Chapitre 3 : Mon humble demeure


J'avais décidemment un bon karma de merde. Sérieusement, c'était quoi le délire avec ces hommes ? Ca leur plaisait donc tellement d'enfermer des femmes dans des prisons parce que leur égo en a un peu pris un coup ? La suite des aventures risquait fortement de ne pas me plaire si c'était le cas. Parce que je comptais bien faire regretter à chacun de ces mecs d'avoir simplement pensé à être macho avec moi. En attendant, pour ça, il fallait que j'arrive à me sortir de cette galère. Une fois de plus.

J'étais attachée depuis peu, et mes liens me faisaient déjà très mal. Ils m'avaient enlevé mes bottes pour être surs que je ne puisse me libérer. Le poids de mon corps m'entrainait vers l'avant autant que vers le sol. Saloperie de gravité ! Du coup, cela exerçait une certaine force et une grande pression aux liens de mes poignets. J'allais avoir de belles marques, c'était certain. De plus, mes chevilles attachées l'une contre l'autre ne me permettaient pas de me stabiliser correctement au sol. Ca craignait réellement.

Alors que je m'échinais depuis de longues minutes à essayer de me détacher, je ne pu empêcher mon esprit de vagabonder vers mes amis. Ils étaient vivants, c'était obligatoire. Ce fut le moment pour moi de repenser à mon lien avec Byron. Me ressentait-il ? Sentait-il ma détresse ? Ou savait-il simplement que j'étais en vie ? Je savais qu'il ferait tout ce qui était en son pouvoir pour me retrouver, et essayer de me sauver. J'étais la clef de leur survie, et il ne laisserait pas cette mission lui filer entre les doigts. Il avait trop d'honneur pour ça. Echouer ne devait pas être dans ses plans.

Je me souvins également de la manière dont j'avais pu communiquer avec lui dernièrement. De la télépathie ? Je n'en savais rien... Mais ça pourrait m'être utile ! Comment avais-je fait déjà ? Je l'avais juste pensé... Et c'était arrivé. Je me devais de réessayer, même si je n'étais pas convaincue de la méthode à employer. Fermant les yeux, je me concentrais, visualisant le visage de mon Capitaine du mieux que je le pouvais avant de me parler intérieurement : « Hey, beau, grand et ténébreux Capitaine. C'est la petite voix criarde à l'appareil. Tu me reçois ? ».

J'ouvris les yeux rapidement en secouant la tête. Non mais je croyais qu'il allait me répondre ou quoi ? Je devais lui envoyer un message clair, net et précis. Lui donner toutes les infos dont il pouvait avoir besoin pour me retrouver. Alors voyons voir... « Jack Ren. Bateau pirate. Milieu de l'eau. Seule. ». Non mais j'étais sérieuse ? Je pensais parler en morse ou quoi ? Tant que j'y étais, je devais peut-être essayer le clignement d'yeux pour faire passer le message à la manière d'un télégraphe ! Evidemment que j'étais sur un bateau et au milieu de l'eau ! Il le savait très bien ! Et c'était vaste ! Je me foutrais des claques... « Bordel de chiotte, tu es idiote ma pauvre fille ! Attends non merde, je voulais pas penser ça ! Si tu me reçois cinq sur cinq... Euh... Ecoute pas mes dernières paroles ce serait cool ! ». Et voilà que j'avais l'impression de me trouver sur un répondeur. Il fallait que j'arrête là. De toute façon, je n'avais pas ressenti cette petite sensation, ce frémissement, qui m'avait donné la certitude que le message était passé la première fois. Depuis que j'étais sur ce bateau, j'avais l'impression de me sentir séparée d'une partie de moi, vide de quelque chose qui m'était important. Impossible de mettre un mot sur ce que c'était, mais c'était très déstabilisant. Et puis là... Pour le coup je ne savais plus si j'espérais ou non qu'il ai reçu mes petits télextos. Ouais. Ça sonnait bien comme mot. Des textos télépathiques. Des télextos. Ma pauvre fille... La captivité ne te réussissait pas.

Mes muscles s'engourdissaient de plus en plus au fur et à mesure de l'attente. J'essayais de ne pas trop me débattre pour ne pas me blesser, et ne pas trop me fatiguer. Néanmoins, plus les heures passaient, plus je peinais à tenir mon corps contre ce mur, droit. Le bateau qui tanguait au gré du rythme des vagues ne m'aidait pas.

J'avais pu remarquer que la nuit était en train de tomber, faisant sombrer ma geôle dans une obscurité de moins en moins rassurante.

Pas de panique. Ca va aller ma grande. Tu vas t'en sortir. Comme toujours.

Le sommeil commençait à me gagner mais je luttais pour ne pas le laissait m'atteindre. Des bruits se rapprochant attirèrent mon attention, ravivant le peu d'énergie qu'il me restait. Une lumière commençait à se répandre dans la cale du bateau à l'approche de mes invités. Si je fus premièrement éblouie, mes yeux ne tardèrent pas à s'accoutumer à cette soudaine clarté, et ils vinrent trouver ceux du capitaine du navire. Accompagné de trois de ces hommes, toujours aussi peu courageux, il s'approcha de cette nouvelle cage :

— Bienvenus dans mon humble demeure messieurs. Pardonnez mon inhospitalité, je suis quelques peu contrainte à l'immobilité, leur dis-je lorsqu'ils s'arrêtèrent derrière les barreaux.

Jack ricana.

— Ce petit séjour dans ma cale n'a pas encore entamé ta fougue à ce que je vois.

— Ça te plairait bien trop, me trompe-je ?

— Oh que non. Je te préfère ainsi. Je réitère ce que je t'ai dit, tu aurais fait une compagne idéale.

— Oh oui, j'aurais porté les couilles que tu n'as pas dans notre couple.

Ses yeux se plissèrent à l'entente de ma remarque mais il ne réagit pas, dans les miens, il devait très probablement déceler une étincelle de défi. Défi qu'il ne souhaitait visiblement pas relever.

J'avais eu le temps de remarquer, depuis mon enlèvement, qu'il ne parlait pas comme un véritable capitaine de navire, ni comme un pirate. Cet homme avait des origines bien plus nobles, et j'étais sure qu'il garder ses petits secrets pour lui.

— Ton voyage approche de sa fin.

— Oh joie ! Ça ne se voit peut-être pas mais je piétine d'impatience.

D'un mouvement de tête, il ordonna à l'un de ses hommes d'ouvrir la cage. Il pénétra à l'intérieur de celle-ci avant de s'arrêter juste devant moi. J'essayais de garder contenance, je ne devais pas lui montrer le moindre signe de faiblesse.

— Fais comme chez toi, lançais-je.

— J'y compte bien.

De sa main, il attrapa le bas de ma mâchoire pour relever ma tête face à lui.

— J'aurais pris tant de plaisir à te découvrir et à te goûter ma douce. Mais il a fallu que tu te mettes en travers de mon chemin.

— Estime-toi heureux, je t'évite une mort pénible. Tu ne dois pas être habitué aux épices mexicaines, tu aurais probablement fait une grosse indigestion.

— Tu es différente. Très différente, ajouta-t-il en m'analysant sous toutes les coutures. Quelque chose chez toi me rend curieux.

— Mon incroyable sens de l'humour probablement.

Il ne réagit même pas. Chouette, il ne m'écoutait même pas. J'avais l'habitude pourtant, non ?

Il caressait maintenant le bord de ma machoire, me faisant serrer les dents. Je détestais ça. On ne me touchait pas. Jamais. Ses doigts sur ma peau me donnaient des frissons de dégoût. Je détournais la tête pour m'en dégager, du moins j'essayais. Etant donnée ma position, ce fut compliqué et cela le fit ricaner :

— Tu ne peux m'échapper ma douce. Tu es dans mon territoire, sous mon contrôle et je compte bien faire ce que je veux de toi.

— Tu peux toujours essayer. Je n'appartiens à personne d'autre qu'à moi-même, rentre-toi ça dans le crâne.

— Nous verrons bien. Sois-prête. Demain, je te libérerais de ces liens, et tu découvriras la petite surprise que je te réserve.

— Oh je ne bouge pas d'ici ! Ne t'en fais pas !

Après m'avoir fixé sans un mot quelques secondes de plus, il me relâcha avant de quitter la cellule. D'un claquement de doigt, il donna l'ordre de refermer la porte de la cellule avant de s'éloigner.

Un de ses hommes entra dans cette dernière avant de s'approcher de moi. Je remarquais alors qu'il s'agissait de celui-ci que j'avais frappé dans l'auberge. J'étais tellement focalisée sur le capitaine que je n'y avais pas fait attention. Il se posta juste en face de moi, proche. Trop proche. Mon regard fixa le sien.

— Tu regretteras c'que tu m'as fait dans c'te taverne.

— Bla. Bla. Bla, dis-je, roulant des yeux.

Je ne comptais même plus le nombre de fois où on m'avait dit ça. Il grogna avant de se coller à moi. Mon impulsivité et ma colère prirent le pas sur ma raison, je fis la seule chose possible dans ma condition. Avec le maximum d'élan que je pu donner, mon front vint cogner son nez. Il recula violemment, se tenant ce dernier qui semblait saigner. Oups. Je le lui avais encore amoché. Il grogna à nouveau avant de se précipité sur moi.

— Harlow ! Éloigne-toi immédiatement ! cria son chef à distance.

— Ecoute donc papa ours ! lui lançais-je.

— C'te salope m'a pété le nez !

— C'est une de mes spécialités quand un abruti me cherche d'un peu trop près mon chou, tu devais pourtant le savoir, non ?

— Sors de là et ferme la cellule. Tout de suite ! ordonna Jack.

Après quelques secondes de flottement, où rien ne se passa, il recula, verrouilla la porte et s'en alla, suivi des autres. Il avait probablement fallu un petit temps pour que l'information remonte jusqu'à son cerveau.

Je me retrouvais de nouveau dans l'obscurité la plus totale, seule, et mon front me faisait mal. J'espérais au moins ça en valait la peine.

       D'autres heures passèrent pendant lesquelles il me fut impossible de me reposer. Allez donc dormir dans les mêmes conditions que moi et vous comprendrez la difficulté. Mes douleurs se faisaient de plus en plus violentes. Durant les dernières heures, j'avais lentement senti la peau de mes poignets et de mes chevilles se déchirer, ressentant chaque tiraillement, chaque gouttelette de sang couler le long de mes membres pour s'échouer sur le sol. J'avais réussi à garder ma souffrance pour moi, mes forces mentales n'étaient pas assez brisées pour que je n'y parvienne pas. Je me doutais qu'un homme devait être posté non loin, surveillant l'entrée. Et il était absolument hors de question que l'on m'entende émettre un son. Mes blessures étaient à vif à présent et même si je ne pouvais pas voir leur état à cause des liens je me doutais que ça ne devait pas être très joli à regarder. C'était douloureux, très douloureux. Et le poids qu'exerçait de plus en plus mon corps sur les chaines me mettait au supplice. J'attendais plus qu'impatiemment le moment où ils me libéreraient de mes chaines. Moment qui se faisait attendre et mettait mes nerfs de plus en plus à rude épreuve...    

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