• SIX •
« Elle est en colère c'est tout. En deuil. C'est vieux comme le monde.
Sidération, culpabilité, colère.
La valse à trois temps.
La danse de ceux qui restent »
- Olivier Adam.
☾
1999, Appartement de Drago Malefoy.
Drago n'avait jamais été doué pour dire ce qu'il pensait, et encore moins pour avouer ce qu'il ressentait. Par doué, il entendait surtout le fait de dire les choses plus joliment. À en voir sa dernière discussion avec la Gryffondor, il ne s'était pas amélioré depuis le temps.
Pourquoi les gens prenaient-ils la peine de passer par mille chemins pour dire deux mots ? Au moins, lui disait les choses comme elles venaient ; ses paroles étaient authentiques, aussi blessantes qu'elles soient.
Il fallait dire qu'il n'avait pas grandi dans une famille facile ; chez lui, on ne mâchait pas les mots avant de les dire, ni les gestes. Son père se montrait cru et violent, aussi bien verbalement que physiquement. Une erreur, un faux pas, et Drago se retrouvait à subir la colère de son paternel. Au fil du temps, Lucius Malefoy s'était fondé une véritable image de tyran.
Assis dans son unique fauteuil, le blond pensait. Il savait que sauver Hermione Granger serait compliqué, mais jamais il n'aurait cru rencontrer de telles difficultés. Le Monde des souvenirs était bel et bien devenu sa réalité, s'en était effrayant.
Il revit son expression le temps d'un instant, se remémora ses traits qui avaient tiré son visage durant leur dernière querelle. Drago le pensait sérieusement : Hermione était têtue et susceptible. Le moindre mot de travers et la voilà en train de vous hurler dessus. Si elle voulait qu'il fasse des efforts, il allait falloir qu'elle donne également du sien.
Quelqu'un toqua à la porte, il soupira. Sûrement ce stupide de Potter. Il pouvait traiter Granger de têtue, lui était complètement dégénéré. Toquer à sa porte à trois heures du matin, qui à part ce vieux retardé de Potter pourrait le faire.
Nonchalamment, Drago se dirigea vers la porte d'entrée :
- J'arrive, cria-t-il.
Quand il eut enfin atteint la porte, le blond déverrouilla cette dernière et la tira.
- Potter je t'ai déjà dit...
Il stoppa sa phrase. En face de lui ne se trouvait pas Harry, mais Hermione. Complètement bouleversée, la jeune femme entra dans l'appartement de Drago en retirant sa veste. Le blond écarquilla les yeux, tenant toujours la porte dans sa main.
- Bonjour peut-être ?
Sa seule réponse fut les sanglots bruyants de la jeune fille. Il soupira, levant les yeux au ciel, refermant la porte derrière l'invitée surprise.
- Je pourrais savoir ce que tu viens faire chez moi à trois heures du matin Granger ? gronda-t-il.
La jeune fille ne lui répondit pas.
- Et puis, comment as-tu trouvé mon adresse ?
Violemment, la jeune fille se retourna. Heureusement que Drago ne venait pas de regarder un film d'horreur juste avant, il en aurait sursauté de peur : en face de lui, la jeune fille habituellement douce et ravissante s'était transformée en un véritable tas de morve sur pattes. Il grimaça. Quelle vision abominable.
- Pourquoi je n'arrive pas à sortir de tout ça ?
Elle s'écroula sur le tapis doré.
Si tu pouvais éviter de te moucher dedans... soupira-t-il.
Mais pour une fois, Drago mâcha ses mots avant de les dire, et préféra se taire. La jeune femme était bouleversée, pas besoin d'en rajouter une couche. Il prit une grande inspiration, puis se baissa pour relever la Rouge et Or. Ses mains enlacèrent ses bras, puis laissèrent passer son épaule pour la soulever.
- Tu seras mieux sur mon fauteuil, dit-il à contrecœur.
Il s'efforçait d'être aimable, ne souhaitant pas causer de dommages plus graves. Drago aurait dû rajouter une règle dans le contrat : « Ne reçoit pas de clients la nuit, ne fait pas d'heures supplémentaires ». Au fond, il savait qu'Harry ne devait pas être au courant de cette petite virée nocturne.
- Pourquoi je me fais tout ça ? Hein ?
La quatrième étape du deuil, Drago la reconnaissait comme il reconnaîtrait sa mère. Il l'avait traversée, lui aussi. Mais il se demanda ; Hermione n'était-elle qu'à la quatrième étape ? N'avait-elle pas passé celle-ci ? Elle était bien en retard dans le processus.
- Pourquoi il est mort à ma place ?
Plus de doute, Hermione Granger affrontait la quatrième étape du deuil ; celle de la tristesse. Drago le reconnaissait à son ton désespéré, à son questionnement et surtout, à son état.
En pleurs, la jeune femme était complètement avachie dans son fauteuil, comme en train de fondre sur place.
Mon pauvre fauteuil, pensa-t-il.
- Je l'ai tué ! cria Hermione.
Ces mots transpercèrent Drago de plein cœur. La culpabilité, il ne la connaissait que trop bien. Ce sentiment de faute, de se sentir coupable.
Il ignorait pourquoi, mais ces paroles ne touchèrent profondément, si bien que l'amertume des larmes et de la rage prirent lentement sa gorge.
- Je l'ai tué... répéta-t-elle. Si seulement j'avais fait assez vite pour le sauver...
Il posa calmement sa main sur celle de la Rouge et Or :
- Nous ne pouvons pas refaire le passé.
- Mais comment faire alors ?
Elle posa ses yeux irrités dans les siens, il lui adressa un sourire doux, douloureusement :
- Nous pouvons construire le présent.
- Je ne m'en sens pas capable seule...
Il rigola :
- Tu viens de comprendre le sens de ma présence dans ce cas.
- Pourquoi m'aiderais-tu ? demanda-t-elle en hoquetant.
- Parce que c'est mon travail d'aider les gens.
Elle fronça les sourcils et souffla :
- Et toi, qui va t'aider ?
Il haussa les sourcils.
- M'aider ?
Elle hocha la tête :
- Toi aussi, tu as besoin d'aide.
Il secoua la tête, elle grimaça :
- Toi aussi tu te mens à toi-même, Malefoy...
Ces paroles étaient sorties de ses lèvres comme un sifflement, flottant dans la pièce comme un doux murmure.
La nuit, les cœurs s'ouvraient plus facilement, tout comme les langues se démêlaient douloureusement. La nuit était le secret, le cocon refermé entre deux être brisés.
- Ça fait bien longtemps que je suis perdu, dit-il alors.
- Si tu peux me sauver, tu peux te sauver aussi.
- Je n'en ai pas envie, répondit-il doucement.
Un court silence, bref mais cruel, les sépara. Il l'observa quelques secondes ; la jeune femme était réellement brisée, dans un piteux état, tourmentée.
- Tu peux dormir dans ma chambre, dit-il.
Pas besoin d'aller jusque là, la brune venait de fermer les yeux dans son fauteuil. Il soupira, quitta le salon, essuyant une larme qui perlait sur ses joues froides.
☽
Et c'est la fin du chapitre six... Quelle émotion ! Je suis vraiment contente d'avoir réussi à l'écrire, bien que ce ne soit pas le plus dur à faire...
Alors, quelles sont vos impressions ?
Connaissez-vous toutes les 7 étapes du deuil ?
À bientôt pour un nouveau chapitre...
• Marina ♡
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