Chapitre 24 - Once upon a time

« On dit souvent que le temps guérit toutes les blessures. Je ne suis pas d'accord. Les blessures demeurent intactes. Mais avec le temps, notre esprit, afin de mieux se protéger, recouvre ses blessures de bandages et la douleur diminue, mais elle ne disparait jamais » - Rose Kennedy.

- Vous avez de la visite.

Ce fut l'unique moment où Elena fut déconcentrée de la journée. Elle réfléchissait désespérément à un moyen de s'enfuir. Elle se représentait chacune des pièces cherchant sans relâche une quelconque possibilité d'évasion. En vain.

Durant la matinée, elle était restée simplement assise sur son lit face à la fenêtre. Elle balaya sa chambre du regard plusieurs fois. Il n'y avait aucune issue depuis cette pièce, ça, c'était clair. Pendant le déjeuner, elle inspecta attentivement la salle commune, jeta un coup d'œil à la salle de repos, et détailla même la pièce où avait lieu son activité durant le début de l'après-midi. Toutes les ouvertures étaient protégées. Les patients étaient sous permanente surveillance – du moins, au moment de prendre leur médicaments. Malgré que l'ensemble du personnel ne se soucie guère de ce qui pouvait arriver aux patients, il semblait y avoir toujours quelqu'un de l'institut dans un coin. Mais généralement en train d'essayer de passer le temps à papoter comme le faisaient les infirmières, au lieu de guetter le moindre souci, à observer les fait et gestes des malades, ceux-ci étaient pratiquement libres de faire ce qu'ils voulaient.

Cet institut semblait être un lieu idéal pour les personnes comme Elena. Mais la détresse des patients importait peu au personnel. C'était bien là la faiblesse du système. Cependant, cette négligence pourrait bien être utile à Elena. Sinon, comment pourrait-elle s'échapper de Radley ?

Les heures de visites commençaient à 14h et à 19h durant la semaine, et ne duraient qu'une heure. Le weekend, les patients pouvaient recevoir de la visite de 13h30 à 16h, puis de 19h30 à 20h30. Les patients avaient le droit à un coup de fil chaque dimanche à 16h. C'était un samedi et il était près de 14h30. C'étaient sans doute ses parents, puisqu'ils ne travaillaient pas le weekend, et que c'était l'heure idéal pour eux pour venir voir leur fille.

L'infirmière qui était venue lui annoncer la visite l'accompagna jusqu'à la salle commune, où avaient lieu les visites. À la place des visages à la mine épuisée de ses parents et sa sœur, elle découvrit une toute autre personne. Elena se figea et resta plantée un moment au beau milieu de la pièce.

Katherine l'attendait.

Voir Katherine assise à cette chaise était bien la dernière chose à laquelle elle s'attendait. Que venait-elle faire ici ? Elena était bien trop vulnérable, et Katherine représentait un grand danger. Décidant qu'elle ne lui ferait pas peur, elle serra les poings et avança jusqu'à la table du fond.

Katherine lui lança un grand sourire.

- Elena ! fit-elle sur un ton mielleux.

Elena se contenta de s'asseoir en face d'elle, essayant de garder son calme.

- Bonjour, Katherine.

L'infirmière se retira en restant à une certaine distance, non sans leur jeter de temps en temps un petit coup d'œil, histoire de les surveiller. Katherine regarda longuement autour d'elle.

- Cela ne ressemble pas trop à ce que les gens disent de Radley. Cet asile est beaucoup plus... flippant, vu de l'intérieur. Mais bon. Les gens n'ont la plupart du temps aucune idée de ce qu'ils racontent.

- Cet « asile », comme tu dis, c'est chez-moi maintenant.

- Tu as enfin trouvé ta place, grâce à moi. Tu ne m'as toujours pas remerciée pour ça.

Elena lui lança un regard noir pour réponse.

- Qu'est-ce que tu veux ?

Katherine fit mine de réfléchir.

- Mmmm... Pour l'instant, rien.

- Alors, qu'est-ce que tu fiches ici ? demanda Elena de manière un peu trop agressive.

L'infirmière leur jeta un bref coup d'œil avant d'afficher à nouveau son expression d'ennui suprême.

- Ce n'est pas très gentil de me parler sur ce ton, Elena.

- Je veux que tu t'en ailles. Tout de suite.

Katherine la toisa un instant avec un sourire narquois.

- Je t'ai ramené quelque chose.

Elle lui tendit une feuille pliée en quatre. Elena ne la prit pas. À la place, elle commença à un faire château de cartes.

- Oh, tu décides de m'ignorer. Bien.

Katherine déplia la feuille, et commença à lire.

Il était une fois, une jolie petite fille de 2 ans nommée Rebecca. Elle vivait comme dans un rêve entourée de parents qui n'avaient d'yeux que pour elle. Un jour, ses parents ont eu une deuxième fille – moi. Mais la pauvre Katherine n'a pas eu de chance : elle n'avait pas eu sa place dans la famille comme elle l'aurait dû, sous prétexte que ses gentils parents n'avaient pas les moyens de s'occuper d'elle – si je puis me permettre de faire un commentaire, c'est plutôt car ils ne voulaient pas d'elle, tout simplement. C'est ainsi que la petite Katherine fut abandonnée par les siens. Les Wilkinson continuèrent leur vie heureuse, et Rebecca grandit n'ayant aucun souvenir de sa petite sœur. Malheureusement, vint le jour où elle perdit ses parents : ces derniers furent tués dans un accident de voiture en rentrant tard la nuit. La jeune fille crut avoir tout perdu, mais un beau jour, elle reçut la visite de quelqu'un d'inattendu... Moi ! Rebecca, qui était sur le point d'être confiée à sa tante, proposa à sa sœur perdue de mieux se connaitre et de venir s'installer chez-elle. Katherine en fut ravie : après s'être fait trimballer de famille d'accueil en famille d'accueil et s'être fait rejeter tant de fois, quelqu'un était enfin heureux de la voir et l'accueillait les bras ouverts. Cependant, alors qu'une toute nouvelle vie lui semblait acquise, quelque chose vint tout détruire. Ou devrais-je dire « quelqu'un »... Rebecca fut assassinée dans sa propre maison, d'abord poussée dans les escaliers, puis brûlée avec l'ensemble de la bâ tante disparut, sa sœur disparut, sa nouvelle vie... Envolée. Katherine revint à la case départ. Tout ce qu'elle avait imaginé après sa rencontre avec sa si charmante sœur était trop beau pour être vrai. Enfin, ça aurait pu l'être si une certaine Elena Porter n'était pas rentrée dans le scénario... Oui, toi. Toi qui...

- Je te conseille vivement d'arrêter, menaça Elena en s'arrêtant à la moitié de son château.

Toi qui as gâché ma vie, poursuivit néanmoins Katherine. Toi qui as pris la vie de Rebecca. Toi qui as volé celle d'autres innocents. Toi qui m'as pris tout ce qui me restait... C'est vrai, moi aussi je t'ai pris tout ce que tu avais, mais qu'est-ce donc à côté de ce que tu m'as fait endurer ? Ne te crois pas en sécurité dans ta toute petite chambre, Elena... Saches que je suis plus proche de toi que tu ne le crois – et ce, en permanence. Garde bien en tête que ma vengeance n'est pas encore achevée, et que ce tu mérites vraiment t'arriveras tôt ou tard. Compte sur moi.

- Katherine (mais ça, tu le sais déjà)

Elena se crispa un moment mais ne tarda pas à se détendre de nouveau en continuant son château.

- Je te trouve bien pathétique, Katherine.

Cette dernière s'adossa à sa chaise.

- Ah, oui ? Regarde-nous bien toutes les deux et dis-moi qui selon toi est la plus pathétique des deux.

- Sans aucun doute, c'est bien toi !

Amusée par la perplexité de son interlocutrice, Elena s'expliqua :

- Moi, je n'ai toujours été qu'une pauvre folle qui a finalement fini par être enfermée dans cet institut pour un très long moment... En revanche, toi, malgré la vie quelque peu solitaire mais agréable qui s'offrait à toi à Rosewood, tu as décidé de tout foutre en l'air. Et pourquoi ? Afin d'avoir la satisfaction de me voir tomber. Afin de venger une personne qui après tout n'a représenté qu'un fantôme dans ta vie. Afin de soi-disant pouvoir tout recommencer... Courir après quelque chose qu'on sait avoir perdu à jamais, n'est-ce pas plus pathétique ? Tu as voulu ta vengeance et tu l'as eu. Mais tu as perdu tant en cours de route... Regarde-toi. Tu me déteste, n'est-ce pas ? Eh bien tu devrais te rendre compte que toi aussi, tu t'es changée en monstre. Et puis, tes chers amis ont en souffert aussi. En particulier... comment s'appelle-t-il, déjà ? (Elle feignit de réfléchir) Ah, oui. Toby.

Elena rit en évoquant ce prénom et déposa les deux dernières cartes au sommet du château. Elle allait passer à sa partie préférée : la destruction du château. Mais Katherine s'en chargea à sa place en frappant bruyamment la table, ce qui fit voler les cartes.

- Je vais te tuer, menaça Katherine d'une voix qu'elle n'avait jamais eu auparavant.

À sa grande surprise, Elena eut un petit sourire.

- Tu viens à l'instant de confirmer ce que je disais : tu n'es qu'un monstre, Katherine Anderson.

Katherine se leva brusquement en frappant de nouveau la table. Elena se leva au même moment en hurlant et renversa la table sur Katherine. Deux infirmières accoururent, emprisonnèrent les bras d'Elena et l'entraînèrent vers le couloir menant aux chambres.

Katherine fut contrainte de quitter les lieux, mais lorsqu'elle se tourna une dernière fois vers son ennemie, elle vit que celle-ci affichait un sourire sadique.

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