Chapitre 195
Elle ne pose pas plus de questions ; je veux lui faire la surprise à elle aussi, elle l'a bien deviné. Ainsi, nous voilà prêtes toutes les deux, attendant l'ascenseur auprès des garçons.
« Tu sais que c'est uniquement à cause de toi qu'on est obligés de se camoufler quand on sort, se moque J-Hope derrière son masque, parce que sinon en théorie on n'a pas besoin de les porter ces trucs quand on fait juste le tour du quartier mais là, comme il fut être sûr qu'on ne voit pas que tu es avec nous, on doit tous être déguisés comme si on allait à une soirée fin du monde.
- Une soirée fin du monde ? répété-je d'un ton sceptique.
- Ouais, avec le masque pour éviter de respirer l'air pollué par le nucléaire qui a ravagé la planète en transformant la moitié de la population en zombie, et la casquette et les lunettes pour avoir l'air cool. »
Il insiste fortement sur ce dernier mot avant de hocher lentement la tête, comme pour affirmer la véracité de ce qu'il vient de dire. Non mais je rêve, c'est ridicule...
« Dites-moi les garçons, reprend Aly, il sortira quand l'album avec Charlie ?
- Mi-juillet, répond RM. C'est à ce moment-là que les clips et les dance practice sortiront à leur tour.
- C'est trop cool, mais alors ils n'ont pas totalement fini d'être montés ?
- Non pas encore, mais ça, ça ne dépend plus de nous : on a terminé le boulot, et on pourra partir en tournée tranquilles.
- C'est trop bête, soupire ma petite sœur, j'aurais trop voulu vous voir en concert, mais je n'ai pas réussi à avoir ma place...
- Tu sais, ce n'est pas très grave, t'as déjà eu trois semaines avec nous, ce n'est pas pour trois heures de plus ou de moins que ça va changer grand-chose, relativise le leader qui semble touché par ses paroles.
- On aurait bien aimé proposer à Charlie de nous rejoindre un peu sur scène à l'occasion de notre passage à Paris, ajoute Jin, en plus comme ça tu aurais pu passer dans les coulisses, mais le manager préférait qu'on ne change rien à ce qui était prévu, même si je ne vois pas quel gros changement ça aurait impliqué.
- C'est gentil, sourit Aly, mais ce n'est rien. De toute façon, c'est vrai que j'ai déjà eu tellement de moments avec vous... Je ne peux pas en demander trop non plus. Mais une tournée mondiale... vous n'avez pas peur d'être trop fatigués ? »
Un cout moment de silence s'installe entre nous, les garçons semblent hésitants alors que c'est J-Hope qui reprend d'un ton qui se veut rassurant :
« Ne t'en fais pas pour nous, ça ira. »
Et le prix de la réponse la moins convaincante revient au petit Hobi, pour son magnifique mensonge très peu crédible.
Plus sérieusement, j'espère sincèrement que tout se passera bien pour eux, mais je me doute que ce moment sera éprouvant. Je ne sais strictement pas si c'est la première fois ou non qu'ils font une telle tournée, et Aly m'en a assez peu parlé, ce qui fait que je ne sais même pas combien de temps ça va durer et combien de concerts ils vont donner. J'espère simplement que tout se passera bien, même si j'ai peu de doutes quant au fait qu'à un moment ou à un autre, la fatigue risque d'être plus pesante. Ils sont jeunes, Jungkook est à peine plus vieux que moi, et je ne sais honnêtement pas où ils trouvent tout le courage et toute l'énergie nécessaire pour faire ce qu'ils font si bien. Depuis des années, ils sont conditionnés à être parfaits, mais cette pression constante que leur public, leurs supérieurs et eux-mêmes se mettent n'est pas toujours supportable. J'ai eu largement le temps de constater tout ça et honnêtement, ça ne m'a pas plu. Je sais qu'à force, eux ils trouvent ça normal, je sais qu'en Corée du Sud, travailler comme un dingue, c'est bien moins choquant qu'en France... mais avoir appris à les connaître me pousse à avoir mal au cœur pour eux quand je vois tout ce qu'ils doivent faire s'ils veulent continuer de satisfaire un public toujours plus exigeant.
Ils sont les premiers, les plus populaires, les plus adulés, mais à quel prix ?
« Eh Charlie, on te dit que ça va aller, reprend RM en passant son bras autour de mes épaules dans un geste qui témoigne à la fois de son assurance et de sa volonté de me rassurer, et si à un moment ou à un autre, l'un de ces gamins n'arrive plus à suivre, on s'en occupera tous ensemble, tu m'entends ? »
Je hoche faiblement la tête ; il a beau parler ainsi, j'ai du mal à croire que tout sera si simple, mais je ne peux que me raccrocher à cet espoir.
Alors qu'on marche, mon regard se pose sur une petite bijouterie qui vend des articles pas chers. La vitrine est sobre, garnie de bracelets, bagues, colliers et autres bijoux fantaisie. Je m'approche avec curiosité de la devanture, si bien que les garçons et Aly s'arrêtent pour me demander ce que je fais. Plutôt que de répondre, je leur fais signe de continuer leur chemin sans moi, de toute façon je connais un peu cette rue, je vois exactement où on est.
« Ne traîne pas trop, me prévient Jin, il risque de pleuvoir bientôt.
- Je sais, je sais. »
C'est vrai qu'il fait de moins en moins beau ces temps-ci...
J'adresse un bref signe à mes compagnons et pousse la petite porte de l'échoppe. L'intérieur est encore plus exigu que ce que j'avais imaginé, je ne pense pas que le magasin puisse contenir plus de sept ou huit clients à la fois, et pourtant il y a des bijoux absolument partout.
Suite au tintement métallique de la clochette reliée à l'entrée un petit homme fait son apparition de l'arrière boutique derrière le comptoir. Il est courbé, son dos semble être douloureux, et l'âge a marqué son passage sur son visage qui exprime pourtant une douceur des plus tendres. Il est maigre, son pantalon a beau être très fin il a l'air de flotter dedans et je suis convaincue que vu la largeur de ses hanches, s'il ne mettait pas de ceinture, le vêtement tomberait jusqu'à ses chevilles. Ses habits sont plutôt classiques pour une personne de son âge, disons qu'il ne se démarque en rien d'autrui. J'espère que c'est une pièce de repos qu'il a dans son arrière boutique, parce que sinon je le plains : même la petite canne sur laquelle il s'appuie pour marcher semble trembler et j'ai l'impression qu'elle pourrait lâcher d'un instant à l'autre.
« Je peux vous aider mademoiselle ? Vous cherchez quelque chose pour vous ou un ami ?
- Pour des amis et moi, affirmé-je en lui rendant son aimable sourire.
- Hum je vois... »
Il réfléchit, passant son pouce et son indexe sur son menton avant d'avoir une idée.
« J'ai peut-être quelque chose à vous conseiller dans ce cas.
- Oh vous savez, je ne cherche rien de très spécial, seulement un souvenir des moments qu'on a passés ici, expliqué-je trop gênée à l'idée de déranger ce brave vieillard.
- Justement. »
Là il a réussi à piquer ma curiosité. Je relève mon regard de la vitrine sur laquelle il était posé et lui accorde toute mon attention. Constatant cela avec un fin rictus, il me fait signe de venir vers lui, ce que je fais sans hésiter. Il sort un bracelet en C de métal argenté et me le montre avec fierté. Mon air interrogateur l'invite à développer son idée :
« Je peux y faire graver ce que vous souhaitez : le bracelet coûte cinq mille wons, et vous rajoutez deux cent won par lettre.
- Il est en fer ? »
Pour le prix, ça ne peut être que du fer ou de l'acier.
« En titane, » me corrige le vendeur.
C'est bien ça, je connais un maladroit qui ne risquerait pas de le casser.
« Vous ne gravez que des lettres ?
- Non, j'ai aussi une ribambelle de symboles, mais c'est un peu plus cher.
- Pas de problème pour moi, acquiescé-je.
- Parfait, dans ce cas dites-moi ce que vous voulez et on pourra passer au règlement puis à la gravure.
- Parfait ! »
Il me tend un papier et j'y écris quelques mots, y dessine chaque fois le même symbole, et le tends de nouveau au vendeur.
« Je voudrais ça sur sept bracelets et ça sur deux autres, dis-je en pointant tour à tour les deux phrases.
- Eh bien, on ne m'avait jamais fait commande d'autant de ces bracelets, c'est leur heure de gloire ! Vous avez de la chance, au-dessus de trois bijoux identiques on fait une promotion. »
Oh super ! Le vieil homme tape quelques chiffres sur sa caisse enregistreuse avant de m'indiquer le total, bien trop élevé pour que je paie en liquide, par chance ma carte bancaire passe et je n'ai pas de soucis pour régler le paiement.
- J'en ai pour une petite demi-heure, indique-t-il. Soit vous allez vous balader en attendant, soit vous pouvez venir voir comment ça fonctionne.
- Vraiment ? Ça ne vous dérange pas ? »
Et c'est de cette façon que j'ai passé au total presque une heure dans la boutique (oui parce qu'en plus le vieil homme a été un peu long pour tout graver puisqu'il m'expliquait chacun de ses gestes et qu'on a fait une pause pour discuter après les vingt premières minutes) ; quand je vais rentrer les garçons vont me tuer... Mais ça valait le coup : ce vieil homme d'apparence modeste est en vérité quelqu'un de brillant, de très cultivé, et il a passé presque trois quarts d'heure à graver chacun des bracelets tout en me racontant diverses anecdotes au sujet non seulement de la gravure (et je vous assure que vu comme c'était raconté, ça valait le coup), mais aussi à propos d'un nombre de choses incalculable. Je ne me suis à aucun moment ennuyé en sa compagnie. Je ne regrette pas d'être restée, d'autant plu qu'il pleut depuis déjà un bon quart d'heure, et quand il pleut, se promener dans les rues de Séoul, ça fait déjà moins rêver.
Ainsi je rentre en vitesse, prenant soin de ne pas trop attirer l'attention sur moi à cause des bracelets qui s'entrechoquent dans le petit sac fourni par le vendeur. Je suis trop contente, moi qui cherchais un petit cadeau pour les garçons, je pense clairement l'avoir trouvé ! J'imaginais prendre des bracelets tout simple, limite peut-être un pendentif, mais ça, c'est encore mieux puisque j'ai pu les personnaliser ! Alors certes, sur les bracelets des garçons j'ai chaque fois fait graver la même chose, mais chacun va l'interpréter d'une façon différente, et finalement je n'aurais pas pu trouver de mots plus justes.
J'ai hâte de les leur offrir ! Je m'y prendrais sûrement avant mon départ, genre séquence émotion, ça sera mignon, et puis comme ça, même s'ils ne les aiment pas ils ne pourront pas les refuser.
Je reviens rapidement aux bureaux de la BigHit et monte tout aussi rapidement par les escaliers à l'appartement – grossière erreur puisqu'une fois arrivée, je suis essoufflée et en plus de ça j'ai mal aux mollets. Je pousse la porte pour aussitôt tomber sur les garçons en train de se préparer à partir. C'est vrai qu'il est presque deux heures, les vacances sont terminées, ils ont des choses à faire.
« Charlie, s'étonne J-Hope avec un sourire taquin, c'est bête on a presque cru qu'on avait réussi à se débarrasser de toi.
- Pas tout de suite les garçons, je suis tenace je vous rappelle.
- Elle a raison, admet Jungkook, on a beau essayer de la dégoûter ça ne fonctionne pas.
- Peut-être parce que depuis le début quelqu'un la soutenait en secret, hasarde RM en coulant de façon explicite son regard vers V.
- Bah j'ai bien fait non ? se défend Tae avec un grand sourire. Maintenant on est les meilleurs amis du monde, hein ? »
Il regarde les garçons avec espoir dans l'attente de leur approbation, mais à la place je glousse bêtement, entraînant de la part de chacun un sourire amusé. Tae sait qu'il est mignon quand il parle comme ça, il sait qu'on ne peut rien lui refuser, mais plutôt que de lui donner raison, le leader hausse les épaules et s'en va, suivi par les autres.
« À ce soir mon petit amour ! lance V en s'en allant.
- Attends, comment tu m'as... »
La porte se referme brutalement derrière lui et je reste muette, amère : si c'est ça mon nouveau surnom, je veux mourir sur le champ, car sinon c'est V et ses idées à la con qui s'en chargeront.
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Plus je deviens une totale fangirl de mon histoire, plus je pars loin dans mes délires. XD
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