Chapitre sans titre 26
Noa passait devant la porte de Simone, son sac de cours sur le dos, maintenu par une seule bretelle, lorsqu'il entendit un grincement. Il tourna la tête pour voir le chambranle s'entrouvrir.
― Pssstt, chuchota la vieille dame.
Noa, surpris, s'arrêta net. La tête de la retraitée passait à peine par l'entrebâillement et ses yeux regardaient en tout sens, pour s'assurer qu'ils étaient bien seuls. Elle sortit un bras, d'où pendait un sac en papier brun et lui tendit.
― Tiens, prends donc, disait-elle d'une voix précipitée.
Puis une fois que Noa l'eut attrapé, elle claqua de nouveau la porte, laissant Noa décontenancé. Il regarda le sac puis la porte à présent close. Il haussa les épaules ne sachant qu'en penser, jeta un coup d'œil derrière lui, mais le corridor était toujours désert, et il reprit son chemin vers la sortie de l'immeuble.
Il était toujours sous le choc de la rencontre lorsqu'il arriva à l'arrêt de bus. De sa main valide, il ouvrit alors le sac pour y voir un petit paquet enveloppé d'aluminium, il le sortit du sac et entreprit de le déballer. Une part de gâteau au chocolat y était enveloppée. Noa sourit. Un sourire qui gagnait ses oreilles et son cœur. Il attrapa la pâtisserie et mordit un grand coup dedans. Délicieux, c'était délicieux.
Lorsqu'il monta dans le bus, celui-ci n'était pas trop rempli et il trouva une place pour s'assoir au milieu. Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu'un papy vint se poster en face de lui. Il avait l'air un peu hagard et son pantalon lui remontait presque sous les aisselles. Le vieil homme lui jetait des coups d'œil, alternant entre la part de gâteau que Noa tenait toujours à la main, son bandage et son visage. Une lumière sembla éclairer les traits du monsieur. Le bus fit une embardée et le vieil homme manqua de perdre l'équilibre.
― Vous devriez peut être vous assoir, lui suggéra Noa, désignant la place libre à côté de lui.
― M'assoir.... Oui, oui, marmonna le papy, puis il s'installa sur le siège indiqué.
Noa reporta son attention sur la route qui défilait par la fenêtre, mais la voix du vieil homme ramena son attention vers ce dernier.
― Tu es Noa, n'est-ce pas ?
Etonné, Noa se tourna plus franchement vers lui et le regarda, intrigué. Ce dernier insista :
― Noa ?
― Oui, oui c'est bien moi. Mais, qui êtes-vous ?
― Cela n'a pas d'importance. Tiens, j'ai un message pour toi.
Le papy plissait les yeux et prenait des airs de conspirateur, ce qui donna à Noa envie de rire, mais il se retint de le faire. De plus, il devait bien avouer que toute cette scène le décontenançait. L'octogénaire lui tendit une enveloppe et se releva, le bus arrivait à un arrêt. Une nouvelle fois, il remonta son pantalon en se raclant la gorge, jeta un dernier regard à Noa et sortit du bus.
Noa reporta alors son attention sur l'enveloppe entre ses doigts, d'un geste fébrile, il la décacheta pour trouver une petite note manuscrite. Il pensa reconnaître l'écriture tremblotante de Simone, mais il n'en était pas certain. Le message disait : « Rendez-vous mardi, 16h à la salle communale. Viens seul ».
Noa regarda autour de lui, essayant de trouver un sens à tous ces évènements matinaux, mais il n'y avait plus rien d'inhabituel au ronron du moteur du bus, ni à l'allure matinale de ses passagers. « Mardi 16 heures »... Noa relisait la note. N'était-ce pas le jour où Simone jouait aux cartes ? N'était-ce pas dans la salle communale justement ? Qu'avait-elle encore manigancé ? Noa ne pouvait s'empêcher de sourire. Elle ne l'avait pas abandonné. Il comptait.
*****
― Carte Vitale ? demanda le pharmacien.
Noa lui tendit la carte verte subtilisée plus tôt dans le sac de cuir de sa mère. Il avait bien compris que c'était à lui de s'organiser pour changer son bandage. D'ailleurs, il ne l'avait pas changé hier, il espérait que ce ne serait pas trop important ? Il sortait des cours, une journée bien intensive de fin d'année, pré baccalauréat. Sa tête bourdonnait encore de toutes les informations communiquées dernière minute par leur prof de français. Elle leur avait souhaité bonne chance pour les épreuves qui se dérouleraient la semaine prochaine. Il s'efforçait de ne pas trop y penser ou le stress allait remonter. Pour lui, l'importance d'obtenir son diplôme était capitale, il n'avait pas le droit à l'erreur.
Le pharmacien s'empara de l'ordonnance et entreprit d'aller chercher en réserve le désinfectant, les compresses stériles et les pansements. Il déposa le tout sur le comptoir.
― Mutuelle ? demanda encore l'homme en face de lui.
― Heu ? Non, pas de mutuelle, indiqua Noa.
Il avait l'impression désagréable de subir un interrogatoire.
― Vous pouvez m'expliquer comment faire ? chuchota presque Noa.
― Comment ça ? dit le pharmacien d'une voix forte qui donna à l'adolescent l'envie de se terrer six pieds sous terre.
― Pour nettoyer ? Comment on fait ? répéta Noa.
― Mais ? Tu ne vas pas faire ça tout seul !
Le pharmacien se moquait presque. Il eut un rire gras et farfouilla un moment dans le tiroir sous la caisse avant de sortit une carte de visite cartonnée qu'il lui tendit.
― C'est une infirmière libérale. Elle reçoit sans rendez-vous les matins de huit heures à dix heures. C'est pris en charge, précisa-t-il.
Noa poussa un imperceptible soupir de soulagement. Il remercia le pharmacien avant de sortir dans la rue, son sac de soin à la main.
*****
Simone gratouillait derrière les oreilles du chaton sur ses genoux, il était en train de lui filer ses bas avec ses pattes, mais elle ne lui en tenait pas rigueur. Fourchette avait fini par revenir miauler devant sa porte à l'heure du dîner, l'appel du ventre avait été plus fort que celui de l'aventure. La vieille dame s'était sentie soulagée, elle avait beau avoir perdu ses nerfs, elle n'aurait pas souhaité que Fourchette disparaisse de sa vie. Pas un de moins. Pas encore.
Son cœur battait encore un peu fort d'avoir entraperçu Noa ce matin. Elle n'avait pu s'empêcher de remarquer les cernes qui ombraient ses yeux noirs. Il lui avait semblé amaigri, du moins, c'est ce qu'elle s'imaginait, loin de ses repas copieux et pâtisseries. Ce n'était pas pour rien si elle avait choisi de lui glisser en douce un gâteau au chocolat, c'était son préféré.
Elle avait vu sa main bandée. Qu'avais tu donc fait, Noa ? pensa Simone. Viendrait-il au rendez-vous ? Gino aurait-il réussi à passer son message ? Elle se sentait telle une héroïne de ses feuilletons télévisés au mauvais scénario qu'elle visionnait les après-midi. Mais pas sûr qu'une héroïne avec de la cataracte, quatre-vingt balais et du mal à marcher soit bien vendeur.
Lorsque Noa était remonté vivre un étage plus haut, Simone avait eu la sensation que sa vie se terminait. Qu'on lui retirait le dernier rayon de soleil qu'il lui avait été accordé. Elle s'extirpa tant bien que mal de son fauteuil au tissu usé et Fourchette sauta de ses genoux en râlant. Elle ouvrit d'une main son réfrigérateur et attrapa ses ingrédients pour le souper.
Mardi, nous serons bientôt mardi, pensa-t-elle en jetant un morceau de couenne de jambon au petit chat.
Cette histoire touche presque à sa fin... Encore quelques chapitres (que je n'ai pas encore écrits!!) Je suis une calamité sur cette histoire. J'ai juste mon épilogue de fin d'écrit!) et on arrive au bout... Je voulais en tout cas remercier mes lecteurs de l'ombre pour vos petits votes qui m'encouragent énormément et les commentaires que j'ai pu recevoir. A la semaine prochaine!
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