14.2

Nous ouvrons les portes, pour ce qui a été décidé comme étant la dernière fois. J'ai bien du mal à me rendre compte que nous quittons réellement ce camp, une fois pour toutes. Je regarde autour de moi, un peu déboussolée. Et dire qu'il y a plusieurs jours, j'avais décidé de quitter ce camp toute seule. Tant de choses se sont passés depuis...

Les personnes armées se postent autour de celles qui n'ont pas cette chance, un peu comme une barrière de protection. Rare sont les personnes qui n'ont pas de rôle précis dans ce petit troupeau. Il y a celles chargé de nous protéger, et donc qui sont armées. Il y a celles qui doivent porter les provisions, ou autres éléments importants qu'on a choisi d'emmener. Il y a moi, petite malade qui serre les dents pour suivre le rythme de marche. A vrai dire, personne ne fait réellement attention à moi, les gens sont stressés, et ils n'ont qu'une envie, fuir le plus vite possible cette armée de Grounders qui se dirige vers nous. Alors bien entendu, marcher lentement pour me laisser le temps de les suivre, c'est bien le cadet de leurs soucis. Clarke m'a demandé de prendre de l'avance, de partir avec l'avant du groupe, et bien sûr, elle n'a pas eu besoin de formuler la raison... Je vais les ralentir, au bout d'un moment, je vais défaillir et je vais les ralentir. Dire que je me sens parfaitement bien serait un mensonge éhonté, le mal de tête est toujours là, et avec lui un poids s'est rajouté sur mon estomac. Je crois que Bellamy n'est pas encore sorti du camp, et j'ai des sueurs froides à l'idée de ne pas avoir son visage sous les yeux, rien que pour m'assurer qu'il est toujours là, avec moi.

Au bout d'un moment, alors que j'étais devant avec Octavia, Jasper et Miller, je me rends compte qu'ils ont pris pas mal d'avance sur moi, je n'entends même pas ce qu'ils disent. Et voilà que je me fais doubler par Finn et un autre gars, portant la civière sur laquelle se trouve Raven. Son regard croise le mien et je la vois froncer les sourcils. N'en tenant plus, ayant soudainement l'estomac dans les talons, je prends appuie sur un arbre sur mon chemin. Je vois Raven se redresser, et je ne peux m'empêcher d'être surprise de la voir inquiète pour moi. Je leur fais signe de continuer alors que Finn s'est arrêté pour me lancer un regard interrogatif. C'est juste un petit moment de faiblesse. Je ferme les yeux, me concentrant sur ma respiration. Pas besoin d'un miroir pour comprendre que j'ai perdu toutes les couleurs d'ordinaire si rares de mon visage.

"Est-ce que ça va ?" me demande pressement Clarke qui arrive près de moi, posant ses mains sur mes épaules. Je me tourne vers elle en ouvrant les yeux. Je hoche la tête, je me sens fiévreuse. "Je risque pas d'en mourir, non ? Faut juste que je l'endure..." dis-je en essuyant la sueur sur mon front. Clarke prend mon pouls en posant deux doigts sur les veines de mon poignet, je peux voir qu'elle compte dans sa tête. "Si tu t'évanouis, il y a des chances que tu ne te réveilles pas... Que tu tombes dans le coma..." murmure-t-elle, comme un reproche, qui, je le sais, n'est pas dirigé vers moi. Ok, je n'avais pas envisagé cette possibilité. Clarke relève les yeux doucement et je souffle, fatiguée. Une silhouette que je ne connais que trop bien se distingue parmi la foule et croise mon regard. Je me penche alors vers Clarke. "Pas un mot à Bellamy, d'accord ?" soufflé-je à voix basse, le regard insistant. Clarke, perplexe, m'observe en silence, mais je la presse de me le promettre en posant une main sur son épaule. Elle finit par hocher la tête et Bellamy apparaît alors à côté de nous. "Ça va ?" demande-t-il, la voix légèrement plus rauque que d'habitude. Je me force à me tenir droite, lâchant l'épaule de Clarke. "Oui, juste un petit coup de fatigue, mais ça va mieux." mentis-je en le regardant droit dans les yeux, surprise moi-même d'être capable de mentir aussi bien.

Une voix dans la foule appelle Clarke, pour une cheville foulée, et après un dernier regard pour moi, elle s'éloigne. "Tu veux encore te reposer ?" me demande Bellamy, concerné. Je fais non de la tête, le cortège formé par ce qui reste des 100 est déjà en train de prendre trop d'avance sur nous. Bellamy enroule alors ses doigts autour des miens et je m'y accroche presque trop désespérément. Moi qui ais toujours eu en horreur de compter sur les autres, je me rends compte que ça ne me gêne pas avec Bellamy. Comme si c'était normal que je puisse m'accrocher à lui, comme lui peut s'accrocher à moi. Il me fait signe d'y aller quand je suis prête et commence alors à marcher, désireuse de rattraper le groupe. Et nous avançons, au milieu des autres, main dans la main.

Soudain, nous nous arrêtons, et apparemment, cet ordre provient de tout devant. Je sens la tension émaner de Bellamy par ses doigts qui s'agrippent aux miens. Je lève les yeux vers lui, son regard scrute les alentours, et surtout, l'avant de la foule. Il sait tout comme moi que c'est Octavia qui se trouve en tête. Je peux voir à l'expression de son visage qu'il est tiraillé entre se précipiter à l'avant ou rester avec moi. Il n'y a pas un son aux alentours, tous les adolescents ont cessé de parler, de bouger, voir même de respirer. Je lâche la main de Bellamy tout en lui faisant signe du menton d'y aller. Bellamy me scrute, perplexe, il fait un pas en avant puis s'arrête. Je l'interroge du regard, je ne veux pas l'empêcher d'aller prendre soin de sa sœur. Je sais tout ce qu'elle représente pour lui. Bellamy s'approche alors de moi et ses lèvres se posent au coin de miennes, tout doucement. "Merci." murmure-t-il, avant d'attraper son arme qui pendait sur sa hanche et de partir d'un pas rapide vers l'avant du groupe. Je sens mon cœur se gonfler, et, étrangement, je me sens beaucoup mieux d'un coup.

Cependant, à peine Bellamy a-t-il disparu entre les silhouettes des autres adolescents qu'un cri résonne dans toute la forêt. "GROUNDERS !" hurle une voix, que je reconnais immédiatement comme étant celle de Jasper. En une seule seconde, tous les visages se sont décomposés, et il n'a fallu qu'une seconde de plus pour que tout le monde se mette à courir en sens inverse. Perdue, je ne bouge pas, cherchant un visage connu dans la foule, comme Clarke, Jasper, Octavia, ou surtout, Bellamy. Je me fais bousculer plusieurs fois par des adolescents totalement affolés. C'est Clarke que je distingue la première, à la couleur de ses cheveux, elle approche en courant vers moi, et du regard, je comprends que la situation est grave. Elle passe un bras sur mes épaules et me rapatrie de force vers le camp, me poussant fortement pour que j'ai le moins d'effort possible à fournir.

Arrivées du camp, je souffle de soulagement, Bellamy est là, en train de guider tout le monde. Son regard croise le mien, et je le vois se détendre immédiatement. Les gens s'affolent, crient, sermonnent que les Grounders nous suivent, qu'ils sont juste derrière nous. Mais alors que je jette un regard par dessus mon épaule avant que l'on ne ferme la porte du camp, je ne vois rien. Clarke, à qui je m'accroche désespérément pour tenir encore debout, regarde autour d'elle, perdue. Bellamy est monté sur l'un des remparts au dessus du camp, le fusil braqué vers la forêt, aux aguets du moindre mouvement. Quelqu'un a rapporté le corps sans vie d'un garçon, alors qu'une sorte d'objet tranchant à plusieurs lames est planté en plein milieu de son visage.

Soudain, une discussion animée s'engage entre Bellamy, Clarke, Finn et Octavia. D'après ce que Lincoln leur a dit, les Grounders ont d'abord envoyé leurs éclaireurs, et la mort de ce Drew serait l'œuvre de l'un d'entre eux. Octavia et Finn pensent que nous pouvons nous en sortir si nous n'avons à faire face qu'à des éclaireurs, mais Bellamy s'y oppose fortement. La foule, en alerte, s'est rassemblée autour de nous. Les gens semblent attendre des ordres, peu importe lesquels. Octavia se tourne alors vers Clarke. "Clarke, on peut toujours y arriver !" lui dit-elle, cherchant son soutien. Le regard dur de Bellamy se pose alors à son tour sur Clarke. "Tu décides Princesse. On fait quoi ? Courir et mourir, ou rester et se battre ?" lui demande Bellamy, comme un ultimatum. Ce qui est définitivement le cas. J'observe Clarke tout en desserrant doucement mon étreinte sur elle. Elle prend une grande inspiration, et, le visage fermé, elle secoue la tête. Finn s'approche alors d'elle, lui attrapant le bras. "Si on est toujours là à l'arrivée de Tristan..." commence-t-il, mais Clarke le coupe net dans son élan. "Lincoln a dit des éclaireurs, plus d'un. Il nous a dit de rentrer chez nous avant qu'ils n'arrivent. Finn, ils sont déjà là !" lui explique-t-elle, le ton pressant, avant de se tourner vers Bellamy. "On dirait que tu vas l'avoir, ton combat." lui dit-elle froidement.

Il n'en faut pas plus à Bellamy pour s'adresser à la foule d'un ton autoritaire. "On s'y est préparé. Tuez-les avant qu'ils nous tuent. Tireurs, à vos postes !" ordonne-t-il, et déjà, un mouvement de foule bouscule le camp. Les personnes armées se dirigent vers les différents points stratégiques pour défendre le camp. Bellamy conseille de prendre les tunnels pour sortir et entrer du camp, parce qu'à partir de maintenant, les portes restent fermées. Finn s'est éloigné, dépité. Je vois Jasper et Harper s'enfoncer dans un tunnel, sûrement pour aller à l'une des sentinelles à l'orée du camp. Je me sens terriblement inutile. Alors que Bellamy rattrape Octavia qui partait pour s'engouffrer elle aussi dans un tunnel, Clarke s'approche de moi, posant une main sur mon front et deux doigts sur mon poignet. "Va te reposer. C'est maintenant ou jamais, ils attaqueront sûrement de nuit." me dit Clarke en soufflant, las. "Comme si je pouvais dormir dans un moment pareil." marmonné-je, décidée à trouver quelque chose pour me rendre utile, peu importe comment. "Ce n'est pas vraiment comme si tu avais le choix." assène Clarke en haussant le ton, me jetant un regard particulièrement réprobateur. Surprise, je la dévisage, attendant qu'elle ajoute quelque chose, mais elle n'en fait rien et s'éloigne.

Je la suis alors qu'elle se dirige vers l'intérieur du vaisseau, non sans avoir attrapé Bellamy d'abord. Lorsque j'entre dans le vaisseau à mon tour, Bellamy paraît surpris, mais ils semblent être partis dans une grande discussion, alors il n'a pas le temps de me dire quoi que ce soit. Je m'installe sur l'un des sièges, et ferme les yeux. Comme ça, Clarke voit que je suis en train de me reposer. Mais en réalité, j'écoute leur conversation. Ils sont en train de se préparer pour l'attaque, faisant le compte sur leurs munitions et leurs fusils. Le tour du camp est en parti miné, il l'était plus avant le passage de Murphy, mais il reste des coins où on a guère envie d'y mettre les pieds. Il nous reste quelques grenades, mais peu, encore une fois, à cause de Murphy. Cependant, il est rapidement compris qu'une fois les terrains minés et les grenades utilisées, il n'y aura plus que les murs pour nous protéger. C'est là que Clarke a une idée. Utiliser les fusées du vaisseau. Les laisser approcher, allumer les fusées, et les désintégrer. "Des terriens grillés... J'aime ça." déclare Bellamy, presque impatient.


Je ne me rends pas tout de suite compte que je me suis endormie, mais lorsque Raven crie : "Je ne sens plus mes jambes." j'émerge difficilement d'un calme et d'une sérénité que je regrette immédiatement. J'ouvre les yeux et je vois Finn et Clarke se pencher au dessus de la blessure de Raven. Je les vois échanger un regard, et je comprends tout de suite à la lueur dans les yeux de Clarke que quelque chose cloche. "La balle a bougé, elle touche ta colonne vertébrale, tu saignes de l'intérieur." annonce Clarke, le visage grave. J'observe Raven qui encaisse la nouvelle, et je me sens soudainement triste pour elle, et j'en ai un peu honte. Même si je ne m'entends pas avec Raven, je sais qu'elle n'aimerait pas qu'on ait pitié pour elle, et pourtant, je ne peux pas m'empêcher d'avoir de la peine. Pourtant, mon niveau d'empathie n'a jamais été particulièrement élevé. Peut-être tout simplement parce que je n'ai interagi avec personne pendant plus de quatre ans.

"On ferait mieux de se dépêcher, alors." déclare Raven après un regard pour Finn. Mais celui-ci demande alors s'il ralentir l'hémorragie aiderait, ce que Clarke lui confirme. Finn se met alors en tête d'aller chercher quelque chose que possède Lincoln, dans sa grotte, une sorte de coagulant qui ralentira les saignements. Bien sûr, Raven s'y oppose, mais Finn ne lui laisse pas vraiment le choix, il lui rappelle qu'elle est la seule à pouvoir allumer les fusées du vaisseau, et que si elle meurt, nous mourrons tous. Puis il se lève et sort du vaisseau, Clarke sur ses talons, apparemment inquiète. Je me relève doucement, mais cela ne me paraît pas aussi difficile qu'avant, bien que mes jambes soient totalement engourdies. Je prends quelques secondes, appuyée contre la parois du vaisseau, à bouger mes chevilles et mes poignets dans tous les sens, histoire de retrouver rapidement la sensibilité. Mais en réalité, je ne me sens plus aussi nauséeuse et lourde qu'auparavant. Ce bref repos m'a été bénéfique.

Clarke rentre alors subitement dans le vaisseau et me dévisage, surprise. "Je vais mieux." je me contente de lui dire, sincèrement. Elle hoche la tête, alors que je peux voir dans son regard une tristesse et une peur que je ne connais que trop bien moi-même. C'est pour cette raison que je ne peux pas rester une seconde de plus assise à cet endroit, à fermer les yeux en attendant que le temps passe. Moi aussi je dois protéger ce à quoi je tiens.


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Bonjour tout le monde !

Et voilà le nouveau chapitre ! En réalité, cet épisode ne m'inspire pas beaucoup, il me stresse ahah XD Enfin, j'espère que ce chapitre vous aura plu tout de même et que vous avez hâte de savoir la suite, même si vous devriez... Hum, non, je ne dirai rien héhéhéhéhéhé

Merci à toutes les personnes qui m'ont suivie jusqu'ici, qui lisent, votent et commentent, je ne serais sûrement pas arrivée jusqu'ici sans votre soutien !

A bientôt !

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