15 Décembre
18h41

Lorsque j'ai poussé la porte du café, la première chose que j'ai vu était le sourire de Hoseok. Je l'enviais. Je voulais moi aussi sourire comme lui. Je voulais moi aussi partir à la recherche du meilleur afin de rétablir mon monde sur pieds. Mais même cette envie commençait à disparaître. Ou peut-être l'oubliais-je tout simplement ?

Ma vision était toujours un peu floue, je peinais à garder les yeux ouverts, aveuglé par les lumières du café. Ma tête tournait, ma gorge me brûlait et mes mains tremblaient.

_ Jimin, ça va ? Demanda mon collègue de travail alors que je m'approchais du comptoir, les yeux à moitié fermés.

Qu'est-ce que j'étais venu foutre ici dans cet état ? Pourquoi je n'étais pas juste rentré chez moi ?

_ Jimin ?

Mon regard se mit à parcourir autour de moi, comme si je ne connaissais pas les lieux. Même des heures après avoir fait ce que Jungkook me demandait, je sentais que je n'étais pas encore moi même.

_ Le plafond Hoseok, il respire toujours, laissai-je échapper alors que je levais la tête.

_ Jimin, tu es sûr que tu es dans ton état normal ?

J'ai baissé la tête pour le regarder et j'ai laissé échapper un rire. Mes yeux ont alors dévié vers le mur et j'ai commencé à le fixer, fasciné par toutes ces particules qui fusionnaient parfaitement bien ensemble. Tout était d'une harmonie saisissante, peut-être étais-je l'intrus de ce monde ?

_ Viens, dit Hoseok en me tirant par le bras vers l'arrière du comptoir.

Il me fit asseoir sur un tabouret et me tendit un verre d'eau que je pris la main tremblante. Ma gorge me brûlait tellement, j'étais persuadé à ce moment là qu'elle était en feu. Mais je n'ai rien dit, Hoseok risquait de me trouver fou, non ? Et puis il me restait un peu de raison, au fil des heures tout redevenait clair dans ma tête. Jungkook m'avait dit un peu plus tôt que j'avais eu un "mauvais trip" mais que si je sortais un peu, j'allais aller mieux.

_ Jimin, résonna la voix de Hoseok, je ne pense pas que tu sois en état de travailler ce soir.

_ Tout va bien, répondis-je en passant mes mains sur mon visage.

_ Tu veux que j'appelle un taxi pour que tu rentres ? Demanda mon collègue en posant sa main sur mon épaule.

_ Ne t'inquiète pas.

Il essaya de me dissuader de travailler mais la voix de Jin le stoppa, lui criant d'aller s'occuper des clients. Le regard désolé, il m'a dit qu'il allait revenir et que je n'avais pas intérêt à travailler dans cet état. Une fois que Hoseok partit, j'ai descendu le regard vers mon téléphone dans mes mains. Sans trop savoir pourquoi, mes doigts se mirent à composer un numéro que je connaissais par coeur. Toutefois après de nombreuses sonneries, personne ne décrocha l'appel. Mon cœur se serra dans ma poitrine, tout commençait à perdre des couleurs.

Pourquoi il ne répondait pas ? Je ressentais le besoin de lui parler. J'avais un mauvais pressentiment, mon cœur me faisait atrocement mal. Pourquoi ? Mais pourquoi Jungkook ne répondait pas ? Qu'est-ce qu'il faisait ? Je pensais qu'il ferait tout ce que je lui demanderai. Je voulais pourtant juste lui parler, afin qu'il me libère de ce poids. Alors pourquoi je ne l'ai pas eu au téléphone à ce moment ?

Ça craint. Je crois que je venais de me rendre compte que j'étais devenu complètement dépendant à Jungkook.

J'ai alors essayé d'appeler Yoongi. Lui non plus n'a pas répondu. Ma lumière m'avait définitivement quitté. On ne s'était plus appelé depuis qu'il était parti. Mais au fond de moi, j'espérais que cette fois-ci il réponde. Je pensais que si j'avais pas droit à la main de Jungkook, peut-être que la lumière de Yoongi me serait accordé. Mais non, ça aussi j'en avais pas le droit.

Je me sentais mal.

Nerveux, ma main tremblante passait dans mes cheveux, je ne savais pas ce que j'avais à ce moment à là mais je me sentais pas bien. Mon cœur battait vite. Trop vite.

Quelque fois, je me mettais à penser à ma vie. Je me souvenais un peu de mon sourire, de quelle allure il avait. Mais c'était pendant un court instant. Quelques secondes après j'étais plus capable de m'en souvenir.

Comment ?

Comment on faisait déjà pour sourire ?

Ensuite c'était le visage de Yoongi qui me revenait en tête. Mais encore une fois, il disparaissait quelques secondes plus tard. Je voulais pas l'oublier alors j'ai ressayé de l'appeler. Il a pas répondu.

Je me sentais vraiment pas bien.

J'ai alors repensé à Jungkook, j'essayais d'ancrer son image dans ma tête. Je ne voulais pas l'oublier à son tour.

Au même moment, la cloche au dessus de la porte retentit et j'ai relevé la tête vers cette dernière. Mon regard rencontra des yeux perçants. Le procureur Kim Namjoon était là.

_ Jimin, résonna soudainement une voix à côté de moi.

Mon patron, Seokjin, se tenait près de la caisse, une tasse sur son plateau. À en croire la légère fumée qui s'échappait de cette dernière, un liquide chaud y était versé.

_ Il neige dehors, tu as l'air frigorifié, dit-il en me tendant la tasse.

La main tremblante, j'ai attrapé le chocolat chaud qu'il me tendait, inclinant légèrement la tête pour le remercier. Mais l'odeur du chocolat chaud entra dans mes narines, me donnant des nausées qui me firent grimacer.

_ Tu ne te sens pas bien ? Demanda Jin en posant sa main sur mon épaule. Tu veux que je te conduise à l'hôpital ?

_ Je... je vais bien.

Il ne fallait surtout pas que j'aille à l'hôpital. Je savais très bien que si je me sentais aussi mal c'était à cause des substances que j'avais pris chez Jungkook. Si j'allais à l'hôpital non seulement ils appelleraient maman et en plus de ça je risquais de me faire virer.

_ Jimin je sais que tu as pris de la drogue, dit soudainement le gérant d'une voix un peu plus calme. Et vu comment tu te comportes, ce n'est pas la première fois.

_ Je vais être viré c'est ça ? Peinais-je à lancer alors que je commençais à avoir des vertiges.

_ Ce n'est pas ce que j'ai dit.

Il posa son plateau sur le comptoir et prit place près de moi. Hoseok qui servait un client releva son regard vers nous, les sourcils froncés et le regard passant de moi à Seokjin. Mon regard dévia vers le procureur assis sur une table pas loin, il nous fixait aussi. J'ai commencé à avoir des sueurs froides, passant mes mains dans mes cheveux pour réaliser que je faisais l'erreur de ma vie. Pourquoi étais-je venu ici ? Merde.

_ Ne traîne plus avec Jungkook, commença Jin d'une voix très calme.

J'ai froncé les sourcils, relevant la tête vers le gérant qui arborait une mine très sombre. Même s'il ne souriait pas beaucoup d'habitude, c'était la première fois que je le voyais aussi sérieux, voir même en colère.

_ Je te demande... pardon ? Demandai-je, perdu.

_ Ne fais pas comme si tu ne comprenais pas ce que je te dis Jimin, me reprocha Jin. Je sais très bien que tu traines avec Jungkook ces dernières semaines.

_ Je ne vois pas de qui tu parles, dis-je en serrant les dents, le regard fuyant.

Comment Seokjin connaissait Jungkook et pourquoi il me mettait en garde de lui ? Des questions commençaient déjà à retourner ma tête, je n'étais plus très sûr de vouloir continuer à parler avec le gérant.

_ Ne joue pas à ce jeu avec moi Jimin, dit-il en cherchant à capter mon regard. Jeon Jungkook, le gars avec qui tu traines maintenant, tu vas arrêter de le fréquenter.

_ Ce n'est pas parce que tu es mon patron que tu as le droit de me dicter qui je dois fréquenter ou pas, réussis-je à dire alors qu'une douleur atroce martyrisait ma tête à chaque fois que je sortais un mot.

_ Je dis ça pour ton bien. Tu ne le connais pas.

J'ai passé ma main dans mes cheveux, laissant échapper un soupire d'agacement. J'en avais marre qu'on me dicte toujours ce que je devais faire. Qu'on veuille toujours me dire ce qui est bien ou mal pour moi. Aucune personne dans ce monde n'était fichu de voir ce qui se passait réellement ?

_ Toi, tu le connais peut-être ? Demandai-je d'une voix remplie de mépris.

_ Oui, je le connais. Et mieux que toi.

J'ai laissé échapper un rire, ancrant mon regard dans le sien. Je préférais quand Jin était un gérant calme qui ne nous parlait jamais. Mais qu'est-ce qu'il lui prenait ? C'était incroyablement frustrant de l'entendre parler en ayant la conviction qu'il avait raison.

_ Jungkook, dit-il en voyant que je ne considérais pas ses paroles, est mon demi-frère.

Mon cœur rata un battement, alors que mon rire se calmait, laissant place à l'incompréhension. Demi-frères ? Seokjin et Jungkook ?

_ Donc oui Jimin, je le connais très bien.

J'ai baissé la tête, complètement stupéfait par les dires du gérant. J'essayais de me souvenir de tout ce que je savais sur Jungkook et le choc me paralysait au fur et à mesure que je me rendais compte que je ne connaissais pas grand chose sur lui. Lui semblait tout savoir sur moi, alors que de mon côté c'était un peu le néant. Bien évidemment j'avais pu savoir quelque informations chez lui, notamment qu'il aimait probablement le dessin, qu'il aimait se rendre au pont la nuit, qu'il habitait pas loin du café, qu'il avait une voiture noire, qu'il avait "arrêté" de fumer... Mais en réalité je ne connaissais rien sur sa famille, sur ses amis ou encore sur son passé. Je ne savais absolument rien.

_ À en croire ta tête, tu me crois maintenant.

_ Comment est-ce possible ? Je ne vous ai jamais vu parler ensemble.

_ Jungkook et moi ne sommes pas en bon en terme. Je me demandais bien évidemment pourquoi il venait à mon café deux fois par semaine, dit-il comme s'il détestait avoir affaire à son demi-frère, et j'ai fini par comprendre pourquoi il venait ici...

_ De... de quoi tu parles ?

Seokjin se tut, semblant peser le pour ou le contre.

_ Rien oublie, juste ne traîne plus avec lui, dit-il en se levant.

J'ai attrapé son bras avant qu'il ne parte, décidé à obtenir des réponses. C'était une habitude des deux frères de tout retourner dans mon cerveau ?

_ Pourquoi ?

_ Jimin, je dis ça pour ton bien. Toutes les personnes qui fréquentent Jungkook ne finissent jamais bien.

_ Pourquoi tu parles de ton frère comme s'il était le diable en personne ?

_ Parce qu'il l'est.

_ Tu le connais pas Jin, tu te trompes à son sujet.

Le gérant laissa échapper un rire nerveux, alors qu'il se retournait face à moi, l'air agacé de mon comportement.

_ C'est moi qui ai peur de m'être trompé à ton sujet, dit-il au bord des nerfs, je ne te reconnais plus Jimin.

_ Tu ne me connais pas et encore moins ton frère, dis-je d'une voix plus froide que prévue.

_ En quelle langue je vais devoir t'expliquer que Jungkook est un malade ? Lança-t-il en serrant les dents. C'est un putain de psychopathe Jimin. Tu entends mes paroles ? Un manipulateur.

_ Non, murmurai-je en tournant la tête de droite à gauche, tu te trompes.

Ma réponse eut le dont de l'agacer encore plus, il commença à dire qu'il était pas encore trop tard pour moi et que je devais m'éloigner de Jungkook. Il disait que Jungkook ne ressentait rien, pas la moindre compassion pour moi.

_ Non tu te trompes, Jungkook est le seul qui m'aide, dis-je d'une voix tremblante et presque inaudible. Il est le seul qui pense à moi, répétai-je en refusant d'entendre ses paroles.

_ Tu penses qu'il t'aide mais c'est faux Jimin, Jungkook ne peut aider personne, il n'a absolument aucune empathie.

_ Non, tais toi, murmurai-je en bouchant mes oreilles à l'aide de mes mains tremblantes.

Seokjin a pourtant continué à dire que je ne devais pas le laisser effacer qui j'étais. Que Jungkook ne pensait qu'à lui et qu'il aimait faire sombrer les autres. Moi je lui disais que non, qu'au contraire, Jungkook me protégeait. Seokjin continuait à dire que le Jeon s'en fichait de moi et que tout cela n'était qu'un jeu pour lui. Que je n'étais qu'une expérience parmi tant d'autres. Que je n'étais pas le premier qu'il avait détruit. Il disait je ne devais pas me laisser avoir par ce personnage manipulateur qui n'éprouvait aucun remord à tirer le monde vers le bas.

_ C'est lui qui a détruit notre famille, enchaîna le gérant, le regard plongé dans ses souvenirs douloureux. Quand il est sorti de l'hôpital psychiatrique, tout a très vite dérapé. Les docteurs avaient pourtant dit que son traitement avait marché et qu'il pouvait enfin ressentir comme un être humain normal. Moi, je voulais juste retrouver mon petit frère. Mais ce n'est que lorsque nos parents sont morts dans cet accident de voiture, en allant le chercher à l'hôpital, que j'ai compris qui il était vraiment. Il n'a même pas pleuré, il était juste là, sans être là. Il n'est même pas venu à l'enterrement, j'étais seul. Tout ce qu'il m'a dit était " Cela n'a aucune importance ". Tout était de sa faute et pourtant son regard était toujours le même. Jungkook était et restera toujours le monstre qu'il est. Je voulais et je veux juste qu'il meure.

_ Ce n'est pas de sa faute, dis-je en essayant d'arranger la situation, c'est à cause de la sorcière. C'est elle qui tire les ficelles de ce jeu.

_ Pitié Jimin n'oublies pas qui tu es, ne te laisse pas sombrer toi aussi, dit-il d'une voix presque suppliante. Tu n'as toujours pas compris qui était la sorcière ? Ou peut-être que tu l'as toujours su dès le début mais que tu as décidé d'oublier ce que tu savais. D'oublier qui tu étais.

_ Tais... toi, répétai-je sans arrêt, la voix tremblante.

_ J'aurais dû me douter que t'étais la raison pour laquelle il a subitement commencé à venir au café. Mais moi j'avais confiance en toi. Je savais que tu souffrais, mais de nous tous tu étais la personne plus forte. Je voyais dans tes yeux que malgré tout, Park Jimin était un adolescent fort. Maintenant regardes toi, dans tes yeux je ne vois rien, que du néant. Peut-être est-ce de la peur parce que tu commences à te rendre compte que tu t'es oublié ?

_ Tais toi.

_ Tu crois peut-être que Jungkook te sauve, mais tu te trompes. Il est comme ça, il prend un malin plaisir à tirer les autres vers le bas. Il n'aime pas être seul en enfer. Il te fait oublier tout tes souvenirs et une fois que tu t'en rends compte il est déjà trop tard. Jungkook est un monstre. Il ne ressent rien pour toi.

_ Tu te trompes, Jungkook est différent de la personne que tu me décris. Il est probablement la personne la plus rassurante que j'ai croisé de toute ma vie. Le seul qui pense à moi et qui n'observe pas grave que je sois comme je suis. Le seul qui me dit que ce n'est pas grave d'être un lâche ou une pauvre victime qui a décidé d'oublier ses souffrances.

_ Tout ce qu'il fait c'est de te manipuler pour te descendre encore plus bas que terre. Et je crains qu'il ait encore une fois réussi, et qu'il soit déjà trop tard pour toi.

_ Comme si j'avais une chance d'être sauvé, laissai-je échapper en passant ma main tremblante dans mes cheveux.

_ Oui, tu avais cette chance. Hoseok et moi étions toujours derrière toi. Tu ne le voyais pas mais en faisait en sorte que tu sourisses toujours le temps que tu passais ici. On espérait qu'un jour tu nous en parles. On aurait aimé t'aider. On voulait vraiment te sortir de là.

_ Alors pourquoi ? Demandai-je en luttant pour ne pas éclater en sanglots. Pourquoi vous ne m'avez pas appris à transformer ma douleur en autre chose ? Pourquoi vous ne m'avez pas appris à mettre un terme à toutes ces petites choses qui me faisaient atrocement mal ? Vous avez une drôle de façon de vouloir aider quelqu'un. Jungkook lui, m'a prouvé qu'il était là pour moi. Alors tais toi Seokjin, tu ne sais pas ce que tu dis.

_ Me taire ? Alors que j'ai perdu mes parents à cause de lui ? Il a détruit notre famille, tu n'as aucune idée de comment j'ai souffert à cause de lui.

Je ne voulais plus l'entendre. Mon cœur battait fort. Trop fort. Il menaçait de sortir de ma cage thoracique tant les paroles de Seokjin m'anéantissaient. Jungkook n'était pas un monstre. Il était celui qui me tendait toujours la main quand ça n'allait pas. Celui qui était toujours présent quand le monde entier me tournait le dos. Celui qui me rassurait et m'illuminait quand mon monde sombrer dans le noir.

Alors Seokjin, comment j'aurais pu comprendre tes paroles aussi ?

_ J'espère qu'il mourra, finit par dire Seokjin. Ce n'est pas un jeu Jimin, c'est la réalité. Et au cas où tu ne le saurais pas, des gens souffrent vraiment de ça.

J'ai craqué. Son regard rencontra le mien, alors que le silence complet commençait à régner dès que j'avais lancé la tasse qui s'était brisé au sol sous un bruit fort et fracassant.

_ Tu n'as pas le droit de me dire ça Seokjin, murmurai-je en baissant la tête. Tu n'as pas le droit de me dire que je n'ai aucune idée que les gens souffrent dans ce monde. Ton bien est le mal de quelqu'un. Ton mal est le bien d'un autre. Tout le monde souffre. Les raisons pour lesquelles nous souffrons ne sont pas obligés d'être graves. Ou elles doivent te paraître plus tragiques, dramatiques et spécifiques ? Oui tu as perdu ta famille, et tu es triste. Toi tu as tes raisons pour souffrir à cause de ça. Mais tu ne souffres pas plus que personne dans cette salle. Et encore moins dans ce monde. Alors ne me dit pas que je n'ai aucune idée de la souffrance dans ce monde.

Je me suis tu un instant, le coeur serré, puis j'ai repris.

_ Tu penses que tu es le seul à avoir souffert ici ? Tu m'as dit que tu voulais m'aider, je t'ai demandé pourquoi tu ne l'as pas fait. Tu m'as dit que le seul à m'aider me détruisait, mais tu ne vois pas que c'est le seul qui me tend la main ? Comment je suis censé comprendre tes paroles alors ? Je me suis accroché pour qu'on me donne des réponses, j'aurais moi aussi voulu qu'on m'apprenne à aller mieux de la bonne façon. Je me suis tant résolu à m'accrocher à mes souvenirs, mais jamais je n'ai eu des réponses. C'est facile de dire qu'on aurait pu m'aider et que Jungkook me détruit, mais en réalité c'est dur. C'est dur d'être celui qui m'aide et pourtant lui il essaie, et je me fous de la façon dont il le fait. Ça n'a pas d'importance qu'il s'y prenne de la mauvaise manière.

_ Jimin, essaya-t'il en attrapant ma main qui tremblait.

_ Mais moi je ne sais rien de tout ça, l'arrêtai-je en retirant ma main de son emprise. J'ai longtemps souffert et agonisé parce que j'étais Jimin. Alors comment suis-je censé vous comprendre quand vous me dites que j'oublie que j'étais avant tout Jimin ? Arrêtes de croire que tu souffres plus que toutes les personnes ici. Tu ne sais rien de moi et tu ne souffres pas plus que moi. Tout le monde souffre, personne ne souffre plus que quiconque. Mais même en arrivant à cette conclusion, ce n'est pas toujours sûr de trouver quelqu'un qui nous comprend réellement. Alors tu n'as pas le droit de me dire que j'ai aucune idée de la souffrance dans ce monde, sous prétexte que Jungkook a détruit votre famille. Tu n'as pas le droit de me dire ça Seokjin.

J'ai tourné les talons et je suis sorti du café sous les regards choqués de tous les clients. Une douleur me fit grimacer alors que je baissais la tête pour voir qu'un morceau de porcelaine s'était réfugié dans ma peau à cause des éclats.

_ Tu es blessé ? Résonna une voix à ma droite.

Le procureur qui m'avait suivi en sortant du café sortit un pansement de la poche de son manteau et me le tendit.

_ Qu'est-ce que vous me voulez ? Dis-je en l'ignorant et en continuant d'avancer.

Ma tête tournait tant j'avais parlé. Je voulais juste rentrer et ne plus penser à ce qui s'était passé. Je voulais juste ne plus ressentir ce pincement au coeur et tout oublier.

_ Je voulais te parler Jimin.

_ Pas maintenant, je suis fatigué.

Il m'arrêta en saisissant mon bras, me faisant grimacer à cause de la petite blessure dessus.

_ Suis moi, dit-il en désignant d'un coup de tête une voiture garée dans le mini parking.

J'ai soupiré puisqu'il n'avait pas l'air de vouloir abandonner sans m'avoir parlé. Bon sang mais que me voulait-il ? Frustré, je l'ai suivi en silence jusqu'à sa voiture et une fois à l'intérieur, il alluma le chauffage. Après ça, un silence s'installa, moi fixant les flocons de neiges tombants et lui tapant légèrement son doigt contre le volant, le regard dirigé vers le café.

_ De quoi discutiez vous avec le gérant du café ? Demanda-t-il en brisant le silence. Ça semblait très tendu.

_ Les disputes avec son patron, ça arrive souvent non ? Demandai-je sans le regarder alors que je sentais son regard perçant sur moi.

_ Pas souvent non, en tout cas pas de cette manière.

_ Pourquoi vous vouliez me parler ? Ai-je fini par dire en soupirant, me tournant vers lui.

Il me fixa pendant de longues secondes, alors que je peinais à ignorer les violents maux qui me martyrisaient. Son regard descendit vers mes mains tremblantes que j'ai par la suite caché en dessous de mon fin manteau qui me protégeait à peine du froid. Je n'étais pas en état de réfléchir correctement, j'espérais juste qu'il me laisse partir le plus vite possible.

_ Tu as dit que t'allait m'aider à résoudre le mystère derrière tout ça, non ?

_ Oui.

_ Pourquoi tu ne m'as pas dit alors que tu avais une relation plus qu'amicale avec Kim Taehyung ?

Mon cœur rata un battement.

_ Je l'ai découvert le jour où je t'ai interrogé. Je pensais que tu allais me le dire, mais tu as fait semblant de ne pas être un proche de Kim Taehyung. J'ai par la suite cru que tu allais m'appeler, mais tu ne l'as jamais fait. Pourquoi Jimin ? Pourquoi avoir caché ça à la police ?

_ Regardez moi dans les yeux, répondis-je réellement épuisé de tout ça, j'ai l'air d'être en état de parler de mon ex qui a péri dans des flammes ?

_ Alors laisse moi te poser une autre question. Le soir qui a précédé la mort de Kim Taehyung, que faisait-il dans ce café ?

Me rappelant que le procureur était là ce soir là, j'ai dégluti. Son regard descendit vers ma gorge et il esquissa un léger sourire en coin presque imperceptible.

_ Si tu ne souhaites pas répondre à celle là, alors laisse moi t'en poser une autre Jimin. Le matin ou je t'ai parlé dans ton lycée, pourquoi les contours de tes ongles étaient rouges ?

J'ai froncé les sourcils. Il avait fait attention à ça ? Je ne m'en doutais même pas. Merde. Ça sentait vraiment pas bon tout ça. Et puis ma tête me faisait déjà assez mal comme ça, je ne voulais nullement parler des événements passés.

_ Le jour de la disparition de Lee Jae-eon, tu as eu une légère altercation entre le fils et la mère. Puis tu as eu un accident dans les escaliers, et Lee Jae-eon a tout simplement disparu ce même jour. Le soir qui a précédé la mort de Kim Taehyung, tu as discuté avec lui alors que vous étiez séparés depuis pas mal de temps et que les relevés téléphoniques ont montré que vous n'étiez plus en contact. Puis le matin de sa mort, tes doigts étaient ensanglantés et Kim Taehyung a été retrouvé mort.

Je n'ai rien dit. De toute façon je n'avais rien à ajouter, je lui avais déjà dit tout ce qu'il devait savoir.

_ Tu sais maintenant pourquoi c'est à toi que j'ai demandé de l'aide, dit-il en regardant droit devant lui.

_ Votre instinct.

_ Tu ne trouves pas toi non plus que tu ressembles au fil conducteur de ses deux affaires ? Demanda-t-il en tournant la tête vers moi.

Je n'ai pas répondu. De toute façon que pouvais-je dire ? Oui, je suis le coupable ? Ou Non ? Sachant qu'il avait déjà des preuves. Certes pas solides pour me coincer, mais assez pour réveiller son instinct infaillible de procureur.

J'étais crevé à ça moment là, j'étais fatigué de tout ça.

Kim Namjoon a esquissé un sourire, avant de tourner à nouveau la tête vers le volant. J'ai ouvert la portière et avant que je ne sorte, sa voix résonna à nouveau.

_ Nous avons retrouvé une caméra presque entièrement calcinée chez Kim Taehyung, l'équipe scientifique est entrain de l'examiner. D'ici là nous saurons ce qu'elle contient et nous trouverons sûrement un témoin. Je vais coincer le responsable Jimin, je te le jure.

_ Au revoir procureur Kim Namjoon, dis-je en claquant la portière.

Puis je me suis éloigné de sa voiture. Je marchais, je marchais, je marchais sans trop savoir où aller. Je voulais juste fuir et oublier tout ce qui se passait. Ma tête tournait, je n'étais même plus sûr de tenir encore. Le froid glaçait mes mains et mes pieds, ma plaie me piquait et mon coeur se comprimait dans ma poitrine. J'étais frigorifié. Je suffoquais. Mes entrailles se tordaient dans tous les sens, je voulais vomir. Tout allait vite. Beaucoup trop vite. Je n'étais pas capable de supporter tout ça.

Sans m'en rendre compte je suis arrivé au pont. Je me stoppai quand je vis une silhouette, près de la rambarde. C'était lui, je le reconnaissais. Comme s'il avait senti ma présence, il se tourna vers moi et ouvrit ses bras. Encore une fois il était le seul qui me tendait la main. Lui, lui et toujours lui. J'ai marché encore un peu et je me suis juste réfugié dans ses bras chauds et réconfortants. Jungkook a passé sa main dans mes cheveux, les caressant tendrement.

_ Il... y'avait... une caméra... chez Taehyung, essayai-je d'une voix tremblante.

_ Ne t'inquiète pas, je doute qu'elle contienne une pellicule, dit-il comme s'il savait déjà que les policiers n'y trouveraient rien.

_ Un... témoin... il y'avait aussi... un témoin.

_ Qui ça ?

_ Mon ami... Min Yoongi.... m'a vu... sortir... de chez... Taehyung... le soir... de sa mort.

_ Tu es frigorifié, dit-il soudainement.

Jungkook retira difficilement son manteau et le reposa sur mes épaules. Je voulais lui dire que sa chaleur me suffisait mais j'arrivais plus à parler. J'étais tout simplement épuisé. C'était même fantastique que je puisse parler un tout petit peu.

_ Tu risque de tomber malade si tu restes ici, allons-y.

Sa voiture n'étant pas garé très loin, nous nous sommes retrouvés à l'intérieur et il a attaché nos ceintures. Alors que je peinais à garder les yeux ouverts, je le vis tourné doucement la tête vers moi.

_ Ne t'inquiète pas Jimin, tout va bien se passer. Je vais tout arranger, murmura-t-il en posant finalement ses lèvres sur le haut de ma tête.

J'ai souri suite à ses paroles, posant ma tête sur la vitre. Il allait tout arranger parce qu'il était le seul qui se souciait réellement de moi et qui voulait que j'aille mieux. Le seul qui faisait tout pour me protéger et qui me réconfortait à chaque fois. Seokjin avait tort, il ne le connaissait pas. Jeon Jungkook n'était pas un monstre, il était tout simplement celui qui me tendait toujours sa main. La personne que j'avais tant attendu et qui allait m'aider à aller mieux.

23 jours après la mort de Jae-eon, 3 jours après la mort de Taehyung, Jeon Jungkook était décidément celui qui remettait en place l'équilibre de mon monde écroulé.

*•*