Chapitre 232
Taehyung chante sa partie et je reconnais exactement le moment où je dois m'élancer sur scène.
Trébuche pas Charlie, trébuche pas.
Bon, ça c'est réussi, je me place correctement aux côtés des autres. La musique résonne dans mon oreillette par-dessus le bruit émis par le public à mon arrivée. Des hurlements m'accompagnent lorsque je commence à chanter, et je suis heureuse d'entendre les fans prendre part à mes lignes, soutenir ma voix avec les leurs qui ne forment qu'une seule et parfaite harmonie. Mon cœur se gonfle d'une fierté merveilleuse et je peine à me retenir de sourire trop largement, ça n'irait pas vraiment avec cette ambiance douce mais énergique de la chanson. Mon immense sourire, je dois le garder pour ma deuxième chorée.
Le stress s'envole complètement, remplacé par le bonheur et l'adrénaline. Je m'éclate, lance des regards aux spectateurs qui forment des cœurs avec leurs doigts ou leurs bras et quand je jette un bref regard à Jungkook à côté de moi, il me répond d'un sourire encourageant.
Ce moment passe bien trop vite à mon goût et quand la chanson s'achève et que je dois partir de scène rapidement car les garçons enchaînent avec la deuxième chanson, j'ai le cœur qui bat la chamade au point que ça me fait mal, mais je suis si excitée par cette ambiance que je n'ai qu'une envie : y retourner !
« Aly c'est trop top là-haut ! »
Je saute dans les bras de ma petite sœur sans hésiter, et je dois être un peu brutale parce que je crois qu'elle manque de s'écrouler vers l'arrière dans les secondes qui suivent, mais je n'y peux rien, c'est si fort ! En fait, le stress et la peur ne sont là que tant que je ne suis pas sur la scène, car une fois que je m'y trouve, tout s'envole. J'ai toujours voulu faire partager ma musique, mes œuvres, et plus encore depuis que ces œuvres ne sont plus seulement de moi, mais des BTS et moi.
Ça me touche réellement que ces chansons puissent plaire, car chacune a été écrite de façon sincère, je suis fière des trois. Même si elles sont toutes trois différentes de ce que je voulais écrire à l'origine, de ce que j'imaginais, je les trouve vraiment bien, mieux même que ce que j'avais espéré, surtout la troisième que l'on peut lire d'une grande multiplicité de façons. Moi, je la lis comme un au revoir à ce groupe qui m'aura porté jusqu'au sommet, et c'est avec cette idée en tête que j'ai écrit.
« Je suis fière de toi ma Charlie ! s'exclame-t-elle tandis que je me cache dans un recoin pour changer rapidement de t-shirt et remettre ensuite correctement mon micro. T'y retournes dans combien de temps ?
- Environ une minute maintenant, j'interviens au milieu de la chanson, pas à la fin.
- Alors sois prête à enchaîner, je te regarde, je suis derrière toi à t'encourager. »
Je passe rapidement ma main dans les longs cheveux d'Aly et dépose un rapide baiser sur son front avant d'aller de nouveau me poster près de l'escalier latéral qui mène à la scène principale. Le staff a beau passer, stresser, hurler mille et une instructions, je suis dans ma bulle, et même cette ruche ne pourra pas m'en sortir. Mes tympans vibrent au rythme euphorique de ma deuxième chanson et mon oreillette me retransmet tout en direct tandis que depuis le sommet de l'escalier, cachée par un écran géant, je surveille les garçons. Ils affichent tous un immense sourire et je n'ai qu'une hâte, les rejoindre.
Ça y est, c'est à moi ! J'arrive avec un sourire que je ne dissimule plus auprès du groupe et dès lors, c'est une tornade de bonne humeur qui s'élève. Les garçons ont retiré leur veste pour montrer un t-shirt coloré, comme lors du dernier concert. Ainsi, nous sommes tous parfaitement accordés. Mon passage avec Jimin se passe au mieux et fait hurler les fans qui rêveraient d'être à ma place.
Pendant mon grand écart, je regarde les fans et passe sensuellement ma langue sur ma lèvre supérieure, les mains plaquées sur la scène (ce qui me pousse à me pencher un peu vers l'avant), avant de relever légèrement les bras pour sentir Jimin me relever avec force et grâce. Je me laisse faire, faisant un bref mouvement des gens qui donne l'impression que je marche dans les airs juste avant qu'il ne me repose devant lui.
La foule hurle, je crois que j'ai finalement vraiment réussi à m'approprier ces chorégraphies. Tous ces mouvements, je n'y réfléchis même plus, je laisse mon corps s'exprimer à ma place et quand je danse, c'est fluide, c'est beau, c'est bien, c'est comme ça que j'ai toujours rêvé de danser ! À la fin de ma trentaine de seconde de chanson, je laisse un rire m'échapper, qui rend bien avec les paroles que je prononce à ce moment-là.
Je passe à l'arrière de la chorée et en profite pour quitter la scène juste après un ou deux mouvements de plus, de façon à rester assez discrète, comme ça c'est Suga qui a toute l'attention sur lui, placé tout devant dans la chorée, et moi je n'ai pas l'air trop con à m'enfuir comme une voleuse.
La prochaine chanson, c'est la troisième. Je m'habille d'un t-shirt rouge sombre et on m'apporte une bouteille d'eau. Un technicien en profite pour raccrocher correctement mon micro qui bougeait un peu à la fin de ma prestation. Tout se passe vraiment trop vite depuis dix minutes, j'ai du mal à suivre, je me sens dans un autre monde fat de cris hystériques, de joie et de fierté. Si mon cœur avait pu déserter ma poitrine, il l'aurait fait, pas de chance j'en ai encore besoin pendant quelques minutes.
Aly vient s'asseoir à mes côtés, au pied des marches, et m'offre un regard heureux.
« Plus qu'une dernière performance. »
Mais qu'est-ce qu'elle est bête ma sœur.
Ça, ça s'appelle l'ascenseur émotionnel : j'étais heureuse, fière de moi, un peu fatiguée certes mais ça n'allait pas faire disparaître mon sourire, et là, Aly me balance ça comme ça, au calme. Mon visage se décompose, mon cœur aussi je crois bien, car au lieu de se gonfler de fierté, il se tord de douleur.
Ça fait mal.
J'essaie de cacher ça et acquiesce avec mon beau sourire qui sonne désormais étrangement faux, et c'est à ce moment-là qu'Aly se rend compte de son erreur. Elle ne sait pas trop quoi dire, mais la main réconfortante qu'elle pose sur mon épaule me fait comprendre qu'elle me soutient.
Toute cette adrénaline rend mes sentiments beaucoup plus forts et j'ai vraiment l'impression que je vais fondre en larmes d'un moment à l'autre, j'en ai tous les syndromes : nez qui pique, gorge qui se noue, larmes aux yeux que je refuse de laisser couler.
Et en plus je vais chanter une chanson d'adieux, c'est si approprié.
Bon, qu'on s'accorde tous sur une chose : en plein milieu de la scène, d'ici environ trois minutes, je vais éclater en sanglots devant plusieurs milliers de personnes qui se feront une joie de filmer ça et de le poster sur internet.
J'aime les réseaux sociaux.
J'aime aussi l'ironie.
Les garçons font une très courte pause entre les deux chansons, mais ils descendent à l'aide d'une trappe mécanique sous la scène alors je ne les vois pas : ils doivent simplement changer de t-shirt pour être coordonnés à moi, et ils vont aussi sûrement en profiter pour boire un coup d'eau.
« Charlie, regarde ! »
Je tourne mon attention vers l'écran que me désigne Aly et qui retransmet en direct ce que les caméras filment dans la salle. À part la foule qui hurle, il n'y a que les écrans géants qui diffusent...
Qui diffusent des photos prises par les garçons et moi, celles qui ont été postées sur les réseaux sociaux. Une ligne du même rouge que celui de mon t-shirt passe de photo en photo, obscurcissant chacune d'elle tour à tour sur son passage, comme pour symboliser le temps qui s'écoule. Il n'y a que deux ou trois images par écran, mais quand cette ligne rougeâtre quitte un écran pour aller sur un autre, les photos du premier écran changent. Les clichés sont de plus en plus récents, il y a même quelques vidéos sans le son.
Je reste abasourdie, tout mon corps se met à trembler en dépit de mes efforts pour me contenir.
« On peut m'apporter un mouchoir s'il vous plaît ? lancé-je au staff sans quitter l'écran des yeux. Je sens que je vais chialer comme une merde sur scène, et j'en connais un qui me tuerait si mon maquillage en venait à s'abîmer. »
Un assistant file immédiatement chercher ce que je demande et j'entends les ARMY scander mon surnom, ça me touche énormément. Quand le jeune garçon revient, il a un paquet de mouchoirs entier ; il a bien raison, je vais fondre en larmes, mieux vaut prévoir large. Déjà que là, je crois que je n'arrive à me retenir que parce que mon cœur a cessé complètement de battre tant je reste sous le choc de ce diaporama... D'un côté on avouera que c'est quand même ultra violent de me foutre face à ça, et d'un autre côté, je trouve que c'est un hommage magnifique à ces moments inoubliables que j'ai passés auprès du groupe.
Pleure pas Charlie, pense à un chat qui se casse la gueule... Ah c'est drôle un peu, quand même.
Allez, courage.
Le temps s'arrête, les garçons remontent sur scène, la musique retentit sur l'écran que je regarde et dans mon oreillette. Je sens mes lèvres et plus généralement tout mon corps trembler. Ça doit bien se finir, je ne dois pas pleurer pendant la chorée, je dois au moins attendre la fin de la chanson... la fin du concert... la fin du séjour et du rêve.
Charlie, tu penses de façon négative là...
Oh putain ça en fait des fins au même moment.
Pitié, que cette chanson ne se termine jamais, je ne veux pas partir, je ne veux pas les quitter, eux. La musique m'importe peu, je n'ai pas envie d'être une star mondiale je m'en moque, je veux simplement être heureuse, je veux simplement avoir le droit d'aimer Taehyung sans être emmerdée par des règles risibles !
Un soupir m'échappe, on m'indique que je monte dans très exactement une minute. Je me redresse et lève les yeux non plus sur l'écran face à moi mais sur la scène derrière moi. Les garçons exécutent à la perfection la danse, et cette fois-ci, que ce soit dans leur voix, leur intonation, ou bien la façon de faire leurs mouvements, un sentiment domine : la peine. Jimin a les yeux brillants, j'ai l'impression que mon meilleur ami va littéralement fondre en larmes et j'ai juste envie d'aller le prendre dans mes bras. Je suis quelqu'un de très émotif, voir quelqu'un pleurer me donne envie d'en faire autant, et histoire d'être sûre de ne pas craquer sur scène en pleine performance, je laisse d'emblée s'échapper quelques larmes alors que mon cœur se contracte douloureusement, cognant par mégarde contre mes côtes.
Quelques sanglots secouent mon corps qui tremblait déjà, et je commence déjà à devoir utiliser les mouchoirs, tapotant délicatement le coin de mes yeux avec, vérifiant ensuite que je n'enlève pas de maquillage par la même occasion.
Non, de ce point de vue là tout va bien.
« Courage, ça va bien se passer, j'en suis sûre. »
J'acquiesce faiblement aux propos d'Aly et souffle un bon coup pour essayer de garder contenance. Je monte les quelques marches qui me séparent de la scène et lance un dernier regard à ma sœur. Aly est retournée, dos à moi, la tête plongée dans ses mains, et jusqu'ici je peux entendre ses pleurs déchirants. Et après c'est elle qui fait la forte.
Heureusement que le moment de monter arrive, car une seconde de plus et c'était crise de larmes assurée pour moi aussi. Au moins, je ne vais pas avoir de mal pour entrer dans l'émotion de la chanson, j'y suis déjà totalement, les yeux brillants de larmes qui ne demandent qu'à s'en échapper et le cœur pris dans un étau d'appréhension.
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