CHAPITRE 51

Coucou ! Un peu d'action dans le chapitre d'aujourd'hui et des discussions profondes. On se rapproche doucement de la dernière partie de cette fanfiction, j'espère que vous êtes prêts ! On se retrouve dans deux semaines pour la suite des aventures de Théo, le nouveau planning est mis en place !

CHAPITRE 51

Théo courait à perdre haleine. Désorienté à cause d'Enoch, il peinait à retrouver son chemin dans la végétation dense qui l'entourait. Néanmoins, certaines zones plus clairsemées lui indiquaient qu'il était sur le bon chemin. Une gigantesque boule de feu traversa soudain le ciel, proche, sur sa droite. Il bifurqua tant bien que mal et reprit sa course. Des cris ne tardèrent pas à lui parvenir aux oreilles. Il dégaina son épée et bondit au-dessus de la dernière rangée de buissons.

Un énorme fauve ailé se tenait devant lui, au corps à corps avec Grunlek. Sa queue de scorpion tapait frénétiquement le sol pour essayer de l'atteindre. Pour l'instant, le nain tenait bon, esquivant les attaques. Derrière lui, Tesla et Balthazar, leurs bâtons dans les mains, braquaient la créature, essoufflés. Cyrielle aidait Mictian, coincé sur la charrette. Quant à Shinddha, il se tenait à distance, arc à la main. Plusieurs flèches dépassaient déjà du flanc de la créature, signe qu'il avait déjà essayé de la ralentir.

"Théo ! Attention ! hurla Grunlek."

La queue s'abattit dans sa direction. Il roula sur le côté et l'évita de justesse. Il se redressa et bondit vers la manticore, épée à la main. Il feinta pour fuir avant de courir vers le flanc. Il donna un grand coup de pied et enfonça l'épée le long de sa jambe profondément dans la chair. La bête poussa un hurlement de douleur et se retourna sur le dos. Grunlek attrapa l'armure du paladin pour le tirer en arrière, mais la lame resta coincée. Le fauve l'attrapa avec sa gueule et la jeta au loin avant de feuler agressivement en direction de ses assaillants. Une distraction parfaite pour Shinddha, qui visa et planta une de ses flèches directement dans son œil droit. Aveuglée par la douleur et la rage, sa queue balaya tout autour d'elle, ratant de peu le nain et le paladin. Tesla et Balthazar ne perdirent pas de temps pour arroser la créature à grands renforts de boules de feu. Sa crinière fut la première à s'embraser, illuminant la clairière.

Cela suffit néanmoins à dissoudre l'enchantement qu'Enoch avait lancé dessus. Reprenant brutalement pied dans la réalité, l'instinct de survie fit le reste. La manticore se roula au sol pour s'éteindre avant de détaler vers les profondeurs de la forêt. Ses blessures, sérieuses, lui coûterait sans doute la vie dans les jours qui venaient. Personne ne la regretterait.

La tension redescendit peu à peu dans le groupe. Théo alla ramasser son épée, toujours au sol et la nettoya dans l'herbe. Grunlek partit quant à lui donner un coup de main à Cyrielle, toujours en détresse avec le chariot. Par chance, le demi-frère de Balthazar ne s'en sortait qu'avec des égratignures. Ce qui se trouvait dans le chariot, en revanche... Tesla n'apprécia pas de retrouver ses fioles brisées sur le sol de bois. Plusieurs produits avaient même commencé à dévorer le plancher.

"On peut savoir où est-ce que vous étiez, Silverberg ? l'agressa-t-elle par vengeance. Vous êtes le guerrier entraîné ici, c'est à vous que revenez la tâche de protéger le groupe !

— Je vous en prie, si vous voulez être possédé par le père de Bob vous aussi, je vous offre volontiers la capacité. Enoch m'a piégé. Il m'a emmené dans un cimetière qui date des dernières grandes guerres démoniques et m'a menacé une nouvelle fois de représailles si on continuait vers le désert. C'est lui qui a envoyé la manticore.

— Ça veut dire qu'on est dans la bonne direction, répondit Grunlek en haussant les épaules. Il pourrait nous arrêter, mais il ne l'a pas encore fait. Je ne pense pas qu'il représente une menace pour le moment.

— Grunlek a raison, approuva Balthazar. Ne nous laissons pas impressionner par un gros chat et un peu de magie noire. On a affronté pire que ça."

Le ton encourageant de ses amis rassura un peu le paladin. Néanmoins, il ne pouvait s'empêcher de garder les menaces dans un coin de sa tête. Ils avaient raison sur un point : Enoch avait la puissance pour les détruire mais ne l'avait pas encore fait. Pourquoi n'avait-il pas encore essayé de les tuer s'il tenait tant à ce qu'ils ne s'aventurent pas dans le désert ? La question méritait réflexion.

Les aventuriers décidèrent d'un commun accord de ne pas rester dans les parages. Les chevaux avaient fui le combat, il fallut plusieurs minutes pour les retrouver dans la broussaille. Théo frissonna lorsqu'il retrouva le sien près de la tombe de la druidesse, les yeux dans le vide, comme hypnotisé. Une force étrange était à l'œuvre dans ces bois et il comptait être suffisamment loin d'ici lorsque quelqu'un la percerait à jour.

Après finalement deux heures d'effet et une vidange de vessie pour Théo, le groupe reprit enfin la route en direction de Fort d'Acier. Mis à part quelques bandits qui firent l'erreur d'entrer dans le chariot de Tesla et terminèrent carbonisés sur un coin de la route, rien ne vint perturber le reste de leur voyage. Ils ne tardèrent pas à longer le lac de Castelblanc et la civilisation fit peu à peu son retour autour d'eux.

Théo fut cependant de plus en plus mal à l'aise à mesure qu'ils approchaient d'une grande structure cubique, proche d'un sentier. Il s'agissait d'une citadelle de pierre qu'il ne connaissait que trop bien pour y avoir passé plusieurs mois enfermés après la bataille de Fort Tigre qui avait manqué de lui coûter la vie. Il n'arrivait pas à la quitter des yeux, ce qui attira bientôt le regard de ses compagnons.

"Pourquoi ce vieux château t'intéresse à ce point ? finit par demander Balthazar."

Le paladin sursauta et se retourna vers lui. Shinddha était installé derrière lui, curieux lui aussi. Il avait fini par abandonner le chariot, fatigué des plaintes de Tesla.

"Pas de bons souvenirs, marmonna le guerrier."

Shinddha leva la tête à son tour vers la structure, pensif.

"Cet endroit me rappelle quelque chose. On n'est pas passé devant en bateau en allant à Fort d'Acier ?

— Si, approuva Balthazar. Mais c'était plus neuf dans mes souvenirs. C'est une citadelle de Castelblanc ? demanda le mage.

— Non, de Lorimar, répondit sombrement le paladin. Une prison expérimentale, plus précisément."

Le mage ne mit que quelques secondes à faire le rapprochement. Il se gratta la barbe, lança un regard vers Shinddha, puis vers lui. Théo secoua la main pour l'informer que ça ne le dérangeait pas d'en parler devant le demi-élémentaire.

"C'est là qu'ils t'ont enfermé, donc ? Ça a l'air désert.

— Ça l'est. Ceux que je n'ai pas tué avec les prisonniers sont rentrés chez eux maintenant.

— Il s'est passé quoi ici ? demanda Shinddha, suspicieux.

— Tu te souviens quand on a retrouvé Théo dans le petit village avant Fort d'Acier ? Sa sœur nous avait dit qu'il avait disparu après s'être battu à Fort Tigre. Il a été enlevé par des soldats de Kirov et détenu ici pendant les quelques mois où nous étions coincés dans le puits de magie à la Tour des Mages. Et ils lui ont fait... Des choses pas très sympa."

L'archer resta silencieux un moment, puis se tourna vers le paladin.

"Qu'est-ce qu'ils t'ont fait ? Est-ce que ça a un rapport avec... la manière dont tu as réagi quand je suis revenu ?

— Oui, répondit le paladin d'une voix incertaine. Ils m'ont torturé et ont joué avec mes souvenirs, et depuis, j'ai ces crises bizarres. Je ne sais pas comment l'expliquer. J'ai comme des retours en arrière où je perds pied et je me retrouve dans des scènes que je préférerais oublier.

— Je vois. Et donc, c'était quoi celle que tu as vu quand je suis revenu ?"

Le paladin ne répondit pas tout de suite. Ses mains tremblèrent légèrement sur la bride alors que les images revenaient. Il prit de grandes inspirations et elles se dissipèrent. Peut-être qu'il avait besoin d'en parler après tout. Balthazar était attentif, lui aussi.

"Ta mort. Je n'aurais pas dû... Je n'aurais pas dû te soigner. Tu serais resté à terre et ce ne serait jamais arrivé.

— Je m'en doutais, dit l'archer avec un demi-sourire. Mani m'en a un peu parlé avant qu'on parte de Castelblanc. Il m'a dit que tu pensais qu'il était responsable de ce qui s'était passé, mais c'est faux. Tu te crois responsable de ce qui est arrivé. Théo, ce n'est pas de ta faute. J'ai foiré un tir parce que je ne tenais plus debout. Si ça n'avait pas été moi, ça aurait été quelqu'un d'autre. Manaril en avait marre de jouer, elle voulait juste nous tuer. Et puis, je suis là maintenant, par un quelconque hasard.

— Il a raison, approuva Balthazar. Tu sais, si tu en avais parlé dès le début, on aurait pu trouver une solution avec Grunlek. Parce que je ne pense pas que tout est lié à ce qu'ils t'ont fait dans cette prison. Tu rejettes tout sur ça parce que tu as peur d'accepter que ça puisse venir de toi. Même si c'est plus violent, tu as le même type de syndrome que ces soldats qui rentrent du front et qui bondissent au moindre bruit suspect. Je crois que tu as simplement de l'angoisse post-traumatique, Théo. Et tu sais quel est le meilleur moyen de la combattre ? C'est de parler de ce qui te fais peur, de tes expériences, de ta détresse. Tu t'es beaucoup ouvert depuis qu'on a commencé ce voyage, et j'ai remarqué que tes crises sont plus espacées qu'avant. Tu as cette sale habitude de garder tout pour toi jusqu'à l'explosion, et tu te fais mal tout seul."

Le guerrier baissa la tête. Il était vrai qu'il repoussait tout en bloc lorsqu'il s'agissait de ses crises, mais il n'avait jamais pensé que tout pouvait provenir de lui. Ce qui s'était passé là-bas avait certainement eu de l'effet, mais Balthazar avait raison, ça concernait des souvenirs passés. Shinddha était encore bien vivant à cette époque-là.

"Alors quoi ? Je suis cinglé ?

— Non, répondit Balthazar. Bien sûr que non. Tu as simplement besoin d'évacuer les sujets qui te préoccupent et apprendre à les accepter. C'est dur, ça prend du temps. Mais tu sais qu'on est là pour toi, pas vrai ? On a vécu les pires merdes ensemble, au point où on en est, je peux t'assurer que je peux tout entendre. Et je pense que c'est la même chose pour Shin et Grunlek. On est une famille, on est là pour ça.

— Ouais, c'est ça, répondit Théo d'une voix plus sombre. On l'est pour l'instant, mais une fois que tout sera terminé ? Grunlek va retourner dans sa montagne, toi à la Tour des Mages... Je sais que Grunlek et toi voudraient que je vienne par pitié, pour pas me laisser derrière... Mais tu m'as vu ? Je ne suis pas mage, et certainement pas doué pour les affaires royales. C'est même pour ça que je me suis barré de Castelblanc. La vérité, c'est que j'ai peur de ce qu'on va devenir. De ce que tout ça va devenir. Ne fais pas de promesse que tu ne tiendras pas, Bob."

Le mage parut surpris de sa remarque. Il lança un regard vers Shinddha, puis sourit.

"Si un jour on m'avait dit que tu ne pourrais plus te passer de moi... se moqua-t-il gentiment. C'est vrai, nos objectifs n'ont jamais été les mêmes. Pour moi, c'était enfin me stabiliser quelque part, pour Grunlek c'était être accepté. Mais ça ne veut pas dire que parce qu'on n'est pas là tout doit s'arrêter, tu sais. Je ne compte certainement pas rester enfermé dans la Tour des Mages toute ma vie, et ça m'étonnerait que Grunlek ne prennent pas de nouvelles vacances comme celles qu'il prend en ce moment-même. Même si ça devient temporaire. Et puis, il y a toujours Shin. T'as vu sa tête ? Jamais le gars trouve un travail barbant dans une ville.

— Merci, grogna l'intéressé. Ton opinion me réchauffe le cœur. Mais il a raison. Je comptais partir vers les terres de mes ancêtres quand tout sera fini pour... Je ne sais pas. Mais j'ai bien besoin de quelqu'un avec moi. Et ensuite, on pourra toujours remplacer les deux guignols pendant qu'ils ne sont pas là. Je crois que Mani n'apprécie pas la vie conjugale, si tu veux mon avis. Je ne pense pas que ça durera avec Menki Dal. Il est trop indépendant.

— Oui, il préfère les flèches huilées aux jolies vierges qui ont fait vœu de chasteté, se moqua le mage."

Shinndha bleuit brusquement.

"C'est... C'est pas vrai ! On est juste ami, il n'y a aucune attirance romantique entre nous. Et puis c'est pas de ma faute si les elfes ont des tendances à la pansexualité. Il n'y a rien de bizarre entre nous.

— Oui, comme cette fois où il t'a regardé te baigner tout nu perché sur un rocher, rit Balthazar.

— Ou la fois où il s'est parfumé avec un parfum aux pommes juste parce que tu lui as dit que t'aimerais bien manger une tarte, appuya Théo.

— Ou encore quand il t'a ramené toutes les gemmes bleues de sa collection à un bijoutier pour t'en faire une chevalière, le provoqua le mage en pointant la bague qu'il avait au doigt.

— Ça... Ça ne veut rien dire ! s'exclama le demi-élémentaire. Ça faisait longtemps que je voulais une chevalière."

Le mage et le paladin éclatèrent de rire, ce qui détendit immédiatement l'atmosphère. Même si Théo n'avait pas spécialement plus d'indications sur ce qu'il était censé faire après toute cette histoire, il se sentait un peu mieux et prêt à reprendre la route de manière plus sereine. Il allait le falloir de toute manière. La plus grande étape de leur voyage était encore devant eux. Si Enoch avait raison et qu'ils risquaient gros en s'aventurant dans le désert, il préférait être prêt à toute éventualité. Même la plus déplaisante : un échec.

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