Chapitre 68
Pour la deuxième fois, je dors dans le lit de Püpe, mais cette fois-ci, sans elle.
Un agréable rayon de soleil m'a réveillé de mon sommeil comateux. Enfin une journée sans nuage sur le Chœur !
Je saute du lit et trottine jusqu'à la fenêtre pour inspirer une bonne bolée d'air frais. Cette bonne odeur de varech qui me titille les narines et me rappelle les Falaises Sanglantes. Cependant, je préfèrerais un doux fumet de pâtisseries avec un bon café brûlant. Les papilles émoustillées, je décide de sautiller vers les cuisines des domestiques. Ceci-dit, ma cheville en vrac me calme rapidement mais ne m'empêche pas non plus d'atteindre mon but, le ventre déjà gargouillant.
Clark est au fond du réfectoire, une pile de brioches sur le coin de la table. Tout ça risque bien d'alimenter sa propre brioche.
Je le rejoins, encore baillant et pose mes fesses sur le banc.
— Tu aurais mieux fait de rester au lit, Clark, ta blessure peut se rouvrir.
— Mais personne d'entre vous ne m'a apporté de quoi apaiser ma faim.
— Eh calme-toi, le soleil vient à peine de se lever.
Il hausse les épaules avant d'engloutir la moitié d'une tartine dans sa bouche déjà pleine :
— Où sont les filles ?
Le rire strident de Tiny répond en partie à la question posée.
Encore toute échevelée, elle s'affale à côté de moi, les joues rougies :
— Dis-donc, Binou, tu es encore en pyjamas ?
Je me tairais sur sa tenue, à elle...
— J'ai dormi chez Püpe donc je n'ai pas eu accès à mon uniforme de bouffon.
— Oh, vous avez fini par vous réconcilier ?
— Non, on fait chambre à part.
— Hein ? Mais elle a dormi où, elle ?
— Dans ma chambre.
Elle fronce les sourcils sans comprendre la logique inexistante de ma vie. D'ailleurs maintenant que j'y pense, il va peut-être falloir que je la délivre, ma furie. Est-ce qu'elle acceptera de rester sage si je lui apporte un petit déjeuner digne de ce nom ? J'en doute fort. Mais on peut essayer.
Je me lève du banc, attrape un plateau que je garnis et retourne à ma chambre. Avec le coude, j'appuie sur la poignée et pousse la porte avec mon pied avant de la claquer derrière moi.
— Chérie ? Je t'ai apportée le petit-dé...
Zut. Où est-elle ? Mon lit et vide et la ceinture du peignoir gît lamentablement sur les draps devant la mine frémissante d'un lapin arrogant. Mais c'est pas vrai ! Comment fait-il pour survivre en permanence ? Et surtout, pourquoi s'attache-t-il ainsi à ma femme ? Du sang macule les draps ainsi que le pelage du rongeur. Qu'est-ce qu'il s'est passé encore...
Je pose le plateau sur le lit, dépité d'avoir transporté toutes ces bonnes choses pour rien. À peine ai-je eu le temps d'effectuer ce geste que le lapin démoniaque me tire déjà sur le bas du pantalon avec hargne. Il s'excite à déchirer mon pyjama mais un bon coup de pied règle le problème. Non mais ! Il valdingue à l'autre bout de la pièce et s'éclate contre une commode. Nom d'un greluchon de guinguette, il me tape sur les nerfs !
Avec ça je ne sais pas où rode Püpe. Elle se cache sûrement derrière une tenture, attendant le moment opportun pour me faire la peau. Aïe aïe, j'aime pas ça du tout.
Et puis en parvenant à la salle de bain, je me retrouve face à elle. Les bras croisés sur sa poitrine, vêtue d'une de mes chemises, elle m'assassine du regard :
— Je ne trouve toujours pas quelle torture t'infliger pour ta stupidité.
— Heu... Je t'ai apporté des pains au chocolat.
— Tu es surtout parti sans fermer à clé. J'ai l'honneur de t'annonce que le majordome m'a vue à poil.
— Huruk ?
— Heureusement que Bhaurisse est intervenu pour l'empêcher de me faire du mal. Je crois qu'au départ il voulait te demander d'assister à la soirée comme les autres bouffons. Mais je lui ai fait changer de plans, apparemment.
Je me pince les lèvres, imaginant mal l'arathor soulever Püpe. En plus, elle déteste les peuples des forêts : vieille rancune.
— Il me sanctionnera ?
— Pour l'instant, il est à l'infirmerie à se recoudre la fesse droite et le bras gauche. Bhaurisse n'y est pas allé de main morte.
Comme si je n'avais pas assez de problèmes... Bon, un majordome de plus à éliminer. Je ne permets pas qu'on s'en prenne à ma femme même si cette dernière a bien l'intention de me réduire en pâtée pour dragon.
— Je suis désolé, ma chérie, la prochaine fois je fermerai à clé.
— La prochaine fois tu ne partiras pas comme un voleur !
Oulah. Je recule lentement devant l'allure hostile de la gnome. Elle va me dévorer, j'en suis certain. Il est temps de partir en quête de ma dague avant qu'elle ne me crève les yeux...
— Commence pas à te défiler, Binou.
— Mais pas du tout. Je suis sincèrement désolé pour cet incident.
— Pas pour le reste ?
— Le reste, tu l'avais cherché !
— Très bien !
Elle se jette sur moi et m'envoie son genou dans le ventre. Le souffle coupé et frappé devant la fulgurance de l'attaque, je m'effondre sur le parquet vernis. Püpe m'attrape par mes pauvres cheveux décolorés et me plonge la tête dans la baignoire encore pleine d'eau glacée. Il m'en faut pas plus pour contrattaquer. Je lui fauche les jambes et lui ceinture la taille avant de la faire basculer dans la cuve.
Immédiatement, ses longs cheveux obstruent son visage et la voir se débattre avec ses mèches tout en tentant de se défendre me provoque quelques gloussements vengeurs.
— Binou... Tu es insupportable.
— Je sais que tu m'aimes.
Elle parvient enfin à se frayer une ouverture avec sa chevelure et soupire de lassitude, les bras croisés sur sa poitrine.
— Tu vas attraper froid.
Je me penche pour la sortir du bain mais elle attrape brusquement le col de ma chemise et me renverse dans une eau beaucoup trop froide.
— Püpe ! Petite diablesse !
Cette fois-ci, c'est elle qui ricane et s'extirpe aussitôt du bain avec une agilité qu'elle dissimulait juste auparavant.
Sans complexe, elle retrousse sa chemise trempée et la passe au-dessus de sa tête pour s'en défaire. Des centaines de petites perles d'eau dégoulinent sur sa peau diaphane, par endroit marquée par des cicatrices roses. Faut qu'elle arrête de castagner tout le monde aussi. Même si j'avoue que son petit côté tigresse ne me rebute pas toujours.
— Tu sors ou tu t'es déjà transformé en glaçon ? Je te rappelle qu'on est en plein hiver.
Je m'exécute, peu enclin à tomber malade. La gnome me rejoint avec un petit sourire en coin et me retire mon haut de pyjama avant de m'asseoir sur un confortable fauteuil. Ah bah... d'accord...
Loin de m'opposer à ces petites mains expertes sur mon corps, je la laisse se poser à califourchon sur mes cuisses et glisser ses doigts dans mon pantalon. Mes yeux ne tardent pas à se voiler de plaisir pendant qu'elle me caresse de la sorte. Inconsciemment, je pose mes paumes sur sa peau froide :
— Tu es glacée, ma chérie...
— Crois-moi... J'ai eu trop chaud pendant toute la nuit.
Je ricane en imaginant la gnome attachée, dégoulinante sur les draps. Elle a dû me maudire mais je suppose que ses pensées se focalisaient entièrement sur moi. Et rien que ça me fait bander.
Je me saisis de ses jolies fesses que j'agrippe fermement pour la rapprocher davantage de moi. Püpe écarte instinctivement les cuisses, excitée d'assouvir les désirs de sa nuit.
Cela fait trop longtemps que je rêve d'une véritable partie de jambes en l'air. En fait, depuis que l'autre barge m'a ressuscité. Je savais que les cheveux blancs m'apporteraient la poisse. Heureusement que le noir revient ! Et avec ça, la liberté d'honorer ma compagne bien en profondeur.
Je parviens à me relever, les jambes de la gnomes enroulées autour de ma taille et ses mains croisées derrière ma nuque. Nous nous embrassons avidement alors que je la porte jusqu'au lit.
— Tu restes cette fois-ci, hein ? sourit-elle en glissant ses doigts dans ma chevelure épaisse.
Sa voix se perd au-dessus de ma tête ; je suis bien trop occupé à profiter de l'instant présent. Sous mon corps, je sens sa peau se réchauffer rapidement et ses membres se détendre après mes effleurements. Je n'ose croire que je vais enfin y arriver et reprendre le dessus dans mon conflit conjugal.
La gnome s'adosse contre les oreillers et me laisse s'allonger sur elle. T'en fais pas ma belle, je vais pas tarder à te retourner et te prendre à répétition. Pour l'instant, je profite de ses adorables cajoleries entre mes jambes alors que ses lèvres bien pulpeuses se presse contre ma peau brûlante. Avec le nez enfoui dans son cou, les mains plaquées sur ses seins et la queue entre des doigts experts, je me porte comme un roi. Mes ronronnements de plaisir arrachent des petits rires à ma furie qui continue de me chauffer comme ce n'est pas permis.
— Püpe... Crois-moi : je vais te besogner comme tu n'auras jamais vu.
Elle laisse échapper un gloussement :
— Je crois surtout que Monsieur va se répandre au bout de quelques secondes !
Olalah, commence pas à m'agacer toi ! Je suis surtout là pour assouvir mon plaisir, tu as déjà assez profité, ces derniers temps.
Sans hésitation, je me dégage d'elle et la retourne autoritairement de manière à avoir son fessier contre moi. La vue de sa chatte déjà apprêtée comme il faut me fait déglutir de plaisir. Mon sexe est plus que tendu et je commence déjà à couler surtout lorsqu'elle se cambre bien docilement.
Sans plus tarder, je m'accapare ses belles fesses et m'apprête à glisse dans son fourreau humide ; je me mords déjà les lèvres face à l'orgasme qui m'attend...
— Binou ! Le roi te demande sur le ch...
— BINOU ! LA PORTE !!!
Oh merde, j'ai encore oublié. Yauly vient de rentrer dans ma chambre et reste interloqué, sûrement pas prêt à ce genre de scènes. In extremis, je tire le dessus de lit au-dessus de Püpe et moi et assassine la chimère du regard. Je vais exterminer ce félin !
— Désolé, j'ignorais que...
— Dégage immédiatement, grogné-je.
— Oui mais... Tu es attendu maintenant à la table du roi et...
Mais c'est pas possible !
— Bon, c'est bon, j'ai compris ! J'arrive.
Yauly hoche la tête et disparait, me laissant seul avec Püpe et ma colère.
— Dommage, murmure-t-elle avec une moue déçue.
Je vais devenir fou ! Le premier qui se paie ma tête aujourd'hui, je le bouffe !
Je descends du lit et pars me trouver un nouveau costume de bouffon. Cette ville est totalement maudite ! Tous les ingrédients étaient enfin réunis pour passer un bon moment et voilà que ce roi de pacotille quémande ma présence pour égayer son misérable repas.
J'ouvre les battants de l'armoire à la recherche d'un uniforme abominable. Le mieux que je puisse porter semble avoir été trempé dans le vomi d'un orc.
Après un passage express en salle de bain, je me carapate dans les couloirs, peu désireux d'encourir la rage du roi. Va falloir qu'on m'explique pourquoi je suis tant indispensable. Alors que je dévale les escaliers, je rate une marche et me tords la cheville. Rhaaa, c'est pas possible. Bien sûr, c'est pas le bon pied ! Boitillant, je rejoins la salle à manger du roi où attendent déjà quelques convives. Contrairement aux jours précédents, les planches et les tréteaux ont été remplacés par des sofas et des tables basses pour accueillir une vingtaine d'invités. La plupart d'entre eux festoient déjà allongés alors que des domestiques leurs servent à boire.
Mais étrangement, je ne croise pas Arnil...
— Binou ! s'écrie jovialement Silovan, je t'attendais !
— Pourquoi demander ma présence ?
L'astre ricane et se pose nonchalamment sur un kliné où est assise Anarrima.
— Il faudrait la dérider, tu ne crois pas ? J'ai cru comprendre que tu allais lui être assigné.
Je hausse les sourcils devant la mine effondrée de la jeune femme. Le roi doit désormais la surveiller étroitement maintenant qu'elle a affirmé clairement sa désapprobation. Je doute que le son de mes grelots ne la distraie, en tout cas... Surtout que Silovan prend largement la confiance en lui enroulant le bras autour des épaules. D'un geste rageur, elle le repousse et lui crache au visage :
— Lâchez-moi, gros porc.
— Elle sort les griffes, la belle. Tu pourrais faire un effort, non ?
Pas de réponse.
— Tu sais que c'est moi qui ai tiré sur la reine d'Arminassë ?
Elle baisse la tête, ne voulant se mêler à cette conversation.
— Je n'hésiterai pas à répéter ça sur toi si tu ne te montres pas plus enthousiaste.
— Laissez-là, maître Silovan, interviens-je, vous l'importunez.
— Pour quelles raisons, je voudrais bien savoir !
— Vous venez de lui dire que vous avez attaqué sa mère. Elle n'a pas besoin de voir votre face en ce moment.
Silovan pouffe de rire avant de se rapprocher davantage d'Anarrima.
— Je passerai le bonjour à ta chère maman lorsque je reviendrai à Arminassë. Mais tu m'excuseras si je profite un peu de sa léthargie, hein ?
— Vous êtes immonde...
Bon, comme ce vieux débris répugnant commence à raconter ses fantasmes dégoutants sur Luinil, j'interviens. Je saisis une énorme amphore de vin et la déverse sur la tête du trublion. Perte de crédibilité assurée, mon vieux !
Hors de lui, l'astre se relève d'un bon pour faire face aux rires des convives.
De mon côté, j'agite gaiement les grelots de mon chapeau, fier d'avoir fait taire cette ordure.
— Tu t'es enfin réveillé, toi ? grince-t-il tout dégoulinant.
J'ai ruiné son beau costume. Quel dommage...
— Vous m'aviez demandé d'amuser la galerie. C'est réussi, non ?
La jeune femme laisse esquisser un sourire de contentement. Les nerfs à vif, Silovan s'adresse à deux gardes de faction :
— Vous deux, allez chercher le prisonnier puisque l'on tient tant à s'amuser.
Je fronce les sourcils :
— Vous n'y pensez pas. Le roi vous châtierait fortement s'il s'apercevait que vous jouiez ainsi avec un tel captif...
— Arnil reste occupé par la coordination des réseaux.
— Et vous avez surtout envie de faire porter le chapeau à un autre maintenant que vous êtes bien ridiculisé.
— Ferme-là, le gnome et laisse notre petite Ana retrouver son cher papa.
Lassée, cette dernière se lève en vue de quitter la joyeuse assemblée.
— Non, tu restes.
— Laissez-moi.
— Je suis sûr que tu rêves de te jeter dans les bras de celui qui t'a ignorée pendant vingt ans et qui t'a utilisé comme un vulgaire pion, hein ?
Anarrima serre les dents alors que l'astre la rassoit de force. Par une porte dérobée, les deux gardes trainent Morgal jusqu'au centre de la pièce. Tous les regards curieux des spectateurs convergent vers lui et je ressens une certaine gêne flotter au-dessus des têtes.
Sur les dalles froides, l'elfe est totalement vidé de son énergie, refermé sur lui-même. Personne ne pourrait soupçonner que cet homme gouvernait le Cosmos il y a encore quelques semaines et j'ai l'impression que cette nouvelle noblesse oisive est déçue du produit. Elle espérait probablement à un monstre difforme et hurlant.
Mais contrairement à leurs attentes, ne se présentent à eux qu'une pauvre créature à l'allure peu repoussante.
Le pire dans cette scène de mauvais goût, c'est que j'ai l'impression que Morgal est conscient, même si son regard est fixé avec détermination sur le sol. Il n'ose pas croiser les yeux avec sa fille dans un tel état de déchéance.
Cette histoire m'est insupportable.
Un courant d'air se fraie soudain un passage jusqu'à ma tête : Silovan vient de me voler mon chapeau dans un tintement de grelots.
— Il aura l'air plus vivant avec ça.
Il enfonce la coiffe sur la tête de mon ancien maître qui ne bronche toujours pas.
— Arrêtez... murmure Anarrima en détournant le visage.
Morgal baisse davantage la tête en entendant la voix de son enfant, la mâchoire contractée par la colère sourde qui gronde en lui. Il est ouvertement humilié devant ses ennemis et l'un des êtres qui lui est le plus cher. Cette situation est abominable pour lui mais que peut-il faire ? Ces forces l'ont déjà quitté depuis longtemps. Avec son chapeau de bouffon et sa mine prostrée, il semble incarner l'allégorie de ce monde qui part en quenouille.
Et surtout, comment supporter être ainsi à la merci d'une caste aussi décadente où tout devient un prétexte pour se déconnecter du réel.
Voyant que son numéro malsain n'amuse pas vraiment ses confrères déstabilisés, l'astre se tourne vers moi :
— Et toi, Binou, ça ne te fait rien de voir les rôles inversés ?
— Je reste toujours un esclave...
La bouche de mon interlocuteur se relève dans un rictus carnassier. Il me tend alors un knout sorti d'on ne sait où et déclare :
— J'imagine qu'il t'a torturé quand tu travaillais pour lui, non ? Rends-lui désormais la pareille.
J'écarquille les yeux, choqué par ce qu'il me demande de faire. Tout d'abord, non, Morgal ne m'a jamais torturé et ensuite, même si j'ai eu plusieurs fois envie de le massacrer, je ne me vengerai pas de la sorte. Ce serait comme minimiser, orchestrer trivialement toutes les souffrances que j'ai subies.
— Allez, sois pas timide.
Derrière le chantre de cette farce, les invités s'animent et semblent prendre plaisir à la scène ; lorsqu'il s'agit de faire couler du sang... Des encouragements me viennent jusqu'aux oreilles mais cela me révulse encore plus.
— Arrêtez... supplie Anarrima, les yeux en larmes.
Je recule, refusant de participer à cette comédie désagréable.
— Très bien, puisqu'il faut tout faire soi-même...
Silovan rejoint l'elfe et déchire le haut de sa combinaison avant d'abattre son fouet. Le dos déjà parcouru de cicatrices s'ouvrent dans une multitude de sillons carmin. Le sang gicle sur les convives qui ne se retiennent pas de rire ou de commenter les effets du fer sur la victime.
Seul le cri d'horreur de la jeune femme atteste réellement de la situation.
Morgal s'effondre sur ses coudes dans un râle épuisé. Les clochettes de son chapeau sonnent froidement en même temps que les goutes rouges s'éclatent sur les dalles.
Silovan relève le bras, prêt à frapper de nouveau. Instinctivement, je m'interpose entre lui et mon ancien maître, le bras tendu face au fouet qui ne vas pas tarder à s'abattre. Mais ce n'est pas sur ma main que les crochets s'enfoncent...
Mon visage prend tout de plein fouet. Et c'est le cas de le dire. Immédiatement, les dents métalliques déchirent ma face sans pitié. Ma peau est lacérée, voire peut-être décollée. Un rideau sanglant embue mes yeux alors que mes cris me brisent les tympans. La douleur est insupportable. Je m'effondre sur le sol, les mains plaquées sur ce qu'il me reste de visage.
J'ignore alors tout ce qui se passe autour de moi, seule ma souffrance existe et la panique qui grandit en mon cœur. Je ne parviens même pas à discerner mon entourage tellement mes yeux sont poisseux.
Une main me saisit par le col et sans que je comprenne ce qu'il m'arrive, on me plonge la tête dans une vasque d'alcool. Immédiatement, les brulures décuplent et me rendent totalement fou...
— À ton tour de recevoir du vin sur la tête.
Je perçois les rires se mêler à mes cris d'agonie. J'ai si mal... J'ai l'impression que tout part en miettes et se liquéfie autour de moi. Ma douleur n'a que l'amusement de mes tortionnaires en échos ; même mes larmes me brûlent comme un acide dévastateur.
Le liquide vital dégouline dans mon cou et sur moi comme pour préparer mon corps à un sommeil glacial.
Dans tout cet enfer, des poignes se referment sur mes épaules et je suis trainé vers une destination inconnue...
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