49. Joint, enfant et remparts
NDA : heyyy je suis de retour pour essayer d'égayer ce lundi un peu morose uwu
je suis désolé de le poster un peu tard oopsi, j'espère qu'il vous plaira :)
ENJOY!
GABRIEL.
-Quand qu'est-ce que tu as commencé à fumer ?
Gabriel était assis côté passager, dans la petite voiture de Zedd, l'observant silencieusement rouler son joint au-dessus de ses cuisses.
Quelques dizaines de minutes auparavant, le bar avait fermé ses portes pour la nuit et Zedd avait boudé parce qu'il avait encore envie de boire, bien qu'il ait déjà ingurgité un bon nombres de pintes de bières et de shots. Mais n'étant absolument pas en état de conduire, Zedd avait proposé qu'ils s'installent dans sa voiture, garée un peu plus loin dans la rue du bar, en attendant qu'ils dessoûlent - objectif un peu paradoxal étant donné qu'il était en train de se rouler un joint.
De toute façon, Gabriel était lui-même beaucoup trop bourré pour rentrer chez lui sans réveiller David - s'il n'était pas avec Trisha - ou même pour le confronter parce que Gabriel et Zedd étaient tout de même partis sans prévenir personne et David lui avait envoyé un tas de messages et l'avait appelé six fois.
Mais Gabriel l'ignorait pour rester avec Zedd, dans leur bulle hors du temps. Il était trop content d'être avec lui pour gaspiller son temps à se chamailler avec son frère.
-Ça dépend, répondit Zedd avec un sourire. Cigarette ou joint ?
-Les deux.
Zedd passa sa langue sur sa lèvre inférieure avec de lécher le bord de la longue feuille. C'était sexy alors que ça ne devrait pas l'être, Gabriel suivit ses mouvements des yeux alors que son estomac se nouait, se rappelant de toutes les fois où cette même langue avait glissé sur ses hanches et son cou.
-J'ai fumé ma première cigarette quand j'avais onze ans et mon premier joint quand j'en avais treize.
Il fit tourner le long cône entre ses doigts pour faire coller la feuille. Concentré dans sa tâche, il ne levait même pas les yeux vers Gabriel.
-Wow, c'est-
-Tôt ?
Zedd sourit lorsqu'il se tourna vers lui. Il haussa une épaule en commençant à taper le filtre - un bout de carton - de son joint contre l'arrière de son téléphone. Gabriel regarda curieusement ses mouvements en se demandant à quoi servaient toutes ses étapes.
-Ouais, je sais, continua Zedd. J'en suis pas très fier, mais je n'en ai pas honte non plus.
Il baissa les yeux sur son long joint et sorti son briquet pour brûler l'excès de feuille au bout. Puis il le porta à ses lèvres et Gabriel était obnubilé par chacun de ses mouvements, par la lumière chaude du briquet qui éclairait parfaitement les doux traits de Zedd, et par la grâce qui se dégageait de ses gestes.
-Tu ne le regrettes pas ? demanda encore Gabriel.
De nouveau, Zedd haussa les épaules. Il recracha la fumée et Gabriel fut légèrement dérangé par l'odeur très - épicée de son joint.
-Parfois, si, répondit Zedd.
Il fit tomber la cendre dans une tasse en plastique My Little Pony, qui faisait visiblement office de cendrier, coincée dans son porte-gobelet. Gabriel avait un peu honte de reconnaître Rainbow Dash, il devrait arrêter de se ramollir le cerveau devant des dessins-animés.
Gabriel remarqua qu'il n'y avait pas que des mégots de cigarettes dedans et il vint à se demander si Zedd avait déjà fumer des joints au volant. L'idée même lui noua l'estomac.
-Puis après je me dis que de toute façon, je vais finir par mourir un jour ou l'autre et j'ai pas envie de vivre avec des regrets, continua Zedd.
Il avait fermé les yeux et pressé l'arrière de son crâne contre l'appui-tête. Il aspira une autre bouffée sur son joint.
Zedd se tourna vers Gabriel en le lui tendant. Le bouclé écarquilla les yeux en regardant curieusement le joint entre les doigts de Zedd, puis il leva les yeux vers lui.
-Tu veux - tu veux que je fume ? demanda-t-il en pointant l'agent destructeur.
Zedd gloussa doucement et haussa une épaule.
-Je te propose simplement, tu n'es pas obligé d'accepter. Je ne te force à rien, Gaby.
Mais Gabriel était curieux de toucher à ce monde-là, de savoir pourquoi Zedd consommait du cannabis et ce que ça lui faisait.
-D'accord, souffla-t-il en tendant finalement la main pour attraper le joint.
Ses mouvements étaient maladroits alors qu'il le ramenait vers lui. Zedd l'observait avec un doux sourire.
-Et là, qu'est-ce que je fais ?
-Tu le mets dans ta bouche, t'aspires et t'inhales.
-J'inhale ? répéta Gabriel avec les sourcils froncés.
-Oui, comme quand ta mère rentre dans ta chambre quand tu te branles, gloussa Zedd. Han !
Pour appuyer ses dires, Zedd plaqua une main sur sa poitrine et aspira - inhala - profondément avec un air choqué. Gabriel rit doucement.
-Mmh, je vois, répondit-il.
Il coinça alors le joint entre ses lèvres et aspira une petite bouffée. La sensation de la fumée dans sa bouche était étrange et Gabriel essaya de l'inhaler, mais ses poumons semblèrent se bloquer et sa gorge se serra. Il s'étouffa, recrachant la fumée alors que Zedd se tordait de rire à côté de lui.
-P'tit joueur, va, gloussa Zedd.
Gabriel était encore en train de tousser dans son épaule lorsqu'il rendit le joint à Zedd accompagné d'un joli doigt d'honneur. Zedd le récupéra avant de se retourner, tendant le bras entre les deux sièges pour attraper une bouteille d'eau sur la banquette arrière.
-Tiens, souffla-t-il en la donnant à Gabriel.
Il s'empressa de la saisir et en but de longue gorgée, apaisant sa gorge en feu. Ses yeux étaient remplis de larmes à force de tousser et ses joues devaient sûrement avoir une teinte de rouge écarlate.
-Bon, ça c'est pas pour moi, marmonna Gabriel en refermant la bouteille.
Sa voix était rauque et sèche. Zedd lui sourit légèrement.
-C'est une question d'habitude, dit-il en aspirant une nouvelle bouffée sur son joint.
-Tu ne penses pas à ce que ça pourrait faire à ta santé ? demanda Gabriel.
Zedd lâcha un soupir.
-De temps en temps, oui, répondit-il en laissant la cendre tomber dans la petite tasse. Mais après avoir passé deux ans dans une putain de prison, j'en ai plus rien à foutre.
-C'était comment là-bas ?
Un sourire vint jouer sur les lèvres de Zedd.
Dieu, il était si beau.
-Je lui donnerais même pas une étoile sur TripAdvisor, gloussa-t-il en expirant la fumée.
Gabriel leva les yeux au ciel, mais il n'arrivait pas vraiment à s'empêcher de sourire non plus.
-Sérieusement, Zedd.
L'hispanique tourna les yeux vers le plafond et tira une autre bouffée. Il avala bruyamment sa salive et soudainement, son regard était plein de mélancolie.
-C'était - horrible, souffla-t-il.
Gabriel sentit son coeur se serrer.
-Quand tu penses à tes années lycée, tu penses à tes premiers petits copains, tes premières soirées, tes premières fois.
Zedd regardait à la route à travers le pare-brise comme s'il l'avait déjà vue dans un endroit lointain. Il avala de nouveau sa salive.
-Tu penses aux SATs, aux inscriptions à l'université, à toutes les cuites que tu vas te prendre dans la gueule.
Un soupir échappa sa poitrine.
-J'ai fêté mes dix-huit ans dans un centre correctionnel, Gabriel, confessa-t-il en ancrant son regard dans le sien. J'ai eu un pot de yaourt en plus que les autres, c'est tout. Mon père n'est même pas venu me voir. Le seul moment un peu festif de la journée, c'est quand Oly et Trisha sont venus me voir, mais les visites ne peuvent pas durer plus d'une heure alors-
Zedd détourna le regard en humectant ses lèvres, demeurant silencieux un instant.
Gabriel avait tellement mal au coeur. Personne ne devrait passer ses dix-huit ans dans de telles conditions et Gabriel était en colère contre le monde entier.
-Je ne suis jamais allé à un bal de promo de ma vie, t'imagines ? C'est dingue.
-C'est vrai ? s'exclama Gabriel.
Parce que les bals de promos étaient quelque chose que tout le monde devrait vivre au moins une fois dans sa vie. C'était quelque chose d'universel dans leur pays, une cérémonie qui célébrait leur jeunesse, leurs études et leur réussite, une fête pour symboliser le passage de l'adolescent à l'adulte.
Zedd hocha la tête avec les sourcils haussés.
-Non pas que ça m'intéresse vraiment, mais c'est juste - j'aurais voulu voir ce que c'était. Je sais qu'Oly a été élu Roi du bal de promo dans notre lycée avec son ex petite copine et je suis un peu déçu de ne pas avoir pu assister à ça.
Il se tourna vers Gabriel.
-Tu y es allé, toi ?
-Ouais, répondit Gabriel en acquiesçant lentement. Mais je n'en ai pas un super souvenir. J'y suis allé avec un gars que je fréquentais à cette époque-là, Lucas. Il a fini par se faire sucer par l'une des cheerleaders dans les toilettes et j'ai dû appeler Joseph pour venir me chercher. En plus, Lucas refusait de me faire danser parce qu'il trouvait que c'était vraiment la honte de danser avec quelqu'un qui-
Gabriel marqua une pause un instant.
Il ferma les yeux avant que les mots débordent de ses lèvres. Un rire nerveux échappa sa poitrine et il haussa les sourcils.
-Dans tous les cas, je n'aurais même pas pu danser avec lui, souffla-t-il. Enfin, tu vois ce que je veux dire.
Gabriel ouvrit les yeux, mais seulement pour regarder ses mains triturer la couture de sa blouse. Il n'osait pas vraiment affronter le regard de Zedd.
-Je ne vois pas ce que tu veux dire, finit par répondre Zedd.
Gabriel planta son regard dans le sien, l'hispanique paraissait très sérieux.
-Je ne vois pas en quoi quelqu'un ne pourrait pas danser avec toi, Gabriel, c'est complètement stupide.
Le bouclé se mordilla la lèvre inférieure.
-Comment est-ce qu'on aurait dansé un slow, Zedd ? Je ne pouvais pas-
-Mais c'est des détails techniques ça ! s'exclama Zedd.
Gabriel se fit tout petit, même s'il savait que Zedd n'était pas en colère contre lui.
-Putain, je t'aurais porté, je me serais assis avec toi, j'aurais dansé sur les genoux s'il le faut ! Ce sont des putains de gros crétins, Gabriel, ne commence pas à croire que tu ne peux pas danser avec quelqu'un seulement à cause de ton fauteuil ! Ou que tu ne peux pas danser tout court !
Zedd pressa son front contre sa paume, son coude appuyé contre le rebord de la fenêtre. Son genou se mit à tressauter nerveusement et Gabriel voulait l'attirer contre sa poitrine et caresser ses cheveux jusque'à ce qu'il se calme.
-S'il te plaît, Zedd, il n'y a aucune raison d'être contrarié, murmura Gabriel. De toute façon, il a mis cette cheerleader enceinte à peine un mois après. Crois-moi, il n'était pas du tout ravi quand il a appris qu'elle ne pouvait plus avorter.
Gabriel gloussait et il se sentait un peu coupable, mais le karma faisait bien les choses et il n'allait pas en pleurer.
-Elle va sûrement accoucher en février ou en mars alors elle n'a même pas pu commencer ses études de commerce. Mais apparement, elle veut le garder alors-
Il haussa les épaules.
-Je suppose que je leur souhaite de réussir dans la vie et j'espère que ce gosse sera bien élevé quand même, mais je me permets de jubiler un peu quand même.
Gabriel leva les yeux vers Zedd. L'hispanique le regardait avec un doux sourire.
Ses yeux commençaient à être un peu rouges.
-Ce sera notre secret à tous les deux, chuchota-t-il.
Gabriel gloussa.
-Ça me va.
Ils se regardèrent quelques instants, silencieux, et Gabriel avait l'impression que le monde entier avait disparu. Il n'y avait qu'eux deux, l'odeur de drogue et le doux ronflement du chauffage de la voiture. L'électricité se déplaçait entre eux et c'était un peu - intime. Zedd souriait encore et c'était ce sourire lent et beau qui faisait chanter les oiseaux, pousser les fleurs et qui faisait littéralement vibrer le coeur de Gabriel.
-Tu veux des enfants, toi ? demanda finalement Zedd.
Gabriel sentit une ruée d'enthousiasme se presser contre sa poitrine.
-Tu rigoles ? J'en veux plein !
-C'est vrai ? sourit Zedd.
Il semblait un peu attendri, Gabriel essaya de ne pas montrer qu'il rougissait.
-Oui ! s'exclama-t-il. J'adore les enfants, j'ai toujours rêvé d'en avoir quinze ou vingt ou même trente !
-Tu ne penses pas que ça fait un peu beaucoup ? gloussa Zedd.
-Roh, c'est une façon de parler, abruti, rétorqua Gabriel en levant les yeux au ciel.
-Combien tu en veux alors ?
Gabriel haussa les épaules.
-Je m'en fiche assez, répondit-il. Je serais heureux avec deux enfants comme avec vingt-sept alors - je laisserai mon mari choisir, je suppose.
Zedd hocha lentement la tête en détournant le regard. Il le posa sur le route et il sembla sombrer dans ses pensées un instant.
-Et toi ? demanda alors Gabriel.
-Je n'en veux pas, répondit Zedd sans même le regarder.
Gabriel fronça les sourcils.
-Pourquoi ?
Zedd prit une longue inspiration.
-Parce que j'ai déjà gâché les vingt premières années de ma vie à faire de la merde, souffla-t-il. J'ai pas envie de passer le restant de mes jours à m'occuper d'enfants. J'ai envie de vivre.
-Avoir des enfants ne veut pas forcément dire que ça va gâcher ta vie, Zedd.
Un rire échappa la poitrine de Zedd, mais c'était un rire amer.
-J'ai gâché celle de mon père, je sais ce que c'est.
-Mais tu ne sais pas ce que ça fait d'avoir des enfants, rétorqua Gabriel. Ils t'apportent une toute nouvelle forme d'amour et ils te forcent à être la meilleure version de toi-même, ils te permettent de te dépasser.
-Ça ne change rien, Gaby. Et tu es le premier à savoir que l'amour et moi, ça fait pas très bon ménage.
Gabriel sentit son coeur se serrer seulement un bref instant.
-Aimer ses enfants n'est pas la même chose qu'aimer quelqu'un d'autre, Zedd.
L'hispanique soupira en fermant les yeux.
-Je ne veux juste pas d'enfant, Gabriel, arrête d'essayer de comprendre.
-Je n'essaye pas de comprendre, j'essaye de te montrer qu'avoir des enfants n'est pas forcément une fatalité.
-Mais je m'en fous des enfants, Gabriel ! s'exclama Zedd en ancrant son regard dans le sien. Avoir des enfants n'est pas le problème, c'est d'être un père !
Gabriel ne lisait pas de la colère dans ses yeux, il lisait toutes les traumatismes qui poursuivaient encore Zedd aujourd'hui.
-J'ai eu un père de merde ! continua-t-il. Je sais ce que ça fait quand t'as un mauvais père, je sais ce que ça fait à un enfant !
-Tu n'es pas ton père, Zedd, murmura Gabriel. Tu sais quelles erreurs à ne pas faire et - regarde, j'ai eu des parents de merde aussi, mais ça ne m'empêchera jamais d'essayer d'être le meilleur père possible pour-
-Mais tu n'es pas complètement déglingué, bordel !
Et cette fois-ci, c'était de la colère que Gabriel lisait dans les yeux de Zedd.
-Putain, t'as au moins eu la chance de grandir dans une vraie famille, d'avoir des frères et une soeur qui t'aiment, d'avoir des parents qui t'aiment, même s'ils te le montrent de façon étrange parfois. J'ai passé mon enfance à visiter ma mère à l'hôpital et à me faire casser la gueule par mon père !
La respiration de Gabriel s'interrompit un bref instant.
Lorsqu'il avait vu que Mike avait donné une claque à Zedd peu après leur petite scène au milieu du diner, Gabriel avait tout de suite compris pourquoi leur relation était bancale. Il ne savait rien d'autre sur leurs différents, mais confronté à la réalité des choses, Gabriel sentit un profond sentiment de colère naître dans sa poitrine, mais aussi une horrible douleur étreindre son coeur lorsqu'il réalisait que Zedd avait pensé son enfance entre sa mère au bord de la mort et son père qui le frappait, puis son adolescence avec de mauvaises fréquentations et à faire des visites régulières au commissariat de police, avant de finir ses dernières années d'innocence dans un centre correctionnel.
Zedd n'avait même pas encore vécu. Toute sa vie, il n'avait fait que survivre.
-Et regarde comment j'ai tourné, Gabriel ! continua Zedd. Regarde-moi ! Je ne serais jamais un père à la hauteur.
Il y avait tellement de douleur dans la voix de Zedd que Gabriel avait presque envie de pleurer. C'était peut-être l'alcool dans lequel son cerveau baignait qui le rendait aussi émotif, ou peut-être la bouffée du joint, mais il avait aussi l'impression qu'il avait depuis longtemps dessoûlé et qu'il avait juste envie de pleurer parce qu'il ne pouvait même pas prendre un peu de la douleur de Zedd.
Il la prendrait en entier s'il le pouvait.
-Si tu ne veux pas d'enfant parce que tu n'aimes pas l'idée d'avoir des enfants, alors je respecte ton choix, Zedd. Mais si tu ne veux pas d'enfant parce que tu as peur d'être un mauvais peur, alors je veux que tu arrêtes ça tout de suite. Tu es une bonne personne et-
-Je ne le suis pas, Gabriel.
Le bouclé tourna son regard vers Zedd, mais l'hispanique avait les yeux posés sur son volant.
-J'ai fait des choses que tu n'imagines même pas, chuchota-t-il. Et si je faisais la même chose à mes enfants ? Je serais incapable de me pardonner ou même de me regarder dans la glace.
Gabriel avait toujours su que Zedd avait fait des mauvaises choses dans sa vie, des choses dont il avait honte et dont il ne parlait jamais, mais Gabriel n'arrivait pas à croire que ces choses-là puissent être impardonnables.
-Qu'est-ce que tu as fait qui pourrait être si grave ?
Zedd se pinça les lèvres avant d'aspirer une bouffé sur son joint.
Puis une deuxième.
Il expira la fumée vers le plafond et avala bruyamment sa salive.
-J'ai envoyé un gars à l'hôpital, souffla-t-il. Deux côtés cassées et le nez pété.
Il passa sa langue sur sa lèvre inférieure avant de la mordiller doucement.
-J'ai coupé les cheveux d'un mec aussi une fois. Une idée débile de mes anciens potes, c'était une bande de gros homophobes qui arrêtaient pas d'harceler ce mec gay dans ma classe, il avait de longs cheveux absolument magnifiques.
Zedd déglutit.
-On l'a coincé dans les toilettes et on a tout coupé. Tout. Il pleurait et nous suppliait d'arrêter et j'ai rien fait, Gabriel. Ils l'insultaient de gros PD, lui disaient que c'était une fillette qui méritait de mourir et que sa famille devait avoir honte d'avoir ce genre d'abomination parmi eux. J'ai continué à regarder sans jamais rien dire.
Gabriel était un peu à court de mots, il n'était pas sûr de savoir quoi dire. Ce que Zedd décrivait-là était réellement atroce et Gabriel n'arrivait pas à imaginer le Zedd qu'il connaissait, celui doux et aimant, qui frappait un mec au point de lui briser les côtes ou qui se moquait d'un garçon seulement pour sa sexualité. Ce n'était pas Zedd, ce n'était pas possible.
Il imaginait un Zedd jeune et naïf qui se faisait entraîner dans des plans foireux par une bande de mecs pas vraiment réglos. Il ne pouvait pas y avoir d'autres explications que celle-ci, Zedd ne ferait jamais ce genre de chose.
L'hispanique lâcha un petit soupir, extirpant Gabriel de ses pensées. Il paraissait soudainement si petit et vulnérable, les yeux baissés et pleins de regrets.
-J'ai frappé Oly une fois.
La voix de Zedd était basse, se frayant un chemin à travers la tension qui régnait dans le petit habitacle.
Gabriel retint son souffle.
-Fort, chuchota Zedd, plus bas encore. Il s'est promené avec un oeil au beurre noir pendant une éternité et-
Il ferma les yeux si fort que des ridules se créèrent aux coins. C'était presque comme s'il revoyait les images, comme si cette histoire le faisait encore silencieusement souffrir.
-Bordel, je m'en veux encore ! Ça fait des années que ça s'est passé maintenant, Oly m'a pardonné depuis longtemps, mais - j'en sais rien.
Il soupira.
-C'est juste que-
Zedd humecta ses lèvres et Gabriel vit sa main droite se fermer en poing. Il était en train d'enfoncer ses ongles dans sa paume.
-Je sais qu'Oly et Trisha ont peur de moi parfois, murmura-t-il. Trisha était là quand ça s'est passé et j'ai l'impression qu'elle a changé depuis ce jour-là. C'est une vraie tête brûlée, elle pourrait se lancer tête baissée dans une bagarre avec un mec de trois mètres de plus qu'elle.
Un bref instant, un sourire vint jouer sur ses lèvres, mais il s'évanouit beaucoup trop vite.
-Mais quand elle se dispute avec moi, elle prend toujours ses distances. Ça lui ait déjà arrivé de sursauter quand je faisais un mouvement brusque, même quand j'étais pas forcément énervé. Elle est juste - elle a peur de moi, Gabriel, je l'ai déjà vu dans ses yeux.
Il ancra enfin son regard dans celui de Gabriel.
-Et elle n'est pas la seule, je sais qu'Oly aussi. Il déteste quand je me bats, il essaye toujours de m'éviter de tomber dans des embrouilles, quitte à lui-même se faire casser la gueule. Ce qui est d'ailleurs arrivé la dernière fois avec Blake.
Les phalanges de Zedd devenaient blanches à force de serrer le poing.
-Arrête ça, murmura Gabriel en attrapant sa main.
Au seul contact des doigts de Gabriel, ceux de Zedd se détendirent automatiquement. L'hispanique se laissa faire lorsque Gabriel inspecta le creux de sa paume.
Elle baignait dans le sang, ses cicatrices s'étaient rouvertes.
-Zedd...
Gabriel fouilla la boîte à gants jusqu'à trouver un paquet de mouchoirs.
Ça fera l'affaire, se dit-il.
Il l'imbiba avec un peu d'eau de la bouteille, Zedd se tendit lorsque Gabriel le pressa contre sa chair meurtrie.
-Regarde, je suis incapable de contrôler ma colère, Gabriel, et mes meilleurs amis ont peur de moi.
-Mais je n'ai pas peur de toi, Zedd.
Leurs regards se rencontrèrent et c'était - électrique.
Le toucher de sa peau faisait disparaître le monde entier pour ne laisser place qu'aux frissons de l'instant présent.
-Tu devrais, souffla Zedd.
-Tes démons ne m'effraient pas.
L'hispanique fronça les sourcils et Gabriel baissa les yeux pour que Zedd ne puisse pas y lire tous ses secrets. Il continua d'essuyer le sang au creux de sa paume.
-Ils ne m'effraient pas, répéta Gabriel. Je comprends que tu sois - plein de colère ou plein de tristesse, ou peut-être même les deux. Parfois, il faut savoir s'écrouler, Zedd. Un peu comme les phoenix. Ils brûlent et s'élèvent de leurs propres cendres. J'attendrai le jour où tu seras prêt à brûler.
Gabriel humecta ses lèvres et il caressa les doigts de Zedd entre les siens. Elle était complètement meurtrie. Son majeur était gonflé, teinté de drôles de tons de bleus et de violets, pressé contre son index avec du bandage collant. Ses doigts et le dos de sa main étaient pratiquement recouverts de petites coupures, alors que ses phalanges étaient complètement ouvertes. Apparement, son nouveau travail d'intérêt général ne le traitait pas très bien.
-Et si je ne brûle jamais ? Et si j'étais juste comme ça ?
Gabriel ancra son regard dans celui de Zedd.
-Je n'ai pas besoin d'être réparé, Gaby, je suis juste-
-Mais je ne veux pas te réparer, le coupa Gabriel.
Zedd se tut.
-Je ne dis pas que j'attendrai parce que je pense qu'un jour tu iras mieux, je dis que je t'attendrai parce que je veux être à tes côtés quand tu en as besoin, Zedd. Je m'en fous que tu aies des problèmes de colère et je m'en fous que tu sois triste et je m'en fous que tu aies frappé ton meilleur ami parce que je sais qui tu es, Zedd. Je te vois.
Gabriel serra les doigts de Zedd entre les siens. Il se pinça les lèvres pour se retenir de dire une bêtise, mais Zedd le regardait avec de grands yeux débordants de sincérité et ses yeux étaient un peu rouges et il était si vulnérable, si beau et doux sous les pâles lueurs des lampadaires extérieur. Gabriel était enveloppé d'une fumée toxique, son coeur battait à tout rompre dans sa poitrine, mais il ne s'était jamais senti aussi vivant qu'à ce moment-là.
Les mots débordèrent de sa bouche avant qu'il ne puisse y penser une seconde fois.
-Je t'aime, Zedd. Je ne t'aime pas malgré tes côtés sombres, je t'aime avec tes côtés sombres. Je t'aime parce que tu es vivant et téméraire. Je t'aime parce que tu te bats pour les choses que tu aimes, peu importe ce que la loi te dit. Je t'aime parce que tu es sans filtre et brutalement honnête. Je t'aime parce que tu ne te laisses pas faire, parce que tu ne baisses pas les bras devant un système qui veut t'écraser. Je t'aime parce que tu sais vivre, parce que tu as vécu des choses et tu en sors avec une maturité incroyable. Je t'aime parce que tu es énervé, parce que tu as la rage de vivre, parce que-
La lèvre inférieure de Gabriel se mit à trembler et sa voix se brisa un peu.
-Parce que tu me fais rire, Zedd. Je t'aime parce que tu prétends toujours dormir vingt minutes de plus le matin pour me laisser finir mes dessins sur toi. Je t'aime parce que tu n'arrives pas à être subtil quand tu es avec quelqu'un que tu n'aimes pas. Je t'aime parce que tu ne dis pas « s'il vous plaît » mais « si'ou plaît ». Je t'aime parce que tu bois ton café avec beaucoup trop de sucre. Je t'aime parce que tu fronces le nez quand tu ne comprends pas quelque chose. Je t'aime parce que chantes horriblement mal sous la douche. Je t'aime parce que tu es ce genre de personne bizarre qui trempe ses frittes dans son milkshake. Je t'aime parce que tu as des ridules aux coins des yeux quand tu souris. Je t'aime parce que...
Il n'était même plus bourré. Il était complètement sobre et pourtant, il devenait ce bordel monstrueux de mots d'amour et de sanglots étouffés pour aucune raison.
Gabriel se pinça les lèvres en lâchant les doigts de Zedd, détournant le regard un instant pour essuyer les larmes qui menaçaient de couler.
-Je suis désolé, je n'aurais pas dû dire tout ça, souffla-t-il. J'ai - je ne sais pas ce qu'il s'est passé dans ma tête et j'ai-
-C'est la première fois qu'on me dit ce genre de chose.
Gabriel ancra son regard dans le sien. Zedd était silencieux en face de lui, le coin des lèvres légèrement courbés, et des étoiles dansaient dans ses prunelles sombres.
J'aurais pu te le dire un millier d'autres fois, pensa Gabriel.
-C'était stupide, répondit-il à la place.
Un rire déborda des lèvres de Zedd.
-Tu rigoles, c'était-
Sa voix s'évanouit doucement, comme s'il cherchait ses mots. Il regarda Gabriel en aspirant une bouffée sur son joint, ses yeux vitreux et injectés de sang, mais il y avait une lueur de tendresse et de douceur au fond de ses prunelles.
Peut-être même de l'amour.
-J'ai juste - j'ai vraiment envie de t'embrasser maintenant.
La respiration de Gabriel se bloqua quelque part à l'arrière de sa gorge. Son corps s'enflamma et il pouvait sentir toutes les cellules sous sa peau se mettre à danser, saturées de désir.
Zedd ne posa son regard qu'une seconde sur les lèvres de Gabriel, mais ce fut assez pour le rendre complètement dingue.
-Pourquoi tu ne le fais pas alors ? chuchota Gabriel.
La tension qui régnait dans l'habitacle était étouffante. Gabriel enfonça ses mains dans les poches de sa veste pour se retenir de juste attraper le visage de Zedd et l'embrasser jusqu'à ce que l'air lui manque.
Zedd soupira et détourna le regard.
-Parce que ce serait te faire des promesses que je ne peux pas garder.
-Je m'en fiche, répondit Gabriel.
C'était vraiment le cas, il s'en foutait complètement. L'idée même de sentir les lèvres de Zedd contre les siennes rendait Gabriel désespéré, et même s'il souffrait après, même s'il savait que ce baiser ne mènerait peut-être à rien, ça en valait la peine.
Tout ce qui concernait Zedd en valait la peine.
-Je ne m'en fiche pas, Gaby, souffla l'hispanique. Je ne peux pas te faire encore plus mal.
Il secoua la tête et ferma les yeux un instant.
-Je n'aurais jamais dû te dire ça, murmura-t-il.
-Pourquoi ?
-Parce que ça ne sert à rien que je te fasse espérer alors que ça n'arrivera plus jamais.
Le monde entier se fracassa autour de Gabriel.
Zedd ancra son regard dans le sien et Gabriel avait vraiment envie de pleurer, mais aussi d'embrasser Zedd et il ne savait pas vraiment quelle envie était la plus forte.
-Je ne pense pas que je vais rester ici encore longtemps, continua Zedd. Je vais finir mes heures de travail d'intérêt général et mon contrat avec Sheppard et après - je me casse loin, Gabriel. Je ne suis même pas sûr de rester en Amérique et-
-Je viendrais avec toi, le coupa Gabriel.
Zedd lâcha un soupir, mais c'était un soupir de défaite, teinté de tristesse, et Gabriel pouvait déjà entendre son coeur se briser dans sa poitrine.
-J'ai besoin de me trouver, souffla-t-il. Et j'ai besoin de le faire seul.
Les larmes débordèrent des yeux de Gabriel.
-Donc tu vas juste nous abandonner et te casser ?
-Je ne vous abandonne pas.
-Alors tu reviendras ?
Zedd se pinça les lèvres et toute la douleur dans ses yeux fut assez pour que Gabriel comprenne qu'il ne reviendrait probablement jamais.
Gabriel détourna le regard et ferma les yeux un instant.
-Donc tu nous abandonnes, chuchota-t-il.
Ce qui était réellement douloureux, c'était de savoir qu'il n'y avait rien ni personne qui retenaient Zedd de rester ici. Était-il malheureux à ce point-là ? Gabriel aurait voulu être la raison qui empêchait Zedd de partir.
-Je suis désolé, murmura Zedd.
-Tu peux me ramener chez moi, s'il te plaît ?
Gabriel ne lui lança même pas un regard. Il se retourna et attacha sa ceinture, il ne pouvait pas rester dans cette voiture. Il avait besoin d'être seul et de laisser sortir tous les sanglots qui martelaient sa poitrine.
-Gabriel, souffla Zedd.
-Zedd, répondit-il sans même le regarder.
Les yeux fixés sur les bâtiments à l'extérieur, il refusait de lancer un regard à Zedd de peur que toutes les émotions ne deviennent trop lourdes à contenir.
-Gabriel, regarde-moi.
Mais Gabriel avait déjà envie de pleurer et il était sûrement déjà en train de pleurer. Il ancra son regard dans celui de Zedd et il devait avoir l'air d'un désastre. Alcool, larmes et dispute ne faisaient jamais très bon ménage.
-Qu'est-ce que tu veux de moi, Zedd ? murmura-t-il.
L'hispanique mordilla sa lèvre inférieure et il semblait tourmenté par la culpabilité, tiraillé par quel désir en lui était le plus fort. L'habitacle demeura silencieux pendant quelques instants, Gabriel et Zedd se contentaient de se fixer à travers tous les mots inavouables qui planaient autour d'eux. Les températures ne devaient pas très hautes à l'extérieur, mais Gabriel avait terriblement chaud, et l'air devenait lourd de tensions et d'électricité.
Il avait envie de rester près de Zedd pour toujours, mais il avait aussi envie de retrouver son lit et rester assis à être témoins de son conflit intérieur ne le rendait que plus désespéré. Gabriel sentit une larme chaude dévaler sa joue.
-Putain, mais réponds-moi ! tempêta Gabriel. Dis-moi quelque chose, n'importe quoi ! Tu viens de me dire que tu vas probablement te casser à l'autre bout du monde et c'est maintenant que tu veux être silencieux ? Bordel, je viens littéralement de te faire une super déclaration d'amour et-
Gabriel fut coupé au milieu de son élan et soudainement, les lèvres de Zedd étaient sur les siennes.
Le reste de ses mots s'évanouit au fond de sa gorge au profit d'un halètement surprise. Les mains de Zedd avaient saisi ses joues et ses lèvres étaient insistantes sur celles de Gabriel, chaudes et envieuses. Gabriel sentit son coeur faire un looping dans sa poitrine, laissant une empreinte dans sa cage thoracique gravée d'un Z.
Ses mains trouvèrent naturellement le corps de Zedd. Il mêla ses doigts dans l'étoffe douce du chandail de Zedd tandis que les autres s'enfonçaient dans son biceps. Un gémissement échappa sa poitrine lorsque Zedd mordilla légèrement sa lèvre inférieure avant de glisser sa langue contre la sienne. Gabriel y trouva le goût de bière, de joint et de chewing-gum à la menthe et c'était parfait.
Zedd embrassait comme il parlait, passionné, déterminé, avec une certaine éloquence qui laissait Gabriel pantelant. Embrasser Zedd le rendait vivant, remplissait ses poumons d'air et son coeur d'amour jusqu'à ce qu'il en sature.
Les doigts de Zedd glissèrent entre ses boucles jusqu'à les saisir. Il les tira légèrement et Gabriel gémit bruyamment dans le baiser. Zedd se sépara de lui, à bout de souffle, et pressa son front contre le sien.
Ils partageaient le même air, respiraient celui de l'autre, et c'était tellement intime que Gabriel sentit son estomac se nouer douloureusement. La caresse des lèvres de Zedd contre les siennes lui manquait déjà et la frustration se mit à vibrer dans son bas-ventre.
-Tu n'es pas obligé de garder tes promesses, souffla Gabriel.
Et les dernières remparts de Zedd s'effondrèrent.
NDA : MDRRRR OUI JE L'ARRÊTE LÀ PARCE QUE JE SUIS UN GROS FILS DE PUTE
(nan en vrai c'est parce que sinon il était trop long.......... et aussi parce que je suis un peu sadique et j'aime le suspens hihi)
ce chapitre est vraiment rempli de plein de choses différentes, on en apprend encore sur le passé de zedd et son expérience dans un centre correctionnel + une méga déclaration d'amour + UN PUTAIN DE BISOU WESH J'ESPÈRE QUE VOUS ÊTES HEUREUX
vous pensez qu'il va se passer quoi dans le prochain chapitre du coup? suis-je en train de réaliser tous les fantasmes de gaby ou suis-je en train de créer une fausse joie générale? 👀
j'espère que vous avez aimé ce chapitre! si c'est le cas, n'hésitez pas à voter et commenter!
le prochain sera posté ce week-end au plus tard :)
stay home and stay safe
men are trash & aquarelle, N. ❤️
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