Chapitre 9

La lune est maintenant haute dans le ciel. Jeonghan et Seungcheol sont perchés sur un arbre, en hauteur pour ne pas être vus. Le chef a réussi à attraper un poisson qu'ils ont tous les deux partagé autour d'un feu réchauffant.

La température a baissé très rapidement, eux qui avaient chaud, se sont retrouvés gelés. Leurs vêtements leur collent à la peau et les fait grelotter.

— Tiens, accroche toi à l'arbre avec cette corde, ça te permettra de ne pas tomber quand tu dormiras.

Jeonghan regarde la main de Seungcheol lui tendre l'objet.

— Et toi ? Tu en as autant besoin que moi. Comment tu vas t'attacher ?

— Il n'y a pas d'autres solutions, à part si tu veux te retrouver à dormir collé contre mon torse.

Le blond hausse les sourcils et le chef regrette déjà ses paroles en le voyant descendre lentement de sa branche qui était plus en hauteur que la sienne.

Jeonghan à toujours été très entreprenant, faire du rentre-dedans à quelqu'un ne lui a jamais posé de problèmes. Au contraire, il adore ça parce qu'il prend le contrôle, l'autre est déstabilisé et il a donc le champ libre pour faire ce qu'il veut. Il a toujours été très excentrique sur ce coup. Alors, il n'a pas hésité à accepter la proposition que Seungcheol lui a fait, non seulement ça leur permet de pouvoir tous les deux se reposer et prendre des forces, puis Jeonghan ne dira jamais non pour sentir le souffle chaud du noiraud dans son cou.

Pendant ces quelques années où ils étaient séparés, Jeonghan s'est mis en couple avec différentes personnes plusieurs fois, il a pris du bon temps ; mais personne ne s'occupait de lui comme Seungcheol le faisait. Il ne se ment pas à lui-même, voir son ex en chair et en os devant lui, à fait renaître des sensations, du désir et aussi beaucoup de nostalgie.

Il n'est plus amoureux, la flamme est éteinte. Mais il suffit d'une étincelle pour relancer le feu, et les deux en sont parfaitement conscients. Ils ont pris leurs distances et ont fait comme s'ils ne se connaissaient pas devant les autres, mais seuls, ils n'ont pas besoin de se cacher.

Jeonghan s'accroche au tronc pour ne pas tomber. Il a envie de s'amuser un peu, alors il fait mine de lâcher prise, et il se met à jubiler en voyant Seungcheol, les yeux écartés et les mains sur ses hanches pour le retenir. Le noiraud comprend la supercherie du blond et se replace correctement, vexé.

— C'est une mauvaise idée et tu le sais très bien, de toute façon, je ne comprends pas pourquoi tu as accepté de prendre part à cette mission en sachant pertinemment que j'étais sur le coup.

Il se lève et commence à grimper plus haut jusqu'à ne plus être dans le champ de vision de Jeonghan. Celui-ci soupire, mais fini par s'asseoir, la corde dans les mains.

Lui-même ne sait pas pourquoi il a décidé d'accepter.

Il aurait pu prendre part à une autre mission, ça n'aurait pas changé grand chose. Mais pourtant, dès qu'il a entendu le nom de Seungcheol, il n'a pas hésité une seule seconde.

Est-ce qu'il voulait prouver quelque chose ? Où est-ce peut-être instinctif ?

Pourtant, lorsqu'ils n'étaient plus en contact, même si ça lui arrivait d'y repenser, il ne se sentait pas en manque. Le revoir à débloqué quelque chose, et Jeonghan regrette maintenant amèrement son choix.

Non seulement, il se fait du mal, mais il en fait aussi à Seungcheol, parce qu'il ne doute pas un seul instant que le plus vieux soit dans le même état que lui.

C'est comme revoir une personne avec qui vous étiez très proches étant adolescent, mais que vous avez oubliés au fil du temps. C'est un choc, tous les moments passés ensemble remontent, les disputes, les rires, les soirées pyjama, les journées à la plage, les jeux débiles et problématiques dont tout le monde raffole, les cadeaux, les anniversaires, les pleurs et l'amitié indestructible qui avait été construite.

On se souvient de tout et la seule envie qu'on a, c'est de recommencer. De revenir en arrière, à cette époque où l'on était heureux, insouciants, nous n'avions pas de problèmes, on s'amusait comme des enfants.

En repensant à tout ça, les larmes montent aux yeux de Jeonghan. La situation dans laquelle il se trouve ne l'aide pas vraiment à contenir ses émotions. Seungcheol a déjà eu son moment de tristesse, c'est maintenant au blond de l'avoir.

Le cœur lourd, la fatigue prend possession du cœur du plus jeune et après quelques minutes de mal-être, il s'endort finalement, ne se doutant pas que Seungcheol l'observe d'en haut, peiné et rempli de sensations qu'il avait perdues.






***






Quelques heures plus tôt :

— C'est encore loin ?

— Mingyu arrête de te plaindre, on est presque arrivé alors ne lâche pas le rythme.

Le géant grogne, mais se remet à marcher vite en rejoignant Chan qui est silencieux, suivant tranquillement les deux plus vieux de la bande.

Mingyu l'observe quelques instants, se demandant comment il peut être aussi calme. Il a l'air serein, comme s'il se baladait simplement dans un parc près de chez lui, au milieu des rivières, de la végétation et des animaux.

Chan tourne lentement sa tête, se sentant épier. Il fait un petit sourire à son interlocuteur avant de se re concentrer sur la route.

Devant eux se trouve une grande clairière avec des plantes faisant plus de deux mètres. Mingyu bouge sa tête en comprenant qu'ils vont devoir obligatoirement traverser s'ils veulent rejoindre Junhui et Dokyeom.

Mais ne pas voir ce qu'il se trouve autour de lui ne le rassure pas vraiment.

— Je suis sûr qu'il y a plein de bestioles qui n'attendent que de me voir arriver pour m'assaillir.

— Ferme ta bouche et avance le grincheux, ce ne sont que des insectes, ça ne te bouffera pas, t'as rien à craindre.

Mingyu ouvre la bouche en faisant l'offusqué. Jihoon a beau ne plus être dans leur régiment depuis bien longtemps, c'est toujours un plaisir de partir en mission avec lui.

Il est déterminé, à la tête sur les épaules, ne panique que très rarement, et même s'il n'est pas très sympathique avec les jeunes et qu'il fait peur ; tout le monde le respecte et l'aime.

— Pourquoi Chan il a pas le droit à tes crises aussi ? C'est toujours moi qui prends, s'exclame Mingyu en grognant de mécontentement.

Le rosé ne prend pas la peine de répondre et commence à s'aventurer dans les hautes herbes suivi des deux plus silencieux de la bande.

Avec sa machette, le géant coupe les feuilles qui l'empêchent d'avancer et son regard est dirigé vers le sol, il grogne, toujours mécontent du comportement du biologiste. Il ne lui en veut pas, il ne le comprends tout simplement pas.

Mingyu n'est pas le seul de l'armée à supporter la mauvaise humeur et les paroles crues de Jihoon, mais il a l'impression que le coloré fait énormément de favoritisme. Même s'il est habitué, il aimerait recevoir des compliments et des sourires au lieu des surnoms descendants et des regards de haine.

Il est d'autant plus déçu puisque Wonwoo ne semble pas se préoccuper de son sort, comme s'il était d'accord avec Jihoon sur le fait qu'il soit la personne qui gêne et qui empêche les autres de faire leur travail.

Après un dernier soupir, il relève la tête et ouvre la bouche pour la refermer une seconde plus tard. Il regarde à droite, à gauche, il s'avance de quelques pas et se met même sur la pointe des pieds.

Il se met à crier le prénom de chacun de ses compagnons, mais aucune réponse.

— J'y crois pas...

Comment a-t-il pu les perdre ?

Ils ne sont plus là. Ils ne peuvent pas s'être cachés, ce n'est pas le genre de blagues que ferait Jihoon ou encore Wonwoo. Là, il les a vraiment perdus de vue.

En plus, cette clairière est infinie, à part les hautes herbes, il ne voit rien. Il pousse un léger cri de rage avant de commencer à courir lentement.

Il s'arrête au bout d'un moment et pose ses mains sur ses genoux pour reprendre son souffle. Si au début, il était calme, il commence un peu à paniquer. S'il ne les retrouve pas, il devra se débrouiller par lui-même, et sans rien à part une machette, il n'est pas sûr de s'en sortir. Surtout qu'il est complètement perdu, depuis le début, il est dans le déni complet et se contente de suivre les autres.

Il allait se remettre en route quand un bruit se fait entendre derrière lui, il se retourne en une fraction de secondes et frappe dans le vide avec sa machette. Celle-ci se plante dans une grande tige et un cri sourd se fait entendre.

Mingyu lâche son arme sous le coup de la surprise et marche en reculons en voyant que ce qu'il prenait pour une longue tige n'est autre qu'une patte d'araignée géante.

Le co-pilote lève les yeux pour tomber sur quatre paires d'œils qui le regardent fixement, noirs et terrifiants. La bouche de la bête s'ouvre pour faire apparaître de petits crocs, et Mingyu sursaute lorsque l'une des pattes se pose juste à côté de lui.

Il maudit Jihoon et rebrousse chemin en courant. Mais l'araignée ne semble pas d'accord avec ça et le poursuit. Malheureusement pour Mingyu, la bête est beaucoup plus rapide en plus d'être très imposante, elle le rattrape facilement et il finit par trébucher dans sa précipitation.

Puis sans qu'il ne comprenne rien, il commence à s'élever dans les airs, l'araignée à réussi à l'attraper et le remonte grâce à un fil qu'elle a créé. Il se retrouve emprisonné dans une toile et roulé lentement comme s'il était une mouche.

Il comprend rapidement ce qu'il va se passer s'il ne fait rien en voyant la bouche de l'araignée s'ouvrir en grand, assez pour gentiment l'accueillir.

Il essaye de se débattre le plus possible, mais rien à faire, il est coincé. Épuisé, Mingyu arrête tout mouvement et abandonne.

De toute façon, plein de gens sont morts, un de plus ou un de moins, qu'est-ce que ça peut bien changer ?

Ils sont tous condamnés.

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