11

Aaron. J'ai succombé à l'envie qui me prenait.
j'ai succombé pour essayer de rester sain.
J'ai besoin de toi plus que jamais actuellement. Je n'arrive plus à supporter ce qui m'arrive. J'aimerais au moins comprendre de quoi il s'agit, mais c'est impossible. Tu es la seule personne capable de me le dire, tu étais la seule personne que je voulais entendre. Tu étais le seul à me donner des nouvelles, à essayer de m'expliquer la situation.
Aaron, je ne sais pas quoi te dire, pourtant j'avais ce besoin irrépressible de m'adresser à toi. J'ai perdu mes mots, oublié mes phrases. Comment cela peut-il m'arriver ? Je deviens fou. Les bruits autour de moi se font de plus en plus fort, de plus en plus clair. J'arrive à les distinguer à présent, à les reconnaître à nouveau, pourtant aucune voix ne viens jusqu'à moi.
Pourquoi ?
Es-tu capable de répondre à cette question ?
À mes toutes questions ?
Si mes capacités auditives augmentent, pourquoi je n'arrive plus à entendre personne ?
Est-ce parce que pour l'instant personne n'est venu me voir et me parler, ou alors simplement parce que je ne veux entendre que toi ?
Aaron, je ne comprends pas. Est-ce que mon subconscient essaye de me dire quelque chose ?
Est-ce pour cela que je me suis mis à m'adresser à des personnes ?
Aaron, réponds-moi. Toi qui avais un sens de la déduction bien supérieur au mien, serais-tu capable de trouver les raisons du pourquoi du comment ?
Aaron, je me perds de plus en plus. Je ne sais même pas si j'existe, et si lorsque je me réveillerais — si je me réveille — je serais entièrement sain d'esprit. J'ai déjà la désagréable impression d'être fou à lier, et je ne sais pas comment bannir ce sentiment de mon esprit.
Je refuse de croire que cela m'arrive à moi.
Je refuse de croire que je n'avance pas.
Je refuse de croire que je régresse.
Ce n'est pas tant que je refuse c'est que j'en ai peur. Je ne veux pas régresser car j'ai peur de ce que cela pourrait impliquer. J'ai peur que cela veuille dire que je ne pourrais plus te voir, te parler réellement, t'entendre.
Aaron, je ne sais plus quoi faire, je ne sais plus quoi dire. J'en ai marre de me morfondre sur moi-même, de m'apitoyer sur mon triste sort.
Aaron, je ne sais pas comment faire pour arrêter. Cela me paraît impossible, tout simplement. Pourtant, avant, ce n'était pas dans mon habitude d'utiliser ce mot, à vrai dire je le détestais. Et maintenant que je suis dans plongé dans cette obscurité omniprésente, je n'arrête pas de l'employer. Je n'arrête pas de me dire que je ne peux faire autrement, que ce mot est le mot parfait pour décrire ma situation.
Mon réveil est impossible.
Mon retour à la vie active est impossible.
Mes rêves sont impossibles.
Aaron, je n'en peux plus. Je vais abandonner.

Je suis tellement désolé, si tu savais. Ma mémoire est revenu au fur et à mesure que le temps passait. Je ne sais pourtant pas depuis combien de temps je suis dans cet état, cependant je suis de plus en plus souvent endormis. L'étrangeté de mon esprit fait encore des siennes apparemment.
Aaron, je ne sais pas si je vais tenir encore longtemps ainsi, j'ai l'impression d'imploser intérieurement et petit à petit. J'ai l'impression de sombrer encore et encore. J'ai l'impression de me noyer. Et j'ai peur, j'ai tellement peur, si tu savais. C'est horrible. Le futur m'effraie et je ne peux pas me défaire de cette terreur, c'est ainsi. C'est plus fort que moi. Mes sentiments me contrôlent entièrement et je ne sais pas comment faire pour les en empêcher. Je veux tout simplement les arrêter, mais je n'y arrive pas. Je n'arrive même plus à les camoufler. Je ne suis pas, ou du moins plus, assez fort pour cela. C'est tellement vexant de se rendre compte que l'on ne tient plus le choc, tu sais. J'ai l'impression que l'on m'enfonce un pieu dans le cœur à chaque nouvelle difficulté. Je me pensais un minimum fort, ou du moins plus que cela.

J'en ai marre Aaron, tellement. Je ne tiens plus le coup, mais à vrai dire, l'ai-je déjà ne serait-ce qu'une seule fois réellement tenu ? J'ai l'impression de ne dire que ça, tout le temps. Cela doit bien être la vingtième fois que je le répète, et pourtant je continue, inlassablement. Je me plains, littéralement, et je déteste cela. Je déteste être comme ça. Vraiment, j'aimerais me mettre une bonne paire de gifles pour pouvoir me remettre les idées en place, et je ne peux même pas. J'aimerais même que quelqu'un me mette un coup de poing dans la mâchoire pour que je me secoue un peu. Comment j'en suis arrivé là Aaron ? Comment j'en suis arrivé au point de non-retour ?

Reviens Aaron.
Reviens je t'en supplie.
J'ai besoin de t'entendre pour ne pas sombrer entièrement.
J'ai besoin de ta voix pour rester à peu près sain. Je sais très bien que je ne suis pas sain, à vrai dire je ne le suis plus depuis très longtemps, mais j'aimerais au moins pouvoir rester sain d'esprit. C'est frustrant de devoir se dire que je dépends entièrement de toi pour aller bien. Je ne sais même pas si c'est vraiment frustrant en réalité, je sais juste que je ne comprends pas pourquoi c'est ainsi, et que cela m'énervé.
Je ne comprends strictement rien à ce qu'il m'arrive, à ce qu'il se passe, à ce que je pense et à ce que je ressens. Je ne comprends plus mon cœur – mais l'ai-je seulement déjà compris un jour ?
Je ne comprends plus mon âme.
Je ne comprends plus mon cerveau.
Je ne comprends plus mon comportement, mes pensées.
J'en ai marre. Si tu savais à quel point. Je n'en peux plus, je ne le supporte plus et je ne veux plus avoir à le supporter.

Bordel Aaron ! Je... Je sais plus quoi dire, je suis totalement perdu. Je m'enfonce de plus en plus loin dans un labyrinthe d'horreur, de douleur, de souffrance. Je veux en sortir, mais comment ? Je ne sais pas comment faire, ce que je suis supposé dire ou penser pour réussir. Je ne sais rien du tout en somme. Et c'est tellement... je ne sais pas, c'est juste plus qu'énervant en fait. Je perds mon vocabulaire Aaron, je ne sais plus comment dire les choses. Mon état se dégrade et la migraine ne fait que s'accentuer. Comment l'arrêter ?
Comment tout arrêter ? Je ne sais pas, je ne sais pas, je ne sais pas, je ne sais pas !
Aaron j'ai besoin de ton aide !
J'ai besoin de toi, de ta chaleur corporelle, de la douceur de ta peau, de la mélodie de ta voix, de la force de tes bras, de l'électricité de ton toucher.
J'ai besoin de toi tout entier. Je ne sais même le plus comment te le dire, comment t'appeler, comment te faire revenir. 

Dis-moi, est-ce que tu es près de moi ?
Est-ce que je suis dans tes bras ?
Est-ce que tu me parles tout bas ?
Est-ce que tu me réconfortes ?
Est-ce que tu pleures encore à cause de moi ?
Est-ce que tu me comprends ?
Est-ce que tu m'entends ?
Est-ce que tu essayes de me voir?
Est-ce que tu essayes de m'aider ?
Est-ce que tu essayes de me faire parler ?
Est-ce que tu penses que je suis capable d'ouvrir les yeux ?
Est-ce que tu penses que je me peux me réveiller ?
Est-ce que tu m'en voudras ?
Est-ce que tu sais pourquoi je suis comme ça ?
Hein Aaron, dis-moi. Pourquoi hein ? Toi qui savais quasiment toujours tout, toi qui avais toujours raison, toi qui me connais mieux que personne, dis-moi pourquoi je dois être ainsi, pourquoi je ne peux pas m'en sortir ? 

J'en ai marre. Je me perds. J'ai mal. J'ai tellement mal. À un point, je ne sais même pas comment le décrire. Je ne le supporte plus. Enfin, de toute évidence je ne l'ai jamais supporté.

Aaron, j'étouffe.
J'étouffe à rester ainsi, seul avec le silence, seul avec son amie la folie. Je n'en peux plus. Je sombre, je sombre de plus en plus, de plus en plus profondément. J'ai l'impression de me noyer, je l'ai probablement déjà dit, je le sais, mais ça empire. Je n'en peux plus. L'air s'infiltre dans mes poumons et prend toute la place, mais j'ai l'impression qu'il s'agit seulement de ce liquide salée qui m'effraie. Une brûlure intense me prend tout le torse. Rien n'arrive à l'apaiser, je ne sais pas comment la faire passer. Je ne sais pas si je suis réellement en train de me noyer ou bien en train de me brûler. Les deux solutions me terrifient. J'ai l'impression d'être attachée sur un bûcher flamboyant et que l'on me force à boire de l'eau de mer. Enfin, boire est un bien grand mot. Je dirais plutôt que l'on essaye de me faire respirer sous l'eau.
Comment je dois faire ?
Comment je peux arrêter tout ça ?
Comment dois-je interrompre le processus ?
Comment dois-je y mettre fin ?
Est-ce que la mort est à nouveau la seule solution s'offrant à moi ?
Ou bien est-ce que je fais entièrement fausse route depuis le début ?
Aaron, dis-moi. Aide-moi. Fais quelque chose je t'en supplie. Je déteste supplier les gens, tu le sais, pourtant en ce moment je le fais de plus en plus.
Mais Aaron, je n'en peux vraiment plus. J'implose intérieurement. Je ne sais pas vraiment mettre de mots dessus à vrai dire. J'ai besoin d'aide, c'est une certitude. Aaron.

Aaron.
Aaron.
Aaron.
Aaron.
Aaron.
Doudou.
Aide-moi.

Aide-moi.
Prends-moi dans tes bras, je ne sais pas, mais fais quelque chose pour me soulager.
Reprends-moi dans tes bras comme avant.
Installe-moi au-dessus de toi, en travers de tes jambes ou entièrement sur toi. Laisse-moi profiter de ta chaleur corporelle.
Berce-moi.
Supporte-moi.
Embrasse ma joue. Fais-moi des papouilles dans les cheveux.
Je ne sais pas, mais fais quelque chose, j'en ai vraiment besoin là.
J'ai besoin de toi, j'ai besoin de ta présence, j'ai besoin de ta douceur, j'ai besoin de ta force, j'ai besoin de tes mots. Je t'en supplie. Parle-moi.

Aaron, ta voix m'émerveille. Cette phrase est étrange à dire, je te l'accorde. Mais c'est vrai. Dès que tu vas dire quelque chose je me retrouve hypnotisé, je t'écoute sans savoir quoi faire, ni comment réagir. Ta voix m'envoûte, à moins que ce ne soit tes mots. Tu m'as inspiré tellement de poèmes, de chansons si tu savais, je ne peux rien faire d'autre que d'écrire tout ce qui me passe par la tête lorsque je t'écoute. Cela peut faire peur, c'est vrai, mais tu n'es pas le seul à avoir des besoins irrépressible d'écrire, moi aussi je dois me vider l'esprit parfois, moi aussi je dois évacuer toutes mes pensées, moi aussi je dois me libérer de toutes ces choses pour ne pas souffrir de maux de tête ignobles et atroces. C'est ainsi.

On se ressemble plus que tu ne le penses Aaron, beaucoup plus. Enfin, je suis sûr que tu le sais même si tu ne le dis pas. C'est ainsi avec toi, n'est-ce pas ? Tu sais beaucoup de chose, et dire cela est un euphémisme, mais tu ne l'évoques jamais. Il en est de même pour tes sentiments, tu ne les exprimes jamais clairement, pourtant dieu sait que des fois j'ai besoin que tu le fasses pour pouvoir t'aider. C'est ainsi, la situation se doit d'être difficile si je puis dire, et nous, nous nous devons de faire avec et d'essayer d'avancer. Compliqué n'est-ce pas ? 

Dis-moi Aaron, est-ce que tu comprends ce que je raconte depuis tout à l'heure ?
Est-ce que tu t'en doutais ?
Est-ce que tu le savais avant même que je ne le clame ?
Aaron, sais-tu à quel point je souffre ?
Sais-tu tout ce qu'il se passe dans ma tête, dans mon esprit, dans mon cœur ? L'imagines-tu simplement ?
Et dis-moi, que se passe-t-il en toi ?
À quoi penses-tu ?
Que veux-tu ?

J'ai tellement mal si tu savais. La douleur me tords le ventre, m'oppresse les poumons. La douleur me broie le cœur, si seulement tu savais. Je n'en peux plus. Je me perds moi-même, de plus en plus, et c'est insupportable. J'ai besoin d'aide, oui, je le sais et j'en cherche désespérément. Pourtant, tu sais à quel point je déteste en demander, à quel point je déteste être redevable envers les autres. Mais là, sur l'instant présent, je reconnais que je ne pourrais pas m'en sortir, avancer sans.

Je me hais d'être comme cela, j'ai l'impression d'être dépendant. Je ne veux clairement pas ça, je ne veux clairement pas subir une quelconque dépendance envers quelqu'un, et pourtant c'est ce qu'il se passe, je suis à nouveau dépendant, et depuis bien plus longtemps que je ne le pense, je ne m'en rends compte que maintenant. Je déteste ça, je veux juste réussir à avancer seul.

Aide-moi, aide-moi, je n'en peux plus. Je me contredis sans cesse, je le sais, mais aide-moi, j'ai besoin de toi. J'implose, littéralement, j'implose intérieurement et je ne vais pas tarder à exploser. J'ai une grenade à la place du cœur. Ma tête devient une bombe dont le compte à rebours est bien trop court et ne va pas tarder à s'achever.

J'ai l'impression que je vais m'éteindre à tout moment, alors Aaron, dis-moi pourquoi mes sens sont de plus en plus affûtés.

Tic, Tac, Tic, Tac.

Je n'en peux plus, j'arrête de me battre. Le temps est presque écoulé.

Cinq, quatre, trois, deux, un... J'implose, j'explose. C'en est fini de mon esprit, de ma santé, de mon âme et, j'espère, de moi.

Tic, Tac, Tic, Tac.

Boom.

*

Il ne l'entends pas. Le jeune garçon n'entend plus. Comme une routine incessante, les machines autour de lui se remettent à s'affilée alors que le personnel se presse déjà dans la chambre. Ils refont inlassablement les mêmes gestes.

Un choc, deux chocs, trois chocs.

Mais ça me semble pas marcher.

Ils n'arrivent pas à le ramener aussi facilement que les autres fois. Parce qu'il lui manque quelque chose, il y a une ombre dans le tableau. Et cette ombre représente pourtant sa lueur, son étoile. Et elle est bloquée, hurlant et suppliant pour qu'on le laisse à nouveau accéder à la chambre. Mais rien n'y fait.

De son côté, le personnel s'agité d épouse en plus. L'état de l'adolescent devient critique. Pourquoi ne se bat-il pas ? Ils recommencent encore, pour la dernière fois.

Un choc, deux chocs, trois chocs.

Et tout se remet en marche.



H.

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