Chapitre 2
②
Släkt ou Säbövik : telle est la question
💛💙
– Sérieusement, je ne sais plus quoi faire de lui.
Ma pinte de bière claque sur la table et je soupire lourdement. Autour de moi, mes collègues me jettent des regards qui en disent long. Ils sont différents pour chacun. Celui de Namjoon est perdu, il ne sait pas de qui je parle, ou alors, il a oublié. Celui de Hoseok est compatissant, tandis que ceux de Yoongi et de Seokjin sont respectivement amusé et lubrique. Eux, ils savent très bien de qui je parle, mais la compassion, ça ne leur dit rien.
– J'peux avoir une bière, moi aussi ? s'exclame une voix fluette par-dessus celles des consommateurs.
– T'es trop jeune, répond Namjoon à la manière d'un vieux daron.
– Finis ta limonade, renchérit Hoseok.
Jimin fait la moue et ronchonne.
– Bande de méchants hyungs. Vous êtes vraiment des tyrans.
Lui, c'est notre stagiaire. Il est au lycée, donc il n'a officiellement pas l'âge de picoler. Ça ne l'empêche pas de nous accompagner au bar certains soirs après le travail, cela dit. Il connaît et s'entend déjà avec tout le monde, même si ça ne fait qu'une semaine et demie qu'il est là. Il a commencé aux stocks avec Namjoon avant de passer au restaurant avec Hobi. Depuis, ces deux-là le traitent comme leur fils adoptif.
– Bon sinon, personne n'est foutu de m'aider avec mon problème ? je râle. Ou au moins de faire semblant de s'y intéresser ?
C'est vrai, quoi. Ils ne se rendent pas compte de la lourdeur de la situation. Depuis un mois, il y a ce type qui se croit chez sa mère et qui vient taper ses meilleures siestes dans nos pieux. Ce n'est même pas comme s'il contribuait à notre chiffre d'affaires ! Nan, tout ce qu'il fait, c'est dormir. Encore, et encore. Au départ, c'était une fois par semaine. Maintenant, c'est trois ou quatre. Et toujours le matin.
Le pire, c'est qu'il a un sommeil de plomb. Je mets toujours des lustres avant de réussir à le réveiller (ce qui n'arrive pas tout le temps, des fois je suis obligé d'abandonner la partie). Quand par miracle j'y parviens, il ne s'excuse même pas. Il se contente de me regarder avec sa gueule enfarinée et de partir sans un mot, les jambes toute flagada.
– Tu devrais lui dire que j'ai couché avec une cliente dans ce même lit qu'il occupe, lâche Seokjin. Peut-être que ça va le dissuader.
Mes yeux s'exorbitent et Hoseok manque de s'étouffer.
– Tu as quoi ? crie-t-il, sous le choc.
– T'as souillé un Säbövik ? je lui fais écho.
Jin hausse les épaules tandis que Yoongi ricane.
– De toute façon, les Säbövik, c'est pas les meilleurs, dit ce dernier. Il devrait essayer les Släkt ! Même si ce sont des une place, ils sont d'un confort...
Je le fusille du regard.
– Mais t'as aucune fibre professionnelle en toi, c'est pas possible ! T'as même pas intérêt à lui donner ce conseil.
– Ça peut se négocier si tu me fournis en Daims pendant tout le mois.
Je secoue la tête, dépité. Et Jimin n'en loupe pas une...
– J'adore les Daims, moi aussi ! Taehyung-hyung, tu m'en donneras ?
Mes pupilles fatiguées se posent sur lui et je ne réponds pas. À la place, je souffle fort.
– Tu seras avec nous bientôt, Minie, lui dit Yoongi. Je te montrerai ma réserve secrète à ce moment-là et tu mangeras ce que tu veux.
– Chouette !
Jimin est aux anges. Contrairement à ses deux papas d'adoption.
– Yoongi, je te jure que si le gosse finit avec du diabète, je t'en tiendrai personnellement responsable, déclare Hoseok.
– Et moi, je t'enfermerai dans le cimetière, continue Namjoon.
Il frémit lui-même en mentionnant cette partie des stocks. C'est sa bête noire. Et pour être honnête, je le comprends. Je n'ai pas aimé non plus me rendre là-bas. On y trouve plein de meubles décédés, ceux qui attendent qu'on joue les Frankenstein pour leur donner une seconde vie. C'est glauque de voir tous ces canapés éventrés et ces lampes décapitées...
– J'ai déjà été enfermé dans le cimetière, glapit Jimin.
Tout le monde se gratte la gorge et détourne le regard, gêné. Namjoon ne sait plus où se mettre.
– J-Je me suis déjà excusé, Minie ! bredouille-t-il. Ce n'était même pas fait exprès.
– Je sais, Hyung. Mais le mal est fait...
Un silence de mort prend vie autour de nous. Je décide de le rompre rapidement avant que l'un de nous décide de se pendre.
– Sinon, à part conter les exploits de Jin, d'autres suggestions pour déloger mon parasite ?
⊷
– Vous comprenez ce que je vous dis ?
– Bien sûr, monsieur. Vous souhaitez un matelas avec un revêtement plastifié pour vos incontinences.
– Non, vous ne comprenez pas ! Je souhaite un matelas avec un revêtement plastifié et une fonction autonettoyante pour mes incontinences.
Ma tête me tourne et mes oreilles sifflent. Depuis combien de temps me hurle-t-il dessus ? Il n'est même pas encore dix heures du matin que j'ai déjà le crâne gros comme un paquebot. Quand je disais que je n'aimais pas les vieux...
– Je regrette, monsieur, dis-je en gardant mon calme, mais nous n'avons pas ce genre d'options-là.
– Comment ça ?! Je l'ai vu sur le Bon Coin, pourtant ! Le vendeur disait que son lit venait de chez vous, qu'il avait un revêtement plastifié et une fonction autonettoyante parfaite pour mes incontinences !
Le Bon Coin, je répète dans ma tête. J'aurais dû m'en douter. On trouve tout et n'importe quoi, là-bas ! Une fois, j'ai vu un gars vendre une machine à laver et un sèche-linge avec sa mère comprise dans le lot. Sans parler d'une autre annonce qui offrait gracieusement une perruque entièrement composée de poils interfessiers. J'ai envie de vomir rien que d'y repenser...
– Je demande à parler à la Direction, ordonne le papi.
La Direction ? Comme si elle n'avait que ça à faire, la Direction ! Bon sang, cette journée est si épuisante que ça ne m'étonnera pas si je rentre chez moi avec une migraine carabinée. Du bout des doigts, je me masse les tempes en cherchant une solution pour me sortir de ce sale pétrin. Mais quand mes yeux se posent un peu plus loin sur le Säbövik et que je vois Yoongi discuter avec la Belle au Bois Dormant, c'est le pompon. Je vois rouge et manque de m'arracher les cheveux.
– Vous savez quoi, monsieur ? Je vais vous appeler la Direction, j'annonce en me tirant comme un voleur.
Le vieux continue de mugir alors que j'avance vers mon collègue, mais je m'en fiche. D'un pas affirmé, je m'approche, les poings fermés et la mine sévère.
– Tout à fait, je l'entends dire. Ce ne sont peut-être que des une place, mais je vous assure qu'ils sont méga confortables.
C'est pas vrai... Dites-moi que je rêve !
– J'peux te parler ? j'apostrophe Yoongi.
Ce dernier s'interrompt et se tourne vers moi, tout comme les mirettes du gars sans-gêne. Durant une seconde, je soutiens son regard sans faillir. Des cernes maquillent son visage ; il a l'air exténué (ce qui est étonnant vu tout ce qu'il dort). Je ne perds pas plus de temps à l'observer, cependant, et attrape mon collègue par le bras pour l'emmener plus loin.
– Tu lui as vraiment conseillé les Släkt ? Mais pourquoi t'as fait ça ? C'est comme si tu lui donnais l'autorisation officielle de squatter nos matelas !
Yoongi ricane.
– C'est un peu le cas. Désolé, mais c'est si divertissant de te voir râler ! Ça me garde éveillé.
Mes paupières se ferment. Et je geins. Comme un pauvre chien abandonné ou que l'on affame, je geins. Bruyamment, dramatiquement. Parce que je n'en peux plus et qu'ils vont tous finir par me rendre chèvre.
À bout de force, je le regarde et le chasse d'un geste de la main.
– Va-t'en. Y a un client qui t'attend et c'est au-delà de mes compétences, alors va-t'en.
Tout sourires, Yoongi se réhausse sur ses pieds, le dos bien droit. Puis il enfourne un Daim dans sa bouche et lâche avant de partir :
– Bisous !
Je lui en foutrais, des bisous ! Je le fixe du regard alors qu'il se dirige vers le vieux et je prie pour qu'il se fasse postillonner dessus. Il ne mérite que ça.
– Vous aussi, vous pensez que les Släkt sont mieux que les Söbävik ? C'est important d'avoir les avis de professionnels différents.
Une voix que je ne connais pas capte mon attention. Je m'oriente vers le jeune homme et réalise que c'est la sienne. C'est la première fois qu'il me parle, alors ça me fait tout drôle.
– Säbövik, je le corrige machinalement. Et vous n'aurez pas mon avis sur la question. Vous n'êtes pas censé dormir ici.
– Mais je dors bien, ici, argue-t-il paresseusement.
Son ton amorphe me prend de court et me calme un peu. Je soupire et me mets à l'étudier. Assis au bord du matelas, ses mains sont posées à plat sur ses cuisses et son visage est levé en direction du mien. Comme ça, il a l'air d'un bon garçon bien sage.
– Vous devriez rentrer chez vous. Ça fait plus d'une heure que vous êtes là.
– C'est vrai... J'ai pas mal de choses à faire.
Sur ces mots, il se lève, flageole un peu mais se rattrape, et je me gonfle d'espoir. Enfin !
– À bientôt, Taehyung.
Il me salue et s'en va sans rien dire d'autre. Moi, je reste coi. Et con.
Il m'a appelé par mon prénom.
Et il m'a dit à bientôt.
..‿︵‿..︵ʚɞ
Hej ! Comment allez-vous ?
Je ne pensais pas publier le second chapitre aussi tôt, mais je voulais tant vous remercier de l'accueil que vous avez offert à cette histoire que j'ai craqué.
Entre nous, j'avais aussi super hâte de vous présenter notre gros dormeur ! Je ne sais pas pourquoi, mais j'adore le caractère de ce Jungkook (que vous découvrirez avec le temps). Il me donne envie de l'enrouler dans un plaid et de le bercer.
Bref, il me tard de vous poster la suite !
Kyssar 😘
Astëlya
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