Chapitre 33: Un espoir?
Nos cris avaient réveillé les deux petites à l'étage. Pensant que mon père se faisait agresser, elles s'étaient faufilé dans les escaliers, l'une avec un passoire servant de casque et l'autre avec un balais. Elles virent alors Inès sortir en larmes. Elles savaient très bien qu'elle n'était pas une ennemie. Ce qui les rassura rapidement. Voyant l'air soulagé de Kelly, je ne pris pas la peine de retenir Inès. Je m'étais caché, implorant mon père de les faire rendormir. L'homme soupira et s'avança vers les deux petites en les rassurant. Je profitai de la distraction pour m'échapper de ce fléau et voir Inès qui marchait un peu plus loin. Je courus pour la rattraper. Une fois à ces côtés, je la forçai à me regarder. Mais celle-ci fuyait mon regard. Je soulevai délicatement son menton vers le haut et découvris ses larmes perler sur son visage. Elle se sentait honteuse de me montrer ce côté fragile. Après tout, c'était plutôt une fille forte, très sûre d'elle...
- Inès, je vais trouver un moyen, je te l'assure!
- Ne sois pas idiot! Mon cas est perdu. Je deviendrai un démon, on ne peut rien y faire.
- Je suis sûre qu'il y a un moyen... Il y a toujours une solution...
- Non... Pas toujours! déclara-t-elle en soupirant d'exaspération.
Elle se libéra de mon emprise et s'en alla.
"Tout est calculé... Chaque rencontre que tu fais! Rien n'est là par hasard!"
C-H avait anticipé que j'allais m'accrocher à elle. Mais que recherchait-il en faisant ça? Me détruire pitoyablement grâce aux sentiments que j'éprouvais? Me faire culpabiliser des actes passés en voyant la seule fille que je n'avais pas tué dans sa famille allant dans le camps ennemi? J'étais affaibli par ce sentiment... Je ne pouvais rien y faire. J'avais beau lutté intérieurement mais j'en souffrais. Je ne voulais pas qu'elle parte comme ça. Elle était seule désormais. Je lui avais déjà privé de sa famille.
- Inès... Ne m'abandonne pas..., la suppliai-je en tombant sur mes genoux, sur la chaussée vidée de voitures.
Elle s'arrêta brusquement. Elle ne se retourna pas, attendant que je continue.
- Je sais ce que tu ressens Inès. C'est frustrant n'est-ce pas? Ils t'ont tous abandonnée, mais je ne l'ai pas fait. Ils te connaissent depuis longtemps et je ne te connais pas aussi bien qu'eux. Pourtant, c'est moi qui ai voulu te protéger à tout prix. Tu sais pourquoi!? Tu sais pourquoi!? Parce que je tiens à toi! On n'a jamais été proche et pourtant... Je ne sais pas pourquoi tu as autant de place dans mon cœur...
Elle serra ses poings, se forçant à retenir ses larmes. Même si elle était de dos, je le savais. Ses tremblements me dévoilaient tout. J'avais juste envie de la protéger, coûte que coûte.
Elle me montra enfin son visage pâle. Ses yeux scintillaient à certains côté en violet. Elle essuya ses larmes et dit gênée.
- Tu n'as même pas intérêt à rapporter ça aux autres!
- De quoi?
- Que j'ai pleuré imbécile!
Je souris, me sentant soulagé qu'elle ne me quitte pas finalement. Elle me tendit sa main et me souleva en tirant mon bras.
- Mais... Depuis quand tu ressens ça? demanda-t-elle intriguée.
- Je ne vois pas de quoi tu parles! rétorquai-je en étirant mon sourire.
Elle me donna une tape à l'épaule tout en restant sur place. Je la fixai en arquant un sourcil d'incompréhension.
- On va où? finit-elle par demander.
- Je ne sais pas. Tu ne connais pas un endroit?
- Suis moi alors.
Elle ne perdit pas de temps. Elle se pressa avant de monter sur une moto rouge et noire.
- Elle est à toi? demandai-je surpris.
- Non!
Elle retira la pince sur ses cheveux et l'inséra à la place de la clé. Elle réussit à faire tourner le moteur après quelques secondes de malheur.
- Tu ne montes pas?
- Si...
Nous parcourûmes une dizaine de kilomètres en grillant certains feus rouges et en manquant trois fois d'avoir un accident. Heureusement que la conductrice était agile bien qu'elle était folle.
- Ils continuent de nous suivre!! s'écria-t-elle.
Je fus surpris d'entendre cela. Je regardai alors le rétroviseur et vit une voiture blanche aux vitres teintées.
- Prends le virage, je vais t'aider.
Elle s'exécuta tandis que je me concentrais le plus possible pour m'imaginer le meilleur des scénarios. J'aperçus la couleur rouge de mes yeux à travers le rétroviseur. La voiture ne nous suivait plus. J'avais réussi.
- C'était quoi ça?
- Une illusion, je leur ai fait croire que nous tournions à gauche et qu'une voiture s'était arrêtée devant eux.
- Je ne savais pas que tu savais faire ça.
- Maintenant tu le sais.
Elle n'ajouta rien et se concentra sur la route. Elle finit par déraper devant une maison vide. D'ailleurs, celle-ci me rappelait vaguement quelque chose. Même si elle était vieille et abîmée, j'étais sûr de l'avoir déjà vu.
- On marche à pied. Ils vont trouvé la moto! suggéra la brune en retirant sa pince.
Je descendis de l'engin et Inès fit de même. Je restai là à regarder cette maison abandonnée et aux vitres cassées.
- Kyle, promets moi une chose! murmura-t-elle sous le coup de l'émotion.
- Laquelle?
- Si je deviens un démon... Brûle moi dans cette maison.
- Non... Je...
- Promets-le moi!!! ordonna-t-elle d'un ton au dessus.
- ...
Elle me fixa alors attendant ma réponse. Je ne pouvais pas me résigner à commettre cet acte. C'était au dessus de mes capacités.
- Kyle, je ne te donne pas le choix! Si je deviens un démon, je pourrais te tuer!
- Ça m'est égal!
- Ne sois pas égoïste! Tout le monde a besoin de toi ici! N'oublie pas ta mission: devenir gardien de la porte CEM.
- C'est pas grave...
La claque partit d'un coup. Je passai ma main sur ma joue qui avait sûrement une trace rouge. Je baissai les yeux, ne voulant pas m'énerver en croisant les siens.
- Plusieurs personnes vont mourir si nos ennemis se l'approprient. Ils seront tous victimes de l'Apocalypse.
- Je ne vois pas pourquoi je me battrai pour eux. Après tout, je suis un démon aussi.
- Ne dis pas n'importe quoi!! Tu es humain. Et je le sais mieux que quiconque.
- Je ne vais pas le faire! annonçai-je.
- Arrête de faire le gamin!!
- J'ai tout perdu Inès. Tout. Il n'y a rien qui me retient. Si je venais à disparaître je serais heureux. Beaucoup d'autres personnes aussi le seraient.
- À qui je parle, sérieux!? Moi je serais malheureuse de te voir arriver de l'autre côté. Et tu le sais très bien. Mais tu t'en fiches.
Elle se mit à courir dans une ruelle et je me pressai de la suivre. Elle trébucha et se mangea le sol. J'accélérai la cadence jusqu'à me trouver devant elle.
- Tu comptes me faire courir partout? soupirai-je.
- Oui. Jusqu'à que tu tiennes cette promesse.
- Tu ne vas pas faire ça!
- Si tu tiens cette promesse, je te révélerai ce que tu dois savoir.
Contre toute attente, je finis par accepter. Elle sourit en me pointant la fameuse boutique.
- Elle n'était pas là avant, murmurai-je.
- Elle a bougé de place lorsque la propriétaire s'est fait enlevée. Disons que cet endroit est une ouverture spatio-temporelle. On se trouve dans une autre dimension.
- Comme à la bibliothèque...
- Comme quoi!? demanda-t-elle en fronçant les sourcils.
- Rien..., répondis-je en me souvenant que le temps s'était modifié.
- Ce n'était pas un rêve? rétorqua-t-elle.
- Euh... Je ne sais pas.
Elle me raconta alors à quelques détails près ce qu'il s'était passé. Elle était sur mon dos, craignant de faire face aux démons. Le groupe était avec nous. Charlene nous avait entraînés à y aller avec elle. Puis le groupe s'était séparé. Elle courait à ma recherche, ne comprenant pas ce qu'il s'était passé. Elle me vit alors tiré un livre. Alors qu'elle s'apprêtait à crier, une main l'en empêcha et la remarque froide de sa meilleure amie lui glaça le sang.
- On y va! On n'a plus rien à faire ici.
- Mais...
- Il n'y a pas de "mais" Inès.
- Attends attends! la coupai-je alors qu'elle jouait les répliques des autres.
- Oui?
- Tu veux dire que vous m'aviez réellement abandonné!?
- C'était contre mon plein gré... Ce n'était donc pas un rêve!?
- Tu vois bien que non! soupirai-je.
J'entrai dans la boutique. Je remarquai que la porte derrière laquelle je m'étais cachée la première fois que j'avais vu le sorcier n'était plus à son emplacement. Je parcourais les longues allées séparées par les vieilles étagères en bois remplies de toiles d'araignées. La quantité de poussière avait augmenté depuis la dernière fois que j'étais venu. L'odeur de vieux papier et de bois parfumait le lieu. Et la poussière rendait mes éternuements plus violent. Inès me tendit un mouchoir que je me précipitai d'attraper. Mon nez me picotait. C'en était bien gênant. Elle sourit amusée par la situation et s'assit sur le bureau en balançant ses pieds. Elle s'était placée de façon à ce qu'elle puisse voir ce que je faisais.
Je tirai un livre au hasard sur les exorcistes. J'appris que leurs pouvoirs, issus de la porte CEM leur permettait de vaincre les démons. Mon coeur se mit à battre fort et rapidement. Chaque ligne que je lisais étirait mon sourire. Elle était là la solution! Pourquoi n'y avais-je pas pensé plus tôt?
Ma joie soudaine surprit L'Exorciste qui me voyait venir. Je montrais le livre à Inès en m'attendant à ce que cette nouvelle lui procure la même sensation que moi. Mais celle-ci afficha un sourire triste et elle s'était arrêté de balancé ses pieds joyeusement.
- Je ne voulais pas que cette idée te vienne à l'esprit.
- Pourquoi?
- Parce que je me sens bête!
- Bête de ne pas l'avoir dit à Charlene?
Elle secoua la tête avant de reprendre.
- Bête d'avoir cru qu'elle me sauverait.
Je fermai le livre et le rangeai. Je n'en revenais pas. Ce qu'elle allait m'apprendre allait me bouleverser.
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