Chapitre 4

J'avais conduit Jake jusque chez moi. Il avait soigneusement inspécté les lieux, vérifiant qu'aucun meurtrier sanguinaire ne m'attendait. Nous avions échangé nos numéros et il m'avait fait promettre de l'appeler si je voyais quoi que ce soit de bizarre. Puis, il était parti. J'avais besoin d'être seule, de réfléchir. Peut être même prendre une décision.Voulais je vraiment faire partie de ce monde? Je n'en étais pas sûre. Pourtant c'était bien moi qui avais repoussé Derek et c'était bien moi qu'il avait essayé de tuer. Je poussai un long soupir en me laissant tomber dans mon lit. Et maintenant, je fais quoi?

Prendre une douche.Ce serait pas du luxe!

Je descendis donc jusqu'à la salle de bain et fis couler l'eau chaude sur mes épaules. Mon corps se détendit alors que j'étais enveloppée dans un nuage de fumée. Mon moment de plaisir fut interrompu quand j'entendis sonner à la porte.

Merde!

Je sortis de la douche, me séchai et m'habillai en quatrième vitesse pendant qu'un inconnu torturait cette pauvre sonnette, en appuyant sur le bouton de plus en plus fort et de plus en plus longtemps.

- J'arrive! criai je pour -au moins- la dixième fois.

Quand j'ouvris la porte, les cheveux encore enroulés dans une serviette, je découvris Mélodie et Charlie. Je n'eus même pas le temps de réagir que Charlie entra en me bousculant au passage. Elle paraissait folle de rage. Mélodie semblait plus calme -comme à son habitude, elle s'énervait rarement- et me lança un sourire désolé qui semblait dire : "J'ai essayé de la retenir, je te le jure!". Je refermai la porte derrière elles.

Je sens qu'on va s'éclater! pensai je.

Et le pire, c'est que je ne savais pas quoi leur dire. J'avais envie de tout leur raconter, mais sur le chemin, Jake avait bien insisté sur le fait de ne rien dire. À personne.C'est pourquoi j'inspirai profondément avant d'entrer dans le salon. J'allais devoir mentir à mes deux meilleures amies. Deux personnes qui comptaient énormément pour moi. Je détestais ça. Elles étaient assises chacune à une extrémité du fauteuil rouge en "L" que ma mère aimait tant. Charlie, les bras croisés sur sa poitrine, le dos contre le dossier du fauteuil, fixait un point dans le vide. Ou alors le mur était particulièrement captivant. Si on aurait été dans un dessin animé, de la fumée lui sortirait des oreilles et du nez, tellement elle fulminait. Mélodie, droite comme un "I", triturait la tirette de sa veste. Elle faisait toujours ça quand elle était nerveuse.

- Ta mère n'est pas là?

Charlie avait craché sa phrase comme si ça la dégoutait de m'adresser la parole.

- Charlie...commença Mélodie.

- Non! la coupa-t-elle. Laisse-la se défendre toute seule! Je suis curieuse de savoir quels mensonges elle va encore nous raconter!

Mélodie resta silencieuse mais je vis son visage se décomposé. Elle n'adhérait pas avec la façon de faire de Charlie mais...elle aussi voulait savoir. Elle tourna ses grands yeux verts vers moi.

- Dis nous, Alex.

Je ne pouvais pas leur mentir. Je n'y arriverai pas. Pas à elles.

- Vous avez raison, déclarai je d'un ton neutre. Je vous ai menti.

Elles parurent étonnées que j'avoue ma faute.

- Ma mère ne m'a pas appellé pour rentrer plus tôt. Elle est toujours au travail.

Il y eut un grand blanc. Moment où je compris que j'allais devoir me justifier. Ohhhh...

- Je ... Je ne peux rien vous dire de plus.

Mélodie parut blessée, Charlie encore plus en colère. Elle serra les dents et les poings avant de lâcher:

- Si tu ne nous fais pas assez confiance que pour tout nous dire. Je m'en vais. Je ne veux rien avoir à faire avec toi!

Mon coeur se brisa. Je ne pouvais pas leur dire. Elles me prendraient pour un monstre! Ou pour une folle... Mais je ne voulais pas les perdre.

- Charlie, attends! m'écriai je.

Mais c'était trop tard. J'entendis la porte claquer violemment et comme pour rentre ce geste plus théâtrale, la serviette qui retenait mes cheveux s'écrasa sur le sol. Je me tournai vers Mélodie, toujours assise. Je m'agenouillai devant elle et lui pris les mains.

- M...Mélodie...S'il te plait, ne me laisse pas!

Je balbutiai, dévastée à l'idée d'avoir fait de la peine à deux êtres qui m'étaient chers. Je reniflai, pleurai, je ne pouvais pas accepter de les perdre. Des larmes coulèrent le long des joues de Mélodie. Elle pencha la tête en avant, regardant ses genoux, puis retira ses mains des miennes.

- C'est toi qui nous laisse tomber, pas l'inverse .

Puis elle se leva et partit. Je restai là, comme une idiote. Pour beaucoup de personnes, se serait juste une petite dispute sans importance. Mais pour nous... On ne se disputait jamais. Assise sur le sol, les genoux contre la poitrine, je pleurai jusqu'à épuisement.

***

C'est ma mère qui me réveilla quelques heures plus tard. Elle était rentrée du travail et m'avait trouvé sur le sol, assoupie.Elle me regardait avec inquiétude.

- Alex? Qu'est ce qui ne va pas?

J'émergeai doucement de ma torpeur, encore plus fatiguée que quand je m'étais endormie.

- Je me suis disputée avec Mélodie et Charlie.

- Oh...Je suis désolée. Mais je suis sûre  que vous vous rabibocherez vite, comme à chaque fois!

- Non, murmurai je presque pour moi même. Cette fois, c'est différent.

Ma mère me tendit la main pour m'aider à me relever -j'avais mal aux fesses, à force d'être restée par terre- puis m'essuya les yeux encore humides d'avoir tant pleurer, à l'aide de ses pouces. Ses cheveux étaient détachés et arrivaient un ou deux centimètres au dessus de ses épaules. Elle portait une robe grise et vert citron, sans manches, avec la ceinture et les escarpins assortis.

- Va te changer. Je commande des pizzas. Tu veux quoi?

- Peut importe, répondis je un peu mollement.

J'avais mille et une choses à quoi penser, et le goût de ma pizza n'en faisait certainement pas parti. Je montai les escaliers lentement et mis mon pyjama le plus confortable. Un bas de jogging, un débardeur et un sweet à capuche bleu foncé, trop grand, qui appartenait à mon père. Peut importe à quel point je le détestais, ce pull m'aidait à accepter son absence. C'était un de mes objets fétiches et d'après ma mère, il le portaient tout le temps à l'époque ou ils étaient à la fac. J'allai vers le miroir pour me faire un chignon rapide et négligé. Mon teint pâle et ma mine de cadavre me choquèrent. Je pris mon ordinateur portable et m'installai dans mon lit. Je comptais écrire un message aux filles mais n'arrivais pas à écrire une seule ligne. Je regardais sans bouger, cet emplacement vide qui attendait d'être rempli de regrets et d'excuses. Mais je ne savais pas quoi mettre. Qu'est ce que je pouvais bien dire?

"Je vous ai menti et fais de la peine. Je suis une vraie garce, la pire amie qu'on puisse avoir. Désolée. On est de nouveau meilleures amies?"

Je ne crois pas, non. Pour finir, je refermai mon ordinateur et descendis rejoindre ma mère. J'allai ouvrir au livreur -beaucoup trop jeune pour livrer des pizzas, il devait avoir 14 ans- et après avoir payé, allai m'installer dans le fauteuil près de ma mère. Elle m'avait pris une pizza au fromage de chèvre et pommes. Ma préférée. Mais je n'avais pas faim et ne mangeai qu'un quart de ma pizza. Ma mère et moi restâmes silencieuses pendant tout le diner, mais j'aimais ça. Avec elle, le silence n'était ni gênant ni pesant, mais agréable. Elle me laissait tranquille quand j'en avais besoin, ne m'oppressait pas. Une fois dans ma chambre, je lançai un épisode de Castle sur mon ordinateur. Charlie, Mélodie et moi, on regardait pleins de séries dont Castle, Pretty Little Liars, Once upon a time, Awkward...On se réunissait et faisait une soirée popcorn, séries et délires. Mais ça c'était avant, et quelque chose me disait qu'on aurait plus de soirée comme ça maintenant. Et c'est devant Richard Castle et le lieutenant Kate Beckett, annonçant l'identitée du meurtrier, que j'allai rejoindre les bras de Morphée .

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