Chapitre I4 | Partie 2

19h28.

Le gymnase parait à la fois immense et très renfermé. La réunion d'information s'éternise... Déjà une heure et demie qu'Eliot attend, assit dans un coin, presque à l'abri des regards des autres élèves et leurs parents. Sa mère est venue, aussi.

Elle estimait important d'être au courant des projets du lycée et de suivre l'avancée des travaux de rénovation. Ray, lui, n'est pas sûr que ce soit indispensable. En plus, la faim tord son estomac et les gargouillements font un vrai vacarme.

Il aurait peut-être dû manger un morceau à Midi, plutôt que d'affronter le regard de son ennemi dans les toilettes.

Une vague de frissons le parcourt à cette idée.

Il a été stupide.

Et manipulé.

Mais surtout stupide.

Il fût tiré de ses pensées par le claquement des talons de sa mère, avançant en sa direction. Il tenta de tourner la tête pour éviter toute conversation avec elle.

Échec.

- Eli' chéri, la réunion se termine bientôt. Je vais aller poser quelques questions à ton professeur principal, je trouve que tes résultats ont baissés un peu... Tu veux venir ?

Ray sourit, l'air vide.

- Sérieusement ?

Elle pose une main sur son genou et se met à son niveau.

- Ça doit être à cause de la «période» pendant laquelle tu n'étais plus...

- C'est bon. J'ai compris. (Il soupire). Écoute, vas le voir, pose-lui toutes les questions que tu veux, et je m'en sortirais très bien en t'attendant ici. J'bouge pas.

- Promis ?

- Ouais, promis.

- D'accord. Je n'en ai pas pour longtemps. Vas manger un bout, j'ai repéré des petits éclairs au chocolat sur le buffet, termina-t-elle avec un clin d'œil.

Étonnamment, elle déposa un tendre baiser sur son front, qu'Eliot ne refusa pas, et elle lui tourna le dos, faisant à nouveau claquer ses talons.

En fait... Eliot avait besoin de se souvenir que certaines personnes étaient encore là pour lui. Et ça faisait du bien. Savoir que, quelque part, quelqu'un se soucie encore de vous. C'est une drôle de sensation, qui apporte un peu de chaleur à l'estomac et...

- Hey ! Mon pote hyper out préféré !

... Et Artaban vient encore une fois perturbé la tranquillité du châtain.

- Salut le nouveau... Se força-t-il.

En son fort intérieur, il pria de tout son cœur pour que l'auburn fasse demi-tour et ne s'asseye surtout pas à côté de lui.

Je vous laisse deviner la suite ?

- Comment tu vas ? S'empressa de demander Artaban en se laissant tomber sur le sol.

- Je... Je ne suis pas «hyper out». Je suis juste... Genre... Out.

- Est-ce que ta famille le sait ? Questionna l'Auburn.

- Est-ce que ça te regarde ? Voici ce dont l'adolescent mourrait d'envie de répondre.

Mais il se contenta juste de lui dire que c'était un peu intime comme question, et, Artaban, se sentant peut-être de trop, le salua avant de s'éclipser vers le buffet.

Eliot le suivi du regard et il tomba, avec une immense surprise, sur les deux yeux bleus glacés du Traitre Norvégien. Le châtain manqua de s'étouffer avec sa salive. Il détourna rapidement son attention mais, à chaque fois que ses pupilles repassaient, par pur hasard, en direction du buffet, il se retrouvait à soutenir le regard de ce faux Russe qui le fixait intensément.

Cet idiot sirotait un verre de je-ne-sais-pas-quoi-mais-ça-à-l'air-orange et était totalement déstabilisant.

Au loin, un grand gars chétif se rendit compte de cet échange, qui ne semblait pas lui plaire. Il se leva et s'avança en direction du buffet.

*** Sergeï ***

Finn.

Est-il entrain de rêver ou est-ce bien cet imbécile qui s'approche dangereusement de lui ?

Il ne rêve pas. Et le grand adolescent vient volontairement heurter sa proie, qui renverse quelques gouttes de Punch sur le sol.

- Tu veux que je te rappelle comment ça s'est terminé la dernière fois qu'on s'est retrouvés près d'un buffet ? Ironisa Sergeï, agacé, en secouant sa main mouillée par le cocktail.

Dos à lui, faisant mine de se servir de chips, Finn ignore sa provocation mais rétorque :

- Ne t'approche pas d'Eliot.

Sergeï sourit.

Comme à son habitude.

- Je ne l'ai pas approché depuis aussi longtemps que toi.

Le poing de Finn se resserre.

Il inspire grandement et relâche ses épaules.

Alors qu'il s'apprête à renchérir, le Norvégien le coupe :

- Plus tu le surprotège, plus il s'éloigne de toi.

Un coup de poing dans le cœur de Monsieur Corset.

- C'est faux.

Il garde la tête froide et se retourne.

Les voilà tous les deux, côtes-à-côtes, la tête dans la direction de leur sujet de conversation. Le Russe ne l'a toujours pas lâché du regard, comme s'il ne voulait pas perdre une miette de ses actions.

Tour à tour, ils font mine de boire, parfois de manger, pour rendre invisible leur conversation.

Mais ils savent très bien qu'Eliot ne rate rien de ce qui se passe, bien qu'il fasse mine de ne pas les apercevoir.

- Tu n'es pas son père. Rajoute Sergeï.

- Et je ne te laisserai pas devenir le connard qui brisera son cœur. Affirme Corset avec un air de défi.

L'autre pose une main sur son épaule et le rassure :

- Je le hais, il me déteste, tout va bien dans le meilleur des mondes. La terre a retrouvé son sens de rotation. C'est tout.

Le Norvégien boit cul-sec les gorgées de jus qu'il lui reste et pose brusquement son verre vide sur le buffet.

Il tape dans le dos de son adversaire et s'éloigne, décidé.

*** Eliot ***

Il se rapproche d'Eliot. Vraiment. C'est bel et bien vers lui qu'il va.

Sergeï passe devant lui, s'attarde une seconde, et déclare :

- Viens, on s'casse.

Bug intergalactique.

Un orchestre et une fanfare se battent en duel dans la cage thoracique du plus jeune.

Il bafouille et est prit de bouffées de chaleur.

- On... Faire quoi ?

Ce n'est pas ce qu'il aurait espérer dire, mais c'est la seule chose que ses lèvres ont put articuler.

Sergeï plonge son regard grisant dans le sien.

- Tirer des plans sur la comète.

Et, avec un haussement d'épaules, il reprend sa marche.

Affolé, Eliot se lève. Il voit Finn au loin qui fronce les sourcils et lui fait signe de la main. Mais c'est plus fort que lui. Ray suit son instinct.

Il suit Sergeï.

Il emprunte, à coup sûr, un mauvais chemin...

Les deux indécis passent la porte du gymnase qui mène à une petite ruelle où sont stockés les containers.

Et ils restent là. Et c'est tout.

Grelotant presque dans son simple t-shirt «You're a Muggle», Eliot trouve le courage de faire face à Mister_Blue, et croise ses bras sur sa poitrine pour se réchauffer.

- Donc, tu avais tant de choses à me dire ? Se plaint-il.

L'autre soupire en fixant le sol pavé.

- Attends, je réfléchis. T'es pressé ? Le rembarra le Norvégien avec une pointe d'amertume dans la voix.

- Oui ! Je suis gelé et ma mère m'attend, Monsieur Ivanov ! Aboya Eliot en écartant les bras.

Silence.

Sergeï retire son sweat.

Au passage cela soulève légèrement son t-shirt et, en un éclair, le plus jeune put apercevoir, une nouvelle fois, une ligne d'abdos.

- Tiens.

Il tend son sweat.

- Non. Merci. Articula Eliot entre deux claquements de dents.

Sergeï avança d'un pas, les rendant peut-être un peu trop proches, et déposa son habit sur les épaules du châtain. Cette proximité déstabilise Eliot qui recule tant bien que mal, appréciant tout de même la chaleur dégagée par cette couche de tissus supplémentaire.

- Tu fais tout de travers... Murmura-t-il.

- Je suis désolé.

- Ça ne sert à rien d'être désolé. T'as déjà vu un problème se régler miraculeusement parce-que quelqu'un était désolé ? Moi non. Je ne sais pas à quoi tu joues. Je ne sais pas quel genre d'enfoiré égoïste et manipulateur tu es, mais ça ne me plais pas du tout et ça me dérange beaucoup. Se libéra Eliot.

Ils inspirent à l'unisson.

Eliot 1. Sergeï 0.

- C'était mon ex.

Eliot fronce les sourcils. De quoi parlait-il ?

Puis, oh... L'image de ce matin lui revint.

Il recule.

- Je m'en tape.

- Laisse-moi finir. Gronda le plus âgé en réajustant son bandana.

Puis il s'ouvrit à Eliot. Incapable de se décider à classer ça dans la catégorie «mensonge» ou «vérité», celui-ci se contenta d'écouter silencieusement.

- J'ai essayé de sortir avec des filles. Pour voir si ça pouvait me... «Guérir». Mais je cassais toujours après notre premier rapport. C'était pas... Moi. Et, je m'en veux.

Le vent s'engouffre dans la ruelle et ricoche sur les pavés.

- T'étais jaloux, ce matin ? Demanda-t-il.

Les joues d'Eli s'empourprèrent.

- Non. Mais j'ai au moins retenu que j'étais «dégueu» et que même si on te payait, tu ne passerais pas une nuit avec moi et...

Sergeï l'attrape par le col et l'embrasse.

Instinctivement, Ray le repousse et se défait de son contact.

Pourtant, le regard brûlant de désir du blond et son silence le rappellent à l'ordre comme un aimant.

Le plaquant contre le mur, Eliot cherche le contact avec ses lèvres et il le laisse caresser sa bouche. Leurs langues se cherchent et leurs corps s'entremêlent. C'est un baiser passionné comme il n'en avait jamais vécu. Il ne savait pas qu'une éternité pouvait se vivre juste en embrassant quelqu'un. L'une des mains du plus âgé se perd dans sa tignasse tandis que l'autre s'attarde sur le bas de son dos.

Sergeï pli son genou qui entre en contact avec l'entrejambe d'Eliot.

Là, c'est certain, il ne va pas tarder à bientôt avoir la gaule, si ce n'est pas déjà le cas. Il s'écarte violemment et les voilà qui reprennent leur souffle.

- Arrête... De me manipuler... Parvint à articuler le châtain.

Il prend une grande respiration.

- Je dois rentrer.

Son visage est rouge, il le sent, et il transpire. Ses doigts attrapent le sweat qui repose sur ses épaules et il le balance à son rival qui l'attrape au vol.

- Attends. Ok Eliot, plus jamais je ne te ferai du mal. C'était pour me protéger, moi.

Eliot fronce les sourcils.

- Trop facile. Ne me dis pas que tu fais ça par soucis d'éthique parce que je ne te croirais.

Sergeï ajusta sa tenue et sa coiffure, lentement, puis répondis en lui tendant son petit doigt :

- Je te le promets.

Mais Eliot ne lui donna pas ce qu'il attendait. A la place, il tourna les talons et déclara, avant de retourner dans le gymnase :

- Tu ne m'auras pas. Plus jamais.

La porte claque.

- C'est ce qu'on verra... Chuchota Sergeï pour lui-même, en remettant son sweat.

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