Chapitre 11 - I hate everything about you
« Le secret de l'existence humaine consiste non pas seulement à vivre mais à trouver un motif de vivre » - Fyodor Dostoïevski.
Katherine leva la tête et plissa les yeux, surprise. Qui pouvait bien lui rendre visite ? Elle abandonna ses cahiers de cours dispersés sur la table du salon et longea le petit couloir qui conduisait à l'entrée. Elle ouvrit la porte doucement et jeta un œil dehors. Le jeune homme au visage familier lui adressa un petit sourire tandis qu'elle lui jetait un regard interrogateur.
- Je passais juste te faire un coucou, a-t-il dit.
- Coucou ! s'exclama Katherine avant de refermer la porte.
Toc toc toc.
- C'est comme ça que tu traites les gentilles personnes qui viennent te voir ? demanda-t-il quand la porte fut rouverte de nouveau.
- Règle N°1, Toby : se méfier de tout le monde sans exception car n'importe qui peut être un serial killer.
Toby se rapprocha légèrement et prit un air diabolique.
- Est-ce que j'ai l'air d'être un tueur en série ?
- Désolée, tu n'échappe pas à la règle, affirma-t-elle.
- D'accord... Je m'en vais.
Il tourna les talons et s'éloigna de quelques pas.
- Mais, dit brusquement Katherine, je suis prête à courir le risque de te laisser entrer.
Un sourire satisfait releva les coins de la bouche de Toby tandis qu'il se retournait et revenait sur ses pas.
Une fois entré, il détailla l'intérieur et constata l'absence de multiples choses qui auraient dû se trouver là : des photos encadrées et accrochées aux murs, des décorations en tout genre, fleurs, tapisserie, de la couleur, de la gaieté et même des... êtres humains. Contrairement à chez-lui, cette maison était mal entretenue et était terriblement impersonnelle. De plus, elle se trouvait un peu en retrait comparé aux autres qui étaient dressées côte à côte. Un peu comme si elle était abandonnée avec sa couleur grisâtre et ses volets fermés, alors qu'il y avait bien quelqu'un qui y vivait.
Katherine tourna sur elle-même et ouvrit les bras d'un grand geste théâtral.
- Voici donc ma demeure.
Elle marqua une pause avant d'ajouter :
- À propos... Comment tu as su que j'habitais là ? Je ne l'avais dit à personne.
- Je t'ai vue rentrer l'autre jour, répondit-il en contournant l'unique canapé du salon et en s'asseyant.
Elle tendit un doigt accusateur vers lui et plissa les yeux.
- Tu m'espionnais ? Tu vois, c'est exactement ce qu'aurait fait un tueur avant de s'en prendre à sa victime.
Il leva les mains d'un air coupable.
- Ok, d'accord, je suis démasqué... En fait, je suis un vampire. Et tu viens de commettre l'erreur de ta vie en me laissant entrer.
- Oh... Et je suppose que tu vas m'hypnotiser pour me faire oublier cette conversation ?
- Probablement, dit-il avec malice.
Katherine esquissa un sourire et vint s'installer à côté de lui.
- Tu sais, en fait, je t'aime bien.
Toby tourna la tête vers elle.
- Oui, je sais... C'est humainement impossible de ne pas m'aimer !
Elle haussa les sourcils et lui jeta un coussin dessus.
- Eh !
- Tu le mérites !
Il fit mine de bouder.
- Alors, un plan pour la prochaine attaque ? demanda-t-il, reprenant un minimum de sérieux.
- Oui, j'ai ma petite idée... répondit Katherine, pensive.
Elle sortit son téléphone et se mit taper un message. Toby se rapprocha et se pencha pour voir l'écran. Dès qu'elle eut cliqué sur « envoyer », il la toisa d'un air intrigué.
- Quoi ?
Katherine remit son téléphone dans sa poche et attendit une réponse.
- La première fois que je t'ai vue, tu avais l'air de la gentille fille, du genre mignonne et timide. Mais en réalité, tu fais vachement peur !
- Je sais, je sais...
Stop. Venait-il d'avouer qu'il la trouvait mignonne ? En même temps, il a aussi dit qu'elle faisait peur... C'est peut-être un petit peu vrai, d'ailleurs. Mais il avait quand même dit qu'elle était mignonne. Non que Katherine se souciait de ce qu'il pensait d'elle...
- Donc... Tu vis ici, toute seule ?
Sa voix prit un ton hésitant.
- Oui, acquiesça la jeune fille. Avec l'argent que m'a laissé Maya, j'ai pu m'acheter cette maison – c'était la moins chère, et aussi l'une des seules disponibles. Rebecca était prête à m'accueillir chez elle, elle m'avait promis que je ne serais plus jamais seule, mais... sa voix se brisa tandis qu'elle essayait de continuer sa phrase.
- Désolé. Je n'aurais pas dû...
- Non, ça va aller, l'interrompit-elle en secouant la tête et ravalant ses larmes.
Elle prit une grande inspiration pour se calmer. Elle détestait pleurer devant quelqu'un, alors elle faisait un effort incroyable pour ne rien laisser paraître et garder une expression impassible.
- Tu sais quoi ? (Toby se leva d'un coup) on devrait sortir un peu, toi et moi.
- Hein ?
Il lui empoigna le bras et la fit se lever à son tour du canapé.
- Tu as besoin d'un peu d'air. On ira où tu veux, et on fera ce que tu veux. (Il fit mine de réfléchir) Sauf peut-être aller dans les bois – il va bientôt faire nuit et je pourrais être tenté par l'idée de te laisser avec mes amis vampires.
Cette fois, Katherine lui donna un coup de poing dans le ventre avec un air faussement indigné.
- Aïe ! Ok, ok... Je vois qu'il n'y a pas de quoi s'inquiéter !
Il avança dans le couloir aux murs blancs avec Katherine derrière lui. Avant qu'il n'ouvre la porte, elle lui tapota l'épaule.
- Toby ?
- Oui ?
Elle croisa les bras et se pencha vers lui.
- Ne crois pas qu'on est les meilleurs amis du monde... En réalité, je te déteste toujours.
- Katherine Anderson me déteste... Oh, mais j'en suis honoré !
Elle écarquilla les yeux.
- Je viens de te dire que je te détestais, et tu es « honoré » ?
- Moi, ça me va. (Il haussa les épaules) C'est mieux que si tu ne ressentais rien du tout pour moi... Pas vrai ? dit-il avec un petit sourire en coin.
Katherine sentit son cœur bondir dans sa poitrine. Toby la mettait soudain très mal à l'aise. Sans répondre, elle ouvrit la porte et sortit dehors.
- Bon ben, tu viens ?
Il était resté immobile et l'observait. Katherine haussa les sourcils comme pour dire « alors ? », et il se décida enfin à refermer la porte et à la suivre.
- Alors, alors... chuchota Elena en tapotant un stylo sur son bureau.
Une feuille vierge était placée devant elle. Elle devait écrire cette fameuse histoire qui ferait l'objet de la pièce organisée par le club de théâtre de son lycée. Mais elle ne savait pas quel genre de récit conviendrait à tous ses camarades et son prof afin d'être choisie. Devait-elle imaginer une histoire qui serait agréable, dans la douceur et la bonne humeur, ou devait-elle écrire quelque chose de sanguinaire, plein de meurtres et de mystères ?
Son imagination refusant de répondre, elle reposa son stylo près de la feuille en soupirant. Elle regarda vers la fenêtre et vit à travers la modeste maison des Callum, à proximité de la leur. Morgane était assise sous le porche un livre entre les mains, tandis que ses deux petites sœurs couraient joyeusement dans le jardin. Elena se leva de sa chaise et s'approcha prudemment de la vitre. Elle détailla son expression détachée en lisant, tournant les pages d'un geste désinvolte, jusqu'au moment où Morgane sortit son téléphone de sa poche, répondit, et se dépêcha de rentrer. Elle fixa la porte d'entrée par laquelle la jeune fille avait disparut, quand une idée soudaine vit le jour dans son esprit, et un large sourire se dessina sur ses lèvres. Elle venait de trouver le moyen de faire d'une pierre deux coups : éliminer son ennemi et échapper à toute accusation...
Mais pour cela, elle devait impérativement avoir la meilleure histoire.
« I hate everything about you », écrivit-elle en haut de la feuille en guise de titre, revenant à son emplacement initial.
Elle laissa échapper un petit rire, trouvant son idée de plus en plus géniale.
Avant qu'elle ne finisse d'écrire la première ligne, le bipe de son téléphone jusqu'ici posé sur son bureau l'interrompit.
Normalement, je ne devrais pas te prévenir, mais là, je suis de bonne humeur. Je suppose que je peux que faire exception de temps en temps. Fais attention à toi, mon nouveau plan d'attaque en est presque à son dernier stade : l'exécution ! Tu as trouvé ma petite blague de mauvais goût ? La prochaine va te plaire – je te le garantis.
- {-.-}
Elle reposa son téléphone là où il était en grimaçant.
Dis au-revoir, tu n'existeras plus pour très longtemps...
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