18 | 'LE RUBIX-CUB'
Ses pieds nus en l'air, les jambes contre le lit de Rindo, la tête sur le sol, Tohma racontait à son voisin la façon dont il avait recroisé Izana, sans pour autant l'observer. Son attention était portée sur le rubix-cub, celui qu'il avait reçu à son anniversaire. Ça faisait plus de quinze jours maintenant qu'il n'avait pas réussi à le remettre en ordre, et étant donné qu'il n'avait ni la patience ni le talent, il commençait à être un peu soûlé.
« Enfin voilà, j'ai eu son numéro de téléphone et–
— J'ai rien compris à ce que tu m'as raconté là, avec tes « woush » et tes « pam ! ». T'es nul, le coupa Rindo avec son air si hautain qui lui était propre.
— Tu me casses les couilles, crête de coq, l'insulta le garçon aux cheveux mauves en souriant d'une manière assez agacée, T'es con, j'y peux rien. Même Ran il comprendrait.
— Dis donc–
— Bref, Asanai l'empêcha de continuer, Au final je lui ai envoyé un message vers vingt-trois heures et on a parlé toute la nuit.
— Sérieusement ? Montre ! le plus jeune frère Haitani, qui était affalé sur son lit, se redressa brusquement.
— Pas maintenant, je fais mon rubix-cub. »
Rindo le dévisagea, effaré. Il resta figé quelques secondes avant de craquer et de sauter sur son voisin pour le secouer dans tous les sens comme un cocotier.
« On s'en fout de ton rubix-cub de merde ! Au lieu de mettre les points sur les i t'as moyen de mettre les tchoins dans ton lit et tu fais des rubix-cub ?! Putain, mais quel boloss, j'hallucine !
— Laisse-moi, c'est mon cadeau d'anniversaire, ma mère force avec !
— On s'en fout de ta mère, montre-moi les messages !
— Elle dit que c'est important pour son « gendre » ! Tohma haussa le ton à son tour, grimaçant au dernier mot prononcé.
— Son gendre ? Son gendre ?! répéta le délinquant, ahuri. Il tenait toujours Tohma par les épaules et sa poigne se renforçait considérablement, Izana Kurokawa ?! Son GENDRE ?!
— Ta gueule ! se moqua le jeune homme, gêné, Elle est nulle, j'y peux rien !
— Oui, vos gueules ! s'écria Ran en entrant dans la chambre. Ses cheveux étaient détachés et cascadaient sur ses épaules. Ennuyé, il croisa les bras et regarda les deux plus jeunes de haut, Vous foutez quoi ?
Ils ne répondirent rien, et après quelques instants dans le silence absolu, Tohma bougea finalement un côté du rubix-cub.
« J'ai quatre faces de la même couleur, murmura-t-il en silence.
— Ouais, bah faites votre rubix-cub en silence. J'ai du sang sur mon bâton, j'essaye de le nettoyer. »
Tohma eut des sueurs froides, et l'envie de lui poser la question de qui était-ce le sang lui picota les lèvres. Au final, Ran passa une main dans ses cheveux et tourna les talons. Il avait l'air vraiment fatigué – probablement à cause de Rindo qui faisait exprès de le réveiller aux aurores. Dès que la porte fut refermée, ce dernier reporta ses pupilles violacées sur Tohma, et lui sourit de toutes ses dents, narquois.
« Vous avez parlé de quoi toute la nuit ?
— Pas grand chose. De lui un peu, de mon accident, ce genre de trucs. »
Rindo plissa les yeux, un peu déçu. Il s'attendait à mieux, ou à quelque chose d'un peu moins vague, en tout cas. Ses yeux s'écarquillèrent quand le rubix-cub que Tohma tenait entre ses mains fit un bruit bizarre. Il laissa tomber Izana et se pencha vers le casse-tête, probablement aussi surpris que son voisin.
« Qu'est-ce que c'était que ça ?
— Je sais pas, j'ai fait un mouvement au pif. Je crois que je l'ai bientôt réussi.
— Pas trop tôt ! il ne pouvait pas s'empêcher de le rabaisser, Ça t'en aura pris du temps ! »
Il n'eut en réponse qu'un regard assez cynique. Le plus jeune préféra donc l'ignorer pour faire un dernier mouvement de poignet et résoudre son casse-tête. Effaré, il resta bouche bée, alors qu'un autre son assez sourd se faisait entendre. Un bruit concis, comme un mécanisme ancien qui se débloquait.
« Il date de quand ce bidule ?
— Je ne sais pas. Ma mère m'a dit que ma grand-mère l'avait fabriqué pour elle, mais qu'elle n'en aurait jamais eu l'utilité. »
Rindo fronça les sourcils, encore plus confus. Tohma décida de le secouer un peu, pour voir, et commença à paniquer quand il s'ouvrit en deux.
« AaAh ?!
— T'as tout cassé, abruti !
— Tais-toi Simon ! le surnom venait définitivement d'Alvin et Les Chipmunks, ce qui agaça considérablement le dénommé « Simon », J'ai rien fait, ça s'est ouvert tout seul.
— Et ben alors ? »
Asanai ramassa l'objet qui était tombé sur le sol et récupéra ce qui se trouvait à l'intérieur. Comme un coffret, le rubix-cub s'était ouvert et si l'on ignorait les machineries, les vis et les ressorts, on pouvait se concentrer sur deux bagues. Le jeune homme crut que ses yeux allaient sortir de ses orbites quand il remarqua l'éclat brillant du diamant trônant sur le haut des deux bagues. Il connaissait sa grand-mère comme une vieille femme aigrie avec le reste du monde qui faisait très attention à son apparence et ses attirails, mais il ne s'attendait pas à ça.
Rindo se pencha par-dessus son épaule, soufflé.
« Sa mère la pute, murmura-t-il en expirant bruyamment, Il est pas si mal ton cadeau d'anniversaire.
— Ça vaut combien ça tu penses ?
— C'est pas de la gnognotte. Ça se voit à la brillance. Il étincelle sa mère.
— Arrête de dire « sa mère », grinça Tohma sans lui jeter un seul coup d'œil.
— Tu vas le dire à ta daronne ? Et ta grand-mère ?
— Bah oui, quand même.
— Et tu vas en faire quoi ? »
Le garçon aux cheveux lilas se souvint alors de ce que sa mère lui avait dit, et qu'il avait partagé à son ami quelques instants plus tôt.
« Oh mon dieu, non. »
Étonné, Rindo remarqua qu'il s'était mis à rougir jusqu'à la pointe de ses oreilles. Il éclata alors de rire.
« HAH ! s'écria-t-il en tapant du poing contre son lit, hilare, Tu vas aller le donner à Izana ?!
— Non !
— Ce serait si drôle ! Je veux voir la tête qu'il va tirer AHAHAHAH !
— TA GUEULE, C'EST GÊNANT ! »
Le plus jeune Haitani lui attrapa les bagues d'un simple mouvement rapide, sans aucun autre geste superflu. Alors que Tohma essayait de les lui rattraper, pestant contre lui, Ran rouvrit brutalement la porte. Les cernes sous ses yeux commençaient à se faire belles, elles se montraient, moins cachées. Il n'avait plus aucun moyen de cacher sa fatigue : il était exténué, et avoir deux idiots qui beuglaient quand il essayait de s'apaiser n'arrangeait pas son état. Cette fois-ci, il avait son bâton avec lui, luisant et scintillant. Une nouvelle fois, il fixa les deux abrutis qui s'étaient figés au moment où il était entré.
« Je ne cherche même plus à comprendre.
Rindo et Tohma étaient à genoux, face à face, les mains jointes alors qu'ils tenaient tous les deux les mêmes bagues. Après les avoir vu l'un sur l'autre, le plus âgé commençait à se poser des questions, et il finit par secouer la tête.
— Taisez-vous, il sourit mollement, ce qui terrifia Asanai au plus haut point. Le blond aux mèches bleues resta de marbre, Vous êtes bizarres. »
Ah. Bon.
Tohma ne savait plus réellement où donner de la tête.
NDA : Freddy ! You're supposed to be on lockdown !
Vanessa, i frew up 🐻
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