ii. bouquet d'anthemis et d'hélénie
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Soobin avait définitivement tourné une page et il le ressentait depuis un mois maintenant. Taehyun passait son temps à faire la navette entre Beomgyu et lui, et était épuisé d'être ainsi écartelé entre ses deux meilleurs amis. Mais le fossé que Soobin avait creusé ce jour-là dans le couloir demeurait trop profond pour être comblé. Beomgyu peinait à le regarder dans les yeux, Soobin ne l'évoquait plus dans aucune de ses discussions.
Beomgyu avait des vues sur lui. Et cette chose l'horripilait autant qu'elle le ravissait. Il se détestait de le penser, de le ressentir.
Il avait eu raison depuis le départ et Taehyun n'avait même pas cherché à changer de sujet. Chaque soir, il regardait cette photo de Beomgyu et lui, assis tous les deux dans le jardin de sa grand-mère où Beomgyu avait été invité de très nombreuses fois. Désormais, la seule chose qu'il ressentait en la regardant était une profonde trahison. Comment Beomgyu avait-il pu lui faire ça ? Il secoua la tête, peiné.
Il s'était repassé le film des derniers mois des milliers de fois dans sa tête. Tous les moments qu'il avait pu passer seul avec lui. Tous les moments où il était passé à côté des signes. Dans ces moments-là, Soobin se détestait autant qu'il lui en voulait. Une part minuscule de lui tentait de se raisonner, d'aller à l'encontre de tout ce qu'il avait toujours entendu autour de lui, de ce qu'on lui avait martelé étant enfant. Mais cette part était trop conséquente, trop imposante dans son esprit et Soobin trouvait plus simple d'y trouver refuge. Toucher à l'interdit à ce qu'il avait catégorisé comme anormal l'effrayait.
Depuis, Beomgyu lui avait envoyé des messages. Des dizaines et des dizaines de messages. Parfois, Soobin répondait. Des réponses courtes, sans trop s'épancher. Puis il y avait ces fois, comme ce soir, où Soobin n'en trouvait plus la force. Ce soir-là, le message de Beomgyu l'envoya spiraler sans s'arrêter.
De Beomgyu à 23:45
Hey Soobin, j'ai aucune idée de quand tu liras ce message, de si tu prendras même la peine de le lire, mais je tenais à te l'envoyer quand même.
Je tenais à m'excuser.
Je suis désolé d'être tombé amoureux de toi. Désolé de ressentir ça en te voyant. Tu sais, ça fait des années que ça dure. Je te le dis maintenant puisque de toute façon, ça ne changera plus rien à la manière dont tu me regardes. Crois-moi, j'aurais aimé lutter plus longtemps, ignorer tout ça. J'aurais aimé tomber amoureux d'un gars comme moi, de quelqu'un qui aurait pu m'aimer en retour. Je suis désolé que cela soit tombé sur toi.
Je ne peux pas demander de changement de classe au beau milieu de l'année, tu sais comment c'est. Mais l'an prochain, je m'arrangerai pour ne plus être dans les mêmes groupes que toi. J'aurais aimé que nous restions amis tous les deux, vraiment.
Tu le sais déjà, mais ce n'est pas quelque chose que l'on choisit et si j'avais pu choisir, je n'aurais pas choisi de t'aimer toi. J'aurais aimé resté ton ami. Pardonne-moi d'avoir tout gâché.
* * *
Roulé en boule dans son lit, Beomgyu fixait l'écran de son téléphone, les joues humides. Il n'avait pas arrêté de pleurer en écrivant son message, puis après l'avoir envoyé et encore maintenant, une heure après. Il fixait son écran en espérant, en priant pour que Soobin lui réponde. Pour que, par miracle, Soobin lui confie qu'il ne lui en voulait pas. Que peut-être, il avait simplement eu du mal à comprendre au départ, mais que ce n'était rien de grave, rien de honteux. Que Soobin acceptait toujours d'être son ami. Beomgyu pouvait mettre ses sentiments de côté si Soobin acceptait de le côtoyer de nouveau.
Le pouvait-il ?
Non.
Et au fond, il le savait.
Il était amoureux de Soobin. Amoureux de sa voix, de son regard doux, de sa démarche parfois maladroite, de toute la douceur dans ses gestes, de son rire un peu forcé... Beomgyu aimait tout de lui et n'avait jamais aimé un autre homme autant que lui.
Mais Soobin ne lui répondit pas. Ni ce soir, ni celui qui suivit, ni aucun autre soir de la semaine.
* * *
Soobin fixait son plat sans grand appétit. Sans doute parce que la discussion avait encore dérivé sur un sujet politique qui le gonflait profondément. Son esprit était loin de la table où son père était entré en grand débat avec son frère aîné. Loin de sa sœur qui tentait de placer ses arguments et sa mère qui suivait tout cela en silence. Son esprit se demandait ce que faisait Beomgyu en cet instant.
C'était idiot, parce que peu lui importait ce que faisait Beomgyu.
Ou peut-être pas tant que ça. Et cela était bien trop souvent que Soobin se prenait à espérer que Beomgyu ne sorte avec personne, ne pense qu'à lui ou se demande lui aussi ce que lui faisait. Égoïste de sa part, Soobin le savait. Mais Soobin continuait de s'enfoncer, de se faire mal. De se projeter. De se demander comment était Beomgyu avec les personnes qu'il fréquentait dans ses divers clubs. Comment Beomgyu était quand il sortait avec un garçon.
Il secoua la tête ; ses pensées n'étaient pas des pensées à avoir concernant le meilleur ami qu'il avait rejeté. Il se dégoûtait.
- J'ai des devoirs à terminer, marmonna-t-il.
Personne autour de la table ne chercha à le retenir : à leurs yeux Soobin était un élève studieux et son temps consacré aux devoirs était important. Pourtant, l'élève studieux peinait à suivre le rythme de ses cours depuis quelques semaines. Depuis que Beomgyu s'était confessé dans ce maudit couloir.
Il prit une douche rapidement, se changea et fila sous ses draps. Les devoirs attendraient. Son esprit était trop plein. Trop plein de Beomgyu, de son visage, de son odeur que Soobin ne parvenait pas à oublier... Il ferma les yeux, le visage en feu et tira ses draps un peu plus haut, jusqu'à couvrir une partie de son visage. Il ne devait pas y penser. Il devait arrêter. Penser à lui de cette manière n'était pas normale. Penser à ses lèvres, au grain de sa peau... tout était malsain. Pourtant, il attrapa son téléphone d'un geste vif et chercha son profil sur Instagram.
Beomgyu y était assez actif, Soobin le savait pour l'espionner de temps en temps. Il ne le suivait plus, mais guettait le moindre de ses posts. De temps en temps, il se risquait à regarder ce qu'il postait en story, en sachant très bien que son pseudo pouvait ne pas passer inaperçu dans les notifications de Beomgyu. Mais dans ces moments-là, peu lui importait : son voyeurisme l'emportait.
Beomgyu avait posté aujourd'hui. Une série de sept photos, prise en banlieue de Séoul. Beomgyu était avec sa mère et bien malgré lui, Soobin se sentit sourire. Beomgyu et sa mère avaient toujours eu une relation tendre qu'il jalousait un peu. La mère de Beomgyu était si douce, si prévenante... Elle avait toujours été comme une seconde mère à chaque fois qu'il avait été de passage chez eux. Il fit défiler les photos de paysages, jusqu'à arriver à cette photo. Aux yeux de n'importe qui, Soobin était persuadé qu'elle n'était qu'une photo de Beomgyu parmi tant d'autres. Mais aux yeux de Soobin, l'effet fut tout autre. Elle avala toute son attention, capturant son regard avec force. Il y avait quelque chose dans la manière dont Beomgyu avait eu de poser, dans cette façon si singulière dont ses cheveux avaient été coiffés, leurs légères ondulations... Soobin sentit son cœur battre un peu plus fort et ses oreilles chauffer légèrement. Le sourire de Beomgyu était magnifique. Comme l'était son visage rayonnant. Comme l'était la tenue qu'il portait comme si elle avait été spécialement conçue pour lui. Il s'imagina un instant poser une main sur cette taille fine qu'il distinguait, déposer un baiser sur ces clavicules que Beomgyu ne prenait plus la peine de camoufler.
Soudain hors de lui, il éteignit son téléphone qu'il envoya bouler sur sa table de chevet, honteux.
Il resta un instant immobile dans son lit, à fixer le plafond dans l'obscurité. Il écouta seulement son souffle irrégulier, essayant de faire le vide dans sa tête. Mais il ne quittait plus ses esprits. Et l'horrible chaleur qui avait envahi son visage ne le quittait plus non plus. Elle était descendue sur tout son corps, le grignotant lentement, le rendant incapable d'ignorer que son corps l'implorait d'aller plus loin, qu'il se touche.
Et Soobin luttait. Il luttait contre ses envies débordantes, contre les images qui s'imposaient à lui, contre sa propre main qui souleva lentement le haut qu'il portait. Arrête-toi... C'est vraiment mal. Mais pour la première fois, Soobin en fut incapable. Parce que le visage de Beomgyu ne quittait plus son esprit. Qu'il imaginait sans mal ses mains remplacer les siennes et toucher sa peau exactement comme il le faisait. Remonter le long de son ventre, effleurer son torse et peut-être l'embrasser juste là, sous sa gorge. Un gémissement étranglé lui échappa et Soobin se retourna immédiatement sous ses draps, la tête enfouie dans son oreiller. Personne ne devait l'entendre. Ses mouvements se firent plus précis, plus rapides et Soobin se recroquevilla légèrement. Ne pas se faire prendre. Ne surtout pas se faire entendre. Une de ses mains trouva l'élastique de son short et le souleva avec précipitation.
Il jura dans son coussin, étouffant un gémissement de plaisir. Penser à quelqu'un d'autre que lui. N'importe qui sauf Beomgyu. Il le devait. Mais il en fut incapable. Aucun visage ne parvint à se substituer au sien et Soobin abandonna. Le corps bouillant, une main cramponnée à ses draps, il imagina le corps de Beomgyu pressé contre le sien, son souffle dans ses cheveux et ses mains à la place des siennes. Il se demanda ce que Beomgyu lui aurait fait, s'il avait été réellement là. Jusqu'où il était prêt à le toucher, à l'embrasser. La simple idée d'imaginer Beomgyu effleurer l'intérieur de ses cuisses le fit chavirer pour de bon.
Pantelant, il se retourna avec lenteur sur le dos, sa poitrine se soulevant à un rythme chaotique. Respire Soobin, respire. Il ferma les yeux, essaya de reprendre son souffle, une main toujours glissée sous le tissu de son short. D'un geste lent, il étira l'autre de libre et fouilla à l'aveugle dans sa table de chevet, avant d'en extirper une boîte de mouchoir presque vide. Sans oser regarder sa propre main, il l'essuya avec rage, les larmes au bord des yeux.
- Tu m'dégoûtes putain... sort de ma tête, je t'en supplie...
* * *
Beomgyu n'aimait pas les fêtes étudiantes. Il ne les avait jamais portés dans son cœur, et encore moins celles où Taehyun ne venait pas. Ce dernier avait préféré rester chez lui pour travailler, et Beomgyu l'avait compris. Pourtant... Il s'y était rendu, dans l'espoir de réussir à connecter avec de nouvelles personnes en cours d'années. Depuis que Soobin et lui ne se parlaient plus (cela allait bientôt faire deux mois, et Beomgyu n'avait jamais trouvé le temps aussi long) il avait ouvert les yeux sur le peu de fréquentations qu'il avait à la fac.
- Tu ne rentreras pas trop tard, n'est-ce pas mon chéri ?
Beomgyu embrassa le front de sa mère, avant de passer une main dans ses cheveux. Ils commençaient à grisonner depuis peu, et Beomgyu aimait cette petite mèche plus claire que sa mère avait désormais juste derrière son oreille gauche.
- Promit maman, je ferais attention.
Elle esquissa un sourire attendri.
- Vivement que j'ai mon propre appartement, hein ? rigola-t-il.
- Ne dis pas ça, j'espère que tu ne le trouveras pas de sitôt.
- Tu sais très bien que je ne resterai pas loin de toi va !
- Je sais, allez... file !
Elle passa une main sur ses épaules larges et Beomgyu se sentit sourire. Chaque jour, sa mère ne cessait de lui répéter à quel point il grandissait rapidement. Il déposa un dernier baiser sur son front et tourna les talons. Il ne rentrerait pas tard et le savait : quand Taehyun n'était pas là, les soirées étaient plus ennuyeuses.
Beomgyu avait été invité, et il se demandait encore pourquoi. Il nageait à présent dans un milieu si éloigné du sien, entouré de gens ne lui ressemblant pas. Sa mère n'avait jamais été riche, il avait toujours porté sur lui sa classe sociale et le peu de moyen qu'ils avaient eu à leur disposition pendant de très longues années... Et ce soir, noyé dans cette foule d'étudiants, Beomgyu se sentait comme un ovni. Il avait enfilé un sweatshirt crème, un jean patchwork de sa propre création, ses baskets compensées et avait l'impression d'être la seule personne de toute la soirée à porter un style lui étant propre. Il soupira et attacha ses cheveux en une minuscule queue de cheval avant de se diriger vers la cuisine pour y déposer la bouteille qu'il avait achetée.
Et ce fut en cet instant qu'il le vit.
Soobin avait été invité. Évidemment que Soobin l'avait été. Soobin était populaire, Soobin était partout. Aussitôt, sentant ses jambes devenir cotonneuses, Beomgyu détourna le regard. Soobin ne devait pas savoir qu'il se trouvait là. Alors il prit la fuite vers l'autre bout de la maison.
L'endroit était immense et Beomgyu se demanda comment les gens faisaient pour posséder une aussi grosse propriété dans Séoul. Il avait toujours habité en appartement, alors une maison aussi imposante en centre-ville... La chose lui semblait aberrante, tout comme le nombre affligeant de fruits dans la cuisine.
Pendant la première partie de la soirée, Beomgyu retrouva des camarades de classe. Puis, quand ces dernières décidèrent de mettre les voiles, Beomgyu décida de les imiter. Il salua poliment l'hôte de la soirée qui le serra dans ses bras (sans doute avait-elle un peu trop bu, mais Beomgyu ne lui en voulut pas : le geste n'était pas déplacé) et essaya de se diriger vers l'entrée.
- Choi Beomgyu !
Il se retourna juste à temps avant d'être tiré en arrière par une camarade dont il avait oublié le prénom.
- Ça manque de garçon mignon dans notre équipe !
- Dans... ?
Il eut envie de la reprendre sur « garçon mignon », Beomgyu était adulte, majeur depuis plusieurs années et eut l'impression d'avoir été subitement rajeunit.
Et sans qu'il ne comprenne pourquoi ni comment, il se retrouva assis en face de Soobin. Ce dernier le dévisagea comme s'il venait de voir un fantôme et Beomgyu détourna furieusement le regard. Les cartes sous ses yeux, les bouteilles entassées en bout de table... Rien ne lui laissait présager un bon moment. La seule chose qui lui faisait envie était de fuir cet endroit. De fuir le regard oppressant de Soobin qui ne le quittait pas, il le savait. Cela devenait compliqué de l'ignorer, de ne pas s'attarder sur ses cheveux blonds, sur ses avant-bras que laissait voir son tee-shirt à manche courte, sur ses cuisses qui- Beomgyu ! Concentration, tu dois partir d'ici.
- Je dois vraiment y aller, lança-t-il.
- Juste une manche ! Affronte Soobin et tu pars après !
Beomgyu savait très bien qu'ici, la moitié des gens savaient pour son béguin sur Soobin. Beomgyu les détesta subitement de lui faire subir ça.
- Sérieusement, non, répéta-t-il en se levant.
Il eut quelques protestations, Soobin ne le quitta pas des yeux, les lèvres pincées et les sourcils légèrement froncés. Soobin se pencha vers la table et fit tourner la bouteille l'air de rien. Quelques secondes plus tard, on le félicita d'avoir réussi. Soobin avait visiblement échappé à quelque chose.
- Beomgyu !
Joue à leur stupide jeu et barre-toi. Il soupira et fit tourner la bouteille sans trop comprendre le but. Nouveaux cris. Beomgyu avait perdu. Il ne savait pas trop quoi, mais il avait perdu.
- Je peux y aller maintenant ?
- Ton gage ! Tire une carte !
Beomgyu leva les yeux au ciel. Il était prêt à courir torse nu dans la rue si cela pouvait le libérer et lui éviter de devoir dire ou faire d'autres choses qu'il regretterait plus tard. Il piocha une carte sans aucune volonté et on la lui arracha des mains pour la lire avant qu'il en puisse le faire.
- Yaaah ! Trop bien !
Il arqua un sourcil, esquissant un nouveau pas en arrière pour fuir cet enfer.
- Tu dois embrasser la personne jouant contre toi !
Beomgyu dévisagea le garçon qui venait de lire son gage à haute voix et secoua la tête. Les rires autour de lui lui donnèrent le vertige et il bafouilla quelques mots perdus, reculant de plus belle. Soobin s'était levé et Beomgyu voyait se dessiner devant lui son pire cauchemar. Incapable de le regarder dans les yeux, il fixa le sol en essayant de reculer, en vain. Quand les baskets de Soobin se dessinèrent dans son champ de vision il se sentit devenir livide. À quoi jouait Soobin ?
- Même pas en rêve, l'entendit-il dire.
Il releva la tête, les yeux ronds et humides.
- Désolé, je déclare forfait, rigola Soobin.
C'était un rire forcé, qui ne lui ressemblait pas.
- Je ne suis pas comme lui.
Autour d'eux, des protestations, de l'agacement, mais Soobin fut encouragé à le défier sur autre chose. Pourtant, la seule chose qui tourna dans l'esprit de Beomgyu fut sa dernière phrase.
- Pas comme moi ? murmura-t-il, si bas qu'il douta que les autres aient entendu.
- Je suis pas homo.
Au fond, les mots n'avaient rien de violent. Mais Beomgyu les reçut comme une claque cuisante sur sa joue. Parce que tout dans la voix de Soobin suintait le dégoût.
- Super, tout le monde a entendu ? s'agaça-t-il. Soobin est tellement hétéro, que oui, il ne me toucherait même pas avec un bâton !
Beomgyu ignora d'où lui venait toute cette impulsivité. Soobin ouvrit de grands yeux, surpris et sa bouche se tordit étrangement. Enfonçant son majeur dans son torse, Beomgyu continua, les larmes au bord des yeux.
- Tu sais quoi ? Oui, nous ne sommes vraiment pas pareils toi et moi. Maintenant, si tu veux bien me foutre paix, je-
Soobin dégagea sa main d'un geste brusque, soudain affolé. Oh Soobin, c'était à ce point... Beomgyu ouvrit la bouche, s'apprêtant à répliquer de plus belle quand il se sentit poussé en arrière violemment. Complètement pris par surprise, il trébucha et tomba par terre, pas assez rapidement pour se rattraper. Sonné, il dévisagea le blond en face de lui et sentit une première larme lui échapper. Les rires mêlés aux indignations autour de lui se mélangèrent pour en former qu'un fond sonore désagréable et fouillis.
Il se releva précipitamment avant que Soobin ne puisse s'approcher à nouveau.
- Ne me touche plus jamais, souffla-t-il.
Il ignora les mots de Soobin. Ceux des autres autour d'eux. Beomgyu courut aussi vite qu'il le put, loin de la fête, le cœur serré et avec une envie de vomir tout ce qu'il avait pu avaler depuis le début de sa journée. Quelques mètres plus loin dans la rue, il éclata en sanglots.
*
Beomgyu fixait son armoire, désespéré de focaliser son attention sur autre chose que Soobin. Soobin, Soobin, Soobin qui tournait en boucle dans son esprit. Soobin qui l'avait poussé, humilié et qui pourtant, ne quittait pas son esprit. Soobin qui avait eu l'air si.... Si il ne savait trop quoi. Beomgyu avait été incapable de déchiffrer l'air sur son visage. Incapable de lire dans son regard comme il avait toujours su si bien le faire.
Son armoire ne lui apporta rien comme réponse. Au contraire, le drapeau arc-en-ciel que sa mère avait commandé sur internet lui donna la nausée ce soir-là. En temps normal, Beomgyu en était fier. Sa mère le lui avait commandé quelques mois plus tôt, fière de le supporter, fier de lui. Ce soir, son drapeau arc-en-ciel lui rappelait que Soobin le détestait surement à cause de ça et Beomgyu ne pouvait plus le supporter.
Beomgyu et Soobin n'étaient rien. Ils n'étaient plus rien.
Et Beomgyu avait beau se forcer à l'admettre, il n'y parvenait pas.
Il avait fantasmé d'une relation avec Soobin pendant des mois et admettre qu'elle était réellement impossible lui semblait insurmontable.
La dernière chose à laquelle Beomgyu s'attendait ce soir-là fut d'entendre quelque frapper doucement à sa porte de chambre. Sa mère se trouvait derrière et quand elle lui annonça que Soobin attendait sur le palier, il crut rêver. Soobin, sur leur palier ? Elle eut l'air inquiète aussi, il s'efforça de la rassurer et de la raccompagner dans sa chambre.
La boule au ventre, il se dirigea ensuite seul vers la porte d'entrée.
Soobin était bel et bien là. Il avait couru, il le voyait aux rougeurs sur ses joues, à son souffle qu'il peinait à reprendre. Et face à lui, Beomgyu se retrouva avec la bouche sèche. Il hésita entre lui refermer la porte au nez, l'insulter... Et Soobin sembla le sentir. Il posa son pied entre la porte et le mur, une main sur ce dernier.
- Beomgyu je...
Il se força à maintenir le contact visuel, à ne pas baisser les yeux. Soobin s'avança légèrement, Beomgyu recula et ce fut en cet instant qu'il le vit, dans son regard : l'effroi.
- Oh non, Beomie je-
- Beomie ? Sérieux ?
- Je suis venu m'excuser.
- Super. Excuses entendues et acceptées.
Il essaya de refermer la porte, en vain. Soobin la bloqua d'une main. Non, au fond, il ne voulait pas de ses excuses. Elles n'étaient ni entendues ni acceptées. Beomgyu voulait juste le voir déguerpir de devant chez lui.
- Je suis désolé pour ce soir, et pour... - Soobin sembla réfléchir, un peu trop longtemps à son goût - pour tout le reste aussi.
- Super, maintenant bonne nuit.
- Beomgyu s'il te plait...
- Tu veux quoi de plus, Soobin ? Tu es pardonné, vas faire ta vie loin de moi maintenant.
- Je ne veux pas ! s'écria-t-il.
Beomgyu sursauta avant de le dévisager avec des yeux ronds.
- Je ne veux pas faire ma vie loin de toi Beomgyu, merde.
Dans sa tête, un millier de fausses idées se bousculèrent. Mais c'était idiot. C'était de Soobin dont il s'agissait. Soobin qui peinait à respirer le même air que lui.
- Je... Parce que...
Dis-le. Je t'en supplie dis-le moi.
- Parce que tu me manques.
Ce n'était pas ce que Beomgyu voulait entendre. Mais peut-être qu'une nouvelle fois, Beomgyu avait espéré un peu trop. Un sourire triste sur le visage, il acquiesça. Dans le même temps, Soobin relâcha la pression sur la porte, battant en retraite. Il n'y eut plus un mot échangé, simplement des regards. Et les regards pour Beomgyu voulaient tout dire.
Avec lenteur, il referma la porte, les larmes au bord des yeux, mais le cœur étrangement plus léger.
-- note en vrac --
J'ai relu BLUE SPRING au milieu de l'écriture de cette histoire, pour m'assurer de ne pas faire de bourdes et damn, j'ai réalisé le chemin parcourru pour ces deux-là. Quand j'avais écris BLUE SPRING, j'avais pris plaisir à dispatcher des indices sur leur relation, sur à quel point elle avait été compliquée au départ. Pour le moment, on est si loin de la relation adorable et parfaite qu'ils ont dans BLUE SPRING, bien des années plus tard xD Je poste le prochain (et dernier) chapitre la semaine pro, il sera plus conséquent que celui-ci ! En attendant, merci de me lire sur ce prequel <3
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