Chapitre 11 - Le pari du valet en noir, partie 2
Bar du Crossroads Hotel, Tierraroja (5e étage de la Tour)
Soir du 20 juillet 3202
« Mêh. »
Tous les convives dévisageaient avec curiosité le petit être qui était apparu au moment où le stigmate de Soren s'était illuminé.
D'une vingtaine de centimètres de hauteur, la bestiole ressemblait à une sorte de mouton noir habillé d'un costume trois-pièce. Ses traits ovins affichaient une grâce propre à l'aristocratie et - bien qu'il soit en train de flotter dans les airs - il semblait s'appuyer sur une belle canne qui lui donnait un air de dandy.
« Mêh. »
« C'est quoi c'truc ? » Demanda Raijū en fronçant les sourcils.
« C-Ce truc ?! » Sursauta Fyrklöver, indigné. « Ahem... hum, cet élégant mouton noir s'appelle Edel, il fait partie intégrante de ma capacité : le <Pari du valet en noir> ! »
Fier de sa petite présentation, Soren écarta les bras pour mettre en valeur son petit compagnon, qui s'inclina en mimant un salut, comme si il avait porté un haut-de-forme.
« Mêh. »
Un petit silence blasé accueilli l'enthousiasme du nanti. Un tantinet agacé que personne n'ai réagit plus que ça, celui-ci se racla la gorge avant de rependre.
« Mon pouvoir... » Commença-t-il.
« Euh... je ne vois rien du tout, moi. » Intervint une voix.
Tout le monde se tourna vers Matsuba, qui observait les uns et les autres, comme si il cherchait quelqu'un d'autre dans son cas.
Soren lui adressa un regard perplexe.
« Tu n'as... pas de stigmate ? » Finit-il par articuler, étonné.
Un certain silence s'installa de nouveau dans la pièce, alors que Matsuba baissait la tête, rouge de honte.
« Tiens, met ça. » Grogna Raijū en sortant de sa Clé de passage un sac dont elle extirpa des lunettes de vue qu'elle lui tendit.
En les positionnant sur son nez, Matsuba vit aussitôt apparaître le petit être élégant qui flottait aux côtés du Dioptase.
« Il faudra que j'éclaircisse ce point avec dame Raijū plus tard. » Se promit-il.
Il observa en détails le petit être.
« On dirait une peluche... elle ressemble à celle que j'avais gagné dans un UFO-catcher à la fête nationale il y a deux ans, et que j'avais offerte à Shizu. »
« Mmm... loin de moi l'idée de douter de tes capacités, jeune Matsuba. » Intervint soudainement Soren, soucieux. « Mais je dois avouer être inquiet quant au bon déroulé de la mission si tu n'as pas de pouvoirs... »
« Je serai avec lui. » Affirma alors Euryale en posant timidement la main sur l'épaule du jeune homme, qui lui adressa un regard reconnaissant.
Remarquant cette marque d'attention, Raijū émit un discret petit « hpmf » en détournant le regard.
« Bien euh... j'imagine que ça ira. » Se résigna le nanti, en se promettant de garder un œil sur ce duo. « Je disais donc : mon pouvoir ressemble à un jeu de cartes appelé le blackjack. Sauf que l'on y parie pas de l'argent, mais... »
Son sourire s'accentua, alors que ses yeux se plissaient.
« ...des probabilités de survenue d'évènements. »
« Comment ça ? » S'étonna Natherod, intrigué.
« Vous m'avez bien entendu. Il est possible, par le biais de mon pouvoir, d'augmenter nos chances de réussites. »
Mis à part Raijū qui conservait un air méfiant, les autres convives observèrent le Dioptase avec stupeur, conscient des avantages indéniables que pouvait offrir un tel pouvoir.
« Et la contrepartie ? » Soupira finalement la kitsune d'un air pincé.
Le sourire de l'intéressé s'élargit.
« Si le jeu est perdu, les chances diminueront au lieu d'augmenter. » Affirma-t-il avec un air taquin.
« C'est un peu dangereux, comme sport. » Commenta Kaya, troublée.
« Mais non, il suffit de gagner ! » Rétorqua innocemment le Fyrklöver. « Bien, laissez-moi vous conter les règles. Chaque carte a une valeur, et le but du jeu est d'atteindre ou de s'approcher le plus possible d'une somme totale de vingt-et-un. Ainsi, chaque joueur reçoit deux cartes visibles en début de partie, alors que le croupier en reçoit une face visible et une face cachée qu'il est le seul à connaître. À chaque tour, un joueur a plusieurs possibilités. La première est de dire carte, et donc de piocher. Cependant, si son total dépasse vingt-et-un avec la nouvelle carte, il perd instantanément : on dit qu'il brûle. La seconde est de dire stop, auquel cas le joueur ne piochera plus de cartes jusqu'à l'annonce des résultats en fin de partie. La troisième est de dire double : le joueur pourra alors doubler sa mise et piocher sa dernière carte avant de s'arrêter pour attendre les résultats. Quand tout le monde a joué, c'est au tour du croupier de tirer une carte. La partie prend fin lorsque ce dernier dépasse le nombre dix-sept. Ceux qui auront un total se situant entre le total du croupier et vingt-et-un compris auront gagné. »
Soren tendit la main vers Edel, qui lui remit théâtralement un paquet de cartes fraichement extirpé de sa laine.
« Mêh. »
Le nanti fit danser les cartes dans ses mains, avec la fluidité et la grâce d'un magicien, et les étala en une demi-seconde sur le table devant lui, dévoilant un jeu trié dans l'ordre croissant.
« Les cartes numérotées deux à neuf valent leur chiffre. » Poursuivit-il. « Toutes les figures ainsi que les cartes dix valent dix, et sont surnommés les bûches. Quant à l'as, il peut prendre au choix la valeur un ou onze. On parle de blackjack lorsque les deux premières cartes d'un joueurs sont un as et une bûche, ce qui fait automatiquement vingt-et-un. »
Il désigna alors le petit mouton d'un air ravi.
« Edel représente la banque, et de surcroît le croupier. C'est lui qui tire les cartes, et on joue tous contre lui. »
« Mêh. »
« Vous n'avez qu'à formuler dans votre tête l'évènement que vous souhaitez voir réaliser, puis dire : les paris sont ouverts. Dès lors, vous serez pris dans la partie et dans le déchaînement de probabilités, qu'il soit dans un sens ou dans l'autre. Il suffit qu'un seul d'entre nous gagne contre la banque pour remporter la mise principale. Plus nous serons nombreux à l'emporter et meilleur seront nos scores, plus nos chances augmenteront. »
Il balaya le petite assemblée de son regard malicieux.
« Alors, ça vous tente ? »
« Un instant ! » Intervint Matsuba. « On a toujours pas parlé de mon contrat à moi ! »
« Ton... contrat ? » Répéta Soren en clignant des yeux, visiblement perdu.
« Bah oui : dame Raijū a eu ce qu'elle voulait, mais pas moi. Si ma condition vous convient, vous pourriez me faire signer un contrat également, monsieur Fyrklöver ? »
« E-Et bien... oui, je suppose que c'est envisageable, si la demande est raisonnable. »
Matsuba sourit. Il savait exactement ce qu'il allait demander.
***
Pendant ce temps, à la prison de Bocabierta
Le bruit des pioches percutant la roche.
Il était omniprésent en ces lieux, même à une heure si tardive où il aurait pourtant dû être temps de se mettre à table. Dans la grande cour centrale - cerclée par d'immenses murailles lisses où patrouillaient quelques sentinelles en armure blanche - des êtres en haillons dont les pieds étaient cerclés de chaînes frappaient durement le sol.
Tous ces gens étaient des semi-humains. Mais ils étaient méconnaissables : fourrure tondue, griffes et crocs limés, cornes retirées, ailes déplumées... chacun n'était plus que l'ombre de son passé ici.
Et chaque heure de travail forcé supplémentaire minait autant la pierre que ce qu'il restait d'eux.
Soudain, les portes principales - celles menant aux dortoirs et au réfectoire - s'ouvrirent avec éclat. Une petite troupes de pacificateurs émergea de l'ouverture, traversant la cour d'un pas vif et nerveux. Quelques regards de parjuriens curieux s'attardèrent sur les fusils qu'ils arboraient fièrement, mais ils détournèrent rapidement le regard pour se consacrer de nouveau à leur œuvre.
Tous avaient compris depuis longtemps qu'il valait mieux se mêler de ses affaires et travailler en silence en ces lieux.
« Numéro sept-cent-treize. » Lança l'un des soldats blancs à l'intention d'un prisonnier, en s'arrêtant à quelques mètres de lui. « Le directeur Keiner souhaite te voir. Maintenant. »
Le concerné - un parjurien à la peau noire semblant appartenir aux canidés - écarquilla les yeux, visiblement aussi surpris que terrorisé.
« M-Moi ?»
« Oui. » Répondit sèchement le pacificateur. « Dépêche-toi et suis-nous. »
Et sur ce, il fit volte face et repartit avec son groupe en direction de là d'où il était venu. Le prisonnier interpellé jeta un regard désemparé à ses confères enchaînés, qui tournèrent un à un la tête ailleurs, aussi inquiets que lui.
Le regard du semi-humain s'attarda un instant sur une prisonnière blonde à la queue de crocodile qui était dos à lui, puis il soupira et se résolut à suivre les soldats blancs.
Il partit donc à leur suite et pénétra à l'intérieur du bâtiment.
« Qu'est ce qu'il me veut, celui là...? » Songea Sekhemkarê - car c'était bien lui - en parcourant les couloirs derrière les pacificateurs.
L'envoyé d'Hachibunke prit soin d'afficher un air abattu pendant qu'il réfléchissait.
« Ça va faire deux jours qu'on est infiltrés ici, Néféret et moi. On a pris soin d'agir avec discrétion et de ne jamais enfreindre le règlement. On se contente d'aider d'autres prisonniers pour gagner leur confiance. Il n'y a aucune raison pour le directeur de me soupçonner de quoique ce soit. »
Lorsqu'enfin il arriva devant le bureau du gérant des lieux, le lupulellien n'avait toujours aucune hypothèse crédible en tête.
On le fit entrer, et asseoir devant un bureau à l'allure sobre sur lequel reposait deux tasses de thé fumantes. Un individu en uniforme, portant une casquette pour couvrir ses cheveux courts d'un blond pâle, était assis derrière.
« Aaah... bonsoir. Navré de te faire quémander à une heure aussi tardive. » Dit-il dès que les soldats eurent quitté la pièce en se grattant l'arrière du crâne, visiblement embarrassé.
Malgré ses traits plutôt durs, il s'exprimait avec avec une voix douce. Sekhemkarê nota qu'il avait des yeux aussi clairs que du cristal. Derrière lui, deux molosses en laisse mangeaient le contenu d'une gamelle.
« J'ai pris la liberté de nous servir une boisson chaude. » Poursuivit l'homme. « Tu veux des biscuits avec ? Ils sont à la cannelle. »
Méfiant, le lupulellien accepta avec politesse la friandise tendue par le haut-gradé, craignant qu'un refus ne soit mal perçu.
« Ah, désolé. J'en oublie de me présenter. Je suis le directeur de cette prison, le lieutenant Erwin Keiner. » Se présenta son interlocuteur.
En voyant les traits indécis qu'affichait Sekhemkarê, le pacificateur sourit de plus belle.
« J'imagine que tu dois trouver louche toute cette attention particulière... et bien tu n'as pas complètement tord. Je suis réputé impitoyable, après tout. Mais je suis aussi un homme de parole qui sait agir dans son intérêt. Or, il se trouve que j'ai quelques questions à te poser. Pourrais-tu y répondre avec honnêteté ? Je suis prêt à accorder des améliorations à tes conditions de détention en échange. »
Si Erwin paraissait toujours aussi calme et posé, son ton paraissait plus sérieux qu'auparavant.
« Je serais en revanche contrarié si tu venais à mentir. »
Le regard du semi-humain se posa sur les deux chiens en train de manger, puis revint sur le directeur.
« Le stratégie de la carotte et du bâton, quoi... » Songea-t-il, agacé.
Résigné, il hocha la tête.
« Bien. » Approuva Keiner, visiblement ravi. « Je pense qu'on va bien s'entendre, tous les deux. »
Il sortit alors délicatement de son bureau une affiche où était dessiné une parjurienne. Même si les traits de crayon étaient grossiers, Sekhemkarê la reconnut immédiatement : il s'agissait de l'une des quatre personnes avait qui il partageait sa cellule.
« J'imagine que tu la reconnais ? » Demanda Erwin.
« Oui, monsieur. C'est Chenoa, l'une des mes codétenues. » Répondit aussitôt le semi-humain.
« Tout à fait. » Approuva le haut gradé. « Il se trouve que demoiselle euh... Chenoa, ou numéro six-cent-vingt-six comme nous l'appelons, ne s'est pas présentée au réfectoire ce midi. Nous pensons qu'elle - ainsi que plusieurs autres prisonniers dans le même cas - se sont évadés dans la matinée. »
Si Sekhemkarê fit mine de ne rien laisser paraître, il sursauta intérieurement.
« Elle l'a vraiment fait ! J'avais dit à cette idiote d'attendre le bon moment ! »
La veille, la condorienne au plumage rouge lui avait fièrement annoncé vouloir quitter les lieux. C'était une optimiste de nature, qui s'était discrètement rapproché de deux autres prisonniers dans le but de monter un plan d'échappatoire. N'étant pas dans ses intérêts de partir maintenant, le lupulellien avait refusé poliment son invitation, mais avait quand même été informé de quelques détails du plan alors qu'il s'en serait bien passé.
« Maintenant, ils vont me demander ce que je sais. Fais chier. »
« Avais-tu des contactes avec elle ? » Demanda doucement le directeur, intrigué.
« Non monsieur, pas vraiment. On discutait de temps en temps le soir, mais c'est tout. On est même pas affecté au même secteur de forage. »
« Est ce que je dois être honnête ? Avec ma capacité innée, ce serait un jeu d'enfant de m'évader même si ils me condamnent à mort pour mensonges, mais ça ruinerait nos plans ici. D'un autre côté, si je suis honnête, je jetterai cette idiote sous le bus et elle y passera surement. Et merde... »
« Vous n'étiez vraiment pas proches ? » S'étonna Erwin. « Mais tu ne lui donnais pas tes desserts, au réfectoire ? »
Le parjurien dévisagea son geôlier avec stupeur.
Comme Chenoa se faisait régulièrement arnaquer par des prisonniers plus malins la prenant en pitié pour qu'elle leur offre son repas, elle se retrouvait fréquemment à devoir jeûner. Aussi, il était arrivé à plusieurs reprises que Sekhemkarê lui refile son dessert avec une pointe d'agacement, ne pouvant décemment pas la laisser mourir de faim quand bien même elle était trop naïve et altruiste à ses yeux.
Cependant...
« Impossible ! Il n'y avait pas de gardes autour de nous quand ça arrivait ! Comment peut-il savoir ça ? »
« En tout cas, c'est ce que les caméras de surveillance ont enregistré. » Continua Keiner en clignant des yeux.
« Des... quoi ?! » Ne put retenir le lupulellien, abasourdi.
« Des caméras. » Ronronna le directeur en se frottant les mains. « C'est une technologie venue d'ailleurs, fournie par nos bienfaiteurs Messagers du Crépuscule, et qui nous permet de voir à distance ce qu'il se passe dans toute la prison. »
« Je le sais bien ! »
La réaction de Sekhemkarê n'était pas dû à l'ignorance, mais à la surprise. Il n'avait pas imaginé qu'une telle technologie puisse avoir été installée dans un étage où l'informatique n'existait même pas.
« Cet enfoiré... » Grogna intérieurement le semi-humain chacal. « Il y en a forcément dans les cellules également ! Alors il sait pertinemment que Chenoa m'a informé de ses plans d'évasion ! Cet interrogatoire n'a qu'une seule issue depuis le début. »
Un sourire satisfait ornait à présent le visage joyeux du directeur de la prison.
« Numéro sept-cent-treize, Chenoa t'a-t-elle informé qu'elle comptait s'évader ? » Demanda-t-il en sirotant tranquillement une gorgée de thé.
« Oui. » Répondit aussitôt le parjurien, ayant retrouvé un peu de sang-froid.
« Désolé, Chenoa, mais il sait déjà tout. Il veut simplement me tester. Si je lui mens, il le saura. »
« Et bien ! » Fit Erwin en écarquillant les yeux, l'air surpris. « Pour deux personnes pas particulièrement proches, vous avez l'air d'avoir partagé de belles confidences ! Dire que tu n'es là que depuis trois jours... il faut croire que cet établissement est fait pour renforcer les liens ! Cela dit, il est aussi vrai que numéro six-cent-vingt-six a toujours été douée pour établir des relation de part sa nature extravertie. »
L'homme reposa doucement sa tasse de thé, puis ferma les yeux un instant. Lorsqu'il les rouvrit, l'éclat de son regard avait totalement changé. Il n'y avait plus aucune trace de douceur dans ces iris d'un bleu cristallin, uniquement une froideur semblable à celle de la banquise du 16e étage.
« Bien... par où numéro six-cent-vingt-six avait-elle prévue de s'évader ? » Demanda-t-il sèchement.
Sekhemkarê lui rendit un regard haineux.
« Elle a creusé un trou au fond de la cour numéro quatre, à l'intérieur d'un local à balais se trouvant juste à côté de la muraille ouest. » Répliqua-t-il en adoptant un ton tout aussi cassant, les oreilles rabattues sur le crâne.
« Oh ! » Sourit Keiner, reprenant son air empoté l'espace d'un instant. « Je ne pensais pas que tu la balancerais aussi vite ! Décidément, tu es surprenant ! »
Bouillant de rage, poings et dents serrés, le lupulellien se garda au prix d'un self-contrôle incroyable de lui exprimer sa façon de penser.
Mais soudain, il sursauta.
« Il ne donne pas l'ordre de l'intercepter ? »
« Oh ! » Fit Erwin en remarquant son visage perplexe. « Ne t'en fais pas pour ça. »
Il semblait avoir compris sa question silencieuse.
« Numéro six-cent-vingt-six a été arrêtée avec ses camarades il y a deux heures en pleine tentative d'évasion. Je ne te l'avais pas dit ? »
Un sifflement sourd retentit aux oreilles de l'homme-chacal, comme si une explosion avait eu lieu à proximité. Son cerveau peinait à enregistrer ce qu'il venait d'entendre.
Au comble du ravissement, Erwin se leva pour venir poser une main sur l'épaule du prisonnier.
« Comme nous manquons de budget pour entretenir notre chenil, nous avons pris soin de les servir en pâtée pour chien. »
Avec horreur, Sekhemkarêt tourna brusquement la tête vers les deux molosses se trouvant au fond de la pièce. Il remarqua effectivement - au milieu de la masse informe de chaire en bouillie que dévorait avidement les deux chiens - une petite plume rouge, souillée et flétrie.
Rouge, comme le plumage de...
« Toi...! » Songea le parjurien en se tournant vers Keiner. « E-Espèce de...! »
« Je te remercie chaleureusement d'avoir bien engraissé le repas de nos petits toutous. Tu ne peux pas savoir comme ils sont heureux d'enfin avoir un peu de viande à manger. »
Le poil hérissé, le corps tremblant, l'envoyé d'Hachibunke croisa le regard du directeur.
La délectation et le plaisir qu'il y décela lui rappela celle qu'il avait pu observer dans les yeux de monstres appartenant à l'espèce démoniaque.
La gorge comprimé par une sensation terriblement désagréable, Sekhemkarê ne parvint pas à trouver les mots qui exprimaient ce qu'il ressentait.
« Soldats ! » Lança Erwin, un sourire distordue remontant presque jusqu'à ses oreilles gravé sur le visage. « Nous en avons terminés ici ! Veuillez ramener numéro sept-cent-treize dans sa cellule ! »
Alors que les pacificateurs pénétraient dans la pièce, Keiner agrippa soudainement le lupulellien par les oreilles, collant presque son visage contre le sien.
« Je n'aime pas les mensonges, sept-cent-treize. Garde ça à l'esprit. » Lança froidement le directeur avant de le lâcher, le laissant tomber par terre.
Les soldats blancs s'empressèrent de ramasser de force Sekhemkarê et de reconduire celui-ci là où il dormait depuis maintenant trois jours.
Dès qu'ils eurent refermés la grille après l'avoir jeté au sol et qu'ils eurent quitté les lieux, l'homme chacal se releva en silence.
Puis soudain...
...il donna un grand coup dans le mur, fissurant ce dernier.
Écumant de rage, il se mit à haleter en tentant comme il le pouvait de réfréner ses émotions.
« Erwin Keiner... espèce de taré, je te ferai amèrement regretter cette humiliation ! »
Le cri de rage qu'il poussa par la suite se répercuta sur les murs de la prison.
Sky Keep ARC 2 - Chapitre 11, partie 2 : FIN
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