Chapitre 23


Au départ, loup comme humain étaient partis pour se lever tôt, histoire de profiter de la journée. D'ailleurs, tous deux avaient la même vision du sommeil : il fallait dormir assez, mais pas trop. Dépasser un certain seuil fatiguait. Puisqu'ils ne s'étaient pas couchés tard, l'idée avait donc été de ne pas traîner.

Ainsi ils s'étaient levés, avaient déjeuné en tête à tête. Derek, encore moins bavard qu'à son habitude tant que les relents du sommeil étaient encore là, avait surtout écouté Stiles parler et faire l'étalage de sa joie quant à la superbe nuit qu'il avait passée. Si ce détail pouvait paraître insignifiant, Derek l'enregistra et le garda dans un coin de son crâne. Parce que Stiles l'extrapolait bien trop pour que cela ne veuille rien dire.

Et si son sommeil agitait était dû à ce qu'il avait vu et senti l'autre jour... Il n'était guère étonné et pour être honnête, c'était partiellement pour cette raison qu'il l'avait fait rester au loft cette nuit. L'avoir à ses côtés le rassurait. Lui en parler n'était pas une option : connaissant le phénomène, celui-ci tenterait de vérifier et de régler les choses lui-même ce qui le mettrait, par extension, en danger. Derek devrait donc se débrouiller dans son coin s'il voulait tirer cette histoire au clair. Et il le ferait.

Mais pour l'instant, il profitait. Oui, il profitait du moment présent, de ces babillages et de cette langue bien pendue dont il appréciait de plus en plus les sons qu'elle produisait. Parce que c'était rassurant. Car Derek avait fini par se rendre compte qu'un Stiles qui parlait était un Stiles qui allait bien. Plus ou moins. A contrario, lorsqu'il se taisait, c'était le moment de s'inquiéter.

Pour être honnête, Derek appréciait beaucoup sa présence, toutes ces choses qui faisaient de lui ce qu'il était et qu'il détestait auparavant. Disons que les choses avaient lentement changé et que se frayer un chemin dans son intimité lui permettait peu à peu d'apprendre à le connaître d'une autre manière, de comprendre aussi certaines de ses réactions. Autrefois, cela lui paraissait impossible mais à force, il se rendait compte que Stiles était affreusement accessible. Plus qu'il ne l'imaginait, en tout cas. Il savait également que c'était voulu : comme lui, l'hyperactif faisait attention et ne se révélait pas à n'importe qui. Il avait du mal à accorder sa confiance et restait sur ses gardes. S'il ne sentait pas la personne, il ne lui ouvrirait jamais les portes.

Derek s'estimait donc heureux d'avoir accès à une telle rareté. Il était certain de connaître Stiles mieux que personne et ce, même si leur relation était toute récente. Parce qu'avec lui, l'hyperactif n'avait pas d'autre choix que celui d'être honnête. Et il l'était, il en avait envie.

Il lui faisait confiance.

Certains aspects de sa vie, dont son physique, gâchaient juste un peu la chose parce qu'ils le terrifiaient. Et Derek trouvait ça idiot. Pas les peurs ou complexes de Stiles. Ce qu'il jugeait stupide et affolant, c'était la manière dont on l'avait laissé se débrouiller avec tout ça sans jamais lui accorder l'importance qu'il méritait. Il parlait beaucoup, c'était quelqu'un qu'on voyait et qu'on entendait facilement, mais pas quelqu'un à qui on faisait vraiment attention. A contrario, Stiles apportait une attention presque démesurée à son entourage : il veillait toujours à ce que tout le monde se sente bien et n'ait pas à pâtir de ses actions. Mais maintenant, Derek était là et les choses allaient changer.

Stiles sourit en racontant une anecdote et ce sourire dégagea une lumière invisible telle que Derek en resta pantois, subjugué. De fait, il ne réagit pas tout de suite lorsque l'hyperactif se leva pour aller mettre sa tasse dans le lave-vaisselle. Solaire fit le mot qui lui vint instantanément à l'esprit lorsqu'il s'y figura son visage.

Et une bouffée terrible le prit. Une bouffée de chaleur amoureuse que Derek ne qualifierait pas comme telle, pour la simple et bonne raison qu'il n'y réfléchissait pas. Mais elle était là. L'instant d'après, le loup se leva et alla d'autorité enlacer l'hyperactif. Puis, il l'embrassa, comme si c'était la chose la plus simple au monde à réaliser. Comme s'il le faisait tous les matins. Comme si Stiles n'était pas juste un amant de passage dans son lit, ou quelqu'un qu'il aidait parce qu'il en avait envie. Comme si Stiles était spécial.

Et il l'était.

Autrement, le loup n'aurait pas agi avec un tel instinct. Parce que dans ce geste, il n'y avait aucune réflexion, aucun questionnement. C'était naturel. Derek avait ressenti l'immense besoin de laisser libre court à cette envie aussi soudaine qu'incontrôlable, et c'était chose faite.


Dans ses bras, Stiles fondit instantanément. Déposa maladroitement sa tasse sur le meuble le plus proche pour passer ses bras dans le dos du loup-garou. Laisser ses doigts s'amuser avec les plis du tissu de son haut. Le tout, sans stopper ce baiser au goût sucré. Au contraire, Stiles l'encouragea fermement à continuer en lui répondant avec ferveur.

Une ferveur dépourvue de toute excitation. Elle était juste là, naturellement présente. Après tout, il n'était pas obligatoire de dériver ou d'être soumis à une tension sexuelle pour s'embrasser. Une pensée particulière lui traversa fugacement l'esprit. Généralement, on n'embrassait pas son plan cul, puisque le but de ce genre de relations était généralement de concrétiser suffisamment la chose pour jouir de concert. Un plan cul, c'était un plan cul, point final. Et pourtant, il n'arrivait pas à se résoudre à faire basculer ce moment pour lui donner le sens qu'il était censé avoir. Peut-être Derek le ferait-il, auquel cas il répondrait en s'adaptant. Cela ne voudrait pas dire qu'il se forcerait, juste... Qu'il se débrouillerait pour avoir envie, histoire de se mettre dans le moment. Ça, il était d'accord même s'il avait la lucidité de se dire que ce n'était pas extrêmement sain. Lorsque venait la question d'un rapport, il n'y avait pas à se mettre dans la tête qu'il fallait s'adapter. Ou l'on en avait envie, ou non. Il n'y avait pas de demi-mesure. Idem pour les pratiques. Tout était une question de volonté et de consentement. Stiles était d'ailleurs certain que Derek ne le forcerait à rien. Il le lui avait déjà prouvé à de nombreuses reprises. Mais cela n'expliquait toutefois absolument rien quant à son geste, que Stiles accueillait à bras ouvert. Parce que l'embrasser et se retrouver ainsi collé contre lui, enlacé de toutes parts... Il adorait ça et savait que le sevrage serait difficile à assumer une fois la saison des chaleurs passées. Il ne comprenait d'ailleurs pas pourquoi Derek le touchait aussi chastement alors que ladite saison devait mettre ses nerfs à rude épreuve. Et Stiles eut soudainement peur qu'il se retienne juste pour ne pas le brusquer ni le déranger. L'abstinence n'était pas forcément bonne pour lui en cette période et l'hyperactif se souvenait parfaitement bien de la douleur qui tiraillait le loup lorsqu'ils avaient passé une semaine à ne plus s'adresser la parole. Tout ça à cause d'un stupide quiproquo.


L'inquiétude commençant à prendre une certaine place en lui, Stiles mit doucement fin à ce baiser qui lui donnait des frissons, mais resta tout contre lui, les yeux fermés.

- Tu veux plus ? Murmura-t-il tout contre ses lèvres.

Stiles était capable d'assurer si Derek lui avouait finalement son désir. Il ne sentait pas de bosse contre son bassin, mais il s'imaginait que cela pouvait arriver à tout moment. Peut-être Derek se retenait-il ? A cette pensée qui lui réchauffait autant le cœur qu'elle l'inquiétait, Stiles rouvrit les yeux et croisa le regard si particulier de son amant, qui le fixait avec une intensité folle. Une intensité qu'il eut peur d'interpréter, de prendre pour du désir, de la faim. Derek était un peu dur à décoder été Stiles aimait savoir, comprendre la personne. Avec lui, c'était difficile. Très imprévisible, comme un animal.

- Non.

La confusion prit place dans les yeux écarquillés de Stiles. Alors... Pourquoi ? Pourquoi tout ça ?

- Et toi ? Lui demanda le loup-garou d'une voix grave.

- Non plus, répondit instantanément le châtain.

L'espace d'une seconde, il avait envisagé de mentir tout en sachant que cela ne serait qu'une perte de temps puisque Derek décèlerait le mensonge en moins de temps qu'il faut pour le dire. Alors, il avait été honnête, mais ne put s'empêcher de craindre un peu sa réaction car après tout, il aimait cette étreinte, ces baisers, cette chaleur si particulière qui le faisait se sentir toute chose.

En fait, il avait un peu peur de précipiter leur séparation physique.

Pour être honnête, Stiles n'attendait pas grand-chose de cette relation, mis à part ce pourquoi il avait été d'accord pour y prendre part. Il n'était pas du genre à se faire d'espoirs lorsqu'il savait que ceux-ci pouvaient le détruire. Il prenait ce qui venait et s'en contentait. Par contre, il ne pouvait nier qu'il aimait les contacts de Derek et ce, même s'ils n'étaient pas de nature sexuelle. On veut rarement mettre fin à quelque chose d'appréciable ou qui nous fait du bien. Et en même temps, c'était un peu mauvais, car il était doucement en train de devenir addict à ce loup bien plus doux et humain qu'il ne l'avait imaginé de prime abord.

Derek se permit de déposer un très léger baiser sur son nez. A nouveau, il fixa ses prunelles dans les siennes. Stiles y lut une absence totale d'hésitation. Le reste, il ne le comprit pas.

- Dans ce cas, on reste dans cette configuration, souffla le loup avant d'happer ses lèvres avec douceur.

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