Chapitre 7
Hi! J'espère que vous allez bien?
Merci infiniment pour vos nombreux commentaires sur le précédent chapitre. Je suis désolée d'être en retard dans mes réponses, surtout que c'est le plus important pour moi. Je souhaite vous remercier un par un et promis ça sera chose faite. Parce que ça me tient plus que tout à coeur et que je ne vous remercierais jamais assez.
J'espère que ce chapitre vous plaira!
...
CHAPITRE 7
« C'est comme ça qu'on voit si on se plaît avec une personne, quand on peut se taire tout à fait, au moins une minute et profiter du silence. »- Pulp Fiction
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(If You Want Love_NF)
Louis.
En même temps que je conduis jusqu'à chez Niall, ce dernier côté passager et tous les autres se serrant à l'arrière, j'ai plusieurs pensées qui me traversent. La première est que je souhaite arriver le plus rapidement possible sans croiser les flics. Parce qu'on est beaucoup trop dans cette voiture et qu'une amende ou un retrait de permis est la dernière chose dont j'ai besoin. L'autre pensée qui ne fait que me traverser est: qu'est-ce que je suis en train de faire? Depuis quand je me retrouve lié à ces gens? Depuis quand je me permets de penser aux autres alors que penser à Lucia et moi est déjà beaucoup trop suffisant?
Je relève mon regard pour croiser celui fatigué de Harry sur la banquette arrière. Il arrive à peine à tenir sa tête. Les cernes creusent ses yeux, ses lèvres ne forment qu'un trait, légèrement tiré vers le bas aux deux extrémités. Ses boucles sont complètement emmêlées et, lorsqu'il tente de passer ses doigts à l'intérieur, il grimace de douleur à cause des noeuds et finit par abandonner.
Je prends une grande inspiration avant de soupirer et de détourner le regard pour de nouveau regarder la route. Mais c'est plus fort que moi. En même temps que je conduis, dans ce silence pesant, je ne fais que revoir ces images. Harry qui monte sur le balcon. Harry, complètement bourré, qui vacille. Mais c'est pas comme s'il n'avait plus toute sa tête. Et c'est justement ça le plus inquiétant. L'impression de l'avoir vu sauter de lui-même. Alors, certes, sa vision du danger n'est plus la même avec de l'alcool dans le sang.
Mais j'ai toujours cette impression qui me dit qu'il voulait réellement sauter.
Tu avais raison pour le SOS. C'est ce qu'il a dit une fois dans mes bras, comme un pantin désarticulé. Et ça ne devrait pas autant m'atteindre. Ça ne devrait pas me faire sentir cette pique dans le creux de ma poitrine.
Des SOS, tout le monde en lance.
Alors je ne comprends pas pourquoi c'est le sien que j'ai décidé d'entendre.
Enfin, entendre est un bien grand mot quand je le vois maintenant muet. J'ai remarqué qu'il ne parlait pas beaucoup, en général. Que ça soit au groupe de soutien, dans le self lorsque je l'aperçois avec Lenny et Charlie, pendant le cours de français où il est à mes côtés. Je secoue légèrement la tête en réalisant que, si j'ai remarqué ça, c'est parce que je le regarde beaucoup plus que je ne le devrais. Nos nombreux contacts visuels peuvent le confirmer.
Et alors que je décide de ne plus retourner au cours de soutien, alors que je décide de ne pas répondre à son dernier message, que je décide de l'ignorer au lycée, pendant le cours de français, me voilà à le rattraper alors qu'il s'apprêtait de sauter. Me voilà à le conduire lui et ses amis chez Niall où je vais moi aussi passer la nuit.
Parce que, oui, je pourrais très bien les déposer et me barrer.
Mais, lorsque je me gare, je regarde Harry tenter de sortir de la voiture et tomber à genoux à terre, sous le regard attristé de Charlie qui essaie de le relever. Alors une nouvelle pensée que je déteste déjà me traverse. Celle qui me dit que je dois rester pour Harry.
Je sors alors à mon tour de la voiture et en fait rapidement le tour pour arriver face à Charlie et Harry.
-« C'est bon, je m'en occupe. » Je dis à Charlie en passant mes bras sous les aisselles d'Harry pour le relever.
Cette dernière me sourit doucement et hoche la tête pour aller aider Lenny à soutenir Liam qui ne marche plus très droit. Manël, elle, veille sur Ava qui a le visage fermé. Et Niall s'empresse d'aller ouvrir sa porte d'entrée.
Une fois Harry relevé, je passe un bras autour de sa taille alors que son bras à lui s'enroule autour de mes épaules. Afin de mieux le maintenir, j'attrape sa main ballante sur mon épaule avec la mienne qui est libre. Et je ne saurais expliquer la sensation qui me traverse en sentant ses doigts s'accrocher aux miens presque désespérément.
-« Je veux dormir.. » Il souffle dans mon cou.
Un frisson traverse alors ma peau et je me racle la gorge en le faisant entrer avec moi dans la maison de Niall.
-« C'est le réveil qui va piquer. » Je lui répond en entrant dans le salon.
-« C'est nul de se réveiller. » Il dit plus bas.
Je fronce légèrement les sourcils et, encore une fois, une pique se plante dans mon foutu coeur qui ne sait pas rester aussi impassible que mon visage. Il est bourré, Louis. Il ne sait pas ce qu'il dit.
Et tu ne crois absolument pas en les conneries que tu viens de penser.
-« J'ai des matelas dans le garage, je vais les chercher. » Nous lance Niall. « Certains peuvent dormir sur le canapé, je laisse ma chambre aux filles et la chambre de mon grand-frère est dispo aussi. Si on peut éviter de toucher à celle de mes parents, ma mère cramerait direct que j'ai invité du monde.
-Je veux pas de chambre. Je vais rester près des toilettes. » Marmonne Liam.
-« On va s'installer dans ta chambre avec Ava et Manël. » Dit Charlie. « Je vais t'aider à y rajouter un matelas. » Continue t-elle en partant aider Niall.
Ils disparaissent alors tous les deux derrière la porte qui mène au garage alors que Liam part directement aux toilettes. Ava ne fait que répéter qu'elle veut se démaquiller alors Manël part avec elle à la recherche de la salle de bain.
Il ne reste donc plus que Lenny, Harry et moi dans le salon. Harry qui est toujours appuyé contre moi et que j'essaie de maintenir debout. Lenny tourne la tête vers nous et se pince les lèvres avant de me proposer:
-« Tu devrais le mettre dans la chambre du frère de Niall. Il sera mieux dans un lit, je pense.
-Ouais. » Je réponds simplement en lançant un regard à Harry qui s'endort presque contre mon épaule.
Puis, lorsque je remarque que Lenny nous regarde toujours, les paroles de Zayn me reviennent. Merde, Zayn, faut que je lui envoie un message. Mais, avant ça, je ne contrôle pas mes paroles lorsque je dis à Lenny:
-« Il y a quelque chose entre Harry et toi? »
A l'entente de ma question, Lenny fronce les sourcils et s'empresse de secouer la tête. Et je ne devrais pas ressentir une pointe de soulagement. Vraiment pas.
-«Pourquoi tu me demande ça? » Il reprend d'une voix neutre.
-« Vous êtes souvent ensemble. Et je me suis dit que..
-Que parce que je suis le petit gay du lycée je veux forcement sauter sur chaque mec qui traîne avec moi? » Il me coupe avec un rire nerveux.
Je déglutis difficilement en regardant ailleurs le temps d'un instant. Je me sens presque honteux, et surtout idiot d'avoir posé cette question. Surtout que ça ne me regarde pas. Même si c'était le cas, s'il y avait quelque chose entre eux, qu'est-ce que ça peut me foutre?
A cette pensée, je serre un peu plus Harry contre moi.
Lenny semble remarquer mon geste et son air sévère s'évapore le temps d'un instant, laissant place au doute et à la surprise à la fois. Puis il revient sur terre et secoue la tête lorsque que je lui répond enfin:
-« Je suis désolé. Ça ne me regarde pas de toute façon. »
Lenny acquiesce et, alors qu'on entend du bruit venant des escaliers menant au garage, il rajoute doucement, avant que quelqu'un d'autre arrive:
-« Il n'y a rien entre nous. Au cas où. »
Je déglutis difficilement et n'ai rien à répondre. C'est beaucoup trop le foutoir à l'intérieur pour que je réponde quoi que ce soit. Et, lorsque je tourne la tête vers Harry, mon coeur rate quelques battements en voyant que son regard était déjà posé sur moi.
Est-ce qu'il a entendu notre conversation avec Lenny?
Est-ce qu'il a mal interprété quoi que ce soit? C'était seulement une question. Seulement de la curiosité à cause de la remarque qu'avait fait Zayn devant le lycée. Voilà. Rien d'autre. Ça ne peut être rien d'autre. Aucun intérêt.
Aucun intérêt. C'est pour ça que tu restes là, hein, abruti.
-« On a des matelas! » S'exclame Niall en trainant difficilement le matelas qu'il tient.
Lenny s'empresse d'aller aider Charlie qui a le second matelas qui va partir dans la chambre de Niall où dormiront donc Ava, Manël et Charlie. Niall va dormir sur le matelas dans le salon et Lenny sur le canapé. Liam sur le second canapé, s'il décide de sortir des toilettes.
-« Louis, tu peux dormir dans la chambre de mon frère avec Harry. » Me lance naturellement Niall en s'approchant de nous. « Je vais te montrer où c'est. »
Je me fige un instant, croisant en même temps le regard de Lenny qui semble vérifier ma réaction. Je garde alors mon air neutre, imperturbable, tentant d'ignorer l'appréhension et cette sensation qui revient serrer légèrement mon estomac. Je ne saurais même pas dire si elle est agréable ou non. Tout ce que je sais, c'est que je prends une grande inspiration en tenant Harry contre moi et en suivant Niall dans le couloir.
-« Ton frère n'est pas là, donc? » Je lui demande lorsque nous arrivons dans la chambre en question.
C'est une grande chambre avec un lit deux places, un bureau juste en face et une salle de bain rattachée à la chambre. Il y a plein de posters aux murs. Des posters de films, de spectacles, de groupes de musique aussi.
-« Non, il est parti faire ses études de cinéma au Canada. » Me répond Niall. « Il a une chambre étudiante là-bas. »
Lorsque Niall me parle de son frère, j'ai l'impression de voir son sourire se faire plus triste. Harry, contre moi, relève la tête et semble avoir remarquer la même chose que moi car il dit d'une voix fatiguée:
-« Il te manque, ton frère. »
Ce n'est pas une question.
-« Ouais. » Avoue Niall en hochant la tête.
-« Je comprends. » Répond simplement Harry avant de laisser sa tête retomber à nouveau contre mon épaule.
Je comprends aussi. Lucia me manque chaque jours. Je sais qu'elle n'est pas loin, qu'elle est seulement dans un internat où elle est en sécurité, mais elle me manque énormément. Je ne peux m'empêcher de me dire qu'on perd du temps ensemble, tous les deux. Mais on a pas le choix. On a jamais eu le choix.
-« Enfin, bref! » Relance Niall en tapant dans ses mains, retrouvant un sourire. « Vous pouvez vous servir de la salle de bain et dans les affaires de mon frère si vous voulez. Je les laverais. De toute façon, il ne revient qu'à Noël.
-Ok, merci Niall. » Je lui répond avant de le laisser sortir de la chambre, refermant la porte derrière lui.
Une fois seuls, Harry toujours contre moi, une drôle d'atmosphère s'installe. Jamais je n'aurais cru que cette soirée se terminerait comme ça. Je regarde Harry, qui est à moitié endormi, qui arrive de moins en moins à tenir sur ses pieds. Je n'imagine même pas le nombre de verres qu'il a dû enfiler pour finir dans cet état.
Je regarde le lit derrière moi et décide de l'aider à s'asseoir dessus. Lorsque son poids n'est plus contre moi, j'ne profite pour secouer mes bras engourdis. Quant à Harry, il sort son téléphone de sa poche et le pose sur la table de chevet avant de s'allonger sur le lit, KO. Il ne porte qu'un t-shirt et, malgré le fait qu'on soit en Californie, les nuits peuvent être fraiches. Alors je décide d'attraper le drap au pied du lit afin de le remonter sur le corps d'Harry qui tourne justement la tête vers moi.
Je remarque qu'il a toujours ce fameux collier avec un papillon autour du cou.
-« T'as des frères et soeurs? » Il marmonne soudainement.
Je fronce les sourcils, surpris par sa question. On dirait qu'il est resté coincé dans la discussion que nous avions avec Niall quelques minutes plus tôt.
-« Une petite soeur. » Je lui répond d'une voix neutre. « Lucia. »
Harry sourit légèrement en me regardant, avant de hocher la tête.
-« Et toi? » Je lui demande alors, naturellement.
Harry détourne son regard et, pendant un instant, je m'attends à ce qu'il s'endorme à nouveau. Je vois bien qu'il est complètement perdu, qu'il ne sait peut-être même pas ce qu'il dit. Demain matin, il risque d'avoir oublié notre discussion.
-« J'ai une soeur jumelle. » Il me répond en jouant avec son collier. « Aimée. »
J'ouvre un peu plus grand les yeux, surpris.
-« Je ne l'ai jamais vu au lycée. » Je lui dis.
Harry sourit de nouveau à ma réponse, mais ne me regarde toujours pas. Ses doigts lâchent son collier et il se retourne dans le lit. Son visage s'enfouit dans l'oreiller et je ne peux plus voir son expression lorsqu'il me répond:
-« Elle est très loin d'ici. »
J'acquiesce, même s'il ne peut pas le voir. Peut-être que sa soeur est restée en Angleterre, là où il vivait avant. Je n'en saurais de toute façon pas plus. Parce que la respiration d'Harry se fait plus lente et que je devine qu'il s'est endormi. Je me surprends à le regarder un instant. Comme si le regarder pouvait me permettre d'entendre soudainement tous ses secrets. Les raisons pour laquelle il s'apprêtait à sauter. C'est plus fort que moi, je n'arrive pas à le contrôler.
Mais je dois le contrôler. Toujours tout contrôler. Alors je m'empresse de me relever pour partir m'enfermer dans la salle de bain. J'attrape rapidement mon téléphone où un message de Zayn s'affiche:
SMS de Zayn: Mec, t'es où? Je t'ai perdu.
SMS de Louis: J'ai eu une urgence, j'ai dû rentrer chez moi désolé. Je dors chez toi demain pour rattraper ça?
SMS de Zayn: Yes, pas de soucis. Tu peux même passer la journée chez moi demain si tu veux. A demain!
SMS de Louis: Ça marche on fait ça. A demain, fais gaffe en rentrant.
SMS de Zayn: Toujours ;)
Je souris en rangeant mon téléphone. Je vais passer la journée de demain chez Zayn ainsi que la nuit prochaine. Je ne rentre pratiquement pas du week-end chez moi. C'est parfait.
Tout contrôler. Toujours.
Je prends une grande inspiration et regarde mon reflet dans la glace. Je déglutis difficilement en remarquant que mon t-shirt est taché et que je me sens vraiment sale. Mais impossible que je dorme torse-nu. Alors je ressors de la salle de bain, vérifiant d'un coup d'oeil que Harry dorme toujours, avant de récupérer un t-shirt et un jogging dans les affaires du frère de Niall. Ça me gêne un peu mais pas le choix. Après avoir fermé à clef la salle de bain derrière moi, je me déshabille et grimace en sentant certaines partie de mon corps me tirer lorsque je me contracte. J'ignore le bleu sur mon ventre qui se reflète dans le miroir et m'empresse de glisser sous la douche. Je savoure l'eau chaude. Je savoure le fait que je n'ai pas la peur au ventre à l'idée de passer la nuit chez moi ce soir. Ni demain soir.
Une fois sorti de la douche, j'enfile les vêtements propres du frère de Niall et passe une main dans mes cheveux mouillés que je me contente de sécher rapidement avec une serviette. Je récupère mon téléphone et déverrouille la porte de la salle de bain pour retourner dans la chambre où Harry dort toujours.
Je m'apprête à m'installer au bureau. Parce que je ne sais pas si je dormirais cette nuit. Ce n'est pas une surprise. Que ça soit ici ou chez moi, ou n'importe où. Je fais plus d'insomnies que de nuits complètes. Depuis petit. Je n'ai pas besoin d'un psy pour savoir pourquoi. Je le sais très bien, au fond de moi. Lucia avait ce soucis aussi. Mais depuis l'internat, ça va mieux. Elle a un équilibre. Une meilleure hygiène de vie. Et c'est tout ce qui m'importe.
Mais, juste avant de m'asseoir, j'entends le téléphone de Harry vibrer sur la table de chevet, signalant un appel. Je l'ignore. Sauf que ça recommence, encore et encore. Harry ne se réveille pas. Il est vraiment épuisé. Commençant à perdre patience, je me lève pour attraper le téléphone qui signale un énième appel de Maman. Je sais que ça ne me regarde pas. Et que je ne devrais surement pas me mêler du fait que Harry se fasse engueuler ou non demain parce qu'il n'a pas répondu. Mais l'image du balcon me revient. Et je pense à cette mère inquiète qui n'est au courant de rien. Et qui continue de s'inquiéter.
Harry sait-il seulement la chance qu'il a d'avoir des parents qui s'inquiètent pour lui?
Je soupire à cette pensée et sort rapidement de la chambre pour décrocher à la mère d'Harry qui dit directement:
-« Harry? Mon chéri? Tu ne nous a pas envoyé de messages pour venir te chercher. Tu es encore à la fête? Tout va bien? Tu veux qu'on vienne maintenant? Ou plus tard? »
Mes yeux s'écarquillent et mon coeur se serre en entendant la détresse de sa mère. Il est quatre heures du matin. Quatre heures. Et elle est restée éveillée, attendant le signal de son fils pour venir le chercher? Je reste muet un instant avant de bafouiller, mal à l'aise:
-« Hm, bonjour.. Je suis un.. » Je réfléchis un instant avant de choisir la facilité: « Je suis ami d'Harry. »
Un léger silence avant qu'elle reprenne, encore plus inquiète:
-« Est-ce qu'il va bien? Il est arrivé quelque chose?
-Non! » Je la rassure aussitôt, mentant légèrement au passage. « Harry dort, il ne pouvait pas répondre. Nous venons de rentrer de la soirée et un ami a proposé de dormir chez lui. Harry s'est directement endormi, il a dû oublier de vous prévenir. »
Derrière le téléphone, je peux entendre la mère d'Harry soupirer de soulagement. Mon coeur se serre. J'en voudrais presque à Harry de ne pas l'avoir prévenu. Il ne réalise définitivement pas la chance qu'il a. Une belle maison, des parents aimants et qui s'inquiètent. Il a tout pour être heureux.
Et pourtant..Le balcon.
Je déglutis difficilement et chasse cette image de ma tête même si je sais qu'elle reste dans un coin, prête à ressurgir plus tard et peut-être même à me tourmenter toute la nuit.
-« Vous pourrez lui dire qu'il me dise demain matin quand on doit venir le chercher?
-Je lui dirais. » Je réponds directement.
-« Merci beaucoup... » La mère d'Harry laisse sa phrase en suspens et je comprends ce qu'elle attend.
-« Louis. » Je dis alors en me raclant la gorge.
-« Merci beaucoup, Louis. » Elle reprend d'une voix douce, maternel.
-« C'est normal. » Je termine, perturbé, avant de raccrocher.
Je regarde l'écran s'éteindre sous mes yeux et souffle un grand coup avant de m'appuyer contre le mur derrière moi.
Sans que je ne puisse le contrôler, mes pensées tournent maintenant autour d'elle.
Parfois, je me demande si je l'aime ou si je la déteste.
J'ai promis à Lucia que je retournerais la voir. Je crois que ma soeur s'accroche toujours à l'espoir que ça s'arrange un jour. Elle est très mature, mais elle a toujours l'espoir d'un enfant. Cet espoir que je n'ai plus. Parce que j'ai compris depuis longtemps que certaines choses ne sont pas faites pour s'arranger. On peut l'espérer de toutes nos forces, on peut aimer plus fort que tout, on peut se vider de nos larmes.
La vie n'a pas toujours pitié de nous.
Et pour ma part, je pense que la vie m'a carrément oublié.
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(Smells Like Teen Spirit_Malia J)
Charlie.
Enfermé dans la salle de bain, je déglutis difficilement face au grand miroir face à moi. Cet objet maintenant interdis dans ma chambre. Mais je me doutais que j'en retrouverais ici. Je mord violemment la lèvre inférieur avant de retirer ma robe qui glisse le long de mon corps, laissant apparaître le corset qui se cachait juste en dessous. J'étouffe, j'ai mal, je ne respire plus correctement. Ma mère n'est même pas au courant que je lui ai volé son corset, et j'espère qu'elle ne s'en rendra pas compte.
Regardez, c'est Charlie la baleine.
Les mots résonnent dans mon esprit en même temps que je retire mon corset, laissant maintenant mon ventre à l'air libre. Mes seins tombent légèrement, et je n'y avais jamais fait attention jusqu'à ce jour dans les vestiaires de sport.
Tu devrais mettre d'autres soutifs Charlie. Je dis ça pour toi hein. Mais les seins qui tombent c'est pas très...esthétique.
Je déglutis difficilement en attrapant mes seins et en les remontant légèrement, comme pour me donner une idée de ce que ça donnerait s'ils étaient plus hauts, plus beaux.
Tu devrais moins manger, Charlie. L'obésité c'est vraiment dangereux pour la santé.
Mes mains glissent maintenant jusqu'à mon ventre que je pince. Ça fait mal, mais est-ce que la douleur physique est plus douloureuse que celle qui se joue dans mes pensées en ce moment-même? Je tire sur ma peau. Je la tire au maximum, tentant de me donner la fausse idée d'un ventre lisse, d'un ventre plat.
C'est dommage, parce qu'elle a un beau visage.
Ma lèvre inférieur se met à trembler et mes yeux se mettent à piquer. J'attrape rageusement le pull que j'ai demandé à Niall pour l'enfiler. Je vérifie que mon ventre est bien caché. De toute façon, je vais rentrer le ventre jusqu'à en avoir mal. J'enfile ensuite le jogging que Niall m'a, encore une fois, prêté. Je déteste ma tenue, lorsque je me regarde dans le miroir. Mais, contradictoirement, elle me réconforte. Elle me cache. Je me sens moche. Et je pense que Niall a dû regretter de m'avoir choisi comme cavalière quand on voit à quel point Ava, Manël et plein d'autres filles du lycée étaient magnifiques.
Je sursaute violemment lorsque, justement, Ava entre dans la salle de bain à son tour. Les cernes sous ses yeux me confirment qu'elle est épuisée. Et il ne reste plus grand chose de son maquillage depuis qu'elle a pleurée. Je tente de lui sourire, retenant les larmes qui me menaçaient quelques secondes plus tôt. Mais son regard à elle tombe sur le corset à mes pieds, tout prêt de ma robe.
Elle fronce les sourcils alors qu'un immense sentiment de honte me traverse. Je sais qu'elle remarque immédiatement à quel point le corset est beaucoup trop petit pour moi. Une lueur traverse son regard, de la tristesse, ou de la pitié? Mais je ne lui laisse pas le temps de dire quoi que ce soit. Je me baisse et fourre le corset dans ma robe en boule. Je sors rapidement de la salle de bain et suis obligé de passer par le salon pour rejoindre la chambre de Niall où Manël se trouve déjà.
Lorsque je traverse le salon, je vois Lenny et Niall discuter sur les canapés alors que Liam est allongé sur le matelas. Niall est dos à moi, alors il ne me voit pas. Mais Lenny, lui, croise mon regard. Je sais qu'il comprend immédiatement que quelque chose ne va pas. Il y a ce lien entre nous. Ça a été comme un coup de foudre amical. Il fronce les sourcils et je secoue la tête, lui faisant comprendre de ne rien dire, de ne pas bouger.
Discrètement, je quitte le salon pour me réfugier dans la chambre de Niall. Manël est dans le lit et me sourit gentiment en me voyant arriver, à moitié endormie.
-« Bonne nuit, Charlie. » Elle me dit gentiment.
-« Bonne nuit, Manël. » Je réponds tout en cachant mon corset et ma robe dans un coin, avec mon sac.
Je m'installe ensuite sur le matelas par terre. Je ne veux pas prendre le risque d'aller dormir dans le lit, de prendre trop de place. Je préfère rester seule. Et je me demande parfois si ça sera toujours comme ça. La pensée de partager le lit avec quelqu'un, de partager un moment intime, me paraît impossible. Toute la soirée, je me suis dit que Niall m'avait proposé de l'accompagner par simple gentillesse. Et par amitié, sûrement, parce qu'on s'entend bien.
Mais moi, je le trouve beau. Très beau. Et je le trouve drôle aussi. Je me suis surprise plusieurs fois à le chercher du regard dans les couloirs, à me demander ce qu'il aime faire en dehors du lycée. Lenny m'a fait remarquer que je parlais souvent de lui, et j'ai rougis malgré moi. Ça ne fait qu'une semaine que je le connais. Mais je ne saurais expliquer ce que je ressens. Une attirance, très sûrement. Et c'est peut-être la première fois que je suis attiré comme ça par un garçon. J'ai eu des coups de coeur physique, évidemment. Mais là c'est un peu plus que ça. Parce que, plus j'apprends à le connaitre, plus je découvre des parties de lui que j'aime beaucoup.
Je suis attirée par Niall.
Mais je suis persuadé que ce n'est pas réciproque. Et que ça ne le saura jamais.
J'en suis arrivé au point où imaginer quelqu'un s'intéresser à moi me parait impossible. Et je ne dis pas ça pour exagérer. Je le pense sincèrement, littéralement. Vouloir attirer, vouloir plaire est quelque chose de si facile, de si simple pour certains. Quelque chose même de naturel.
A mes yeux, c'est beaucoup plus compliqué que ça. On m'a fait me poser des milliers de questions sur mon corps. A force de le juger, j'en suis arrivé à le juger moi aussi. A lui trouver des défauts. A l'aimer de moins en moins jusqu'à le détester.
Alors me dire que tout le monde le détestera aussi est devenu une évidence.
La lumière s'infiltre dans la chambre lorsque Ava entre à son tour. Du coin de l'oeil, je la vois refermer la porte, laissant régner le silence. Je ne connais pas bien cette famille. Elle est mystérieuse, discrète, et a subit la pire des humiliations l'année dernière. Elle est si forte d'être encore au lycée malgré ça. Mais ça serait mentir de dire qu'elle a l'air de passer au dessus. Elle semble juste subir et baisser la tête dans les couloirs du lycée.
Je la vois hésiter un instant avant de soupirer et de partir se coucher dans le lit avec Manël.
Le silence ne sera pas brisé ce soir.
Et les larmes continueront de couler, sans aucun bruits, ne laissant que des traces qui s'effaceront de nos joues une fois le soleil levé.
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(Smile_Nathan Grisdale)
Harry.
Lorsque j'ouvre les yeux, je sens d'abord le mal de tête intense qui me traverse et la façon dont mon estomac est retourné. Des nausées restent coincées au fond de ma gorge et mes yeux me brûlent. Je sens mon jean me coller, tout comme ma chemise. J'ai affreusement chaud soudainement et je retire le drap sur moi, réalisant en même temps où je suis. La soirée me revient en tête, comme des flash. Les verres, le balcon, l'image de la piscine si loin mais surtout du sol juste à côté, les bras de Louis autour de ma taille, les toilettes, Liam qui vomit lui aussi, la route qui défile derrière les fenêtres de la voiture, encore les bras de Louis, il parle avec Lenny mais je comprends pas tout, Louis demande s'il y a quelque chose entre Lenny et moi, mon coeur qui se serre et se réchauffe en même sans que je ne comprenne pourquoi, le trou noir, puis l'image de la chambre du frère de Niall, Niall qui dit que son frère lui manque, mon coeur qui se serre, le lit sur lequel je m'écroule, moi qui demande à Louis s'il a un frère ou une soeur, il me parle d'une Lucia puis me pose la question et..
Et je lui parle d'Aimée.
Je déglutis difficilement et ferme à nouveau les yeux, comme si je pouvais effacer cette soirée de mon esprit. Puis je réalise soudainement. Cette soirée. Cette nuit. J'ai dormi ici. Mes parents. Merde. Merde. Merde.
Je me redresse violemment, voyant des étoiles autour de moi le temps de quelques secondes avant de voir de nouveau correctement et d'attraper mon téléphone sur la table de chevet.
-« Panique pas. Ils savent que t'es là. » J'entends soudainement derrière moi.
Je sursaute et me retourne pour voir Louis assis sur la chaise de bureau, les yeux légèrement rouges avec des cernes presque noires. Je me demande depuis combien de temps il est réveillé. Mais, surtout, je me retiens de rougir en me demandant s'il a bien dormi ici avec moi. Une douce chaleur contracte mon estomac et je tourne la tête pour voir que les draps à côté de moi ne sont pas défaits. Je crois que Louis comprends mes pensées lorsqu'il se racle la gorge et baisse le regard.
Puis, comme si je réalisais soudainement ce qu'il m'a dit, je demande:
-« Comment mes parents ont su que j'étais là?
-Ta mère ne faisait qu'appeler, j'ai répondu et j'ai dit que t'étais chez un pote. »
Sans que je ne puisse le contrôler, mon estomac se serre à nouveau, mais beaucoup plus douloureusement. Parce que je comprends que Louis a parlé à ma mère. Et je connais ma mère, elle devait paraître paniquée. Elle le sera toujours, désormais. Et, pendant un instant, je panique à l'idée que Louis ait entendu cette panique. Je ne saurais expliquer pourquoi. Je suis en colère tout à coup, comme s'il avait brisé une partie de mon intimité. J'en ai déjà trop dit en parlant d'Aimée. Je suis en colère contre moi, mais c'est sur Louis que je me défoule lorsque je réponds:
-« T'avais pas besoin de répondre. Je me serais débrouillé ce matin. »
Ma voix est plus sèche que je ne le voudrais et Louis fronce les sourcils, visiblement vexé, avant de répondre:
-« Désolé de rassurer une mère qui n'est pas au courant que son fils a failli sauter d'un étage.
-Et la tienne sait que son fils se retrouve à pleurer sur les toits du lycée? » Je lui lâche en retour, touché par ce qu'il m'a dit.
Louis se fige et les traits de son visage sont soudainement tirés. Il déglutit difficilement et prends une grande inspiration en détournant rageusement le regard. Si j'étais énervé, lui aussi l'est maintenant. Et je ne ressens aucune fierté, que des regrets. C'est tellement petit. Je le réalise en même temps que je reprends plus doucement:
-« Je suis désolé. Je devrais plutôt te remercier de m'avoir aidé hier soir. Tu n'étais pas obligé et pourtant tu l'as fait. Et moi je me comporte comme un connard au réveil alors que t'aurais pu me laisser dans ma merde.. »
J'ose relever le regard à la fin de ma phrase pour regarder Louis dont l'expression s'adoucit, malgré la pointe de frustration qui reste dans son regard. J'ai du mal à le comprendre. Il m'a ignoré le reste de la semaine. J'en suis arrivé à penser qu'il me détestait depuis l'exercice du dessin. Et pourtant, hier, il m'a plus qu'aidé. Il est même resté. Je ne sais pas si c'est seulement de la reconnaissance que je ressens à cet instant, mais une douce chaleur vient recouvrir ma cage thoracique.
-« Tu allais vraiment sauter? » Me demande Louis, d'une voix plus douce, en retrouvant mon regard.
Sa question me fout les frissons, littéralement. La scène se joue à nouveau dans mon esprit. Même bourré, j'étais conscient de ce que j'allais faire. Et c'est peut-être ça le plus effrayant. Comme si l'alcool, à ce moment là, était seulement le courage qu'il me manquait pour...sauter le pas, littéralement. Ces pensées m'effraient plus que tout. Ce néant qui me terrorise n'était censé devenir une solution. Je ne devrais pas penser à ça. Pourtant c'est le cas. Et je refuse de mettre des mots sur ça.
Alors, à la place, je réponds en regardant Louis:
-« Tu ne veux pas parler du toit, je ne veux pas parler du balcon. Ça me paraît équitable, non..? »
La fin de ma phrase est presque un murmure. Mais Louis l'entend très bien. Et la frustration dans son regard ne disparait pas. Il serre les dents, regardant ailleurs et prenant à nouveau une grande inspiration. Est-ce qu'il réalise maintenant ce que j'ai ressenti lorsqu'il a ignoré mes messages et lorsqu'il refuse de parler de ce qu'il s'est passé sur le toit? Ce que j'ai ressenti lorsqu'il m'a demandé qu'on ne parle plus de notre rencontre sur le toit et que je lui ai répondu que je ne pouvais pas oublier?
Son regard est le même que le mien à ce moment-là.
J'espère qu'il comprend enfin que, non, on ne peut pas oublier ce genre de moments.
Et moi aussi je comprends alors pourquoi il ne veut pas parler du toit. Je me sens tellement vulnérable après ce qu'il s'est passé sur le balcon. Je n'ai pas envie d'en parler. Encore moins à Louis qui est celui qui m'a empêché de sauter.
On se comprend peut-être en ce moment-même.
Mais nous restons silencieux. Définitivement pas prêts à en parler.
Une étrange atmosphère s'installe. Nos regards se cherchent et se fuient en même temps. Heureusement, lorsque Niall entre soudainement dans la chambre, il met fin à ce silence pesant qui commençait à durer.
-« Ah! Je venais justement voir si vous étiez réveillés. Il est déjà midi, tout le monde est levé, et j'ai sorti du sucré comme du salé si vous avez faim.
-Merci, Niall. » Répond Louis, en profitant pour se lever. « Je vais me changer pour te rendre les vêtements de ton frère.
-Oh c'est bon, tu me les rendra lundi au lycée. Tu vas pas remettre tes vêtements d'hier soir s'ils sont sales. D'ailleurs, si tu as besoin Harry, tu peux te servir.
-C'est gentil mais je pense que je vais rentrer chez moi de toute façon. » Je lui dit avec un sourire gêné, sentant le regard de Louis se poser sur moi.
-« Tu ne veux rien manger? » Insiste Niall.
-« Je n'ai vraiment pas faim. » Je lui répond. « Je vais juste boire un verre d'eau, si ça ne te dérange pas.
-Evidemment! » Sourit Niall.
Je me lève alors du lit, me sentant sale, fatigué et nauséeux. Rien qui ne me donne envie de recommencer à boire. Je veux juste rentrer chez moi, prendre une douche et m'endormir à nouveau dans mon lit. Tenter de stopper mes pensées qui vont beaucoup trop vite dans mon esprit. Et ne plus ressentir cette chaleur qui ne disparait pas, surtout lorsque je tourne la tête avant de sortir de la chambre et que je croise le regard de Louis. J'ai presque envie de l'ignorer à mon tour. Surtout après lui avoir parlé d'Aimée. J'en ai trop dit. Et il m'a vu dans un état plus que honteux hier soir. Il m'a vu prêt à sauter.
Il en a trop vu, trop entendu.
En fait, je crois que ce qui me frustre, c'est l'impression d'être un livre ouvert face à lui alors que je ne sais rien de son côté. A part qu'il a une petite soeur qui s'appelle Lucia. C'est tout. En même temps, je sais que sa vie ne me regarde pas. Mais c'est plus fort que moi.
Je me souviens de la chaleur de ses bras autour de moi. La douceur de ses doigts autour des miens lorsque je tentais de rester accroché à lui. La façon dont il a tenté de me rafraichir avec un gant d'eau alors que j'avais l'impression d'étouffer. Il ne m'a pas lâché. Pas une seule seconde. Je me suis senti protégé, réconforté, sans même qu'il ne s'en rende compte.
Puis, je n'ai pas oublié cet échange:
« Le SOS. T'avais raison.
-Ouais, toi aussi t'avais raison. »
Il m'a dit que j'avais raison. Sous-entendant donc que j'avais raison de le dessiner avec cette larme sur la joue. Je m'en souviens. C'est flou, mais je m'en souviens.
Je ne devrais pas m'accrocher à ce réconfort que m'a offert Louis hier soir. Je ne devrais pas me dire que j'en ai besoin. Mais ça fait si longtemps que je n'ai pas eu l'impression d'avoir besoin de quelque chose. La seule personne dont j'avais besoin jusqu'ici n'est plus là. C'est pas sain, de s'accrocher au fait que Louis ait été là seulement le temps d'une soirée. Je ne devrais pas espérer en avoir plus. Je ne devrais même pas en vouloir plus.
Putain. Qu'est-ce que j'ai mal au crâne.
Lorsque j'arrive dans le salon, je pars directement m'asseoir à table auprès de Charlie qui me salue en souriant. Cette fille sourit tout le temps. Je crois qu'elle a passé une meilleure soirée que moi.
-« Tiens. » Elle dit en me tendant un verre d'eau.
-« Avec ça aussi. » Continue Ava, fatiguée, me tendant une boîte de doliprane qu'elle a dû utiliser elle aussi.
Je les remercie d'une petite voix et prends le comprimé tout en buvant mon verre d'eau, croisant le regard de Louis, debout et adossé à un mur de la cuisine. La cuisine est ouverte sur le salon où se trouvent Lenny, Niall et Manël, en train de manger, assis sur le canapé, la télé allumée en face d'eux.
-« Où est Liam? » Je demande.
-« Il est rentré chez lui. Il a vomi une bonne partie de la nuit et se sentait vraiment pas bien. Son père est venu le chercher vers huit heures du matin. » M'explique Niall en grimaçant.
Un silence s'installe. Je crois que nous avons tous de la peine pour Liam. Parce que, hier soir, nous avons tous vu son mal-être pour la première fois. Après m'être resservi un verre d'eau, je demande à Niall:
-« Niall, je pourrais avoir ton adresse? C'est pour mes parents, qui doivent venir me chercher.
-Je devrais aussi l'envoyer aux miens. Vu les devoirs qui attendent. » Soupire Charlie.
Lorsqu'elle dit ça, une pensée me traverse. Du moins, un rappel. J'écoute à peine Niall qui récite son adresse à Charlie. Je relève les yeux vers Louis qui a la tête baissée sur son téléphone et qui, dans son autre main, tient une madeleine qu'il a déjà mangé à moitié. Je me lève et profite d'aller mettre mon verre dans l'évier pour m'approcher de Louis qui relève la tête.
-« On... » Je commence avant de me racler la gorge. « On a toujours pas commencé à bosser sur l'exposé de français. On a même pas choisi l'oeuvre sur laquelle on aimerait travailler.
-C'est vrai. » Acquiesce Louis d'une voix neutre.
C'est très étrange de parler travail après la soirée que nous venons de passer.
-« Tu pourrais passer chez moi demain. » Je propose, tentant d'ignorer cette chaleur dans ma poitrine. « Pour qu'on commence. »
La surprise traverse son regard et il semble réfléchir un instant, lâchant mon regard quelques secondes avant de répondre d'un air détaché:
-« D'accord. A quelle heure?
-Treize heures? » Je propose. « Après si t'avais autre chose à faire de ton dimanche je comprends et..
-Treize heures, ça me va. » Il me coupe en haussant les épaules.
-« Cool. » Je réponds simplement. « Je t'envoie l'adresse par messages.
-Je peux te ramener chez toi, sinon. » Il propose, à ma grande surprise. « Histoire de connaître l'adresse.
-Oh, euh, ouais. » Je réponds, me sentant idiot de ne plus savoir formuler une phrase. « Merci. »
Louis se pince les lèvres comme simple réponse et me dit qu'il va chercher ses affaires sales avant qu'on s'en aille. Nous sommes les premiers à nous en aller. On remercie Niall qui nous dit à lundi. J'apprends que Charlie rentre chez elle avec Lenny et que Manël s'apprête à partir elle aussi.
-« J'ai pas envie de rentrer directement chez moi. » Nous avoue Ava d'une petite voix alors que Louis et moi sommes prêts à partir.
-« Reste autant que tu veux. » La rassure Niall avec un sourire bienveillant.
Pendant un instant, je crois voir le regard de Charlie se baisser et son sourire disparaître pour la première fois ce matin. Mais je n'ai pas le temps de m'y attarder. Louis me fait signe qu'on peut y aller et, après avoir salué tout le monde, nous sortons de la maison de Niall pour retrouver sa voiture.
Le trajet se fait en silence. Je parle seulement pour guider Louis sur la route qui mène à chez moi. Je vois son regard fixer les maisons qui se trouvent dans mon quartier. Elles se ressemblent toutes mais sont surtout toutes très grande. Je n'arrive pas à savoir si Louis semble impressionné ou dégoûté de ce quartier qualifié comme un quartier de riches.
-« C'est ici. » Je dis en montrant ma maison.
Louis ne dit rien et se contente de se garer en face de chez moi. Mais je ne me détache pas tout de suite, perdu dans mes pensées. Mais surtout perdu dans ces questions qui me donnent encore et toujours mal à la tête. Encore hier, avant la soirée, Louis m'ignorait. J'ai pensé qu'il me détestait. Je ne le connais que depuis une semaine, après tout. Une semaine suffit pour devenir insupportable aux yeux de quelqu'un. Pourtant il m'a aidé, hier. Seulement par pitié? Si c'était par pitié, s'il s'en fichait, pourquoi est-ce qu'il m'aurait demandé ce matin si je voulais vraiment sauter hier? Peut-être seulement pour sa conscience.
Je ne devrais même pas m'accrocher à ses questions. Ni aux réponses que je n'aurais sûrement jamais.
Surtout en voyant que Louis semble de nouveau fermé. Bien loin des bras réconfortant que j'ai pu sentir autour de moi.
-« Merci de m'avoir ramené. » Je dis simplement en me détachant.
-« De rien. » Répond Louis.
J'ouvre la portière et, alors que je m'apprête à sortir, c'est plus fort que moi. Les mots sortent tout seul de ma bouche. Parce que, putain, ça faisait des mois que je ne ressentais plus rien. Que je me sentais vide. Et, hier soir, cette nuit, je me suis senti plus vivant que jamais. Que ça soit à travers l'adrénaline, la douleur, cette chaleur réconfortante. Tout n'était pas agréable, mais au moins je ressentais quelque chose.
-« Si je voulais vraiment sauter, qu'est-ce que ça changerait? »
Surpris, Louis relève rapidement la tête vers moi, les lèvres légèrement entrouvertes et les sourcils froncés. Je vois bien qu'il ne sait pas quoi répondre. Mais je vois surtout que ma question ne le laisse pas indifférent. Peut-être qu'il n'y avait pas seulement de la pitié, finalement.
-« Je croyais que tu ne voulais pas en parler. » Il finit par me répondre, ignorant ma question.
Il a raison, d'un côté. Je me vois pas en parler. Mais j'avais besoin de poser cette question. Que quelqu'un l'entende. Qu'une personne dans ce monde entende la détresse dans ma voix. Et je me sens coupable que cette personne soit Louis. C'est comme si je lui faisais subir ce poids. Il sait maintenant, et je pense qu'il le savait déjà, que ce n'était pas seulement l'alcool hier soir. Que j'avais vraiment envie de sauter. Avec tout ce que ça engendre derrière. J'étais prêt à accepter les conséquences de ce saut. Mon coeur se broie en me l'avouant à moi-même.
J'étouffe à nouveau, réalisant ce que je viens de confier à Louis qui semble ne pas savoir comment réagir, sûrement choqué, ou regrettant de m'avoir ramené. C'est regrettable, de se retrouver coincé avec le petit nouveau du lycée, suicidaire, et qui n'en a parlé à personne d'autre que vous.
-« Si tu voulais vraiment sauter, tu devrais en parler au psychologue du groupe de soutien. » Reprend sérieusement Louis.
Je hausse simplement les épaules. Je ne me sens pas prêt à lui en parler, à Monsieur Thomas. Est-ce qu'il en parlerait à mes parents? Je ne peux même pas l'imaginer. Surtout pas. C'est la dernière chose dont il faut leur parler. Ils sont déjà brisés, ça ne ferait que les achever.
-« J'aurais pas dû te dire ça, désolé. » Je secoue la tête, prêt à partir cette fois. « Tu n'es pas obligé de venir demain.
-Je viendrais.
-Si tu viens pour ta conscience, je te rassure, je ne recommencerais pas. » Je lui dit.
Je ne sauterais pas. Je ne peux pas. Je n'en ai pas le droit. Je peux pas leur faire subir ça une seconde fois.
Louis tourne la tête vers moi et ancre son regard dans le mien, longuement. On se regarde comme ça, sans rien dire. Nous réalisons peut-être des deux côtés que cette nuit et cette discussion vient forcement de créer un lien, que nous le voulions ou non. Qu'on veuille en parler ou pas, j'ai vu ses larmes sur ce toit et il a entendu mon SOS sur ce balcon.
On ne sait rien l'un de l'autre.
A part peut-être le bruit de nos silences.
Et dans le sien, à cet instant, je comprends qu'il y a plus que ça.
Plus qu'une histoire de conscience ou de pitié.
Malgré moi, de mon côté, c'est aussi le cas. Il y a plus que ça.
-« A demain, Louis. » Je brise le silence, la chaleur devenant trop forte au creux de mon ventre.
Je fuis en sortant rapidement de la voiture, refermant la portière derrière moi. Dos à lui, montant les marches jusqu'à ma porte d'entrée, j'entends la voiture s'éloigner. Et, lorsque je regarde par dessus mon épaule, je croise une dernière fois le regard de Louis avant qu'il ne reprenne la route, ses pensées peut-être autant en vrac que les miennes.
Je prends une grande inspiration avant de soupirer longuement.
« Mais pourquoi lui?
-Je ne sais pas. Ça s'est fait comme ça.
-Tu ne sais pas? Il y a bien une raison.
-Alalaa, j'ai hâte d'être au jour où tu ressentiras quelque chose que tu ne peux pas expliquer, Harry! »
On y est arrivé à ce jour, Aimée.
Mais tu n'es pas là pour voir ça.
J'ai terriblement besoin de toi.
♦
MESSAGERIE HARRY/LOUIS
20h00.
De Harry: « Bien sûr, dit le renard. Tu n'es encore pour moi qu'un petit garçon tout semblable à cent mille petits garçons. Et je n'ai pas besoin de toi. Et tu n'as pas besoin de moi non plus. Je ne suis pour toi qu'un renard semblable à cent mille renards. Mais, si tu m'apprivoises, nous aurons besoin l'un de l'autre. Tu seras pour moi unique au monde. Je serai pour toi unique au monde »
De Louis: Tu veux qu'on travaille sur le Petit Prince de Saint-Exupéry pour le devoir de français?
De Harry: Oui, si tu veux aussi?
De Louis: « On risque de pleurer un peu si l'on s'est laissé apprivoiser... »
...
J'espère que ce chapitre vous aura plu..?
Encore merci infiniment d'être là. Je vous souhaite une très belle soirée et un très bon week-end!
Plein d'amour!❤️
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