18

*

6 mois. 6 mois qu'elle est partie, qu'elle m'a laissé, qu'elle m'a abandonné. J'en pleure encore, et j'en pleurerais toujours. Elle ne devait pas le faire. Et moi j'aurais dû réagir autrement. Maintenant je n'ai plus de nouvelles. Je sais qu'elle appelle parfois, ou alors que ses parents appellent, mais jamais je ne peux pas lui parler. Jamais je n'ai le droit de le faire. Je n'arrive pas à demander l'autorisation de lui parler. Je n'arrive à rien. Je sombre petit à petit. Je déprime de plus en plus. Ils me hantent tels des fantômes. Elle m'aidait à surmonter la rupture avec Bauryce, et maintenant je dois en surmonter une deuxième. Mon cœur a récolté une cassure en plus, une énième, il est tout abîmé, tout bousillé. Il est entièrement détruit, broyé. Pourtant, chaque jour, chaque soir, chaque nuit, je le sens, il est bien là, battant alors que je ne le veux pas, me faisant souffrir de plus en plus. Je veux qu'il s'arrête, qu'il se stoppe pour enfin avoir la paix. Peu importe ce que cela signifie aussi.

      Tout le monde me trouve froid, distant et méchant maintenant. Je ne parle plus, je ne chante quasiment plus. Ma voix lui était réservée, hors de question qu'elle résonne à nouveau. J'ai détruit chacune de mes chansons, chacun de mes poèmes. Seule la musique est mon amie à présent. Plus personne ne possède ma confiance ou encore mon amitié. Je n'apprécie personne et je ne leur donne même pas une once de chance de me connaître. Je ne veux plus souffrir. C'est fini. Et puis, je partirai bientôt, alors c'est inutile de s'attacher à quelqu'un maintenant. Donc je reste seul avec toutes ces notes qui m'entourent. Agressives, douces, mélodieuses, hargneuses, tristes, mélancoliques. Elles sont mes alliées. Et mes faiblesses. Elles me remémorent des souvenirs, et pour peu que le sens de certaine paroles s'accorde avec ma situation, je verse des larmes et des larmes, ne pouvant m'arrêter. C'est plus fort que moi. Je n'y peux rien. Et étrangement, je trouve de plus en plus de chansons qui me causent ce genre de désagréments. J'essaye d'éviter de les écouter trop souvent, mais elles composent entièrement ma playlist, alors c'est mission impossible. Encore aujourd'hui elles ont fait leur preuve. Je suis assis sur mon lit, ma chaîne hi-fi criant des notes que je connais désormais par cœur. Et moi je suis tranquille, en train de pleurer. Je me vide de toutes mes larmes, je chiale littéralement. Je ne sais même pas si des perles salées roulent réellement sur mes joues, je sais juste que mes sanglots ne font que s'accentuer. J'augmente toujours plus le volume, cachant le bruit de mes pleurs.

Je pleure, je me vide, je hurle.

Je hurle ma douleur en beuglant les paroles. Encore et encore, sans m'en lasser. Je continue, je continue et rien ne m'arrête, rien ne vient me déranger.

6 mois que je fais ça presque tous les soirs, ou en tout cas, tous les week-ends. Je passe tout mon temps enfermé, jamais je ne sors, même pour manger. Je sais que je perds du poids petit à petit, enfin très vite plutôt, je sais que c'est alarmant, mais je n'ai pas faim. Je ne veux pas manger. Rien ne peut passer dans mon estomac, ma gorge est beaucoup trop serrée pour ça. Tout ce que j'avale, je le rends directement dans les toilettes. Mon corps rejette toute forme de nourriture, hormis les boissons. Alors je me bourre le plus possible de thé et de café. Je me maintiens aussi éveillé ainsi, les insomnies ayant à présent élues domicile dans mon quotidien.

Ma vie se résume à ça maintenant : se lever, pleurer, se préparer, les cours, ignorer les autres, rentrer, pleurer, pleurer, pleurer, insomnies. Et ça recommence tous les jours.

J'essaye de m'habituer à cette routine, mais c'est dur. La fatigue se voit sur mon visage, les larmes marquent mes yeux et ma voix, et le manque de nourriture se voit sur mon corps. Je sais que ma mère le voit, et je suppose que mon père aussi. Je vois leurs regards désolés quand leurs yeux se posent sur moi. Ils ne savent pas comment m'aider, et je n'arrive pas à leur en vouloir.

Je n'en veux à personne d'autre que moi.

Et Mae.

Elle aurait dû me prévenir avant. Elle est ma meilleure amie, enfin maintenant je devrais plutôt dire "était"  maintenant. Elle était tout pour moi, mon pilier, ma sœur, ma confidente, ma rivale, et que sais-je encore. Elle représentait ma vie entière.

J'aurais pu faire n'importe quoi pour la sauver, quitte à lui offrir mon cœur. Et elle, elle est partie, elle m'a laissé et elle me l'a dit juste avant. Sa voiture était devant chez moi, remplie de valises et de cartons. Je n'ai même pas pu essayer de la retenir. Elle m'a forcé à l'accepter, et je n'y arrive pas. Je n'y arrive toujours pas. C'est impossible, une épreuve insurmontable.

Comment je suis censé faire ?

Je me torture ainsi l'esprit chaque jour depuis son départ. Chaque jour, chaque heures, chaque minutes, chaque secondes. Elle est en permanence dans ma tête mes pensées. Elle hante mes cauchemars, m'empêche de rêver. Elle hante ma vie, elle hante mon être, elle me hante tout entier. J'ai à la fois l'envie de me débarrasser de son souvenir et l'envie qu'elle revienne. Mes envies se contredisent, ma raison est en désaccord avec mon cœur. Une part de moi refuse d'arrêter de se souvenir d'elle, et l'autre essaye d'atténuer le tout, de la faire disparaître. Et tout cela mélangé crée un chaos immense en moi. J ne suis que destruction intérieur, flammes et discorde.

Je m'autodétruis.

La douleur mentale est tellement forte, et je n'arrive pas à l'apaiser. Rien n'y parvient. Pourtant Dieu sait que j'ai tout essayé, mais aucun résultat. J'ai eu beau faire couler mon sang, envoyer mes poings dans les murs, taper mon crâne contre ma tête de lit, me brûler, me saouler... Rien.

Rien.

Ça ne m'a strictement rien fait, à part me rendre accro. Je suis devenu accro à la douleur. La sensation qui m'envahit à chaque fois est délicieuse, mais elle ne dire pas assez longtemps pour que je l'oublie entièrement. J'ai son nom gravé sur le corps.

Mae.

Écrit sur ma cuisse je crois, en gros. Taillé profondément, et donc profondément ancré en moi. Exactement ce qu'elle est.

La musique crie encore. Je sais très bien que j'utilise le mauvais verbe, mais c'est ainsi que j'explique à quel point le volume est fort. Je sais très bien que mes parents sont en train de se disputer en bas, je les ai entendu quand la chanson s'est changée, laissant la place à une autre. Je refuse de descendre, encore plus qu'avant. J'ai déjà assisté à une bonne centaine de disputes, et je déteste toujours autant ça. Quand j'étais petit, je finissais souvent en larmes en entendant leurs cris. Je ne sais pas pourquoi, je me souviens juste que dès qu'ils commençaient tous les deux à se crier dessus, je m'effondrais en larmes. Un peu comme maintenant en somme, c'est juste les raisons de mes pleurs qui ont changé.




H.

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