Chapitre 197

« Charlie c'est quoi tous ces tweets ? »

L'air à la fois accusateur et amusé, RM me tend son portable : son fil d'actualité Twitter est rempli de mes conneries. Moi ça me fait bien rire, lui un peu moins visiblement. J'y peux rien moi si Nam n'a pas d'humour. C'est cool quoi, en plus de quelques photos, j'ai posté des paroles totalement random dont j'avais eu l'idée un jour ou l'autre, et j'ai retweeté quelques messages de mes abonnés ainsi que des tweets dans lesquels je suis citée et qui me disent quelques adorables gentillesses.

Rien de bien méchant en somme, ce n'est pas comme si j'avais fait une vraie connerie.

« Bah c'est cool non ? Je communique avec les fans, je trouve ça normal de les remercier.

- En passant près de quatre heures sur Twitter ?

- C'est bien la moindre des choses, non ? Et puis t'as vu à quel point ceux à qui je répondais étaient heureux ? C'est génial de pouvoir faire plaisir à ce point !

- Oui mais n'en fais pas trop non plus : plus tu en fais, plus ils en attendent de toi.

- T'inquiète Nam, c'est juste Twitter, y a pas de mal !

- D'acc, je te fais confiance. Prête pour le dance practice ? »

J'acquiesce : pendant ma longue promenade sur Twitter, j'ai eu l'occasion d'avoir bien sûr quelques minutes de libres, que j'ai utilisées en allant me changer. J'ai voulu mettre des vêtements sobres : un t-shirt long marron foncé avec quelques motifs blancs et un jean noir très banal. Je me sens bien dedans et je sais d'emblée que je n'aurais pas de mal à danser avec. Je chausse mes converses (comme d'habitude... quelle idée aussi de n'amener qu'une paire de chaussures pour un voyage d'un mois) et retrouve comme à l'accoutumée le groupe dans le couloir, en train de discuter avec Aly et Samna.

Tout passe trop vite.

J'ai à peine le temps de saluer mon ancienne professeure particulière que déjà elle doit s'en aller, apparemment sa mère a quelques difficultés avec Minho qui aurait attrapé un petit rhume et demande sa maman. C'est tellement chou à cet âge-là.

Nous nous rendons en salle de danse, Aly avec son matériel de dessin, comme à son habitude. Je lui ai déjà demandé, il y a quelques mois de cela, pourquoi les dessins la passionnaient à ce point alors qu'elle pourrait faire de la photographie, et j'avais été étonnée de sa réponse : « contrairement à la photo, le dessin ne se borne pas à la réalité, il peut représenter tout ce que l'on désire, même si c'est totalement fantaisiste, peu importe, car c'est celui qui dessine qui choisit. Le dessin a cette liberté que je ne retrouve que dans cet art. Écrire, c'est clairement pas mon fort, je n'aime pas poser des mots sur une feuille, et la musique ce n'est pas mon domaine non plus, c'est plutôt le tien, alors je dessine. »

Ma sœur aime le dessin parce qu'elle a une véritable âme d'artiste : elle a des rêves à profusion, des idées par milliers, et formes et couleurs se mélangent seules dans sa tête tandis qu'elle représente sur sa feuille l'image qu'elle imagine. Aly ne fait pas seulement de beaux portraits, elle s'est essayée à toutes formes d'art, mais c'est bien de ces portraits dont je suis la plus fan, et je suis on ne peut plus ravie qu'elle puisse aujourd'hui faire ceux de ses idoles.

« Tu sais Charlie, m'avait-elle dit, c'est vrai que la photo est plus rapide, plus précise, mais quand je dessine les BTS, c'est toujours le même élément que je colorie en dernier : leurs yeux. J'ai l'impression que quand je colorie des yeux, je donne une âme à celui ou celle que je dessine, c'est inexplicable et je ne sais pas si tu vois ce que je veux dire, mais c'est incroyable. J'ai le sentiment que quand c'est moi qui les dessine, leurs yeux sont encore plus doux que dans la réalité, simplement parce que c'est moi qui les lui ai peints. C'est un peu comme si c'était magique, tu comprends ? »

Et ce jour-là, oui, j'avais compris pourquoi elle aimait à ce point dessiner plutôt que de prendre des photos : Aly est quelqu'un de très sensible, qui a toujours tendance à voir les yeux comme le reflet de l'âme, autrement dit le fait de dessiner lui est toujours apparu comme le fait de pouvoir représenter indirectement l'âme de quelqu'un.

C'était aussi ce jour-là que j'avais compris que ma sœur et moi avions une passion bien plus proche l'une de l'autre que ce que l'on imaginait jusque là, ça nous rapprochait plus encore, et moi ça me rendait heureuse.

Quoi qu'il en soit donc, nous arrivons en salle de danse et après quelques rapides étirements sous les regards des quelques techniciens venus superviser l'installation du matériel de tournage, nous faisons quelques essais pour s'assurer que tout est parfait, jugés par l'œil critique du chorégraphe. Visiblement, lui et le manager sont plutôt satisfaits de ce que ça donne ; je n'irais pas à dire qu'ils sont enthousiastes, mais au moins je peux voir au coin de leurs lèvres un petit sourire témoigner de leur satisfaction vis-à-vis de notre travail.

« Bon, on va tourner, nous informe le chorégraphe, vous êtes prêts ? »

L'exercice du dance practice est à mon avis bien plus dur que celui du tournage du clip : aucune faute n'est acceptée car aucun moment de la vidéo ne sera monté, tout doit être parfait du début à la fin, comme sur scène. C'est stressant, surtout à la fin : quand j'arrive je me dis que si je rate, bon eh bien ce n'est rien, on était encore assez loin de la fin, mais quand les dernières notes retentissent, si je fais la moindre faute, je gâche près de quatre minutes de film et donc d'efforts, et cette idée ne me plais pas du tout. Je ne suis pas venue ici pour être un boulet pour les garçons, je m'évertue à le dire et à le montrer depuis mon arrivée, et pour ce dernier dance practice je compte bien me démener plus que jamais. Je connais mes pas, pour une fois je les ai rapidement bien maîtrisés, et je suis convaincue que je réussirai, aujourd'hui, à me sentir vraiment douée dans ce que je fais.

Comme toujours, je passe plus de trois minutes dix sur le côté à attendre que les garçons en viennent au moment où je suis supposée entrer en scène. Je me rejoue mentalement chacun de mes mouvements, à l'écoute de la chanson, décidée à ne rien laisser me tirer de ma profonde concentration. C'est à moi !

Le premier essai est parfait, je me débrouille vraiment bien je trouve : souplesse, sourire, dynamisme, je ne laisse rien au hasard et je crois sincèrement que je m'améliore. Enfin les heures et les heures que l'on passe chaque jour à danser portent leurs fruits : j'ai beaucoup moins de mal à me mouvoir naturellement, tout est plus fluide, et d'ailleurs j'ai même la sensation que j'ai gagné en souplesse depuis mon arrivée ici, probablement à cause de tous les étirements qu'on doit faire chaque fois.

C'est une bonne journée !

« Pas mal, sourit le chorégraphe, je suis assez impressionné Charlie, on voit enfin que tu progresses réellement à nos côtés, ça fait plaisir de constater enfin ça, tu peux être fière de toi.

- Merci beaucoup, je fais vraiment tout ce que je peux pour.

- Ça se voit, c'est bien que tu sois aussi motivée et investie pour le groupe, on sent que tu es déterminée et que tu as plein de bonne volonté et d'énergie à revendre. »

Il lance un bref regard au manager qui fait un « non » de la tête (c'es vexant...) avant de nous inviter à refaire d'autres prises, après quoi on décidera de laquelle est la meilleure. Je jette quant à moi un rapide coup d'œil curieux au manager ; j'ai l'impression que le chorégraphe et lui manigancent quelque chose, ça ne me plaît pas. J'espère que ce n'est pas en rapport avec une éventuelle mauvaise nouvelle au sujet de mon troisième concert, je me suis tellement démenée pour être parfaite ce jour-là que ça me tuerait d'apprendre que je ne peux même pas y participer...

C'est ainsi que le temps passe, rapidement, tandis que nous enchaînons les essais, les uns à la suite des autres, avec toujours plus de succès. Je me félicite intérieurement de chacune de mes performances, et plus elles s'enchaînent, plus les gens autour de moi sont impressionnés de mon « talent » qui s'est clairement développé depuis mon arrivée ici. Je suis trop contente ! Ainsi donc l'ambiance est au rendez-vous, on a le droit de prendre des pauses plus régulièrement qu'à l'accoutumée et tout est très léger, on s'autorise même sur certaines prises à faire un peu les idiots, tout en restant bien sûr concentrés sur la chorée.

C'est de cette façon que sur l'une des prises, on se retrouve à tous prendre une pose stupide à la fin, lorsque nous sommes supposés nous mettre en ligne. Pour ma part, Jimin et moi nous sommes silencieusement accordés pour nous tourner légèrement de sorte à se retrouver dos contre dos, de profile donc, et je prends un visage ridiculement mystérieux en formant une sorte de V avec mon pouce et mon indexe au niveau de mon menton. Jimin quant à lui opte pour cette chose monstrueuse que je ne ferai plus jamais mais qui le rend si attendrissant : un aegyo.

On a pu regarder la vidéo après, et c'est vrai que ça le rend tout mignon, mais sur moi ça ne marche pas... ou du moins ça me fait chier quand ça marche.

Et dire que les BTS sont théoriquement dans une période allégée puisqu'ils sont supposés « se reposer » avant de débuter leur tournée mondiale (en préparant un nouvel album, parfaitement, chacun se repose à sa manière)... Je ne veux pas imaginer à quoi ressemble leur emploi du temps quand ils doivent travailler sérieusement.

Je m'amuse bien en tous cas, mais je suis rapidement refroidie par les regards étranges que me lancent le chorégraphe et le manager. Depuis quelques jours j'ai plus l'impression qu'ils surveillent mes faits et gestes, j'ai vraiment peur qu'ils m'annoncent quelque chose de terrible...

Oh bordel je sais ! Ils ont dû deviner pour V et moi ! Je suis convaincue qu'ils ont vu que j'étais amoureuse de lui, mais bien sûr quelle idiote, j'aurais dû être plus discrète : le laisser apparaître devant le groupe est une chose, ils savent que je ne suis pas cette fille qui sautera sur Tae dès que l'opportunité se présentera, mais le manager et le chorégraphe, ils n'en savent strictement rien, ils peuvent très certainement s'inquiéter au sujet de la réputation du groupe, au sujet de rumeurs qui pourraient circuler, et peut-être qu'ils me priveront de concert de peur que notre proximité soit trop évidente ! Ou bien pire, peut-être imaginent-ils une histoire entre Jimin et moi, c'est vrai qu'on est super proches sans s'en cacher, ça peut aussi prêter à confusion !

« Eh tu vas bien ? Tu fais une tête bizarre... »

Je lève les yeux vers Suga et hoche lentement la tête, sans réelle conviction.

« Oui, oui, je suis juste un peu fatiguée, il est bientôt onze heure du soir : le temps passe super vite, et si mon cerveau ne s'en rend pas bien compte, mon corps, lui, réclame de dormir.

- Ah je vois. Bon, si tu as envie de dire la vérité à quelqu'un, tu sais que tu peux venir te confier à moi, je ne cafterai pas, pas besoin de me dire des conneries, dis-moi juste que tu ne veux pas en parler. »

Et merde, je crois qu'il est vexé.

« C'est juste que... »

Je me coupe, hésitante, alors que lui qui partait se retourne pour me lancer un regard curieux. Certains des garçons sont partis remplir leur bouteille, les adultes discutent entre eux un peu plus loin et Jungkook, Aly et J-Hope sont ensemble à se marrer au fond de la salle.

« Je... je suis inquiète, ça fait deux ou trois jours que le manager et le chorégraphe sont bizarres avec moi, j'ai peur.

- Peur de quoi ? s'étonne Suga. Ne t'inquiète pas, si quelque chose leur déplaisait, ils seraient venus te voir dans la seconde, ils n'attendraient pas des jours et des jours avant de t'en parler.

- Tu crois ? demandé-je avec une petite étincelle d'espoir.

- Bien sûr, si je te le dis. T'avais peur qu'ils aient vu comment tu regardais Taetae ? »

Ma gêne évidente lui prouve que oui.

« S'ils avaient fait attention à ça, tu serais rentrée en France à peine deux semaines après ton arrivée, ça fait longtemps que tu serais partie. »

Il dit ça avec un petit sourire malicieux qui me pousse à me détendre totalement. Ouf, je suis soulagée ! Mais du coup... Qu'est-ce qu'ils me veulent ?

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