Étienne pleurait. Il était agenouillé face à "nous" et s'appuyait sur ses poings. Ses courts cheveux bruns retombaient sur son front. De la sueur perlait sur son visage très pâle. Cette figure me rappelait vaguement quelque chose.
- Je suis vraiment désolé! répéta-t-il pour la énième fois.
- Tu crois que ça suffira mon grand?

Dāku posa un genou au sol pour se mettre à sa hauteur.
- Il ne peut plus profiter pour pour passer des moments avec sa fille, sinon elle disparaît. Qu'est-ce que tu peux faire pour te faire pardonner?
- Je ne savais pas que ça irait jusque là. Je ne savais pas, s'écria-t-il.
- Je n'en ai rien à faire! Il a juste suffi que tu trahisses ta promesse, pour engrener tout ce raffut.

Il ne s'arrêtait plus. Il en souffrait. Et moi aussi, je souffrais. Je ne me voyais pas vivre sans voir Kelly grandir encore une fois et d'une autre manière. J'aurais tant voulu la guider dans ses choix, et la soutenir dans ses moments de peine... J'avais perdu ma seule et unique chance. Et j'en avais pleins de remords. Si seulement je ne m'étais pas rendu à cette boutique pour retrouver mon corps... Si seulement je n'avais pas perdu mon temps dans cette foutue école d'exorcistes... Si seulement... Si seulement...

- Sa peine est grande Étienne. Il fallait juste que tu tiennes ton rôle de grand frère jusqu'au bout.
- Je sais, et je le regrette amèrement.
- Tu mens! déclara le démon en lui attrapant les cheveux se trouvant au dessus de sa nuque.

Il les tira à l'arrière, ce qui releva la tête de l'homme qui se tenait face à "nous". Il ferma les yeux et se mordit la lèvre inférieure pour s'empêcher de crier.
- Tu rigoles mon coco! Tu te serais suicidé si tu le regrettais vraiment! À cause de ton mensonge, sa mère est morte, son père jouait dans un terrain dangereux pour libérer son fils et a sombré le moment où on lui a dit que Kyle était mort, et lui a vécu dans une zone où il pouvait mourir à tout moment.

Il ne dit plus rien. Ce qui agaça le démon qui le tua d'un coup. Son sang éclaboussa mon visage. Dāku essuya le liquide rouge et se releva. Il ne chercha pas à cacher le corps. Il se releva et s'en alla.

- Qui était-il? demandai-je après quelques minutes de silence.
- C'est un gros bouffon ce mec! C'est tout.
- C'était.
- Oh, ne t'inquiète pas pour ce détail. Dans quelques jours, tu le verras debout en train d'errer dans les rues de Bruxelles.
- Comment ça?
- Il a la même faculté qu'Ashley. Tu le verras par toi-même.
- S'il a la même faculté, pourquoi lui avoir fait ça?
- Pour qu'il vive dans les mêmes conditions que toi.

Je ne cherchai pas à en savoir plus. Je savais qu'il avait besoin de silence pour réfléchir un peu. D'ailleurs, je devais faire de même. Il se dirigea vers une gare et s'assit sur un banc, attendant qu'un train à destination de Paris entre en gare. Il baissa sa tête dès qu'il vit un groupe de gendarmes armés surveiller les passants.
- Ça ne va pas le faire! murmura-t-il.

Il se leva et alla rapidement du côté opposé. Il entra dans une boutique d'accessoires, et circula entre les stands. Il s'arrêta devant une casquette.
- C'est ce qu'il me faut. Mais j'ai pas d'argent...
- Laisse moi faire Dāku. Je peux t'aider.
- Et comment comptes-tu faire?
- Observe et apprend!

Je repris le contrôle de mon corps. Cela me fit un bien fou de ressentir le sang couler dans mes veines. Mais je ne traînai pas. Je sortis un mouchoir de ma poche et concentrai mon regard dessus.
- D'où te vient cette puissance?
- De ma mère, lui déclarai-je en souriant.

Ce n'était plus un mouchoir que j'avais dans mes mains, mais un billet de vingt. Et j'avais eu l'idée de lui apparaître sous la forme du jeune homme que j'avais vu précédement, un binoclard blond aux yeux bleus, vêtu très étrangement. Je passai la casquette au vendeur. Il ne savait pas d'où je venais. Il me dévisagea en arquant un sourcil. Je le regardai de haut en bas avant de demander.
- Bon. Je peux avoir la casquette ou pas!?
Le vendeur qui était chauve, se racla la gorge.
- Ça fait cinq euros cinquante mon garçon!
- Tenez!
- Euh... Dis-moi, demanda-t-il tout bas en se penchant vers moi, tu n'aurais pas vu un jeune homme aux cheveux bruns?
- Euh, si pourquoi? répondis-je en jouant le jeu.
- Je ne le vois plus, c'est quelqu'un de dangereux!
- Alors je ferais mieux de filer si je ne veux pas y laisser ma peau!

Il me "rendit" la monnaie, et je m'en allai le sourire aux lèvres en reprenant mon apparence. Le vendeur n'en crut pas ses yeux. Il se les frotta pour être sûr de ce qu'il avait vu mais je disparus de son champs de vision. Je parie qu'il avait appelé les gens de sécurité parce que je sentis un certain mouvement derrière moi.

Je lâchai un juron et accélérai le pas en prenant les escaliers qui se trouvaient à ma droite. Je mis la casquette sur ma tête, en prenant bien soin de ne pas dévoiler mon visage.
- J'avoue que tu m'as épaté Kyle.
- Tu le dis pour de vrai ou tu te moques de moi?
- À ton avis? J'ai l'air de me moquer de toi?
- Non, répondis-je en étirant mon sourire jusqu'aux lèvres.

Je levai la tête vers le tableau qui affichait qu'un train direction Paris entrait en gare. Une idée me traversa l'esprit. Je me mis dans un coin et en ressortis sous l'apparence d'un gendarme.
- Pas mal!
- Ça me fait plaisir d'être complimenté.
- Tu oublies ce que je suis!

Je me mis à rire en entrant dans le train que j'avais rattraper de justesse. Cette fois-ci, chaque personne pouvait me voir comme ils le voulaient: soit en homme, ou en femme, en enfant ou en vieillard... Tant qu'ils ne voyaient pas que j'étais "Sky", cela m'était égale.

Je pris place à côté d'une fenêtre et laissai mon visage baigné sous les rayons du soleil. C'était un moment reposant dont j'avais vraiment besoin, étant donné que ma vie n'était pas vraiment amusante, surtout à ce moment précis. Je fermai les yeux pour profiter plus de cet instant. Je ne pensais à rien, pour ne pas gâcher ce moment trop précieux à mes yeux. Je me concentrai plus sur mon énergie qui coulait dans mes veines. Je me sentais tellement bien que j'en oubliais mon malheur. Mais un journal me ramena à la réalité. Celui que lisait mon " voisin". Il s'était arrêter sur une page qui parlait d'un tueur en série. Un tueur qui avait tué seize personnes. Son nom était Sky. Je lâchai un rire nerveux qui surprit le lecteur du journal.
- Euh... Un problème? demanda-t-il en arquant un sourcil.
- Ah, non! répondis-je. C'est juste l'information que je lisais.
- Ah, à propos de Sky!?
- Oui! D'ailleurs, vous en pensez quoi?

Je fixais ses yeux gris derrière ses lunettes. Il frotta son menton qui portait une barbe de trois jours avant de répondre.
- Je ne sais pas vraiment et vous?
- Je pense que la sécurité n'est pas fiable, répondis-je avec sûreté. Cette personne a tué plusieurs personnes. Et pourtant, même s'ils connaissent le tueur, ils ne l'ont toujours pas attrapé.
- Moi, je pense que ce sont les infos qui ne sont pas fiables!
- Ah bon, pourquoi? m'étonnai-je.
- Sky vient de la société Egorya. S'il y a bien un criminel, c'est cette entreprise. Elle a créé un monstre qui erre dans les rues de Bruxelles. Il ne faut pas s'étonner!
- Comment savez-vous qu'il s'agit d'un monstre créé par cette société?
- J'étais journaliste, et je menais ma propre enquête. J'ai découvert bien des choses et sérieusement, ce n'est pas très joli!
- Je ne savais pas que cette société était si importante dans cette histoire, mentis-je pour l'inciter à continuer.

Il hocha la tête.
- Parce que le fameux C-H calcule tout dans les moindres détails. Il ne veut rien laisser passer. Il sait que si je parle, je peux paraître fou! C'est pour éviter l'hôpital psychiatrique que j'ai quitté mon poste.

Il me parlait comme si je connaissais déjà l'histoire, c'était une vérité certes, mais il ne devait pas le savoir.
- Alors, c'est la société Egorya qui a tué ces gens?
- Je n'irais pas jusque là, puisque huit d'entre eux sont liés à cette maudite entreprise. Les huit autres, on n'en sait rien d'eux! C'est comme s'ils n'avaient jamais existé... Mais dites moi, qui êtes vous monsieur?
- Oh, je ne me suis pas présenter. Je suis Yuan.

Je ne lui avais pas menti, puisqu'il s'agissait là de mon deuxième prénom. Je me frottai les cuisses pour savoir quelle fonction j'allais me donner. Je finis par trouver.
- Je suis au chômage depuis peu. Je cherche des emplois un peu partout. En même temps, je n'ai pas le potentiel nécessaire pour qu'on m'accepte mais bon!
- Ah je vois. Moi c'est Quentin. Ravi d'avoir fait votre connaissance! dit-il en me tendant sa main.

Je m'empressai de la saisir en souriant. Nous continuâmes notre débat sur l'entreprise de jeux jusqu'à ce qu'on arrive à un point important.
- Je me suis longtemps posé des questions sur leur véritable but. Ils doivent vraiment tenir à cet objectif pour avoir fait tant de morts, vous ne pensez pas? demanda subitement Quentin.
- Maintenant que vous le dites... Je n'y avais jamais pensé de la sorte en fait.
- C'est normal. L'argent donne le pouvoir en ce moment, déclara-t-il en me donnant une tape à l'épaule. En même temps, les familles des victimes ne pensent qu'à se venger. À aucun moment ils vont se demander "pourquoi ils font toutes ces expériences?", à cet instant précis, c'est plutôt " pourquoi mon fils" ou "pourquoi ma fille et pas quelqu'un d'autre!?"

Je détournai mon regard pour le diriger vers la vitre qui m'offrait un paysage rural. Je méditais sur ses paroles. Il n'avait pas tort. Personne ne s'intéressait vraiment à ce qu'ils voulaient faire. Ils pouvaient travailler de leur côté tant que leur projet n'atteignait pas leur famille.
- Quentin, finis-je par dire.

Celui-ci leva les yeux vers moi en arborant son sourire radieux, tandis que moi, je me retenais de pleurer.
- Pourquoi j'ai l'impression d'avoir toujours été à côté de la plaque?

Son sourire se dissipa pour laisser place à l'incompréhension.

- Pourquoi, même si vous me guidez vers la bonne voie, je m'obstine à rester sur le mauvais chemin?
- De quoi parlez-vous?
- J'ai besoin d'aide... S'il vous plait!

Il écarquilla les yeux lorsque je lui apparus sous ma vraie apparence.
- Sky, articula-t-il en laissant tomber son journal.