Chapitre 178

On ne passe pas beaucoup de temps à travailler puisqu'il est bientôt deux heures de l'après-midi et que les garçons sont attendus pour un rapide concert et un fanmeeting – sans moi bien sûr. Je ne suis pas vexée de ne pas participer, au moins je suis tranquille pendant ce temps et je peux me reposer.

Vivre avec un groupe de Kpop, c'est le meilleur moyen de savourer chaque seconde de tranquillité qui s'offre à nous.

Lorsque nous remontons à l'appartement donc, c'est pour saluer rapidement le groupe qui s'apprête à s'en aller. Ils sont tous dans le salon, en train de discuter, et Aly participe activement à la conversation, le sourire aux lèvres. Elle est belle quand elle sourit, sa fossette se dévoile et ses dents qui mériteraient d'être réalignées sont mises en valeur par ses lèvres fines. Aly a des étincelles dans les yeux, comme chaque fois qu'elle parle avec les membres, et si au début cette lumière dans son regard était provoquée par les larmes qui menaçaient à cause de l'émotion qu'elle ressentait à les voir, en vrai, face à elle, aujourd'hui c'est tout simplement le bonheur. Je suis super heureuse qu'ils soient aussi sympathiques avec elle, qu'elle n'ait pas l'impression de se trouver face à des imposteurs, et que les garçons soient si naturels et honnêtes dans leurs vidéos comme sur scène qu'elle n'est pas déçue de les avoir rencontrés. Je suis fière d'avoir pu lui permettre de vivre ça, je sais à quel point ça lui tenait à cœur. Et puis si ce groupe a pu lui permettre de remonter la pente glissante sur laquelle elle s'était engagée, alors je suis heureuse.

« Les voilà, sourit J-Hope. Vous étiez en bas ?

- Oui, acquiesce Suga, et il faudra qu'on songe sérieusement à ménager Charlie, elle est tellement crevée qu'elle n'est même pas foutue d'apprendre les bases du solfège, pourtant je suis un professeur patient, mais là c'était un cas désespéré.

- Ah non toi tu ne commences pas à gronder ma Charlie ! » s'indigne Jimin.

Il bondit presque vers moi et enroule ses bras autour de mon ventre, me rapprochant de lui de sorte à ce que mon dos soit contre son torse. Je repose ma joue contre la sienne tandis que Suga réplique :

« C'est pas elle que je gronde, c'est nous tous : il faut vraiment être fatigué pour ne pas pouvoir imprimer ça, on devrait y aller mollo avec elle. Je sais bien qu'elle dort beaucoup moins ces temps-ci, mais plus le temps avance et plus c'est flagrant.

- C'est gentil de t'inquiéter pour moi, souris-je, mais ce n'est pas nécessaire. Passer du temps ici et tester mes limites m'a avant tout appris à respecter ces limites. Je sais sentir quand il me faut une pause et quand...

- Je veux que tu ailles dormir cet après-midi, ou au moins que tu me promettes de ne pas aller t'entraîner.

- Promis Yoongi. »

Je lui adresse un clin d'œil amusé et Jin vient enlacer Aly comme Jimin le fait avec moi, les yeux dans le vague, un peu comme s'il ne faisait pas vraiment attention à son geste alors que ma petite sœur est au comble du bonheur. En plus c'est mignon, car la différence de taille et de carrure est flagrante de cette façon. Jin est assez large d'épaules alors qu'Aly est plutôt svelte, et le garçon doit mesurer environ un mètre quatre-vingt, soit à peu près quinze centimètres de plus qu'elle. Je n'hésite pas à tirer rapidement mon téléphone de ma poche pour les prendre en photo. Ils sont tellement mignons ! Aly a l'air toute faible, toute petite, et la façon dont Jin la tient témoigne d'un côté protecteur comme s'il agissait avec sa petite sœur. Je passe ensuite en mode selfie et prend une photo de Jimin et moi, entre qui la différence de taille n'est pas franchement flagrante. Jimin adresse un joli sourire au téléphone et je prends une photo de plus.

L'aîné se détache de ma sœur lorsque RM décide qu'il est temps pour eux de partir, et Jimin en fait de même pour moi après un petit bisou sur ma joue.

« N'oublie jamais que t'es encore plus mignon que d'habitude quand tu souris, dis-je en posant mes mains sur ses joues une fois face à lui. Je veux toujours te voir comme ça.

- Je ferai tout pour.

- Promis ? »

Il me répond d'un sourire immense, magnifique, lumineux, et je ne peux pas m'empêcher de le prendre une fois de plus dans mes bras. S'il promet, je le crois.

Les garçons s'en vont en nous saluant de façon chaleureuse, et je me rends compte que c'est quelque chose qu'ils ne prennent pas souvent la peine de faire. J'ai la sensation qu'ils s'attachent peu à peu à nous, ça me fait plaisir, je sais que le lien qu'on crée à force de vivre ensemble non-stop est très puissant, je ne doute pas que ce lien subsistera encore après notre départ, et même si je souhaite de tout mon cœur qu'on ait encore la possibilité de discuter par Skype ou n'importe quoi d'autre, je sais que ça risque d'être très compliqué. Je ne suis pas dupe, je n'ai plus douze ans. Je sais admettre la réalité plutôt que de croire à des chimères et me trouver ensuite déçue par la vérité.

Enfin... Je garde espoir quand même.

Une fois le groupe parti, je reste avec Aly quelques minutes, silencieuse, dans le salon. On échange un regard et je la sens particulièrement émue.

« Je n'arrive jamais à croire que c'est vraiment avec eux que je parle, avec eux que je ris, avec eux que je vis, dit-elle avec admiration. C'est fou Charlie, je ne peux pas croire que ce n'est pas un rêve et que je suis vraiment là. Même quand je le dis j'ai l'impression d'être en train de raconter une immense connerie... »

Aussitôt, l'émotion prend le pas et son bonheur s'exprime par des larmes de joie. Et moi qui pensais qu'elle avait réussi à passer outre ce trop-plein d'émotion... C'est beau de la voir pleurer de bonheur.

« Charlie, je suis heureuse. Pas seulement parce que je les ai rencontrés, mais aussi parce que le monde te voit et j'attendais tellement que l'on reconnaisse ton talent ! Si tu savais ! Et puis depuis qu'on leur a parlé de mon passé, j'ai l'impression d'avoir définitivement enterré tout ça, j'ai la sensation que ça y est, c'est comme si tout à coup, je n'avais plus ce poids sur le cœur à longueur de journée. Quand on est arrivées ici, je sentais que j'allais déjà mieux, car Jimin me souriait comme il l'avait fait au concert, sans être dégoûté, et ça m'a fait tellement du bien ! La plaie avait déjà commencé à cicatriser et puis, après que tu leur as parlé, tu sais, Jungkook est venu me voir, et... et il m'a dit que lui, depuis le début, il me trouve adorable, et que si je perdais du poids, je risquerais de perdre mes joues... ou un os. »

Après cette remarque, elle sourit et attrape un mouchoir qui traînait dans sa poche.

« Je sais qu'il se peut qu'un jour, je n'éprouve plus le même intérêt pour ce groupe, reprend-t-elle, mais je sais aussi que je n'oublierai jamais tout ce qu'ils ont fait pour moi. Tout ce bonheur qu'ils ont su me transmettre. Ça fait deux ans que je n'ai plus honte de moi, que je souris parce que leurs chansons me donnent du courage, me donnent envie de sourire, et j'ai appris à relativiser, à ne plus autant me soucier de tout ce qui pouvait me blesser jadis, à simplement apprécier la vie pour ce qu'elle m'offre. Alors même si le mois prochain, je ne devais plus m'intéresser à eux, je sais que dans dix ans, je les aimerais toujours pour tout ça.

- Et moi pour te faire si joliment sourire. »

Je n'hésite pas à venir enrouler mes bras autour de son corps mince qu'elle ne pouvait plus supporter à peine deux ans plus tôt et je le ressens aussi : ça y est, après deux années à cacher ça, nous avons parlé, et pour la première fois, j'ai vraiment la sensation que tout ça est derrière nous, qu'on peut l'enterrer et qu'il n'y aura plus ni remords ni regrets, simplement des souvenirs qui finiront tôt ou tard par disparaître, ou du moins par devenir de plus en plus flous.

« Eh bien, je pourrais presque croire que c'est maintenant que vous allez retourner en France, plaisante Samna en entrant. Du moins je pourrais le croire si je ne voyais pas derrière ces larmes un si gros sourire.

- Samna, je suis contente de te voir, dis-je en passant rapidement ma manche sur mes yeux qui commençaient à s'embuer. Comment tu vas ?

- Très bien, vous aussi j'ai l'impression.

- Oh ça oui.

- Ça va dit une promenade, j'ai une surprise pour vous.

- Ah bon ? »

Elle acquiesce et je souris à Aly ; je me demande bien ce qu'elle peut nous réserver, mais au vu du rictus sur les lèvres de notre professeure, je sens que nous ne serons pas déçues, alors je n'hésite pas à les suivre. Une balade, ce n'est pas un entraînement, donc je ne viole pas la promesse faite à Suga, non ? Non ça passe, c'est cool, tout va bien.

On sort et dès l'instant où je me retrouve dans les rues de Séoul, je plaque un peu plus ma casquette sur ma tête. J'ai bien sûr aussi le droit au masque, histoire d'avoir l'air d'une parfaite petite psychopathe, et d'ailleurs ça fait bien rire Samna et Aly, mais je n'y peux rien, on m'y oblige, moi je voudrais bien sortir tranquille de ce bâtiment ! Cette fichue clause de confidentialité souligne qu'on ne doit pas me reconnaître quand je sors de l'immeuble, sinon quoi on pourrait penser que j'y vis (et ça serait faire fausse route, complètement fausse route), alors maintenant que de plus en plus de personnes me connaissent, je ne peux plus sortir en paix, même si je veux juste me balader seule ou avec ma sœur et sa prof. Et puis pour être honnête ça me fit sérieusement flipper, il suffit qu'une personne se rende compte de qui je suis pour que je me retrouve avec un manager furieux derrière moi, donc mieux vaut prendre toutes les précautions possibles, même s'il s'agit de ne sortir que peu de temps.

Ce n'est pas très grave ; pour le nombre de fois que je sors, je ne vais pas m'en plaindre, mais je sens simplement mal à l'aise dans ce genre de moments. J'ai l'impression d'attirer tous les regards alors même que je suis supposée être discrète, en plus vraiment je ne supporte pas l'apparence que j'ai, ça me donne beaucoup trop l'impression d'être enfermée et je déteste ça. Une fois hors de la scène, je n'ai pas la sensation d'être une star (enfin, c'est un bien grand mot, mais admettons), et pour le coup, ça me fait bizarre de devoir me cacher. J'ai l'impression que c'est parce que j'ai fait quelque chose de mal, genre un meurtre.

Quoi qu'il en soit, après quelques minutes, je ne fais plus attention aux regards de la foule sur moi (quelle idée aussi de passer dans des grandes rues fréquentées) et nous arrivons devant un immeuble d'apparence moderne dans lequel nous entrons sans nous poser de questions, en suivant Samna. Elle nous fait signe de la suivre pour prendre les escaliers, alors je jette un dernier regard empli d'amour et de peine à l'ascenseur dont les portes ouvertes semblaient m'appeler pour que je ne me fatigue pas. Actuellement j'ai le cœur brisé, l'âme en peine, et les jambes lourdes. Et en plus à cause du ciel un peu plus nuageux que ce que j'ai pu voir d'habitude, il fait plus lourd, alors je meurs de chaud. Je veux prendre une clim dans mes bras pour lui faire un gros câlin...

Par chance on ne monte qu'un étage avant de déboucher dans un couloir éclairé et à l'air paisible. Plusieurs appartement se trouvent ici et Samna se dirige d'un pas assuré jusqu'au fond avant de s'arrêter devant le numéro cent vingt-trois. Elle plante une petite clé argentée dans la serrure qu'elle ouvre et nous invite à entrer d'abord. Ma petite sœur est la première à découvrir l'appartement auquel les meubles en bois massif donnent un côté un peu ancien, presque vintage, mais qui mêle sans mal à ça la modernité. J'aime bien, c'est joli, ça reflète assez bien la personnalité de Samna, entre coutumes et contemporain.

« Eomma ! »

Oh mon dieu je vais décéder.

Minho accourt vers sa mère pour la serrer dans ses bras et dès qu'il arrive à ses pieds, le petit bout de chou se fait soulever par sa mère qui lui fait un énorme câlin.

« Oh my gawd ! murmure Aly. Il est trop chou ! »

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