31.
Ruggero
Il est aux alentours de vingt deux heures, nous sommes tous présents attablés autour de la table de la coloc de Mick et Jorge. L'ambiance est plus agréable que ce que j'aurais pensé, malgré les certaines situations plutôt conflictuelles.
- J'ai une idée ! s'écrit Michael.
On le regarde, perplexe puisque ses idées ne sont jamais les meilleures et l'encourageons à poursuivre.
- On fait une action ou vérité ?
- Rappelle-moi ton âge ? lui demande Valentina en riant.
- Crois-moi, une action ou vérité peut être plus dangereuse que ce que tu ne peux penser.
- Ok mais alors chacun est obligé de répondre ou de faire les actions qu'on lui demande poursuit Agustin.
- Celui qui ne répond pas ou qui ne fait pas l'action fait le ménage chez nous pensant huit mois rétorque Mick.
- Et si c'est toi qui ne veut pas répondre ? demande Carolina.
- Je ferais le ménage chez vous.
On hausse tous les épaules un par un comme pour approuver son idée, et il ne mît pas longtemps à débuter le jeu tout sourire.
Il commence par la blonde du groupe, qui a choisi vérité, et qui a dû avouer avoir déjà suivi un garçon jusqu'à chez lui juste pour avoir son numéro. Plutôt psychopathe comme comportement, mais venant de Valentina, ça ne m'étonne pas spécialement. Le jeu se poursuit par Jorge, qui choisit action et qui se retrouve à devoir embrasser sur la joue la fille qu'il trouve la plus jolie. Son choix se tourne vers Chiara, et encore une fois ça ne me surprend pas vraiment. Ensuite, Agus doit laisser son téléphone à la disposition des filles pendant une durée de deux minutes, chose dangereuse lorsqu'on connaît nos amies. Chaque joueur reçoit à son tour une action ou une vérité, on m'a moi-même demandé si j'avais déjà écrit une chanson à une fille par amour, j'ai répondu non et il s'avérait que quelques uns étaient plus ou moins surprit de ma réponse.
- Karol à toi, action ou vérité ? demande Michael.
Elle prend quelques secondes pour peser le pour et le contre, et finit par répondre assez sure d'elle :
- Action.
- Tu dois écouter Ruggero te parler du sujet qu'il veut pendant vingt minutes.
Je fronce les sourcils en même temps qu'elle, surpris par ce changement de situation. Aucun des deux ne m'avaient concerté pour ce coup là, certainement parce qu'ils connaissaient ma réponse d'avance et je les déteste d'avoir quand même prit la décision seuls.
- Je suis obligée ? tente-t-elle tout de même.
- Tu veux récurer mes chiottes pendant huit mois ?
Elle lève les yeux au ciel, les bras croisés.
- Devant tout le monde ? demande-t-elle.
- Non, allez sur la terrasse et tu es dans l'obligation de l'écouter parler.
Elle se lève finalement de sa chaise les bras toujours repliés contre sa poitrine, sous les regards de nos amis. Je l'imite, et la totalité de la table nous suit jusqu'à la porte fenêtre menant au balcon. On sort tous les deux, et le vent s'empare de mes joues. Karol se dirige vers la balustrade, ou appuie ses bras, me laissant une vue sur son dos et Michael vient nous interrompre.
- On ferme à clef et on met le chrono, comme ça pas de triche.
La porte se ferme devant les visages de nos amis, et Karol brise le silence la première.
- Bon alors vas y dis moi ce que tu veux me dire, plus tôt tu auras fini, plus tôt je pourrais rentrer.
Elle se retourne appuyant ses coudes sur le fer forgé, et me fait face. Je me gratte la nuque, prit au dépourvu par toute cette situation et perplexe de la tournure de cette discussion. Je ne sais pas si tout lui balancer comme ça sans contexte toute la vérité est la bonne solution, j'aurais peut-être préféré que les garçons me laissent faire sur ce coup là.
- Euh je passe frénétiquement ma main sur ma nuque. Je sais pas vraiment comment aborder ça.
- Aborde le c'est tout, je crois que j'ai vu pire.
Je soupire, et enfonce mes mains dans les poches de mon jean.
- Tu sais la dernière fois dans la rue, je t'ai dit que je donnerai tout pour que tu connaisse la vérité, tu t'en souviens ?
- Oui, vaguement. Mais je ne vois toujours pas de quelle vérité tu parle, si tenté qu'il en existe réellement une.
- Il y en a une, concernant la soirée où on s'est séparés.
Elle lève les yeux au ciel une seconde fois en soupirant, persuadée que ce que j'avançais était simplement de vieilles excuses bidons qui ne justifieront pas l'acte qu'elle a vu.
- Si c'est pour me sortir une excuse du genre "Je t'aimais plus mais j'avais peur de te blesser alors j'ai préféré embrasser Cindy pour que tu me quitte" ne va pas plus loin, j'en ai rien à faire.
- C'est pas ça, je te le promets.
- Alors c'est plus quelque chose comme "Ce baiser ne signifiait rien pour moi" ? Parce qu'elle ne fonctionne pas non plus.
- Est-ce que je peux t'expliquer ? Libre à toi de faire ton propre jugement après ça.
Elle se tait et finit par m'encourager à finir mon explication. Les lampadaires de l'immeuble haussmannien se reflètent dans ses yeux, la lumière s'amuse à dessiner les contours de son visage qui semble tout de même agacé et je me surprends à me demander si quelque chose changera dans notre relation après cette conversation, ou si c'est peine perdue.
- Quelques heures avant que j'arrive à la soirée sur la plage, Cindy est venue me voir au lycée. Elle m'a dit qu'elle t'avait entendu parler avec Sebastian et qu'il t'avait donné rendez-vous à la paillote le soir même. Je ne l'ai pas cru, et alors elle m'a avoué que si elle me disait ça ce n'était pas pour nous causer des problèmes mais parce qu'elle appréciait Sebastian et qu'elle voulait se rapprocher de lui. Je ne comprenais pas ce que je venais faire dans son histoire, et c'est là qu'elle m'a demandé de l'accompagner dans l'espoir de faire réagir Seb et de pouvoir m'assurer qu'il ne t'avait pas embarqué dans l'un de ses plans foireux.
- Et le baiser ?
- Elle ne m'en avait pas parlé, je devais juste lui servir d'appât, me pointer devant Seb et t'expliquer que je lui rendais simplement service. Je ne l'ai pas embrassé parce que je le voulais ou pour te faire du mal, je l'ai repoussé à l'instant même où je m'en suis rendu compte.
Un ange passe. Le bruit citadin résonne sous nos pieds, la ville est active et les gens autour de nous ne semblent pas encore s'être endormis. Je suis posté devant elle, enfin libéré du poids que je porte sur les épaules depuis des mois. Maintenant elle sait. Ça n'enlève pas la culpabilité qui sommeille en moi, mais si ça peut permettre qu'elle m'en veuille un peu moins ou qu'elle se sente mieux vis à vis de cette histoire, alors j'aurais au moins réussi quelque chose.
- Et alors quoi ? Je devrais tout effacer, te serrer dans mes bras et faire comme si rien ne c'était passé ?
Je relève le regard vers elle, un peu déconcerté. Le but était de me libérer d'un poids, et de nous aider à tourner la page sans avoir de rancoeur l'un pour l'autre. Je sais pertinemment que je ne peux pas lui demander de me laisser une seconde chance, du moins pas maintenant. Je ne peux pas revenir des mois plus tard, lui donner la vraie version et lui demander de reconsidérer toute notre relation.
- Non, c'était simplement quelque chose qui me tenait à cœur. Je...je sais que je t'ai faite souffrir et je m'étais dit que ça arrangerait certaines choses.
- Que ça arrangerait certaines choses ? Ruggero, le fait que tu me dise la vérité aujourd'hui n'enlève pas les moments que j'ai passé à pleurer pour toi. Elle n'efface pas ce que j'ai ressenti, et elle n'efface pas non plus les mots que tu as écris dans ta lettre l'été dernier.
- Pour l'amour du ciel, ce n'est pas moi qui ai écrit cette lettre ! dis-je en haussant le ton.
- Alors c'est qui ? dit-elle en m'imitant. Là aussi il y a une vérité cachée ?!
- J'en sais rien ! Mais essayez de me croire quand je vous dis que je n'y suis pour rien !
- J'y arrive pas Ruggero !
Sa voix se brise et résonne un peu plus fort à travers le bruit des voitures en contre bas. Sa respiration est étrangement devenue plus irrégulière, nos yeux se transpercent malgré le manque de lumière, et j'attends qu'elle m'en dise plus.
- Je n'arrive pas à te croire quand tu me dis que tu n'y es pour rien, j'arrive pas à effacer la douleur sur j'ai ressenti quand je t'ai vu embrasser Cindy et après tout ça, après toute la souffrance que j'ai pu accumuler pendant des mois, je n'arrive pas non plus à me dire que les mots retranscrit dans cette lettre ne viennent pas de toi !
Je reste interdit quelques instants. Ses yeux brillent dans la lueur de la nuit, et je donnerai tout pour la tenir contre moi, et lui dire que tout ira bien.
- Tu crois que tout est facile parce que tu reviens des mois plus tard en ayant aucune idée de ce que les autres ont pu vivre pendant que tu n'étais pas là. Mais la vérité Ruggero, c'est que je n'arrive même plus à savoir si j'ai réellement compté pour toi.
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