Chapitre 5 ~ Partie 5
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La bibliothèque est immense ! Les étagères sont largement plus nombreuses que celles de Barbara, c'est incomparable ! La gigantesque librairie se trouve dans la tour carrée de droite, c'est un endroit poussiéreux, donc probablement peu fréquenté. En soi, la pièce est relativement étroite, ce sont les livres qui montent jusqu'au plafond. Une table trône en plein milieu, avec une pile de bouquins qui m'attend. Je vais dédier mes prochaines heures à la lecture sur l'Histoire d'Oneiros !
A force de décrypter les écritures, mes yeux piquent. Je profite de prendre une pause, me jetant sur le casse-croûte d'Athénaïs. Pour résumer grossièrement, Oneiros a été construit il y a plus d'une centaine d'années par un couple très riche. Ils étaient en quête d'un foyer ainsi que de terres vierges. Malheureusement pour eux, des créatures appelées « djinns » siégeaient déjà ici, menant le chaos et la terreur parmi les rares habitants. Le couple paya des hommes et les formèrent au combat. Ils réussirent à exterminer une bonne partie de la troupe. Quant à l'autre, elle se retira dans des zones sombres. Le couple pu bâtir leur empire, fondant ainsi leur famille tant rêvée. Au fil des ans, des voyageurs s'installèrent définitivement, attirés par la quiétude du lieu, en apparence. Impressionnés par la multitude de soldats, les djinns n'osèrent répliquer tant qu'une Reine et un Roi seraient au pouvoir. Je comprends mieux pourquoi le château est menacé : les Rosebury ont fuis, le laissant à la merci de n'importe qui. Seulement, après ces années, pourquoi n'ont-ils pas attaqué pour de bon ?
La particularité d'Oneiros figure dans son nom : les rêves. Quand le premier Roi et la première Reine eurent leur enfant, un fils, une sorcière vint se présenter. Elle lut l'avenir du fils prodige : il deviendrait un contrôleur de rêves d'une grande lignée. Hormis la prophétie émise par l'oracle, rien n'explique la fonction exacte d'un tel don. Siloé m'avait déjà parlé des lois existantes, du moins de manière vague.
Les parents du fils, Edward et Aurora, nommèrent donc le Royaume : Oneiros.
Certains carnets présents ici sont écrits par Charles lui-même, il décrit le Royaume au fil des ans, le cartographiant à travers les saisons et les changements. De ce que je comprends, Mr Francisco est né ici, plusieurs années précédant les Rosebury. Il est devenu proche du Roi et de la Reine, devenant le conseiller officiel.
Oneiros est complètement différent de ce que l'on nous apprend au collège ou au lycée. Déjà étant donné sa situation... géographique et historique. Les sorcières m'intriguent également. Comment sont-elles réellement ? Ont-elles ce fameux nez crochu doté d'une horrible verrue ? Quels pouvoirs magiques possèdent-elles ? Où vivent-elles ? Mes suppositions sont coupées par Nasim, pénétrant dans mon antre. Ma séance s'achève, le garde me conduit à mon prochain cours. Celui-ci se déroule dans les sous-sols du château, à l'abri des regards. Une femme frappe dans un sac de sable, s'acharnant sans relâche. Ses bandeaux autour de ses phalanges sont rosés. Ses cheveux châtains collent à son front trempé. Ce qui me fascine chez elle, ce sont ses muscles roulant sous sa peau.
- Voici Yün. Cette nana est une tarée, elle a une hargne folle, murmure Nasim à mon attention.
- Pourquoi ?
- Aucune idée, avoue-t-il en haussant les épaules.
Nous la contemplons, admiratifs, jusqu'à ce qu'elle nous surprenne.
- Salut, tu dois être Mérida je présume, s'avance-t-elle en s'épongeant le sommet du crâne. Bienvenue à toi.
- Bon, vu que tu es arrivée à bon port, je vous laisse.
Je me retrouve seule avec cette étrange fille. Je ne crois pas qu'elle soit plus vieille que Siloé. Contrairement aux femmes d'Oneiros, elle a les cheveux courts, la différenciant.
- Yün, enchantée. Je vais t'initier à l'art de combattre à l'épée. Mais avant que tu puisses en tenir une entre les mains, il va falloir travailler ton cardio. Tu pratiques du sport ?
- N-non, répond-je honteuse.
Le sport, ça n'a jamais été mon truc. J'ai toujours eu de mauvaises notes dans cette discipline, séchant le plus possible les cours du lundi matin.
- Ah. Bon, ça prendra plus de temps que prévu. D'abord, on va suivre un parcours de running. Pour les premières séances, ça ne sera pas mal.
Sa manière de s'exprimer me fait tiquer. Et si... ? Curieuse, je me lance :
- Es-tu originaire d'Oneiros ?
Silence. Elle me fusille du regard, ce qui me fige directement. Je n'aurais pas dû poser ma question, du moins pas si vite alors que nous ne nous connaissons pas.
- Non. Je préfère que l'on évite le sujet. Suis-moi, je vais te prêter une tenue de sport. Ce n'est pas en salopette que tu pourras courir. Et prends cette crème, elle évitera à tes jambes de s'irriter lorsqu'elles se frotteront.
J'attrape le pot qu'elle me lance, la remerciant. Je m'habille d'un short en lin, de même que le tee-shirt, gardant mes fidèles baskets. Dehors, la chaleur est plus cuisante que d'habitude, je sens que cette après-midi va être un calvaire...
La grosse rasade d'eau dans ma gorge apaise ma soif. Mes muscles sont à vif, endormis depuis longtemps. Si Cassien voyait ça, il rirait sûrement ! Mais Cassien n'est pas là, et pendant une fraction de seconde j'ai oublié que notre amitié est enterrée... Yün s'est montrée très stricte dans ses exercices, mais aussi très encourageante lorsque je songeais à abandonner. Je suis sûre que sous ses airs durs vit une femme sensible. A la fin de la séance, elle m'a même gratifié d'un sourire !
En me rendant dans le couloir dédié aux chambres, j'aperçois Toby devant la porte de Siloé, pleurant à chaudes larmes.
- Que se passe-t-il Toby ?? m'enquis-je inquiète en m'agenouillant à sa hauteur.
- Je trouve pas Si-lo-ééé ! Il est où ?
- Il est sûrement occupé tu sais.
- Mais il m'avait promis de me raconter des histoires !
- Je peux le faire à sa place si tu veux.
Il me jauge de haut en bas, réfléchissant à si je serai aussi douée que son conteur principal. Par chance, j'ai vécu dans un monde où les Disney sont écrits. Je saurai quoi raconter.
- Attends-moi dans sa chambre, je me douche et j'arrive, dis-je doucement.
Toby s'est drapé sous les couvertures. Je m'assois près de lui, attendrie.
- Est-ce-que tu connais l'histoire du Roi Lion ?
Il secoue la tête.
- Comment ? Tu ne connais pas l'histoire de Simba ?? On va remédier à ça ! m'effaré-je faussement.
Alors que je récite la fin de l'histoire, Toby s'endort, un sourire sur son visage angélique. Ses cheveux bouclés s'aplatissent sur l'oreiller. Je l'étudie, intriguée par ce petit bonhomme plein de vitalité. Je me demande comment il a vécu le décès de sa mère... Il est évident qu'il est attaché à Siloé, lui qui l'a en quelque sorte sauvé. En parlant du loup, le voilà qui débarque. La surprise se lit sans mal sur ses expressions faciales.
- Il s'est endormi, le prévins-je en discutant tout bas.
- Il n'a pas crié ??
- Non. Je lui ai conté une histoire.
- Oh, souffle-t-il, ému.
Siloé m'explique que d'ordinaire Toby est capricieux au moment de s'endormir, surtout en présence d'inconnus. Toujours assise sur le lit, Siloé me rejoint de l'autre côté, caressant la tignasse blonde de l'enfant. Nous échangeons sur nos journées respectives. D'après ses dires, lui ainsi qu'une troupe de soldats ont repoussé une armée de djinns. Ça n'a pas été une mince affaire, ils étaient plus nombreux que d'habitude.
- Ce qui est compliqué, c'est de discerner les djinns des humains. Les créatures ont des yeux rouges sanguinaires, mais la plupart revêtent de fausses lentilles, ce qui est pas mal trompeur.
- Attends, quoi ?? Des humains se rallient à leur cause ?!
- Oui, même s'ils sont peu. Notre but n'est pas de les tuer, simplement qu'ils entendent raison.
- Et si ça ne fonctionne pas ?
- Ils sont emprisonnés, répond-t-il de but en blanc.
Songeuse, je me questionne sur l'emplacement des prisons, et quels genres de personnes s'y trouvent.
L'absence de bruit, en dehors de la respiration régulière de Toby, nous enveloppe dans une douce ambiance. Je reporte mon attention vers celui-ci, tandis que Siloé m'observe franchement, ce qui rosit mes joues.
- Pourquoi es-tu gênée que je te regarde ?
- Euh, j-je... je n'ai pas l'habitude que l'on me fixe de la sorte, déclarai-je en toussotant, ma salive avalée de travers.
- Pourtant, c'est une épreuve de ne pas détourner les yeux, tu es si jolie... Pardon. Je devrais m'abstenir de tous commentaire... Ne t'inquiète pas pour Toby, je veille sur lui.
Je me retire, troublée par les paroles de Siloé. Pourquoi l'entendre prononcer ces mots me ravis ? Et pourquoi devrait-il se raviser ? Je m'endors dans ma chambre, la tête surchauffant de questions.
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