Chapitre 115
Je suis partagée entre la joie et l'inquiétude : après environ une semaine ici, Aly a déjà un coup de cœur pour un des membres, Jungkook. Bien sûr, à force de se chamailler, de se chercher l'un l'autre, à force d'essayer d'attirer son attention, Aly a fini par tomber dans son propre piège et c'est Jungkook qui a capté son attention. Je l'entends à sa voix, je le vois à ses gestes : elle l'aime, son cœur fait « boum boum », comme elle le dit. Je trouve ça mignon, parce que personnellement, à son arrivée ici, j'ai cru qu'elle serait directement attirée par Jimin dont elle parlait absolument nuit et jour... Mais non, son cœur a été attiré par un autre, par le maknae. Leurs points communs les ont indéniablement liés, et ce lien s'est transformé en attirance pour Aly. L'amour est un beau sentiment, je suis contente de la voir aussi heureuse quand il est avec elle, mais d'un autre côté... Ça me brise le cœur pour elle d'imaginer ce qu'elle doit ressentir.
Car peut-on vraiment apprécier la saveur de l'amour quand on sait qu'il ne pourra jamais se concrétiser ? Peut-on vraiment rêver d'une relation alors que dans douze jours, la réalité reviendra nous frapper de plein fouet ? Ça me fait mal pour elle de me dire que son amour a une échéance : le douze juillet au soir, juste après le concert, on file à l'aéroport pour un vol direction Paris. Une fois de retour en France, ça sera le même quotidien qu'à l'accoutumée. La fac pour nous deux, et plus aucune chance de revoir les BTS ailleurs que sur les réseaux sociaux, c'est ce qui nous attend. Je préfère ne pas m'apitoyer là-dessus puisque de toute façon ça n'y changera rien, mais je ne sais pas comment Aly va le vivre.
Je ne veux pas que ma sœur souffre et bien sûr j'avais envisagé le fait qu'elle pourrait tomber sous le charme d'un membre... ou même de plusieurs membres (on ne va pas se mentir, ils ont tous un charme fou). Mais j'étais loin d'imaginer que les garçons seraient comme ils sont : leur comportement est tellement adorable, ils sont si gentils et compréhensifs avec nous. Bien sûr qu'Aly est tombée amoureuse, ça ne faisait aucun doute. Elle les admirait et les connaissait déjà un peu, mais j'ai bien vu ces derniers jours qu'elle se plaisait énormément ici et découvrir qui sont réellement ses idoles, bien sûr que ça lui a fait plaisir et forcément, des sentiments sont nés et se sont développés au cours de ces derniers jours. C'est rapide, mais vivre avec quelqu'un non-stop, ça permet de le connaître très rapidement, alors je ne doute pas que ça soit sincère.
« Et ça va aller ? demandé-je d'une voix hésitante.
- T'imagines, continue-t-elle comme si elle ne m'avait pas entendue. De tous les mecs dont il fallait que je tombe amoureuse après plus de deux ans sans rien ressentir, il fallait que ça tombe sur quelqu'un avec qui je n'ai même plus deux semaines à passer... C'est con hein ?
- Quand bien même ça le serait, qu'est-ce que tu y peux ? Les sentiments ne se contrôlent pas, c'est pour ça que c'est parfois si difficile de les accepter.
- Mais comment j'ai pu tomber amoureuse de lui alors que je sais que c'est inutile d'espérer quoi que ce soit ? me questionne-t-elle d'une voix étranglée. C'est pas comme l'autre fois, j'étais jeune je ne savais pas vraiment ce que c'était l'amour et j'imaginais que cette passion que je nourrissais pour ce mec de ma classe c'était de l'amour alors que c'était juste un petit coup de cœur... Mais là je sens que c'est différent, au fond de moi c'est bien plus fort Charlie. J'ai l'impression que quand il n'est pas là, c'est comme s'il manquait une partie de moi qui me complétait et que même si je peux être heureuse sans, ça ne sera jamais parfait, que quand il est là c'est comme si tout mon être était en fête, et pas seulement parce que c'est une star et qu'il est mignon ! Jamais personne n'avait montré un réel intérêt pour mes dessins et quand lui il en parle, on dirait qu'il les regarde comme des vraies œuvres d'art. Il repère tout de suite mes techniques de dessin, il voit chaque détail, chaque coup de crayon. On a le même caractère dans le sens ou malgré notre timidité, on peut sans trop de mal s'ouvrir aux autres. Je me sens intéressante avec lui, il me donne l'impression que je suis quelqu'un de talentueux, quelqu'un de spécial, la seule personne avec qui il est en perpétuelle compétition... Je me dis que ce que je ressens, ça doit être autre chose puisqu'on ne se connaît que depuis une semaine mais... quand hier tu m'as demandé ce que je ressentais, c'était encore flou, je ne savais pas ce que me disait mon cœur, je n'entendais pas ses cris, tandis qu'à présent c'est parfaitement clair. Comment j'ai pu tomber amoureuse si vite ? J'arrête pas de me demander si je l'aime pour ce qu'il est ou pour ce que je crois qu'il est. Est-ce que je l'aime parce qu'il est Jeon Jungkook, un mec sympa avec qui je m'entends bien, ou est-ce que je l'aime parce qu'il est Jeon Jungkook, l'idole ultra populaire qui fait tourner la tête de millions de filles ? »
Je suis touchée en entendant se mêler dans sa voix de puissantes émotions qui s'emparent de toute son âme, et je me dis que finalement, si elle se pose ce genre de questions, c'est probablement qu'elle aime Jungkook pour ce qu'il est réellement, sinon elle refuserait de se poser la question de peur d'avoir une réponse qui serait toute autre et qui serait trop dure à s'avouer.
« En fait... J'ai peur Charlie, continue-t-elle avec une voix brisée par la détresse. J'ai peur du jour où on devra leur dire adieu, j'ai peur qu'ils nous oublient alors que nous on ne les oubliera jamais. J'ai peur de n'être plus rien dans leur mémoire et que tous ces bons moments qu'on partage ne soient rapidement plus rien à leurs yeux. C'est égoïste mais je ne veux pas qu'ils m'oublient, je veux qu'ils aient les mêmes images que moi dans la tête, je veux qu'ils voient ces semaines passés ensemble comme des beaux instants qu'ils conserveront à l'abri de tout oubli dans un recoin de leur mémoire et que quand ils pensent à nous, ce soit avec nostalgie. Mais... mais je me dis que le jour où on partira, on ne pourra probablement plus jamais les voir, quant au fait de leur parler on peut oublier, même sur les réseaux sociaux. Je n'ai pas envie de souffrir mais j'ai l'impression que c'est le seul déroulement logique à tout ça. Qu'est-ce que tu en penses ? »
Oula, elle me met devant une sacrée question.
« Tu veux la version honnête ou la version plus douce ? l'interrogé-je en lui lançant un regard sérieux.
- La version honnête, répond-t-elle d'un ton décidé.
- Tu vas souffrir. Ça va te faire mal, parce que vivre avec Jungkook encore douze jours ça va te pousser à te rapprocher de lui encore et encore, et le pire c'est que tu commenceras sûrement à te demander si tes sentiments sont réciproques. Tu verras des signes, tu te diras « peut-être qu'il m'aime aussi », mais peu importe finalement car dans tous les cas, tu verras que la date du départ se rapproche peu à peu. Et quand on rentrera, tu commenceras à penser avec nostalgie à tous ces moments qu'on a passés, tu reverras leurs sourires, tu te remémoreras tous nos fous rires, toutes tes compétitions débiles avec lui, et ça te serrera le cœur. Le plus douloureux en revanche, ça serait si tu commencer sérieusement à te questionner sur les sentiments qu'il a pour toi parce qu'il se rapproche vraiment, car une fois à la maison, tu te demanderas si ça aurait pu marcher et tu n'auras jamais de réponse. Mais tu sais quoi ?
- Non dis...
- Tu vas avoir mal, mais quoi qu'il m'en coûte, même si je dois passer des journées entières à essayer de te divertir, je te jure sur tout ce que j'ai de plus cher que je ne te laisserai pas être triste, parce que la plus belle chose chez toi, c'est ton sourire avec ta petite fossette. Je ne te laisserai pas penser au passé avec mélancolie, car on ne devrait pas se souvenirs de ces moments en ayant les larmes aux yeux. Quand on se rappellera ces instants, on sourira ensemble, on rira ensemble, et on sentira que malgré la proximité qu'on avait déjà avant, cette expérience nous a encore plus rapprochées toutes les deux alors on sera heureuse de l'avoir partagée parce que c'est ça être sœurs : partager avec passion et joie. Alors parfois on aura un pincement au cœur, mais dans ces moments là on sourira en se souvenant de tout ce qu'on a vécu. Donc oui Aly, tu vas souffrir, mais dès la seconde où je m'en rendrais compte, je te jure que tu retrouveras ta joie de vivre. »
Il est hors de question que ma sœur souffre pour un garçon, qui qu'il soit, et en tant que sa grande sœur je dois être là pour lui redonner le sourire quand ça ne va pas, et plus encore quand on sait que nous sommes déjà toutes les deux très proches l'une de l'autre.
Aly prend un air attendri et vient m'enlacer, soufflant un petit « merci Charlie » contre mon cou, tandis que je la serre avec le plus de douceur possible pour lui exprimer tout l'amour que j'ai pour elle. Je veux qu'elle me voie comme quelqu'un sur qui elle pourra toujours compter, quelle que soit la situation. Je veux qu'elle me perçoive avant tout comme un soutien qu'elle ne perdra jamais, comme l'une des seules personnes qui sera toujours là pour elle, sans exception, et qui l'encouragera toujours à être positive et optimiste quoi qu'il advienne. Je veux être celle à qui elle confie tous ses secrets sans en avoir honte, sans imaginer que je pourrais la juger. En fait, je veux qu'elle puisse compter sur moi autant que moi je compte sur elle.
J'espère pouvoir être toujours là pour ma sœur, et plus tard quand nous ne pourrons plus nous voir, on aura toujours nos portables pour discuter. Ce lien que nous avons depuis notre enfance, je veux le conserver précieusement parce qu'il est une des choses les plus chères à mes yeux. Aly est comme une partie de moi de laquelle je ne pourrais pas me séparer. Elle est celle avec qui j'ai passé les moments les plus agréables comme les plus difficiles, la seule qui soit capable de me faire rire comme de me faire pleurer, celle dont je peux percevoir le moindre sentiment parce que ce lien que l'on partage nous rend très sensible aux émotions de l'autre. Quand elle va mal, c'est réciproque et quand elle sourit, je veux sourire avec elle.
C'est probablement parce que j'ai toujours eu Aly à mes côtés que je n'ai jamais vraiment ressenti le besoin d'avoir de l'amour de la part d'un garçon : ma sœur et moi serons toujours liées par le sang, elle ne pourra jamais renier cela, alors qu'avec un garçon, rien n'est jamais certain, encore moins à un âge comme le mien. Je n'ai jamais eu besoin de l'attention d'un garçon car j'avais celle d'Aly, et j'étais heureuse simplement parce qu'une relation banale entre sœurs me suffisait largement.
« Tu seras là, hein ? murmure-t-elle toujours serrée contre moi.
- Oui, toujours. Même quand tu croiras que je ne serai plus là, je serai là, et si un jour tu vas vraiment mal, alors où que je sois, je reviendrai pour toi. Je ne t'abandonnerai jamais. »
Ce lien que le fait de grandir sans nos parents nous a poussé à partager toutes les deux, rien ne pourra le briser, c'est une évidence, et je veux qu'elle le sache. Notre mère, notre père, tous les deux ils étaient absents alors qu'ils auraient dû être là pour nous, et il est hors de question qu'elle imagine qu'un jour moi aussi je pourrais devenir un fantôme, car elle aura beau être loin de mes yeux, elle sera toujours mon petit cœur.
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