Chapitre 8.

Eliot attendait derrière la porte. Il était dix-huit heures et un petit vent frais vint caresser sa nuque. Il frissonna.

- Entre mon p'tit loup, c'est ouvert ! S'écria la voix lointaine de Finn à pleins poumons.

- Pourquoi tu hurles ? Soupira Paola Corset, la petite sœur de l'adolescent, en levant les yeux au ciel.

Eliot observa attentivement la poignée de la porte d'entrée qui tourna jusqu'à ce que celle-ci s'ouvre et qu'il puisse apercevoir la chevelure châtain et lisse de Paola. Elle avait deux ans de moins que lui mais tout d'une femme. Sa poitrine était déjà assez généreuse et ses jambes, pour son âge, musclées comme celle d'une jeune adulte.

Elle lui sourit de toutes ses dents et l'invita à entrer.

- Mon idiot de grand frère, qui, au passage, te sers de meilleur ami, on ne sait pourquoi... Est dans la cuisine. Lança-t-elle accompagné d'un sourire taquin, sans même le saluer.

L'adolescent au chignon se contenta de hocher la tête. Il n'était pas à l'aise avec les filles. D'ailleurs, il ne l'était pas non plus avec les garçons. Il avait eu une copine, une fois, mais ça n'avait pas fonctionné, puisqu'il renvoyait l'image de quelqu'un qui s'en moque. Et, au fond, il le savait, c'était bien le cas.

Les filles n'ont rien d'attirant.

C'est tout.

Puis, ce sont des idiotes, pour la plupart.

Le châtain haussa les épaules, comme s'il venait de conclure une conversation avec lui-même, et se dirigea vers la cuisine.

Finn était de dos, face au plan de travail, profondément occupé à...

A quoi, au fait ?

- Finn ? S'étonna Eliot. C'est un ananas que tu as dans les mains ?

- Parfaitement ! Renvoya l'adolescent épais comme une rampe de métro sans même se retourner.

- Un ananas ?

- Un ananas.

Eliot tira une chaise, se gratta le front et, avant qu'il ne puisse reprendre, son ami le devança :

- Je me suis dis que ça passerait mieux si j'amenais à manger à la soirée d'Amanda.

Il marqua une pause, ouvrit la porte du four, et, alors qu'une odeur nauséabonde s'en échappait, il poursuivit :

- J'ai voulu faire un gâteau, mais comme tu peux le voir... Je l'ai brulé. Du coup, il me restait plus que... Plus qu'un ananas. C'est mon plan B. Dit-il avec un ton presque gêné qui laissa apparaitre un air moqueur sur le visage d'Eliot.

Eliot ne fit pas de commentaire. En temps normal, il aurait rit aux éclats et se serait foutu de lui pendant des jours, des semaines, voir, des années.

Mais ce ne fût pas le cas. Loin de là. Il était encore perturbé par l'évènement qui remontait à seulement quelques heures. C'était comme si sa poitrine entière s'était faite écrasée par un semi-remorque. Il essayait d'oublier, de ne pas y penser...

Mais personne n'aurait pu lutter. Ces pensées se tournèrent un instant vers Dallas. Est-ce que lui reposait en paix ? Avait-il vu la scène ?

Eliot aurait aimé qu'il veille sur lui.

Ou que n'importe qui d'autre veille sur lui. Que quelqu'un tienne à lui plus qu'à quoi que ce soit au monde. Mais ce n'était sûrement pas le cas. Il connaissait l'amitié. Mais pas l'amour. Même pas celui qui nait dans les familles et nous aide à grandir. Non... Il n'était entouré que de conflits, de secrets et d'une ambiance toujours plus noire, ténébreuse...

- Tu m'écoutes ? Demanda Finn très proche de lui, un sourcil arqué, le sortant de ses rêveries. T'as l'air carrément ailleurs en ce moment... Je te reconnais plus Eli'. Soupira-t-il.

Il prit le chemin des escaliers sans s'assurer que son ami lui emboite le pas.

- Dépêche-toi, on doit se préparer si on veut arriver à l'heure ! Rappela-t-il en parlant assez fort.

- Personne n'arrive à une soirée à dix-neuf heures... Le remballa Eli, peu enthousiaste à l'idée d'être seul au milieu d'adolescents en rut, bourrés, qui vomissent sur leurs propres chaussures pendant que son meilleur ami ferait office de chien-chien avec Amanda.

Puis, dès qu'Eliot arriva à son niveau, Finn l'ignora, rajoutant à voix basse, un premier pas sur la marche :

- Et en plus on doit se taper Paola qui a insisté pour venir...

- Cool, elle pourra s'amuser. Se contenta de répondre le châtain.

Il aimait bien la relation qu'il y avait dans cette famille, ça puait l'amour et la bonne enfance. Parfois, il les enviait un peu, c'est vrai.

- Tu garderas un œil sur elle. Assura Finn.

Et, sans poursuivre la conversation, ils arrivèrent dans la chambre qu'Eliot connaissait si bien.

D'années en années, pratiquement rien ne changeait.

- Dommage qu'Andy ne puisse pas venir... Pensa Eliot à haute voix en s'asseyant sur le lit rouge.

- Il ne voulait pas venir, nuance. Répondit Finn en ouvrant son armoire.

Eliot fronça les sourcils.

- Peu importe. Eli', t'es comme mon frère, on a grandi ensemble. Tu sais que tu peux tout me dire... Si t'as besoin, je suis là. Toujours.

- Merci... Dit Eliot à voix basse, comme pour lui-même.

Il sentit une vague de frissons froids lui parcourir l'échine. Il rêvait de pouvoir parler, surtout avec ses amis, de pouvoir tout lâcher et tout expliquer, sans mensonges, depuis le début. Il avait déjà hésité plusieurs fois, mais avait renoncé.

C'était une trop grosse responsabilité.

Finn sortit sa tenue la plus classe, un jean et une chemise, et tendit pratiquement la même chose à Eliot, qui détourna le regard.

- Tu crois quand même pas que je vais te laisser y aller comme ça ? Mets ce jean troué, ça t'iras comme un gant.

Comme à son habitude, le plus grand n'insistait jamais auprès de son ami. Il respectait toujours ses choix et comprenait quand il ne voulait pas s'exprimer, même si, il le savait parfaitement, il en avait besoin.

- Et tu détacheras tes cheveux, ils doivent être bien bouclés depuis le temps que tu portes ce chignon. Ajouta-t-il en se changeant.

Lorsqu'il enleva son pantalon, Eliot rougit et se sentit extrêmement mal-à-l'aise. Si Finn n'avait pas été un «ignorant», il l'aurait été aussi, à coup sûr. L'adolescent ne pût s'empêcher de contempler, du moins, observer, son corps. C'est fou comme il avait changé.

Il avait devant lui un homme. Pas musclé comme un Dieu, mais aux épaules carrées.

A côté de lui, Eliot trouvait qu'il avait encore un corps de petit collégien. Ce n'était pas le cas, mais c'était l'impression que son miroir lui renvoyait. Un corps cadavéreux de collégien, un pantin de bois...

D'ailleurs, «Mister_Blue» l'aurait sûrement trouvé ridicule. Puis, à son propos, Eliot savait qu'il s'était trompé. Ce n'était pas le bon banc. C'était sûr à 100%. Il avait retourné ce souvenir dans son esprit toute la journée et était arrivé à cette conclusion, assez solide à son goût. Sur le chemin du retour, il avait bien regardé, et les bancs étaient tous délavés, presque blancs/beige pourri.

Plus tard, ils étaient fin-prêts. Ils attendirent Paola un petit moment, qui paraissait être une éternité. Elle était arrivée avec une robe noire assez moulante à paillettes que les garçons ne trouvèrent pas du tout à leur goût, sans compter les kilos de maquillage qu'elle avait tartiné sur son visage.

- En route ! Lança-t-elle en ouvrant la porte telle une star de cinéma, les deux garçons sur les talons.

Dans la voiture, un rire raisonna...

- Finn... Ha ha... Tu as... Tu as oublié ton ananas ! S'exclama Paola, les yeux humides, en éclatant de rire.

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Hey :) voilà pour la reprise, avec un chapitre assez court histoire de vous remettre dans le bain doucement. Je ne vous dévoile rien, mais, surprise, le chapitre suivant sera du point de vu de Mister_Blue :p

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