Chapitre 25
PDV Thomas
Je n'ai pas réussi à fermer l'œil de la nuit. Entre mes cauchemars, mes craintes de nous faire griller, les coups de fils incessants que je reçois tous les jours et Julia, je n'arrive plus à dormir. Et quand j'arrive enfin à trouver le sommeil je suis réveillé peu de temps après par mon réveil.
En ce qui concerne cette dernière, je ne sais pas quoi faire avec elle. Tous les jours elle me prouve que je peux lui faire confiance. Hier encore après le discours du proviseur, elle m'a surprise en m'assurant une fois de plus qu'elle n'irait pas voir la police, sans que je ne lui dise quoi que ce soit. Elle commence à me connaître. Et moi aussi je commence à la connaître. Doucement mais sûrement elle a changé quelque chose en moi. Au début je faisais tout pour lui faire peur. Pour la menacer de ne pas aller nous balancer aux flics. Mais quelque chose a changé. Au fur et à mesure d'être à son contact, je l'ai vu différemment. Et elle a commencé à m'attirer. Lentement mais sûrement. Sa fragilité, sa timidité, mais aussi le fait qu'elle s'intègre aussi facilement au groupe. Tout ça à suscité de l'intérêt chez moi. Et même si j'essaye de mettre un maximum de distance entre nous j'ai de plus en plus de mal.
Mais j'ai peur. C'est le mot. Peur. Peur de le regretter plus tard. On ne sait jamais à quoi s'attendre avec les gens. Même quand on pense les connaître parfaitement. N'importe qui, n'importe quand, peut se retourner contre nous et nous trahir. Et ça c'est la pire qui chose qui puisse arriver.
Quand Julia m'a appelé, alors qu'elle venait d'apprendre la disparition de ces parents, j'ai ressenti le besoin d'aller l'aider. Jamais je n'aurais pensé un jour me retrouver chez une fille, en pleurs, à la consoler. Et être avec elle m'a fait ouvrir les yeux. Depuis je ne me reconnais plus. Et je déteste ça. Surtout en ce moment.
Un bâillement m'échappe et me ramène au moment présent, alors que je conduis, une main sur le volant, l'autre sur le rebord de la fenêtre. Il faut vraiment que j'essaye de dormir plus, sinon je ne vais pas tenir le coup très longtemps. Je trouve une place de parking et me gare. Je verrouille mon pick-up et rejoins l'entrée de la fac. Il y a déjà pas mal de personnes alors qu'il est encore tôt. Certains discutent dans l'herbe, d'autres vont déposer des fleurs sur l'autel de se connard de Wyatt. Un regroupement attire mon attention. En particulier parce qu'ils font énormément de bruit et que quelques personnes sont en train de s'engueuler. Je m'apprête à les dépasser quand un visage m'interpelle. Celui de Nathan. Mais il ne fait pas parti des spectateurs. Non, il est au centre du cercle. Je m'approche précipitamment pour voir de plus près ce qu'il se passe. Nathan crée souvent des situations pas possibles à démêler, mais c'est mon ami et s'il a besoin d'aide je suis là.
Plus je m'approche et plus je distingue la scène. Nathan est rouge de colère et se fait pousser de temps à autre par d'autres personnes. Je discerne également les paroles qu'ils s'échangent.
-... j'en suis sûr ! Toi et ta bande de minable y êtes pour quelque chose et vous allez finir en taule !
Nathan, furieux, ouvre la bouche pour rétorquer.
-Mais ferme là ! Tout le monde sait que vous jouez les durs mais qu'entre vous vous êtes des putain de faux-cul. A vous critiquer parce que l'un a une plus grosse bagnole que l'autre ou une nouvelle montre Rolex !
-C'est sûr que c'est pas à toi que ça va arriver !
-Avouez que c'est l'un d'entre vous qui l'a buté parce que vous avez pas supporté qu'il soit plus blindé de tune que vous ! La preuve, si ça aurait été l'un d'entre vous, vous n'auriez pas eu de plaque commémorative à l'entrée de l'université ! Parce que votre père ne verse pas une somme phénoménale à la fac contrairement à celui de se bouffon de Wyatt.
-Répète un peu ce que tu viens de dire pour voir ?!?
Traversant la foule difficilement, j'arrive à rejoindre Nathan au moment où il commence à s'avancer pour se battre avec l'autre mec. Que je reconnais immédiatement. C'était un des laquais de Monsieur Sa Majesté. Il a pas perdu de temps pour prendre la place de meneur celui-là. Le reste de la bande est derrière lui à l'encourager. J'interviens avant qu'ils n'en arrivent aux mains.
-Arrête Nathan, ordonnais-je sèchement.
-Hé ! Mais qui voila ?! Thomas Anderson ! Qui vient sauver son abruti d'ami. Alors on veut pas se battre ? Je ne te savais pas si lâche que ça.
-Je l'empêche juste de faire une bêtise. Surtout pour des imbéciles dans votre genre, puis me tournant vers Nathan qui résiste, laisse tomber s'il te plaît, on s'en va.
Je l'attrape par le bras et nous dirige vers un coin plus tranquille. J'entends derrière nous, les membres de la bande à Wyatt nous menacer.
-C'est ça dégagez ! Mais la prochaine fois que vous viendrez nous chercher comme vous venez de le faire, on vous ratera pas !
Je sers les dents et continue de traîner de force Nathan dans un coin reculé. Au même moment Cathy, Maxime et Aaron nous rejoignent.
-Qu'est ce qu'il t'as pris bon sang ?! m'exclamais-je en me retournant pour fusiller Nathan du regard.
-Ces bouffons n'arrêtent pas de nous emmerder en cours Aaron et moi ! Il fallait les remettre à leur place ! Toujours à se prendre pour les rois du monde.
-Mais tu te rends compte de ce que tu viens de faire ?!!
En cet instant précis je ressens une énorme colère contre Nathan comme je n'en ai jamais eu. Ce qu'il vient de faire est comme donner un coup de pied dans une fourmilière.
-Tu viens de provoquer les seules personnes capables de nous mettre sur la liste des suspects pour le meurtre de Wyatt ! On est censé rester dans l'ombre, ne pas attirer l'attention sur nous, et toi tu viens de leur déclarer la guerre !!
-Ils ne vont rien faire, ils portent pas leur couilles, tente-t-il de me convaincre.
-Bien sûr que si ! sifflais-je, il savent que nous ne nous entendions pas du tout avec Wyatt. Surtout moi. Ils ne savent pas exactement ce qu'il s'est passé entre nous mais crois-moi qu'ils n'hésiteront pas à aller dire à la police qu'on avait un problème avec Wyatt, juste pour nous faire chier. Ils l'ont peut être déjà fait ! Et peut être qu'ils savent même qu'on était avec Wyatt le soir de sa mort.
-C'est peu probable sinon on aurait déjà eu la police sur notre dos, objecte Cathy en s'avançant.
-Je sais. Mais je n'ai pas envie de tenter le diable. Alors Aaron, fis-je en me tournant vers lui, je compte sur toi pour garder un œil sur Nathan en cours.
Il hoche la tête tout en restant silencieux. Aaron est toujours d'un calme olympien, je sais qu'il fera attention à ne pas créer de vagues. Je n'aime pas jouer les chefs de bande mais là on a besoin de mettre les choses au clair. Pour notre liberté.
-Je n'ai pas besoin de baby-sitter ! s'écrie Nathan, encore plus furieux que tout à l'heure, les poings serrés.
Aaron s'avance pour lui parler mais Nathan le pousse d'un coup d'épaule et s'en va. Aaron nous regarde, souffle de découragement et suit les traces de Nathan.
Je ne peux m'empêcher d'être en colère. Nathan est le premier à s'énerver quand il y a un risque que la vérité éclate au grand jour, mais lui, ne se gêne pas pour s'embrouiller avec les mauvaises personnes. Notre plan vient d'être fortement ébranlé. Ne reste plus qu'à espérer qu'il ne s'effondre pas.
-Qu'est ce qu'il se passe ici ? demande une voix que je reconnais immédiatement.
Julia, qui vient d'arriver, me regarde de ses yeux innocents, attendant une réponse.
-Rien qui ne te regarde, répondis-je sèchement en passant à côté d'elle.
Je suis encore trop énervé pour discuter avec elle. Je m'éloigne en direction de l'amphithéâtre et j'arrive à entendre Cathy adresser quelques mots à Julia sans toutefois réussir à comprendre quoi. Dans mes pensées, je rentre m'installer à nos places habituelles. Je suis rejoint rapidement par Maxime, Cathy et Julia qui s'installent en silence à mes côtés. Je surprends néanmoins le regard perdu mais surtout blessé de Julia avant qu'elle ne détourne le regard. J'y suis allé probablement un peu fort avec elle mais tant pis. Je ne suis pas un mec doux et calme, et elle le sait.
Les cours passent et mon agitation finit par redescendre. Je connais Nathan. Il s'est toujours montré impulsif, à réagir à la moindre provocation. Et je sais que côtoyer les amis à Wyatt n'est pas une partie de plaisir. Mais lui plus que quiconque sait qu'on ne doit pas leur donner de raison d'aller balancer aux flics notre problème avec Wyatt. J'espère que lui aussi aura eu le temps de réfléchir et aura pris la bonne décision.
Mon téléphone vibre annonçant l'arrivée d'un message au moment où ceux de Cathy, Julia et Maxime font de même. Je l'attrape et lis.
*Soirée ce soir chez Maxime, oubliez pas !!! C'est la dernière avant que je parte faut en profiter !!! <3*
Le message de Léa m'arrache un sourire. Il n'y a qu'elle pour abuser des points d'exclamations dans ses messages et pour mettre un cœur à la fin. J'avais presque oublié qu'elle partait bientôt. Pendant que nous, nous sommes en cours, elle, se tourne les pouces dans mon appartement. Elle passe ses journées devant Netflix, quand elle n'est pas en train de faire du shopping. Sauf qu'elle ne peut pas faire les boutiques car j'ai refusé catégoriquement de l'accompagner et qu'elle ne doit pas ramener trop de chose en France. Du coup elle passe son temps affalée sur le canapé. Je le sais car elle m'envoie régulièrement des photos d'elle, à chaque fois devant une nouvelle série.
Avec Léa nous avons toujours eu cette relation sans gêne. Nous nous connaissons depuis le collège et ça a été ma première amie fille. Et en plus de ça, Léa et très ouverte, ce qu'il fait qu'elle n'hésite pas à dire ce qu'elle pense, si c'est bien ou pas. On a toujours été honnête entre nous. On sait qu'on peut compter l'un sur l'autre pour nous dire quand ça ne va pas. Ou pour lui demander de l'aide dans n'importe quelle situation. C'est d'ailleurs pour ça que je n'ai pas hésité une seconde à lui raconter ce qu'il s'est passé avec Wyatt. Même sous la torture elle ne dirait rien. Je peux lui faire confiance.
La fin des cours arrivée, on retrouve Aaron et Nathan devant la fac. Aaron m'informe qu'il n'y a pas eu d'accrochage avec Nathan et que la bande à Wyatt les a laissé tranquille. Pour l'instant.
-Comment on s'organise pour la soirée ? nous interroge Cathy.
-J'avoue que je l'avais oublié, confesse Maxime penaud, j'ai pas grand chose chez moi, il faut aller faire des courses.
-Gros bêta, se moque Cathy, comment tu as fait pour l'oublier alors qu'elle se passe chez toi ?
Maxime hausse les épaules et secoue la tête.
-Je viens faire les courses avec toi si tu veux, lui propose-t-elle.
-Ça me va ! Les autres vous faites quoi ? Nathan tu vas avec Aaron et Julia avec Thomas comme d'habitude ?
-Pas cette fois, l'interrompais-je, il faut que je passe chez moi chercher Léa et que je pose mes affaires. Vous pouvez prendre Julia avec vous ?
Cathy hoche la tête et se jette sur Julia pour la prendre dans ses bras, trop contente qu'elle les accompagne. Son enthousiasme me fera toujours rire, même si je ne le montre pas constamment. On se sépare et chacun monte dans sa voiture respective. Je fais la route jusque chez moi et rejoins mon appartement. Je passe la porte lorsque Léa me bondit dessus.
-C'est bon tu es là on peut y aller !
Je la rattrape de justesse avant qu'on ne s'effondre par terre.
-Wouha du calme ! Tu es vachement pressée, laisse moi deux minutes.
-Ça fait deux heures que je suis prête ! Alors oui je suis pressée.
Je m'avance pour poser mon sac dans ma chambre et changer de pull.
-Donc t'es pas restée devant la télé toute la journée ? demandais-je la tête dans le sweat.
-Si. Je peux faire deux choses à la fois. Me préparer ET regarder un écran.
-Je me disais aussi... c'est bon je suis prêt.
Je claque la porte et on monte en voiture. Je démarre dans le silence et regagne la route. Tout en conduisant je sens le regard de Léa sur moi. Je tourne la tête et la surprends en train de me fixer.
-Qu'est ce qu'il y a ? Si t'as un truc à me dire dit le.
-Il se passe quoi avec Julia ? lâche-t-elle cash.
Je manque de piler et me concentre sur la route quelques secondes pour éviter un accident.
-Pourquoi tu me demande ça ? râlais-je après quelque secondes.
-T'évites ma question là. Répond-moi. Elle te plaît ?
Je reste silencieux un instant. Ça ne m'a jamais gêné de parler fille avec Léa, alors pourquoi aujourd'hui ça me bloque ? Ça n'a pourtant rien de différent par rapport à d'habitude. Léa me cuisine, me piège et au final elle finit par savoir ce qu'elle veut. Même si je ne le lui cache pas vraiment. Mais pas aujourd'hui. Je n'arrive pas à lui parler de Julia. Peut-être car notre "relation" n'aurait jamais dû exister. Enfin pas comme ça. On aurait jamais dû se rencontrer et surtout pas de cette manière.
-Ouais en fait t'as pas besoin de répondre, ça se voit sur ton visage.
-N'importe quoi... qu'est ce que tu racontes ?
-Tu ne l'a pas remarqué mais à chaque fois qu'on parle de Julia tu fais cette tête.
Elle penche la tête sur le côté, fronce les sourcils et perds son regard dans le vague.
-Et, continue-t-elle, à chaque fois qu'elle est dans la pièce tu es toujours en train de la regarder.
-Oui pour la surveiller, me défendais-je.
-La surveiller de quoi... ? Même moi qui la connaît depuis moins longtemps que vous, je sais que vous pouvez lui faire confiance.
-On ne peux jamais être sûr à 100%.
-Bien sûr que si... Elle traîne toujours avec vous. Elle est super copine avec Cathy et elle s'entend très bien avec tout le monde. Sauf Nathan mais ça c'est normal. Tu crois vraiment qu'elle serait venu faire copain-copine avec vous si elle comptait vous trahir ?
Ce que dit Léa me fait réfléchir. Au fond de moi je savais déjà ce qu'elle vient de me dire mais je ne voulais pas l'accepter. L'entendre dire à voix haute me fait prendre conscience qu'elle a raison.
-Tu sais ce que je pense ? enchaîne-t-elle.
-Vas-y éclaire moi.
-Tu te caches derrière le fait qu'elle puisse vous trahir pour expliquer la façon dont tu te comportes avec elle. Pourtant quand elle a un problème tu oublies tout ça et tu t'affiches réellement. Par exemple comme quand Nathan l'a enfermé dans la chambre et que tu l'a cherché partout. Cathy m'a raconté cet épisode là.
-C'est parce qu'elle avait trop bu. Elle pouvait tout raconter sans s'en rendre compte, expliquais-je.
-Ok très bien. Et plus récemment, quand elle a appris la disparition de ses parents ? C'est quoi ton excuse pour justifier que tu as accouru chez elle après qu'elle t'ai appelé ?
Je ne trouve rien à répondre et reste silencieux. Elle souffle et reprend plus doucement.
-Écoutes, ce que je veux dire c'est qu'elle ne va pas attendre des années et qu'apparemment t'as besoin d'un petit coup de pouce pour ouvrir les yeux, puisque t'es si nul que ça pour le faire toi-même. Alors petit conseil. Essaye d'être sympa avec elle. Je sais que tu n'as pas l'habitude d'être gentil avec d'autres personnes que la bande mais tu n'as pas le choix. Arrêtes d'être froid et distant parce que je te connais et que je sais que c'est ce que tu fais pour éviter les problèmes.
Elle termine sa phrase avec un clin d'œil et se rassoit correctement sur son siège. Je reste à méditer sur tout son grand discours. Elle ne m'avait jamais fait une aussi grande morale. A croire qu'elle sait mieux que moi ce que je dois faire.
On arrive devant chez Maxime, je me gare. Léa sort de ma voiture et se dirige vers la porte. Je la suis et au moment où elle entre, elle se retourne avec un sourire plein de sous-entendus. Je lève les yeux au ciel et entre à mon tour. Tout le monde est déjà là, assis autour de la table à manger. Julia est là aussi, en train de rigoler avec Cathy et Maxime. Je remarque à mon plus grand regret que Léa avait raison. La première chose que j'ai fait en entrant chez Maxime a été de regarder Julia. Je secoue la tête et me force à détourner le regard. Mais je tombe sur celui de Léa qui me regarde avec le sourire de la victoire.
-Installez-vous ! nous crie Cathy.
Léa s'avance et s'assoie sur une des chaises restantes, à côté de Aaron. La garce m'a laissé la seule place disponible, à côté de Julia. Je lui lance un regard noir et m'avance pour m'installer. Julia m'aperçoit et je lis de la surprise et un peu d'embarras dans ses yeux. Ce matin j'y suis allé un peu fort avec elle et elle ne sait plus comment se comporter avec moi.
-Hum... Julia ? l'interpellais-je.
-Oui ? fait-elle, en se retournant, de sa petite voix.
-Je... euh... je voulais m'excuser pour ce matin. J'étais énervé et je me suis lâché sur toi.
-C'est pas grave... j'avais compris qu'il y a des choses que je ne dois pas savoir.
-Mais même. Ça n'explique pas pourquoi je t'ai parlé comme ça.
-C'est oublié, me répond-elle avec un petit sourire.
Je ne sais pas comment elle fait pour réagir comme ça. Je me suis comporté comme un con avec elle, pas qu'une seule fois. Et pourtant elle trouve toujours le moyen de me pardonner.
Je lui souris en retour et on reste immobile à se fixer sans rien dire. Son portable bip et elle détourne le regard. Son sourire disparaît instantanément et son visage se fige. Je lis ce qui est écrit sur son écran et comprends sa réaction.
*appel entrant de Maman*
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