Prologue - Les explorateurs du temple perdu
Forêt de Nagara, Sylva (21e étage de la Tour)
17 juillet 3202
« V-vous êtes sûrs que nous risquer rien, sinorida ? »
L'homme qui avait posé cette question avait la peau mate et de longues oreilles pointues. C'était un semi-humain appartenant à l'espèce des elfes noirs, qui s'exprimait dans une autre langue que la sienne, comme en témoignait son fort accent.
Penché au dessus de la pirogue, il observait les eaux troubles du torrent avec inquiétude.
L'autre passagère releva son chapeau et ouvrit un œil flemmard. Son iris mauve détailla l'elfe avec lassitude, puis se referma.
« Mais oui, mais oui... »
« Je être certain d'avoir vu ombre de camatl, là dessous. » Insista l'elfe.
La femme soupira avant de se redresser. Emergeant de sa sieste, elle s'étira de toute ses forces, manquant faire sauter les boutons de sa tunique d'exploratrice. Dans son dos, la queue de renard d'un blanc immaculé qui naissait aux creux de ses reins s'agita.
Les kitsunes, semi-humains à moitié renards, étaient originaires et endémiques du 8e étage. En d'autres termes, l'un d'entre eux n'aurait pas dû se trouver au 21e.
Du moins, c'était le cas avant le début de l'ascension.
« Il n'y a pas de camatls, de ce côté du volcan. » Dit distraitement l'ascensionniste en scrutant la berge.
L'elfe lui jeta un regard dubitatif, puis sortit un talkie-walkie.
« La ziorra solesta inla geaula, noy ascermatos alagar alcara. » Lança-t-il dedans, maussade.
« Qu'est ce que tu fais ? » S'étonna l'autre.
« Moi prévenir équipe si jamais nous pas revenir d'ici un jour. »
Exaspérée, la kitsune secoua la tête, puis se remit à guetter la rive.
Le fleuve qu'ils parcouraient était encadré par de longues racines tentaculaires se rejoignant pour former une végétation dense. Il fallait donc trouver un espace de terre dégagée pour débarquer.
« Là ! » Dit la kitsune. « Prépare les affaires. On finit à pieds. »
« À-à pieds ?! Et si jamais on croise une meute de tlantlis...? »
La femme-renarde grogna, lassée.
« Et ben j'espère que t'as de bonnes chaussures. »
***
Une heure plus tard...
Les deux explorateurs pénétrèrent à l'intérieur des ruines souterraines en passant par un petit trou d'un mètre de diamètre. Seuls quelques rayons de lumières éclairaient les lieux à travers les minuscules et rarissimes ouvertures, si bien qu'il régnait une obscurité profonde à l'intérieur de ce temple abandonné.
« Allons-y. » S'impatienta la kitsune en prenant les devants.
Intimidé, l'elfe noir brandit la torche de fortune qu'ils s'étaient fabriqués comme si il s'agissait d'une épée et la suivit, hésitant.
Arrivée dans la première salle, l'aventurière fit un pas et sentit un craquement organique sous sa semelle. Baissant les yeux, elle s'aperçût qu'elle venait s'écraser une bestiole grouillant de pattes aussi grosse qu'une assiette.
« Des araignées... » Geignit-elle. « Je déteste les araignées. Pourquoi il faut toujours que ce soit des araignées ? Pourquoi est ce que c'est jamais des papillons ? »
Krkrkrkrkr...
Alertée par le bruit, la kitsune redressa la tête et s'aperçut que la pièce en grouillait : il en avait des centaines.
« Lasiodora miniatura. » Les reconnut-elle.
« Quelle horreur ! » Gémit une voix derrière elle.
Elle se tourna vers l'elfe, qui fixait les arachnides avec effroi. Elle leva les yeux au ciel.
« Te plains pas, elles sont plutôt petites... pour la région. »
Son regard se posa alors sur la torche.
« Passe-moi ça. » Lança-t-elle en s'en emparant.
L'ascensionniste s'empressa de la brandir en direction du sol. Sitôt fait, les bestioles s'éloignèrent vivement du feu, laissant les deux explorateurs tracer leur route. En atteignant la sortie, l'elfe se mit soudainement à couiner.
« Quoi encore ? » S'impatienta la femme-renarde.
« Sinorida ! J-J'en ai une dans le dos ! » Pleurnicha-t-il.
« C'est juste un courant d'air ! » S'exclama son interlocutrice en le forçant à se retourner.
Elle hoqueta alors : son dos était intégralement couvert de mygales. Elle s'empressa de les chasser d'un coup sec de la main.
« Tu vois, juste un courant d'air. » Maintînt la kitsune avec un sourire alors que l'elfe tournait un regard inquiet vers elle.
***
« Il jamais s'arrête, cette maudit temple... »
« Et toi, t'arrêtes de te plaindre, des fois ? »
« Je ne pas suis impatient de croiser nagariens ! Vous savez la sort réservé aux cēmanis... »
Cēmani : le terme nagarien pour désigner les étrangers. Oui, la femme-renarde ne le savait que trop bien. Pourtant, elle n'était pas inquiète.
« Et moi, j'ai un dîner avec une amie dans deux heures. Relaxe... on est même pas sur un territoire de chasse. Ça serait vraiment improbable qu'on croise un groupe aussi loin de Chaba Caria. »
« Oui mais si jamais... » Entama l'elfe.
« Chut ! » L'interrompit la kitsune.
Elle s'était arrêté à l'entrée de la salle suivante. Les yeux plissés, elle se pencha pour examiner ce qu'elle avait repéré par terre : un minuscule fragment.
Un fragment d'os.
« Comme si un squelette avait explosé... »
Suspicieuse, la femme-renarde releva la tête et détailla les lieux, à la recherche d'un indice. Le sol était pavé de dalles marquées par des symboles nagariens.
Sur le côté, une grande statue de monstre canidé à queue de serpent et à tête de démon levait les mains en l'air - paumes à plats - en dévisageant la salle de son regard maudit, la gueule béante.
Et juste au dessous...
« Docatl naluo kakara paluitla coatla. » Lut-elle.
« Vous... savoir parler le nagarien ? »
« Non, j'ai deviné au pif et je m'introduis dans de vielles ruines nagariennes pour y passer mes vacances. » Ironisa la grimpeuse, exaspérée.
« Moi juste posait question ! » S'énerva l'autre. « Qu'est ce que veux dire l'inscription ? »
La kitsune plissa les yeux.
« Maudits soient-ceux qui ignorent le nom du grand roi de la guerre. » Traduisit-elle.
« C'est... »
« Le titre du serpent à plumes. » Confirma-t-elle. « Quetzalcoatl. Il faut marcher uniquement dans les lettres qui composent son nom. »
L'ascensionniste prit le temps de visualiser le chemin à parcourir.
« C'est faisable... et c'est dans le bon ordre. » Conclut-elle.
Prête, elle se mit en position.
« Euh... »
« Observe et fait comme moi ! »
Elle bondit alors sur la première dalle - celle comportant un symbole ressemblant à un petit dinosaure - et...
...passa au travers.
« Hiii ! »
La kitsune se vit plonger vers les pics acérés qui l'attendaient en contrebas, et son poil se hérissa. Fort heureusement, sa main agrippa de justesse le rebord.
Sans ses griffes, elle serait tombée.
« Bordel de merde ! » Rugit-elle, suspendue dans le vide. « En nagarien, Quetzalcoatl commence par un kual, l'équivalent du K ! J'ai confondu les deux symboles. »
Elle s'empressa de remonter et reprendre son souffle. Derrière elle, l'elfe était devenu aussi blanc qu'un linge.
« Bon, petite erreur de débutante. » Clama-t-elle joyeusement en s'époussetant. « Grand bien me fasse, j'ai de bon réflexes. »
Son camarade ouvrit la bouche... puis la referma.
« Allez, on y retourne. »
Elle reprit sa progression. D'abord le symbole en forme de tête de démon. Ensuite, celui qui ressemblait à deux main entremêlées. Et ensuite...
La kitsune s'interrompit brusquement.
« Q-Qu'est ce qu'il y a...? » Bredouilla l'elfe, en équilibre sur la lettre précédente.
« Y a un lézard. » Répondit l'ascensionniste en plissant les yeux.
« Pourquoi la dalle suivante est différente des autres ? »
Plus précisément, elle paraissait... plus usée.
« C'est louche... je vais tenter de passer le plus rapidement possible, au cas où. »
La femme-renarde ferma les yeux, semblant se concentrer. Derrière, l'elfe allait ouvrir la bouche lorsqu'il s'interrompit, stupéfait.
Un vent étrange s'était soudainement levé dans la pièce. Le poil blanc de l'aventurière semblait être agité par une force invisible. Partout sur la peau de cette dernière, les veines sous-cutanées s'étaient dilatées.
Rouvrant brutalement les yeux, la grimpeuse s'élança d'un bond incroyablement véloce.
SCHBAM !
À la seconde où elle avait posée la patte sur la dalle suivante, la main de la statue s'était violemment écrasée dessus. Fort heureusement, la kitsune y était passé avec une vitesse telle que le piège n'avait fait que la frôler - non sans qu'elle n'y laisse quelques poils de sa queue au passage.
« Un double piège... les enfoirés ! » Couina-t-elle.
L'elfe lui, émit le même son qu'une souris prise dans un piège à fromage en observant avec horreur la main de pierre se relever lentement. Le souffle provoqué par le bond de la semi-humaine l'avait à moitié décoiffé.
« C-Comment vous avez fait ça..?! »
« Qu'importe. Allez, on est presque au bout. » L'encouragea la femme-renarde en reprenant la route aussitôt.
***
Plus tard...
« V-Vous être sûr de ce que vous faire, sinorida...? »
« La ferme, j'ai besoin de silence. »
Un petit bout de langue dépassant de sa bouche, le front trempé de sueur, les yeux rivés sur le petit sac qu'elle tenait dans les mains, l'ascensionniste était en pleine concentration.
Face à elle, sur un petit autel, reposait la relique qu'elle était venu chercher : une petite statuette de guerrier portant un masque à plumes et des symboles sur les bras et le torse.
Le regard de la kitsune alternait rapidement entre cette dernière et le sac qu'elle tenait. Elle en modifiait de temps à autre le contenu, retirant ou ajoutant un peu du sable qui se trouvait à l'intérieur.
« Je pense que c'est bon... » Souffla-t-elle finalement.
Après moult estimations, elle pensait enfin avoir trouvé le bon poids.
« C'est l'heure de vérité. » Murmura-t-elle en approchant le contenant de la statuette.
Elle attendit patiemment, se préparant mentalement. De nouveau, ses cheveux et sa fourrures semblèrent danser sous l'action d'une force invisible. Puis, elle se saisit à toute vitesse de son butin tout en déposant simultanément le substitut qu'elle avait préparé.
Elle attendit alors, le souffle coupé... mais il ne se passa rien. Satisfaite, la kitsune poussa un petit soupire de satisfaction et se retourna.
Pour tomber nez à nez avec la lame d'ivoire d'une lance.
***
« Xotlata foal keraotl, cēmani. » Fit celui qui la menaçait.
La relique ou la vie, voilà ce qu'il avait dit.
L'individu en question était immense - environ deux mètres de haut - et il était accompagné par toute une troupe attendant quelques mètres derrière lui, lances en main.
Leur peau était d'un brun sombre, plus encore que celle de l'elfe qui tremblait à genoux devant eux, pris en otage. Ils portaient des vêtements particulièrement colorés, et surtout leur visage était couvert par ce qui semblait être un masque de bois orné de plumes.
« Hatacoatl. (Dépêche-toi.) » Ajouta le premier nagarien en la piquant du bout de sa lance.
« Nous voilà bien embêtés... » Soupira la kitsune en parfait nagarien. « J'aimerais conserver ce que j'ai obtenu à la force de mes bras, vous voyez ? »
En entendant sa réponse, le nagarien se raidit. Derrière lui, ceux qui retenaient l'elfe accentuèrent la pression de leurs armes sur sa gorge.
Le prisonnier déglutit, terrorisé.
De son côté, l'ascensionniste plissa le museau, contrariée.
« Bien... » Lâcha-t-elle finalement en tendant la statuette, dont le premier nagarien s'empressa de s'emparer.
Les autres libérèrent alors l'elfe, qui se massa la gorge.
« Vous étiez vraiment obligés d'aller aussi loin ? » Marmonna-t-il en svartalfin, sa langue natale. « On avait conclu un accord ! »
« Il fallait rester crédible. » Répondit le premier nagarien dans la même langue.
Malgré cette évidente trahison, la femme-renarde ne broncha pas.
« C'est le troisième pilleur que je vous livre, alors maintenant, libérez ma sœur du camp où elle est enfermée, s'il-vous-plaît... »
Les nagariens échangèrent un regard.
« Tu verras ça avec le capitaine. » Dit le premier en remettant la statuette à sa place. « Capturez-la. »
Deux soldats s'avancèrent vers la grimpeuse, déterminés à la ligoter.
« Méfiez-vous d'elle. C'est une ascensionniste, alors elle détient sans doute des pouvoirs. » Lança l'elfe, inquiet.
« Quel sens de la déduction ! » Fit la kitsune, sarcastique.
L'elfe sursauta violemment.
« Vous parlez ma langue ?! » S'étrangla-t-il. « Pourquoi est ce que vous m'avez forcé à parler kazéen ?! »
« Pour te faire chier. »
Le visage de son interlocuteur s'empourpra.
« Tuez-moi cette connasse ! »
« C'est pas toi qui donne les ordres, ici. » S'emporta le premier nagarien. « Et qu'importe ses pouvoirs, elle est coincée. »
« En êtes vous certain ? » Argua moqueusement la grimpeuse. « Vous pensez que j'aurais suivi l'imbécile qui vous informait par talkie-walkie sous mon nez sans être sûre de moi ? »
« Tu ne t'es même pas mis à couvert ?! » S'exclama le nagarien, abasourdi.
« Je croyais qu'elle comprenait pas ce que je disais ! » Paniqua l'elfe. « Et elle dit ça, mais elle ne s'est même pas aperçut... »
« ...que ces crétins nous filaient depuis l'entrée du temple ? » Termina la semi-humaine en haussant un sourcil.
L'elfe tressaillit, déstabilisé, et quelques regards s'échangèrent parmi les guerriers masqués. Mais le premier nagarien lui, haussa les épaules avec indifférence.
« Qu'importe... » Lança-t-il en se retournant. « Tu dois t'immobiliser quelques minutes pour activer ton voyage, grimpeuse. Alors n'espère pas t'écha... hein ? »
« Hein ? »
« Hein ?! »
Le nagarien écarquilla les yeux, interloqué, alors que plusieurs exclamations de surprise retentissaient.
« Je me suis pourtant tourné... pourquoi est-ce que je vois encore son visage ? »
Baissant les yeux, il s'aperçût alors qu'il ne contemplait pas son ventre, mais son dos. Affolé, il voulut parler, mais seule une gerbe de sang s'échappa de son masque. Lorsqu'enfin il accepta la réalité, la terreur se lut à travers ses fentes oculaires, puis il s'effondra, inerte.
Un silence terrifié s'abattit sur les lieux.
La semi-humaine venait de lui rompre les cervicales à main nue, tordant son cou à cent-quatre-vingt degrés.
L'elfe fut le premier à réagir.
« Il faut que je me tire de là ! »
L'instinct de survie prenant le dessus, il prit tout le monde par surprise et s'empara de la statuette avant de filer vers la sortie à toute vitesse.
« L'imbécile ! » Sursauta la kitsune en s'apercevant qu'il n'avait pas placé le substitut.
Aussitôt, le temple se mit à trembler. Le plafond commença même à se fissurer. Des cris horrifiés retentirent parmi les nagariens restant alors que tout commençait à s'effondrer.
« <Forme Praker> ! » S'exclama l'aventurière en claquant des doigts.
Aussitôt, une sorte de cube métallique apparut à ses côtés, flottant dans les airs. Agitant ses faces, il se transforma alors en une sorte de fusil semblable à un stylo quatre-couleur dont elle s'empara avant d'actionner la couleur rouge.
« Bougez ! » Aboya-t-elle en ouvrant le feu sur les nagariens restants.
BLAM !
Une déflagration propulsa les soldats masqués dans toute la pièce. Inconscients, ils se firent rapidement écraser par les imposants gravas qui se détachaient du plafond.
« Faut que je rattrape cet enfoiré ! » S'agita la semi-humaine en s'engouffrant dans la sortie.
D'énormes blocs de pierre s'écrasèrent derrière elle, ensevelissant la salle dans l'éboulis.
« Je perds du terrain... il est temps de passer à la vitesse supérieure ! »
Usant de nouveau de son étrange force, la kitsune bondit à une vitesse improbable et parcourut le chemin inverse ventre à terre alors que tout s'écroulait.
***
L'elfe émergea des ruines, essoufflé, mais tomba nez à nez avec un immense colosse masqué.
« Qu'est ce qu'il se passe ?! C'est quoi ce bruit ?! Où sont mes hommes ?! » Tonna-t-il.
Aussi haut que large, il était bien plus musclé que les autres nagariens. Affolé, l'elfe déglutit sans répondre. De son côté, le capitaine s'énerva en voyant la relique dans ses mains et se saisit de l'immense marteau qu'il avait apposé contre un rocher.
« Dacuatl loatla ! (saleté de longues oreilles !) » Rugit-il en levant son arme.
Mais à cet instant, une explosion envoya valser des rochers derrière lui.
« Que...?! »
Une silhouette s'extirpa alors du sol d'un bond spectaculaire, avant d'atterrir non loin d'eux, s'accroupissent pour amortir le choc.
« Pfiou... c'était moins une. » Fit la kitsune en se relevant.
Le capitaine jeta un œil à l'ascensionniste, puis à l'elfe.
« Je m'occuperai de toi plus tard. » Gronda-t-il en balayant ce dernier d'un geste de la main.
Catapulté, l'elfe fit un vol plané avant de s'écraser sur un arbre. Il retomba à terre avec la statuette, sonné.
« À nous deux ! » Hurla le nagarien, en se plantant à deux mètres de la semi-humaine.
Celle-ci le toisa avec arrogance. Esquissant un sourire, le capitaine commença alors à faire gonfler ses muscles. Démontrant d'une formidable adresse, il fit tournoyer son marteau autour de lui, dégageant un souffle qui fit s'agiter la végétation alentours.
« HAHAHA...! J'ai toujours rêvé de voir ce que valait les visiteurs d'autres mondes ! Sors ta lame et approche, chienne ! »
La kitsune haussa un sourcil, puis actionna la couleur noire de son fusil... avant de viser son front.
BLAM !
Écarquillant les yeux de surprise, le nagarien loucha sur le javelot d'acier noir qui venait de se planter dans son crâne... puis s'effondra, tué sur le coup.
***
Lorsque l'elfe reprit ses esprit, il entendit le déclic d'une arme. Levant les yeux vers la grimpeuse, il s'aperçut qu'elle braquait son étrange fusil sur lui.
Il déglutit.
« Euh... »
« Merci pour ça. » S'amusa-t-elle en ramassant la statuette. « Je vais te laisser avec nos autres poursuivants, maintenant. Adieu ! »
Et sur ce, elle sortit une sorte de montre à gousset de sa poche et l'actionna, disparaissant en une dizaine de secondes.
Abasourdi, l'elfe contempla l'endroit où elle avait disparu.
« C'est donc le voyage vers un autre monde... » S'émerveilla-t-il.
Il sentit alors un liquide froid s'écouler sur son épaule. Constatant qu'il s'agissait de bave, il releva lentement la tête, les larmes aux yeux.
Une gueule béante emplies de crocs acérés le surplombait.
« Tlantli ! » Pleurnicha-t-il en tentant désespérément de se lever pour fuir.
Mais la créature fut plus rapide et referma brusquement ses mâchoires sur sa tête.
***
Allée Yīnmái, Shang Yun (45e étage de la Tour)
La kitsune réapparut dans un paysage fort différent.
Elle se trouvait au beau milieu d'une immense avenue en pente. Au loin s'élevaient quelques buildings, mais là où elle avait atterri les bâtiments étaient plus traditionnels : ouvertures circulaires, lanternes rouges suspendus à des fils et pagodes aux angles de toit remontants. Les quelques passants qui arpentaient la rue portaient des tenues de soie et des ombrelles en papier.
« Pile à l'heure ! » Se réjouit la semi-humaine.
Shlang ! Krisssss...!
Elle sursauta vivement.
Une sorte de charrette venait d'effectuer un virage serré au dernier moment pour l'éviter, manquant la faire tomber à la renverse.
« Xiang tai luchu ! Axiyi quyaxi ! » Aboya le conducteur avant de continuer sa route.
« Que...? »
Outrée, la grimpeuse l'observa s'éloigner, tétanisée... avant de brandir un doigt d'honneur.
« Je rêve ?! Grosse vache toi-même ! Abruti ! » S'égosilla-t-elle, hallucinée.
De la fumée lui sortant quasiment par les narines, la kitsune se réfugia dans une ruelle pour se changer - troquant sa tenu d'exploratrice pour des vêtements de civil modernes - tout en pestant contre le chauffard.
« La température est quand même plus agréable ici. » Apprécia-t-elle en se calmant peu à peu.
Retirant son chapeau pour que ses oreilles retrouvent l'air libre, elle se mit soudain à renifler l'air, les sourcils froncés. Plissant le museau, elle sortit alors un déodorant de sa poche et en vaporisa sur elle.
« Voilà qui est mieux. Et maintenant... »
Elle se saisit de la fameuse relique qu'elle cherchait depuis tant de temps et la brandit devant elle pour l'admirer.
« Tu vas m'être sacrément utile, toi...! Fufu, c'est dommage. J'aurais bien aimée te garder, tu irais merveilleusement bien au dessus de ma baignoire. Mais tu auras un autre rôle à jouer. »
Satisfaite, la kitsune approcha la statuette de son étrange montre à gousset.
« Store. » Dit-elle à voix haute.
Aussitôt, l'artéfact fut comme aspiré par le cadran, se logeant au sein de l'inventaire de la montre. Son dû mis à l'abri, la semi-humaine quitta la ruelle et se dirigea vers l'adresse où elle avait rendez-vous.
***
Le pavillon Wūséi.
L'un des restaurant les plus réputés de cette ville. Immense bâtisse s'étendant sur trois étages et disposant d'une architecture raffinée, elle ne nourrissait en son sein que la haute société de la région.
En d'autres termes... ceux qui avaient de l'argent. Beaucoup, beaucoup d'argent.
En voyant la kitsune entrer avec sa veste de cuire et ses basket flashy, l'un des serveurs à la moustache pointue vint aussitôt à sa rencontre.
« Navré madame, mais ce restaurant est ferm... »
Il avait beau avoir parlé en shangyun, l'ascensionniste l'avait parfaitement compris.
« Inutile de me servir la sauce on est pas ouverts parce vous avez l'air pauvre, j'ai une invitation. » L'interrompit-elle. « La dame du lac danse sous la septième lune. »
Le serveur sursauta.
« O-Oh, v-veuillez m'excuser... dame Etecalt vous attends au dernier étage. L'ascenseur est par ici. Je vais également vous débarrasser de vos... »
« Pas la peine. »
La femme-renarde se rendit au troisième, arrivant finalement devant une porte coulissante recouverte d'une somptueuse tapisserie brodée d'un paon. D'autres serveurs se chargèrent de lui ouvrir, dévoilant une pièce richement décorée, occupée en son centre par une table basse ronde regorgeant de nourriture fumante.
Une femme était assise derrière, sur des coussins.
Elle avait beau porter un habit de soie très local, son apparence ne laissait aucune place au doute : une peau foncée, un masque boisé, des plumes à l'arrière du crâne... c'était une nagarienne.
« Tu es des plus dépaysantes... » Argua sarcastiquement la kitsune. « Salut, Tchaka. »
La nagarienne esquissa un grand sourire - visible car son masque ne couvrait que la partie supérieur de son visage.
« Yo, Raijū ! Alors, il paraît que tu vas prendre quelques vacances au 1er étage ? »
Sky Keep ARC 2 - Prologue : FIN
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