il en fixant la porte d'entrée du centre de soins. Un piquisson ?!

Les deux filles se tournèrent vers l'endroit qu'il regardait. Une boule de piquants dont on ne distinguait ni la tête ni le derrière arpentait les lieux. Ses pattes étaient minuscules, contrairement aux pics qui se dressaient tout autour de son corps.

- Oui, acquiesça Violette, c'est celui de Lucas, il est mignon, n'est-ce pas ?

- Ce parasite va tout saccager !

- Tenez, interrompit Océana, emmenez ces petits bouts-de-chou dans l'enclos du fond.

Elle leur tendit deux dragonnets - un violet, un autre beige et bleu - et ils partirent les installer dans leur nouvelle "maison".


Le transfert ne dura pas longtemps et Speranto pu enfin se reposer.

Clément croisa les bras.

- Il y aura du boulot, dit-il en regardant l'état de la grande prairie, envahie par les mauvaises herbes. On est partis si longtemps ?

- On s'occupera du ménage plus tard, répondit Océana, rentrons : Lucas doit nous attendre.


Ils arrivèrent dans l'accueil du refuge. Violette retira la pancarte "fermé" de la porte et appela :

- Lucas ? Tu es là ?

Des pas se firent entendre. Un jeune homme aux cheveux d'un brun soyeux et aux traits fins vint les rejoindre. Ses yeux, d'un bleu profond, brillaient autant que le carrelage, fraichement lavé. Un petit dragon était perché sur sa tête et dormait profondément.

- Flammèche ! s'écria Clément, réveillant le dragonnet. Qu'est-ce que tu fais dans les cheveux de Lucas ?

La créature laissa échapper un soupir avant de se rendormir. Lucas s'esclaffa.

- Il aime bien être là, répondit-il simplement. Je suis content de vous voir rentrer. Ne vous inquiétez pas : je me suis occupé de tout, et j'ai aussi fait un peu de rangement dans le laboratoire.

- Quel genre de rangement ? s'insurgea Clément, manquant de s'étouffer.

Il détestait plus que tout qu'on touche à son laboratoire.

Violette lui donna un léger coup de coude.

- C'est génial Lucas ! s'exclama-t-elle. Merci beaucoup, tu nous as été d'une grande aide, cette fois encore.

Le jeune homme lui adressa un large sourire, qui fit fondre Violette. Clément se mit à marmonner des paroles incompréhensibles. Il n'appréciait pas ce "monsieur parfait", comme il le surnommait, qui était bien trop arrogant à son goût. Il ne comprenait vraiment pas ce que Violette lui trouvait...

- J'espère que ça ne vous dérangera pas, reprit Lucas, je me suis permis de dépoussiérer les coins des murs et de nettoyer les sols et les vitres.

Clément roula des yeux.

- C'est adorable ! répondit Violette, ne détachant toujours pas son regard du garçon.

- Ah, j'oubliais, ajouta-t-il, j'ai acheté des fleurs ce matin, pour décorer les box des dragonnets, et je n'ai pas pu me retenir de prendre aussi un cadeau pour vous... Une minute, je reviens.

Il partit dans la pièce à côté de lui et en revint cinq secondes plus tard, tenant deux gros bouquets de fleurs entre les mains. Il les tendit à Violette et à Océana.

- Des bleuets ! s'exclama cette dernière. Mes fleurs préférées.

- Merci, gloussa Violette, on pourrait aller boire quelque chose sur la terrasse, tous ensemble.

- Pourquoi pas, acquiesça Océana. Je vais faire des smoothies.

- Bonne idée, approuva le jeune brun, vous allez pouvoir me raconter votre fabuleuse aventure au monde des vampires ! Clément n'a pas eu trop peur, j'espère ?

Il retint un petit rire devant le regard noir du jeune soigneur.

- Je plaisante, dit-il pour détendre l'atmosphère.

Il attrapa Flammèche, toujours à demi-endormi dans ses cheveux, et le déposa par terre. Le petit dragonnet courut rejoindre son box.

- Tu as réussi à éduquer Flammèche ? s'étonna Clément.

- Oui, c'est un de mes dragons préférés. Il est mignon, avec ses petites taches plus foncées sur le museau.

Violette traversa le couloir qui menait à la terrasse, talonnée par Lucas et Océana.

Clément souffla et les suivit en trainant des pieds.

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