Chapitre 22

Les jours s'écoulaient et je n'avais toujours rien fait. Enfin si, j'avais bien fait une chose. Eviter Jake. Je mettais tout en oeuvre pour ne pas tomber sur lui, quitte à prendre mon petit déjeuner plus tard que les autres et à diner plus tôt, pour ne pas le croiser au réfectoire. J'étais restée tout le week-end en compagnie de Balto et Alice, parfois même de Léo. Ce dernier s'était avéré plus sympathique que je ne l'aurais cru. Il pouvait être très drôle et loyal. Mais cela ne l'empêchait pas de me darder de son regard, d'un air accusateur, pour que j'aille parler à Jake.

- Alors c'est fait? m'avait-il demandé.

- No ...

- Fiche lui la paix, elle lui parlera quand elle le voudra! lui avait rétorqué Alice.

Ce scénario se déroulait en moyenne trois fois par jour. C'en était presque insupportable. J'avais aussi dû affronter ma mère, dimanche soir. On peut dire que, quand elle était arrivée à la maison et m'avait découvert avec Balto, elle avait été surprise. Surtout quand elle avait compris que je comptais le garder et que j'avais déjà dépensé toutes mes "économies" pour lui acheter des affaires. J'avais dû avancer des arguments irréfutables pour la convaincre... et encore. Certes elle avait accepté que Balto reste -après des heures de disputes- mais seulement à plusieurs conditions. Nous nous étions mises d'accord: Balto avait une semaine pour faire ces preuves et prouver à ma mère que c'était un "chien" bien élevé. Comme elle pensait que je l'avais trouvé dans la rue, elle était certaine qu'il ferait ses besoins partout et détruirait tout notre mobilier. Heureusement que Balto comprenait tout ce que nous disions et savait se tenir! Je devais aussi assumer seule la charge financière, ce qui ne poserait pas de problèmes, grâce à Greg. Et si jamais un seul problème voyait le jour, se serait direction la fourrière pour Balto. Cependant, je devais avouer que j'étais assez contente de moi. Je ne m'attendais vraiment pas à avoir son autorisation.

Mais aujourd'hui, c'était lundi, et après des heures d'ennuis à l'école, j'avais dû me rendre à l'Institut. J'étais décidé à prendre les choses en mains et à parler avec Jake. J'espérais trouver une solution pour mettre fin à cette querelle incessante.

Assise sur mon lit, j'attendais. Léo avait promis de m'envoyer un sms quand il verrait Jake entrer dans sa chambre. Comme ça, je n'avais plus qu'à aller le retrouver et mettre les choses au clair, et cette fois ci, en toute intimité. Cela me changerait du réfectoire bondé et ce n'était pas plus mal!

- Je peux te poser une question? demandai je à Balto, couché dans son panier.

- Hum, hum, dit il les yeux fermés, la tête entre les pattes.

- Quel est le problème avec ton nom?

Balto ouvrit les yeux et se redressa.

- Comment ça?

- Je ne sais pas, avouai je. Quand je t'ai demandé ton prénom le premier jour, tu ne m'as pas répondu et quand j'ai dis à Greg de t'appeler Balto, il a eut une réaction étrange...

Balto souffla.

- En réalité, je n'ai pas de nom. Les gardiens ne peuvent pas en avoir, c'est interdit.

Je le regardai quelques instants, médusée.

- C'est une blague? C'est quoi cette règle débile?

- Un gardien doit protéger coute que coute son sorcier. Il y a longtemps, une loi a été établie empêchant les gardiens d'avoir un nom. On disait que cela les différenciaient en temps que personne et qu'ils penseraient à eux avant de penser aux gens qu'ils devaient protéger.

Il s'arrêta le temps de reprendre sa respiration.

- Par exemple, lors d'un combat, le gardien ne risquerait pas sa vie pour protéger son sorcier , car il se comporterait comme un être indépendant. 

Je haussai un sourcil.

- Et ils pensent que vous empêcher d'avoir un prénom va résoudre ce problème?

- C'est une vieille loi, Alex! C'est comme ça! Nous sommes des outils, des objets mis à disposition... Nous ne méritons pas d'avoir un nom.

Cette perspective me semblait tellement invraisemblable, tellement cruelle et barbare! J'allais rétorquer, mais mon téléphone vibra. Je compris immédiatement ce qu'il en était: Léo.

- Bon, je dois y aller, dis je en vérifiant mon portable. Souhaite moi bonne chance!

Balto marmonna vaguement quelque chose et se recoucha, définitivement de mauvaise humeur. Je sortis de la chambre et filai à toute allure vers le dortoir des garçons. J'étais de plus en plus stressée , au fur et à mesure que j'approchais. Comptant mes pas pour me calmer, je dévalai les escaliers.

"54 , 55 , 56"

Je passai à coté du réfectoire, pris l'embranchement à ma droite et continuai.

"81 , 82 , 83"

Une fois dans le bon couloir, je vérifiai les numéros de porte jusqu'à tomber sur le bon. Comme convenu, j'envoyais un message à Léo et à Alice, disant que je m'apprêtais à entrer. Puis je rangeai mon téléphone et attendis. Qu'est ce que j'étais censé faire? Juste frapper à la porte? Ou forcer le passage et ouvrir celle-ci sans autorisation? J'avais peur de me faire expulser dès la première minute.

Je me passai une main dans les cheveux et fermai les yeux. J'entendais mon coeur battre à toute vitesse dans ma poitrine. Je me forçai à me détendre , prenant plusieurs grandes inspirations et expirant lentement. Finalement , je me penchai en avant et jetai un oeil dans le trou de la serrure . Je ne voyais pas grand chose, il fallait l'avouer, mais je pouvais quand même distinguer Jake. Il était assis sur son li , la tête entre les mains. Ses cheveux étaient touts ébouriffés, comme s'il venait de se réveiller et il portait un sweat gris et rouge. J'eus un pincement au coeur en le voyant. Je ne m'étais pas rendue compte que Jake me manquait à ce point. Je le contemplai encore quelques instants puis me redressai. L'observer à son insu me semblait extrêmement déplacé et me mettait légèrement mal à l'aise.

La main sur la poignée, j'ouvris la porte en grand, entrai et refermai derrière moi. Jake se leva immédiatement, aussi habile qu'un chat.

- Avant que tu ne dises quoi que se soit, commençai je. Je suis juste venue pour parler. J'ai le droit de venir m'expliquer sans que tu ne m'ordonnes de m'éloigner.

Il ouvrit la bouche mais je continuai.

- Je sais que je t'ai blessé en décidant de quitter l'Institut et je m'en excuse, mais tu n'avais pas à réagir aussi violemment au réfectoire. Et devant tout le monde en plus! Peut être que tu n'as pas compris ma décision de partir, mais tu dois réaliser que j'avais une vie en dehors de tout ça! En dehors de la magie! Tu as débarqué dans ma vie sans me laisser le choix et je...

Ma voix s'enroua à cause de l'émotion et je fis tout pour reprendre mes moyens.

- Je voulais juste avoir une vie normale! Exactement comme avant! Je ne suis pas née dans cette ambiance là! Dans ce monde si dingue ou les gens ont des pouvoirs magiques! Alors quand Greg m'a proposé de retourner chez moi et de mener ma petite vie peinarde, j'ai accepté. Je pensais que si je laissais la magie derrière moi, je n'aurais plus aucun problème mais...

J'allais lui expliquer comment je m'étais fait attaquée par des goules et avais été forcée de rentrer mais il me coupa. Ses yeux projetaient des éclairs et je présageai que ce qu'il allait dire n'allait pas être agréable à entendre.

- Et tes amis.

- Quoi? demandai je d'une voix sur-aigue. Je ne vois pas ce que tu veux dire.

Il fit un grand pas et réduisit la distance qu'il y avait entre nous. Par instinct, je reculai, mais il se rapprocha encore, jusqu'à m'acculer contre le mur.

- En laissant derrière toi la magie, et tes amis.

Les bras croisés contre sa poitrine, il poursuivit.

- Je peux comprendre que tu ne veuilles pas de ça, dit il en englobant la pièce avec sa main. Que la magie t'effraye ou ne t'intéresse pas. Je peux comprendre que tu ais décidé de partir. Mais ce que je n'admets pas, c'est que tu nous ais laissé tombés, nous! Rien ne t'empêchait de nous contacter! Tu aurais pu nous appeler ou demander à nous voir, Alice et moi. Mais tu n'as rien fait. Tu ne nous as donné aucune nouvelle.

Devant mon air ébahie, il se tût.

- Oh mon dieu, dis je, les mains sur le visage. Je n'arrive pas à y croire.

Les larmes qui me brulaient les yeux depuis quelques instants décidèrent de s'échapper et roulèrent sur mes joues.

- Je n'arrive pas à y croire, répétai je. Tu me connais donc si mal?

Jake qui était jusqu'il y a quelques secondes furieux parut déstabilisé. Il sembla même s'adoucir.

- Tu penses vraiment que je ne t'aurais donné aucune nouvelle, si cela avait dépendu de moi ? Si j'avais eu le choix?

Devant son silence, j'explosai. J'étais furieuse. Furieuse qu'il n'ait pas confiance en moi, furieuse qu'il me reprochait quelque chose d'aussi stupide.

- C'est Greg qui m'a interdit de vous revoir! Greg qui m'a interdit de vous parler, de vous téléphoner ou encore de vous contacter! Plus de magie, plus de "toi"! C'était les termes du contrat! J'ai été obligée de vous laisser!

Je reniflai et secouai la tête de gauche à droite. Mes mains tremblaient et ma vue se brouillait. J'étais juste tellement en colère...

- Par contre, il ne me semble pas que Greg t'ait donné les même restrictions . Tu aurais pu essayer de me joindre mais tu n'as rien fait.

Je vis le visage de Jake devenir effaré, presque coupable.

- Donc c'est à toi même que tu dois en vouloir. Tu es le seul responsable si nous ne nous somme pas vus durant ces trois dernières semaines.

Je me dégageai et sortis de sa chambre aussi rapidement que je le pouvais. J'entendis Jake me suivre dans le couloir mais n'y fis pas attention.

- Alex , attends!

Je sentis sa main s'enrouler autour de mon bras et me retournai en essayant de me dégager.

- Lâche moi! Tu voulais que je te laisse tranquille, et bien, c'est ce que je vais faire! Alors ne m'adresse plus la parole!

- J'ai merdé, je sais! Mais tu ne peux pas tout me remettre sur le dos. Nous avons tous les deux une part de responsabilité.

- Sauf que quand je suis arrivée à l'Institut, j'étais contente à l'idée de te revoir! Je ne t'ai pas renier parce que tu ne m'avais pas téléphoné, contrairement à toi!

Jake me lâcha le bras et j'en profitai pour m'éloigner.

- Je pense que tu avais raison, dis je d'une voix plus calme. Nous devrions arrêter de nous voir. Tu vis ta vie et je vis la mienne, un point c'est tout.

Plusieurs émotions se succédèrent sur le visage de Jake: l'étonnement, la douleur  l'incompréhension et enfin la colère.

- Parfait! cracha-t-il.

- Parfait! rétorquai je alors qu'il s'éloignait vers sa chambre.

- Parfait! répéta-il.

Je sursautai quand la porte de sa chambre claqua. Jake et moi, c'était définitivement terminé. Et tout ça à cause d'un malentendu.

Debout, tout seule, dans le couloir désert, je frissonnai.

- Parfait, dis je une dernière fois.

Puis je partis du couloir, en pleurs.


Voilà ! C'est un petit chapitre , je sais , je suis désolée ! Encore un ou deux chapitre avant l'évènement spécial ! J'ai hâte ! Bientôt , beaucoup de réponses et de révélations seront apportées à l'histoire ... J'espère que vous avez aimé , si oui votez et commentez ! Merci pour tout et bisous :)

ENJOY & XOXO ;)




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