Chap #82
Bonjour tout le monde, j'espère que vous avez passé un bon réveillon ! En tout cas, voici mon cadeau pour vous <3
***
Ce matin je commence mon premier jour de travail, j'ai rendez-vous à 8h30 avec le sous-chef pour qu'il m'explique ce que j'aurai à faire. Je vais devoir fermer ma gueule, obéir aux ordres et travailler dur à des tâches à la con pendant les 2 premiers mois au moins. Avec 0 expérience de cuisine, je ne sais même pas faire les tâches les plus simples et je suis qu'un commis, tout juste bon à nettoyer les plans de travail, vider les poubelles, faire la plonge et éplucher des légumes. Je vais détester ça, mais je dois en passer par là.
Le sous-chef s'appelle Kai, un grand mec un peu froid et bien trop raide. Il me détaille toutes les tâches qu'on attend de moi et me laisse une petite liste pour pas que j'oublie. Il s'agit de trucs tout con : mise en place des plans de travail, vérifier la date des produits dans les frigos, faire la liste de ce qu'il reste et un peu de nettoyage.
Ensuite l'équipe arrive, on fait un point sur le menu, tout le monde prend son poste et on me demande de nettoyer et d'éplucher les légumes. J'me prends quelques remarques sur ma vitesse, puis quand je vais plus vite, sur la qualité de l'exécution.
Oui, ben je peux soit aller vite, soit le faire parfaitement, bordel, c'est mon premier jour connard !
Ça sait critiquer mais personne ne prend deux secondes pour m'expliquer quoi que ce soit, je m'en fou, je me concentre et m'applique, je vais éplucher tellement vite et bien ces légumes qu'ils finiront par être obligé de me donner autre chose à faire. Je serre les dents et j'encaisse les remarques, je suis là pour ça. Quelques odeurs alléchantes commencent à s'élever dans l'air alors que les cuisiniers préparent les fonds pour faire les sauces. J'ai envie d'aller jeter un œil, goûter et poser des questions, mais je me concentre sur ce que j'ai à faire.
Vers 11h les serveurs arrivent, on finit la mise en place et on bouffe un truc vite fait dans un petit coin aménagé pour ça.
"T'es un peu vieux pour un apprenti", "t'as l'air costaud, ça sera utile pour décharger les livraisons de bouffe !"... Je réponds dans un grognement aux quelques questions qu'on me pose mais personne n'a l'air offusqué. C'est une bonne chose, pas de chichi ici, pas de besoin de faire semblant de s'intéresser à la vie de tes collègues apparemment.
Les serveurs mettent en place la salle puis on fait le point avec eux et je tremble presque d'excitation alors que les premiers clients arrivent.
- C'est là que ça commence, j'espère que t'es prêt parce que ça va envoyer, me prévient un certain Jin en rigolant.
Et en effet, j'avais beau avoir imaginé comment se passait un coup de feu, ça crie, ça s'insulte, ça rigole... Les serveurs entrent dans la cuisine, annoncent les tables, les plats et déposent les bons à un rythme trop soutenu pour que j'arrive à suivre.
Je suis censé m'occuper des dressages : un peu de sauce, un peu de déco, un coup de torchon pour nettoyer le bord de l'assiette, à un moment je me retrouve perdu, un grand mec blond me reprend un plat des mains, me crie dessus, dresse lui-même et le met au passe avant de faire retentir la sonnette qui indique aux serveur qu'il y a des plats à servir.
A 13h30 ça se calme, il ne reste plus que quelques desserts à faire partir et je commence à nettoyer la cuisine avec Jin. Vers 15h les cuisines sont redressées pour le service du soir, je repars chez moi, déçu de ma prestation. Je sais que je devrais profiter de la coupure pour faire une sieste, mais impossible. Je me repasse les événements dans ma tête et réfléchis à ce que j'aurais pu faire mieux, je me prépare pour le prochain service.
A 17h je suis de nouveau au restaurant, en tenue et lorsque le coup de feu est lancé je gère mieux la pression. Je dresse les assiettes sans écouter les cris qui fusent, je me laisse pas démonter par le stress ambiant et quand le service se termine j'ai pas vu le temps passer. Je me rends compte que je ne me suis même pas arrêté pour boire alors que je meurs de soif.
Kai me félicite d'avoir survécu à mon premier jour sans craquer et je termine de nettoyer la cuisine vers 23h, avant de repartir chez moi. Les journées sont intenses, mais je vais travailler que du mercredi au samedi.
Je rentre à l'appartement, épuisé. Je jette ma tenue dans la machine à laver, puis je passe rapidement sous le jet brûlant de la douche avant de m'affaler dans le lit.
- Bien passé cette première journée ? me demande Shoto
- Tu devrais dormir, il est tard, je lui réponds.
- Je n'y arrivais pas, j'arrêtais pas de me demander comment ça se passait pour toi
- C'était épuisant, mais je l'ai fait. J'ai tout défoncé pour mon premier jour.
- Ça ne m'étonne pas de toi.
- Et j'ai pas vu le temps passer, pourtant j'ai fait que des tâches reloues mais j'aime le moment du coup de feu ou tout s'accélère. Mais putain, qu'est-ce que ça gueule en cuisine.
- Pour que toi, tu dises ça... c'est que ça doit être vrai.
- Je gueule pas moi.
Il me fixa de son petit regard en biais qui signifiait "ah vraiment ?". Je lui mis un coup avec mon oreiller.
- Et violent avec ça ! dit-il, sa voix légèrement étouffée par mon coussin mais dans laquelle je pouvais déceler un certain amusement.
Je le libérais et me couchais sur le dos, les bras croisés sur mon torse.
- Tu boudes ? me demande-t-il.
- Nan, je suis fatigué !
- Mais oui, bien sûr...
Il se penche, m'embrasse tendrement et me souhaite bonne nuit, je lui répond de faire de beaux rêves et je m'endors presque instantanément.
J'ouvre un œil en plein milieu de la nuit, il est 3h14. J'ai pas soif, pas envie de pisser, pas fait de cauchemar. Je me demande ce qui a bien pu me tirer du sommeil. Je baille et me retourne vers Shoto et mon cœur frôle la crise cardiaque quand je le vois les yeux grand ouverts.
-Oh putain, t'es réveillé. Tu m'as fait flipper.
- Excuse-moi, dit-il.
Sa voix est étrange, je pose ma main sur son bras et il tremble, il est trempé de sueur.
-Hé Shoto, ça va pas ?
-Petite crise d'angoisse.
-Petite ? Non mais peu importe en fait, pourquoi tu m'as pas réveillé ?
- Tu as besoin de dormir.
- Non, j'ai besoin d'un copain qui me surprotège pas et qui me réveille quand il fait une crise de panique dans mon lit.
Sur ces paroles dures que j'avais lâché malgré moi, je vire la couverture de Shoto pour pas qu'il monte à 45 degrés.
- N-non.
- Quoi ?
- Ça me rassure d'avoir la couverture sur moi.
Je lui remet le drap dessus et me lève pour aller chercher un torchon que je mouille d'eau fraîche pour tenter de le rafraîchir un peu. Il tremble légèrement. Je caresse sa joue avec mon pouce pour le rassurer.
-Tu as peur ?
- Oui
- De quoi ?
- C'est stupide.
- On s'en fout.
- J'ai comme l'impression que mon père peut débarquer à tout moment pour nous tuer.
- Ah...
Super, super réaction. Bravo Katsuki. Bordel trouve un truc intelligent ET gentil a dire.
- La porte est fermée, et même si ce n'étais pas le cas, il ne sait pas où j'habite, ni même qui je suis pour toi, il n'a aucun moyen de savoir que tu es ici avec moi et je suis là. Personne ne viendra te faire du mal. Et de toute façon, je ne laisserais personne te faire de mal. Tu le sais ?
- Je sais et je sais que ça n'a aucun sens mais c'est plus fort que moi. Je panique et je peux plus réfléchir de façon logique. Mais ça va déjà mieux maintenant que tu es réveillé j'ai moins peur.
- Raison de plus pour me réveiller quand ça arrive. Tu veux que j'allume ?
- Je veux bien.
J'allume ma lampe de chevet pour que ça ne nous grille pas les yeux. Ses yeux sont rouges et je peux lire la terreur à l'intérieur. Je déteste ça. Je dois faire quelque chose.
- Je dois conclure que tes séances de psy ne t'aident pas trop ?
- Si mais ça ressasse des trucs.
- C'est-à-dire ?
Je lève un sourcil et lui lance un regard interrogatif et il m'offre un faible sourire.
- Ça marche très bien, je fais quasiment plus de crises la journée. Mais comme je raconte ce qui m'est arrivé, des souvenirs reviennent parfois en rêve et je me réveille dans cet état et j'ai eu une séance aujourd'hui, donc...
-Tu es sûr que ça marche ?
- Je me sens mieux quand même.
- Ok. Je suis content alors. Et ça va financièrement ?
Je savais que l'argent était une des raisons principales qui l'avait empêché d'aller voir un professionnel avant.
- Je me débrouille. Je mange ici tout le temps et vous ne m'avez jamais laissé payer pour les courses et tu ne me laisses pas non plus payer quand on sort.
- Ça t'emmerde ? Je veux dire sur une échelle de 1 à 10 ?
- 4 je dirais, je trouve ça mignon et je peux comprendre. Je suppose que si j'étais à ta place je voudrais faire pareil.
- 4, ça va. Et puis ça ira dans l'autre sens, tu vas être juge pour enfant et je serais commis dans un restaurant pendant pas mal de temps encore...
- Tu penses à l'avenir ?
- Évidemment
- Dans si longtemps que je serais juge ?
- J'compte pas te quitter.
- Il y a une différence entre ne pas vouloir partir et imaginer le futur avec quelqu'un.
- Je suis du genre amour immuable. Du genre aimer en secret mon meilleur ami pendant 18 ans sans aucun retour. Alors prépare toi à m'avoir sur le dos pour le reste de ta vie. A moins que tu en aies marre de moi avant.
Apparemment à 3h du matin je n'avais plus de filtre entre mes pensées et ma bouche. Je ne savais pas si c'était une bonne chose mais c'était facile de parler.
- Tu es le seul que j'aime, répondit-il.
- Hum
- Oh, pardon, je ne voulais pas dire que ça remet en question la façon dont tu m'aimes. Ce que je veux dire c'est que je n'ai jamais aimé personne d'autre.
- J'avais compris, t'inquiète double-face.
- Tu te remets à m'appeler comme ça, je dois mal le prendre ?
- Non, je te taquine, lui dis-je en lui faisant un pichenette sur le nez avant qu'il ne fasse une petite grimace.
Il attrape ma main au passage et la colle sur sa joue. Il est encore très chaud, je contemple son visage en pensant à notre avenir.
- J'ai hâte qu'on habite ensemble, dis-je en souriant.
- Tu as hâte de partir d'ici ? me demande-t-il un peu étonné.
- C'est pas parce que je suis triste que je vois pas les avantages. On peut ressentir plusieurs choses en même temps.
- Tu es plus triste ou heureux ?
- Je sais pas trop si c'est quantifiable, lui dis-je. Mais je me sens assez heureux en ce moment..
- Dis moi ce qui te rend triste et ensuite ce qui te rend heureux, demanda-t-il.
Je prends un instant avant de répondre à cette requête.
- Deku et moi on va perdre un à un tous les lieux qui nous appartiennent. 4 ans à la pizzeria à bosser ensemble, c'est terminé. 5 ans de fac à se retrouver le midi pour manger, c'est fini et 5 ans de coloc qui étaient précédées de 12 ans de quasi cohabitation. Ce n'est pas tant de quitter cet appartement le plus dur. Quand je retrouve Deku, je suis chez moi. Et après son déménagement, ne plus le voir et lui parler tous les jours sera la norme, alors que je pense que depuis qu'on se connaît il doit pas y avoir plus de 15 jours dans l'année qu'on passe l'un sans l'autre. J'ai peur qu'il s'éloigne, j'ai pas envie qu'on se voit plus qu'une fois par semaine. Puis une fois par mois. Puis 3 fois dans l'année. Je sais pas comment expliquer, il a été le centre de mon monde depuis si longtemps. La raison pour laquelle je me levais le matin, c'était ma famille, ma paix. J'ai peur de ressentir un grand vide, un manque. C'est douloureux le manque.
- Oui, c'est vrai, acquiesça- t-il le regard dans le vague.
- Quelqu'un te manque ? me permets-je de lui demander.
- Ma mère. J'étais petit quand elle a été emmenée à l'hôpital et ensuite je ne suis plus retourné la voir pendant longtemps. C'était ma paix à la maison. Le jour où elle a disparu, mon monde a cessé d'avoir un sens.
J'aurais voulu dire quelque chose mais je ne sais jamais quoi répondre dans ces moments, certain qu'il ne s'attendait pas à ce que je m'apitoie. J'étais plutôt en colère et triste. Il faut dire que moi j'ai eu une double ration de maman entre la harpie qui m'a mit au monde et la mère surprotectrice de Deku qui m'a traité comme son fils depuis mes 4 ans. Chaque fois qu'il me parlait de son histoire je me sentais minable de m'apitoyer sur mon sort et en même temps je voulais être là pour lui faire oublier tout ça et aller de l'avant, qu'on aille tous les deux de l'avant.
- Tu étais tout seul chez toi après son départ ?
- Non, il y avait mes frères et soeur mais quand on était jeunes, on avait pas trop de relation. Je ne sais pas pourquoi mais mon père s'acharnait plus sur moi alors je suppose qu'ils avaient peur. Quand mon frère aîné a fugué, Natsuo et Fuyumi se sont un peu plus occupés de moi et mon père... il s'énervait moins mais avec beaucoup plus de violence. Quand je suis parti après mon bac, je ne leur ai donné aucune adresse, aucun moyen de me joindre. Je ne voulais plus me rappeler du passé et prendre un vrai nouveau départ. Déjà que j'ai un rappel de son visage chaque fois que je jette un regard dans la glace...
- Tu ne vas plus jamais les revoir alors ?
- Mon psy me dit que ça serait peut être bien d'essayer, j'ai quelques bons souvenirs avec eux. Mais j'ai peur que mon père me retrouve. Est-ce si grave de ne plus avoir de famille ?
- Oui, enfin, je ne te forcerais jamais à renouer avec ta famille, mais il faut être entouré c'est sûr.
- C'est toi qui dit ça ?
- Rigole mais entre le nerd, tête d'ortie et Shin, je ne suis pas seul.
- Et moi ? demande-t-il.
- Bien sûr, toi aussi. Et toi, tu peux compter sur moi et Deku.
- Et maintenant, tu me dis ce qui te rend heureux ?
- Être de plus en plus certain d'avoir un avenir avec toi. Me dire que finalement je ne serais pas seul après que Deku soit parti. Et je dis pas ça en mode je suis content de pas être seul, je suis du genre à préférer qu'on me foute la paix plutôt qu'être coincé avec un emmerdeur. Je ne suis pas avec toi pour combler un manque ou mettre un pansement sur ma douleur. Je sais que ça ne marcherait pas, j'ai essayé avant avec d'autres mecs et ça n'a pas fonctionné. Là j'imagine des trucs comme acheter une maison un jour, partir en voyage. Fêter des anniversaires ensemble. Je pensais tellement finir ma vie tout seul. Tout seul et dans un boulot tout pourri. Mais même ça, je vais faire de la cuisine, j'ai envie de me déchirer pour ça. J'ai l'impression que l'avenir va valoir le coup d'être vécu. Et pas que parce qu'il y aura des moments avec Deku.
- C'est bien, dit-il avec un sourire tandis que mon pouce continuait de caresser sa joue.
- C'est énorme tu veux dire ! Enfin j'ai l'impression.
- Pourtant parfois tu es triste.
- Y a pas une connerie de phrase qui dit qu'il n'y a pas de bonheur sans tristesse ?
- Hum...
- Tu sais que je t'avais dit que j'avais peur et je voulais pas perdre les sentiments que je ressentais pour Deku ?
- Oui, j'ai l'impression que ça remonte à si longtemps, acquiesça-t-il.
- J'ai changé d'avis. J'ai toujours peur mais je veux réussir à me détacher de lui, enfin je veux l'aimer mais plus comme ça. Plus nocivement. Par contre je ne sais pas comment faire ça.
- Peut-être que le déménagement aidera.
- Hm, oui. On verra...
- Je pense que le vouloir, l'affirmer, c'est déjà une étape. Je suis content, déclare-t-il.
Je sens sa main se poser sur mon avant bras et me caresser doucement. Je l'attire un peu plus vers moi, jusqu'à ce que nos corps soient en contact. Il ne semble plus trembler mais il est toujours un peu trop chaud.
- Tu devrais dormir, me dit-il.
- Toi aussi.
- Je pense pas que j'arrivais à me rendormir.
- Je reste éveillé avec toi alors.
- Katsuki, tu ne vas pas t'empêcher de dormir parce que j'angoisse sans aucune raison valable.
- Si, en plus, tu as dit que tu avais moins peur quand je parlais, je pourrais continuer jusqu'à ce que tu t'endormes ?
- Et si ça marche pas ?
- Je raconterais un truc si chiant que tu t'ennuieras et tu dormiras.
- Tu saurais parler d'un truc ennuyeux tout le reste de la nuit ?
- J'ai appris avec le meilleur.
Il me regarde en fronçant les sourcils.
- Deku, répondis-je à sa question muette, ce qui me valu un faible rire.
- Je suis curieux d'entendre ça, dit-il sur un ton de défi.
Je me raclais la gorge, pris une gorgée d'eau dans la bouteille qui se trouvait sur ma table de nuit, éteignait la lumière, m'installais confortablement en tirant Shoto contre moi et j'entamais une explication méticuleuse de world of tank. Il ferma les yeux pendant que je lui déblatérais tout ce que j'avais pu lire sur le jeu et grâce à ma mémoire photographique j'aurais effectivement pu parler des heures. Il s'endormit au bout d'une bonne demi-heure, il était plus de 4h, le réveil serait un peu dur demain et j'aurais surement dû trouver la nuit merdique mais je me sentais léger quand je fermais les yeux à mon tour, apaisé de savoir Shoto calme et endormi à côté de moi et d'avoir pu parler avec lui de façon si franche et ouverte. On devrait toujours discuter au beau milieu de la nuit, je suis sur que j'aurais jamais osé lui dire tout ça en pleine journée.
***
J'espère que ce chapitre vous a plu et a rempli votre cœur d'amour <3
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