🦇15🦇
(Version 2.0 réécrite)
Les jours s'écoulèrent lentement. La peur s'insinuait perfidement dans nos esprits. Je craignais l'accroissement des pouvoirs de la Mort, tandis que je restais au Manoir lorsque les Gardiens partaient évaluer la situation dans le monde des humains.
Ils revenaient pessimistes, sans joie, couverts de sang ennemi et surtout, sans croiser mon regard. Ils savaient ce qu'ils y trouveraient : la terreur, l'appréhension... la lâcheté.
Car oui, j'étais lâche. La peur me paralysait. Je m'entraînais tous les jours dans l'espoir de m'améliorer, mais le combat au corps à corps ne donnait aucun résultat. Alors Nary avait opté pour un renforcement de mes pouvoirs de Dark.
Les boules d'énergie étaient dépassées, à présent. De véritables fouets et épées de magie pure se matérialisaient entre mes doigts exercés. Je lançais mes armes, touchais les cibles, puis les faisais réapparaître sans relâche. La sueur perlant sur mon front ne m'arrêtait pas. Je savais que c'était notre dernière chance. Ils m'avaient bien fait comprendre que moi seule pouvait vaincre la Mort. C'était ma tâche.
Elle pesait bien lourd sur mes épaules.
***
Je posai les doigts sur le bois de la porte. Derrière cette dernière se trouvait Zefi. J'entendais les notes du piano remplir la pièce de vie, accompagnées de la voix grave du vampire. La chanson devait être de sa composition, une chanson de tristesse où brillait cependant une lueur d'espoir ténue, mais bien présente.
Je soufflai et poussai le battant.
L'émotion présente dans sa belle voix me transcenda. Je restai immobile sur le seuil de la pièce, bras ballants. Mes yeux sombres se posèrent sur la silhouette du vampire. Zefi était assis sur le tabouret devant l'instrument de nuit. Ses touches blanches, telles des étoiles, ressortaient. Il avait les yeux fermés.
Alors, tandis qu'il murmurait une suite de notes mélancoliques, ma voix s'éleva dans l'air, se mélangeant à la sienne en une véritable chorale de couleurs éclatantes. Je transformais le chant en ajoutant l'espoir, la joie et l'affection, même si j'ignorais d'où je les tenais. Il garda les yeux clos tout le long de la mélodie, la tête légèrement inclinée.
Cette musique surgissait de mon cœur. Elle emplissait mon esprit d'espoir, elle réparait les failles de l'incertitude et du manque de confiance que j'avais en mon rôle. J'étais en train de vaincre la Mort mentalement, à coups de notes haut perchées.
Lorsque ma voix s'essouffla sur la dernière arpège, la silence reprit ses droits. Zefi ouvrit les yeux. Ses prunelles couleur glacier vinrent se poser sur ma silhouette. J'y distinguai une étrange émotion. De la gratitude ? Ou autre chose ?
Il se leva doucement du siège pour se placer en face de moi. Il ne me quitta pas du regard. Moi, je fermai délicatement la porte par réflexe en entrant complètement dans la pièce.
— Tu chantes très bien, dis-je finalement, un peu pour combler le silence.
— Toi aussi.
Il se tut un instant. Prit une grande inspiration.
— Anastasia, j'aimerais t'entendre dire que nous y arriverons.
Je baissai les yeux. Aussitôt, il saisit mon menton et redressa mon visage. Une grande détresse se lisait dans son regard. Mon cœur à moi, à peine réparé par le chant, était presque dans le même état. Pourtant, je me forçai.
— On va le faire. On va la renvoyer dans son Royaume.
Ma voix étranglée sonnait faux. Simple reflet de mes pensées, elle ne pouvait que les trahir. Et ça me fit très mal. Mes yeux brûlèrent. Une boule se logea dans ma gorge. Mon visage se crispa. J'aurais pleuré si j'avais été...
Vivante.
Mais je suis morte.
Un sanglot incontrôlé agita mes épaules. J'étais morte. Morte. Malgré mon cœur qui battait dans ma poitrine, malgré mon cerveau en ébullition. J'avais séjourné un court instant chez les morts et en était revenue changée. Mais au final, je n'avais rien gagné. Rien.
J'étais faible. Lâche.
Mais je peux encore y arriver. Grâce à eux, grâce aux Gardiens.
— Anastasia. Tu n'es pas seule à porter le fardeau, d'accord ?
La voix ferme de Zefi me sortit de mes pensées.
— On a aussi notre rôle à jouer. Tu ne dois pas la vaincre seule. On va le faire ensemble.
Je relevai le regard. Ses paroles étaient porteuses de courage, celui que j'aurais dû posséder. J'essayai de m'en imprégner, de me l'approprier. De le ranger dans mon cœur.
Alors, mon regard se raffermit. Je serrai légèrement les poings. Une flamme de détermination prit corps dans mon âme.
— Ensemble.
Zefi sourit. Cela me perturba tant que je faillis me pincer le bras.
— Tu vois ? Tu es forte, toi aussi.
— Non. Je suis faible si je suis seule. Ce sont les autres qui me donnent leur force, répliquai-je.
Il eut un rictus presque amusé.
— Alors heureusement qu'on est là, souffla-t-il.
***
— Luk !
J'entendis la voix de Nary crier le nom du vampire dans les couloirs. J'accélérai le pas vivement. J'avais quitté Zefi dans la pièce de musique peu avant, raffermie dans ma maigre détermination. À présent, je cherchais le muet comme la blonde pour un cours de combat. Je décidai de la rejoindre elle, qui semblait plus repérable en hurlant dans tout le Manoir.
Évidemment. Puisque Luk ne savait pas hurler.
— Nary, t'es où ? lançai-je.
Elle m'appela depuis une porte close. Aucun symbole sur le bois sombre, j'en déduisis qu'elle ne menait pas vers un autre monde et la poussai sans crainte.
La pièce était très grande, toute colorée en vert forêt. Le sol était couvert d'herbe, pourtant j'étais certaine de ne pas être en plein air. Un arbre immense semblait soutenir le plafond, les branches tendues et se fondant dans le bois de ce dernier. Ses racines s'enfonçaient dans le sol subtilement. Les feuilles vertes formaient une voûte qui donnait une ambiance agréable à l'endroit.
Nary se tenait au centre de la pièce. Accroupie en hâte, en témoignait sa robe froissée, elle avait la tête baissée. Comme elle était de dos, j'avançai doucement vers elle pour voir l'objet de ses cris.
Luk était évanoui sur ses genoux. Le vampire avait les yeux clos, les lèvres scellées, et respirait si doucement que je crus de prime abord avoir affaire à un cadavre.
Le soulagement m'envahit lorsque je m'aperçus que ce n'était pas le cas.
— Nary, que se passe-t-il ? demandai-je, n'oubliant pas son état d'inconscience.
— Il s'est... évanoui, comme ça. Je... je ne sais pas quoi faire, j'ai mal... mal ! cria-t-elle en terminant ses balbutiements.
Perturbée, je restai là, à réfléchir à ses paroles dépourvues de sens. Nary se tenait l'abdomen d'une main, l'autre bras entourant le corps de Luk.
Nary avait mal, pourtant c'était Luk qui était évanoui, vraiment, je ne comprenais rien ! Ça n'avait aucun sens !
Mais je repoussai mon incompréhension et m'activai, poussée par une sourde urgence.
— Nary, viens, on va l'emmener à l'infirmerie.
— Ça ne servirait à rien, Anastasia. Laisse-moi faire.
Je me tournai vers Zefi, qui était entré dans la pièce en silence. Il posa ses yeux sur Nary avec inquiétude et me dit :
— Prends Nary, elle ne saura pas marcher. Je m'occupe de Luk.
— Qu'est-ce qui se passe ?
— Active ! Sinon ils vont mourir ! cracha Zefi.
Électrocutée par son ton acerbe, et surtout extrêmement alarmée par la tournure de la situation, j'attrapai la vampire et la soulevai sans trop de mal. Les entraînements physiques avaient au moins porté leurs fruits, même si ma force était décuplée par ma nature.
— Suis-moi, ordonna Zefi, Luk dans ses bras.
En nous dirigeant en courant vers l'infirmerie, je me demandai ce qui arriverait si deux Gardiens mouraient avant le combat.
ARCHIVES octobre 2018
Bonjour !
Que pensez-vous de ce chapitre ? 😊
Anastasia qui reprend du poil de la bête ? Zefi qui l'encourage ? 😏
Nary et Luk mourants ?! 😱 Pourquoi ? Une idée ? Indice : j'en ai déjà parlé 😏
Et sinon, vous pensez encore à une victoire de nos vampires préférés, ou bien vous trouvez Ana trop faible, comme elle le prétend elle-même ? Je rassure les suspicieux, cette question n'est là que pour vous sonder :) Moi-même je ne connais pas encore l'option de la fin (victoire ou défaite) mais j'ai deux scénarios en tête ! 😏
En espérant que vous vous lâcherez sur les coms et les votes,
À plus ! 👋
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