Chapitre 18

Hi! J'espère que vous allez bien?

Plus de 600 commentaires sur le précédent chapitre si vous saviez comme je vous suis reconnaissante et comment vous me rendez heureuse avec vos réactions et vos mots merci pour tout. J'ai 4 semaines devant moi où je vais enfin pouvoir prendre le temps de vous remercier un par un alors merci mille fois pour tout.

J'espère que ce chapitre vous plaira!

...

CHAPITRE 18

« J'ai vécu le malheur dans le silence qu'il a fait en arrivant. » -Alain Laugier

(Time_NF)

Zayn.

La capuche rabattue sur ma tête, je regarde dans tous les sens tout en tirant sur ma cigarette. Je crois que je ne réalise pas ce que je suis en train de faire. Du moins ce que je m'apprête à faire. C'est arrivé si vite, trop vite. Le matin je me disputais avec Louis puis j'apprenais qu'il était dans un groupe de soutien pour que, au final, je décide de le rejoindre moi aussi. D'ailleurs, il faudrait que j'informe madame Smith de cette décision. En évitant de préciser que je fais mon entrée dans le groupe en décidant d'entrer par infraction dans le lycée avant son ouverture.

Comme on l'a organisé hier, Lenny a terminé de faire les affiches où nous annonçons, sans dévoiler notre identité, que nous ouvrons un site où on veut recueillir des témoignages, encore une fois, anonymes. J'ai y réfléchi une bonne partie de la nuit. Je me dis qu'il y a deux options possibles. On peut se prendre le plus gros vent de la Terre ou alors on crée nous-même une tornade dans l'enceinte du lycée. Mais, à ce moment-là, ça sera à nous de choisir comment la gérer. Je me demande si les autres réalisent l'impact que pourrait avoir notre idée.

Parce qu'elle commence déjà par me faire prendre le risque d'être viré.

Je sors de mes pensées en voyant une silhouette courir vers moi. Je reconnais Ava, en train de courir tête baissée à cause de la pluie. Il pleut énormément aujourd'hui et je ne pense pas que ça va aller en s'arrangeant. A croire que je me retrouve réellement dans une série dramatique pour ado. Mais dans la vie réelle je prends le risque de perdre le job qui me permet d'espérer un potentiel avenir, une chance de payer enfin mon entrée à l'Université.

De toute façon, en voyant Ava me rejoindre, le jean et le sweat complètement trempés, je me dis qu'il est trop tard pour faire marche arrière.

-« Salut. » Elle lance, essoufflée.

-« Salut. » Je réponds en lâchant mon mégot qui tombe à mes pieds.

Ava suit mon geste du regard avant de relever la tête vers moi, me lançant un regard accusateur.

-« J'espère que tu comptes le ramasser et le jeter?

-Je te demande pardon?

-Le mégot. La pollution, le réchauffement climatique ça te dit un truc?

-Oh putain, on dirait les leçons que la petite soeur de Louis lui fait.

-Elle devrait t'en faire aussi, alors. »

Je hausse les sourcils, surpris du franc parlé de la rousse devant moi, et Ava ne compte apparement pas lâcher mon regard tant que je ne ferais pas ce qu'elle vient de me demander. Et, dans le fond, elle a raison. Même si ça me fait chier de l'admettre.

-« Ok. Range tes griffes, tigresse. » Je lui lance en ramassant mon mégot maintenant trempé.

-« Quel surnom de merde. » Elle grimace.

-« Oh je sens que cette mission à tes côtés va être un moment de plaisir. » Je m'exclame en jetant mon mégot dans la poubelle.

Lorsque je me retourne, Ava me regarde avec un sourire fier, mais aussi amusé. Je crois qu'elle confirme ce que je viens de supposer. Ça me fait bizarre de me retrouver seul avec cette fille dont je ne sais rien à part les rumeurs et les photos qui ont tournées sur elle l'année dernière. Mon coeur se serre en y repensant. Elle est devenue un fantôme après cet évènement et c'est la première fois que je la vois sûre d'elle. Si on ne compte pas hier, accompagnée par le groupe de soutien. Je sais ce que ça fait que devoir vivre avec une stéréotype qu'on nous colle sur le front de force, faisant fuir les personnes qu'on croise parce qu'elles finissent par ne voir que ça.

-« J'ai les affiches. » Me dit Ava en tapotant son sac à dos. « On y va?

-On va passer par derrière. »

Je commence à avancer et sors les clefs de la poche de ma veste pour ouvrir la porte arrière du lycée, celle qui nous fait passer par le gymnase.

-« C'est ici que je vais entrer dans votre secte, du coup? » Je demande en refermant la porte derrière nous.

Ava lève les yeux au ciel mais sourit légèrement tout de même en me répondant:

-« Si tu veux dire par là, est-ce que c'est ici que se déroulent les séances du groupe de soutien, la réponse est oui.

-Tu pouvais directement répondre oui. »

Ava soupire face à mon sourire en coin et nous traversons tous les deux le gymnase. Avant d'en sortir, elle colle deux affiches juste à l'entrée du gymnase. Lorsque nous nous retrouvons ensuite dans les couloirs, Ava s'inquiète seulement maintenant d'un détail plutôt important:

-« Attends, mais il n'y a pas de caméra de sécurité dans le lycée?!

-Si.

-Donc on est filmé?

-Oui. »

Ava se fige tandis que je pique une affiche de son sac ainsi que la grosse colle pour mettre des affiches sur les premiers casiers. Je reste calme, me retenant de sourire en l'entendant paniquer en chuchotant:

-« Mais, mais, mais...

-Pas besoin de chuchoter on est seuls.

-Mais tu t'en fous de ce que je viens de réaliser?!

-Non. C'est juste que je suis assez intelligent pour y avoir pensé avant toi. »

Ava ouvre grand les yeux, sûrement vexée, et je lui lance un grand sourire avant de lui expliquer:

-« Je sais où se trouvent la salle de contrôle tout ça. Je supprimerais les enregistrement de la matinée. Ils sauront que quelqu'un les a supprimé, que cette personne a accroché des affiches, mais ils ne sauront pas qui.

-Et s'ils cherchent des empreintes?!

-On met des affiches. On a tué personne ils vont pas en faire toute une histoire. » Je tente de me convaincre.

-« Tu n'en sais rien. » Elle me répond.

Je déglutis difficilement, réalisant qu'elle a raison sur ce point.

-« Il faut que madame Smith soit notre complice. » Dit soudainement Ava.

Je tourne rapidement la tête vers elle, les yeux écarquillés. Le pire, c'est lorsque je vois qu'elle est sérieuse.

-« Attends, attends, attends. » Je dis rapidement en agitant mes mains devant elle. « Tu veux la complicité de notre proviseur et donc lui avouer notre acte de vandalisme et toutes les règles que nous sommes en train de transgresser?

-Oui.

-Juste oui?!

-C'est toi qui m'a dit tout à l'heure que j'aurais dû juste répondre oui!

-T'as prit quelque chose avant de venir?

-Oh mais ferme-là! » Elle râle avant de reprendre sérieusement: « Je pense que c'est une bonne idée.

-Madame Smith va juste nous virer tous les deux.

-Elle est pas comme ça!

-C'est une directrice avant tout!

-Ose me dire que tu n'as pas confiance en elle? Je me doute que si tu travailles ici c'est grâce à elle. Elle a voulu t'aider comme elle m'a aidé en me proposant ce groupe de soutien et en prenant ma défense l'année dernière alors qu'on voulait me virer du lycée à cause des photos! »

Les traits de mon visage se détendent en voyant le regard de Ava briller un peu plus. Elle ne pleure pas, mais des larmes de rages rendent son regard noir encore plus puissant. Comme si elle regrettait son aveu, elle passe une main sur son front en soupirant. Je décide alors de mettre le sarcasme de côté pour répondre sincèrement:

-« Je suis désolé pour ce qu'il s'est passé l'année dernière. Tu ne méritais pas ça.

-Si, je le méritais. » Elle répond durement.

Je fronce les sourcils et secoue négativement la tête, me rapprochant instinctivement d'elle pour qu'elle entende bien mes paroles :

-« Bien-sûr que non. Tu ne le méritais pas. Personne mérite ça.

-Ce sont mes photos. J'ai dû assumer.

-Mais c'est la faute du connard qui les a partagé. Pas la tienne.

-C'est gentil, Zayn, mais tu ne me fera pas changer d'avis sur la haine que je ressens envers moi-même depuis un an. » Elle me coupe d'un ton sec.

Je me tais, ne sachant pas quoi faire de plus. Elle a raison, ce n'est pas moi qui réussirais à lui faire changer d'avis. On ne se connait pas vraiment et ce qu'elle a vécu ne s'efface pas avec un ce n'est pas de ta faute. Mais ça me fait vraiment mal au coeur d'imaginer la honte et la haine qu'elle ressent envers elle-même. Depuis déjà un an. J'aimerais vraiment savoir quel est le connard qui a osé lui faire subir ça. Elle doit le savoir, mais elle en a jamais parlé. Sûrement à cause des représailles.

Je vois un tout autre visage d'Ava. J'ai connu le fantôme, la fille sûre d'elle, et maintenant la fille qui ne se supporte pas du tout, qui s'en veut et se déteste, pensant que ce qu'elle a subit est de sa faute.

Mais elle reprend un air et un ton neutre pour briser le lourd silence qui nous entoure:

-« Tout ça pour dire que madame Smith m'a aidé à ne pas être viré d'ici lorsqu'elle a su que ma mère n'aurait pas les moyens de nous faire déménager ou de m'inscrire dans un lycée privé du coin. J'ai l'intuition qu'elle ferait beaucoup pour ses élèves et pour les défendre si elle sait qu'ils ont de bonnes intentions. Et ça serait beaucoup plus simple pour nous d'agir en sachant qu'on est soutenu par madame Smith. Mais si tu ne veux pas prendre le risque de lui dire, je le ferais. Et je dirais que je suis venu toute seule mettre les affiches. Je trouverais une excuse pour les clefs. Je dirais que je te les ai volé quand tu regardais pas et t'auras qu'à répondre que, oui, tu les avais perdues.»

Sur ces mots, Ava se retourne pour se remettre à coller les affiches. Mais, moi, je reste immobile, complètement tiraillé. Si on avoue à madame Smith que c'est nous le coup des affiches, il n'y aura plus de retour en arrière. On l'aura avoué. Alors si elle décide de nous virer, nous le serons. Je n'aurais plus de travail. Plus de moyen de financer ma future université.

J'aimerais être dans une série américaine où j'ai le soudain courage d'assumer mes actes, mes idées, où je dirais à Ava que si ça tourne mal je me dénoncerais à ses côtés. Mais on est pas dans une série. Personne ne peut me donner ce courage à par moi-même. Et je n'en suis définitivement pas capable.

Parce que j'ai toujours l'impression d'être spectateur de ma vie.

Jamais celui qui choisit ce qu'il veut en faire.

(Video Games_Lana Del Rey)

Harry.

Les yeux brûlants de fatigue, mais aussi des larmes qui ont coulées cette nuit, j'arrive dans le salon tête baissée. J'écoute les goutte d'eau qui tombent contre la fenêtre, qui continuent leur course jusqu'à éclater au bout. J'ai l'impression que c'est comme ça que je vais finir, moi aussi. Comme la pluie. Tomber, encore et encore, puis éclater. Et, une fois évaporé, ne rien laisser derrière moi.

Pourtant je sais à quel point c'est faux. A quel point on laisse toujours quelque chose derrière nous. Je le vois chaque jours et encore plus hier soir suite à la dispute avec mes parents. Devant Louis. J'ai vu la surprise, voir la peur dans les yeux de ma mère lorsque je lui ai dit qu'il était au courant. Elle ne s'attendait pas à ce que je sois prêt à en parler. Et je ne le pensais pas non plus. Louis a juste deviné et je n'ai pas eu la force de le contredire. Pas eu la force de cacher ma peine à une personne de plus. Je ne sais pas si je regrette. Louis sait mon secret même si je connais aucun des siens. Et, lorsque je réalise l'explosion que ça provoque d'avouer un secret, je ne peux pas lui en vouloir de ne pas le faire.

Mais je crois que, d'un côté, ça m'a fait du bien. Comme si j'arrêtais de cacher le secret d'Aimée aussi. On en a fait un secret et, si elle pouvait me parler là maintenant, je ne sais pas si ça lui conviendrait de nous voir souffrir en silence, comme si notre fille et notre grande soeur était juste en train de faire sa vie ailleurs. Alors que sa vie s'est terminée.

-« Harry? »

Mon coeur se serre à la seconde où j'entends la voix de ma mère. Je tourne la tête vers elle, assise dans le canapé du salon avec un thé à la main. Mon père n'est pas là, déjà parti au travail. Mon regard s'ancre dans celui de ma mère et c'est fou cette sensation de ne plus connaître la personne en face de moi. Parce que j'ai toujours eu une mère heureuse.

Je n'avais jamais rencontré ma mère malheureuse.

-« Je suis désolé. » Je lui dit immédiatement, d'une voix neutre pour ne pas laisser l'émotion me submerger. « Je suis désolé de t'avoir parlé comme ça hier.

-Je comprends que tu sois énervé. » Elle me répond d'une petite voix. « Je suis...Je suis... Je suis désolée de ne pas savoir quoi faire pour aller mieux. »

Sur cette phrase, le visage de ma mère se déforme sous la tristesse et les sanglots viennent rapidement secouer son corps. Elle se met à pleurer devant moi et je décide de garder ce masque imperturbable afin de la rejoindre pour la prendre dans mes bras où elle se laisse complètement aller. Entendre et sentir ses sanglots me déchire le coeur. Mais le pire reste d'entendre sa culpabilité. C'est ma mère, mais c'est aussi celle d'Aimée. J'ai aussi dans mes bras une femme qui a perdue son enfant.

-« Tu n'as pas à t'excuser d'aller mal. » Je réponds contre son cou.

-« Ça devrait être moi en train de te réconforter. » Elle sanglote en s'accrochant à moi.

Je secoue négativement la tête, la gorge nouée et les larmes se remettent à briller dans le coin de mes yeux.

-« Je suis désolée d'être terrifiée à l'idée de te perdre toi aussi. » Continue ma mère à travers ses sanglots. « J'ai sans cesse l'impression que ça peut recommencer, que je peux de nouveau rien voir venir et...

-Je suis là. Je serais toujours là. » Je la coupe doucement.

Ses pleurs se font encore plus forts et je la serre de toutes mes forces contre moi, ayant pour la première fois la peur de la perdre elle aussi. Comme si je réalisais que je ne suis pas le seul à pouvoir craquer. Même si je sais que je ne serais pas capable de le faire. Malgré le fait que vivre sans Aimée me paraisse tout autant impossible.

-« Tu veux que je reste avec toi aujourd'hui?

-Non. » Elle renifle en secouant la tête. « Je vais aller travailler.

-Dans cet état...?

-J'ai besoin de travailler. D'aider ces femmes à donner la vie.

-Ça n'empire pas les choses, justement...? »

Ma mère sourit tristement, reniflant à nouveau alors que les larmes continuent de couler sur ses joues. Elle hausse les épaules, preuve qu'elle n'en sait rien, avant de poser une main sur ma joue pour la caresser tendrement.

-« Je vais essayer de parler avec le psychologue de l'hôpital. »

Je hoche doucement la tête. Je pense que c'est une bonne idée et que mon père et moi finiront par prendre rendez-vous nous aussi. Mais pour l'instant j'ai le groupe de soutien et je sais que, si j'ai besoin, le psychologue du lycée Monsieur Thomas n'est jamais loin. Un jour, peut-être, j'arriverais à aller lui parler. Mais pas encore.

-« Tu veux que je te dépose au lycée? Il pleut beaucoup. » Me propose ma mère en essuyant ses larmes.

Je n'en ai pas vraiment envie. J'avais prévu de marcher, tenter de me vider la tête malgré la pluie. Mais dans les yeux de ma mère je vois qu'elle a besoin de m'avoir auprès d'elle, d'être sûre qu'il ne m'arrive rien durant le trajet. Mon estomac se tord douloureusement mais je tente tout de même un léger sourire lorsque je lui réponds:

-« Oui, je veux bien. »

Lorsque ma mère me dépose devant le lycée, le prénom de Louis ne fait que résonner dans mon esprit, comme il l'a fait cette nuit. En même temps que j'avance vers le groupe de soutien abrité sous l'abris à vélo, je cherche Louis du regard. Mais je ne le vois pas. Tout comme je ne vois pas sa voiture sur le parking. Il n'est peut-être pas encore arrivé et je ne peux m'empêcher de sentir mon coeur se serrer à l'idée de nos retrouvailles. Je pense lui avoir fait peur en lui demandant désespérément de dormir chez lui suite à la dispute avec mes parents. Ça a été plus fort que moi. Je voulais juste partir, encore chamboulé par le fait que j'avouais pour la première fois la mort d'Aimée. J'entends encore la voix de Louis me dire qu'il peut pas, qu'il est désolé. Je le crois, il avait vraiment l'air désolé.

Et j'aimerais lui dire aujourd'hui que je le suis moi aussi. Désolé de m'accrocher un peu trop à notre relation contrairement à lui. On a pourtant été clair depuis le début et je n'avais pas à lui proposer ça, surtout après un moment comme celui-là où il allait forcement culpabiliser de dire non.

Je m'en veux. Et j'essaie d'ignorer ces pensées qui me demandent où est-ce que ça va mener, lui et moi. J'ai l'impression de foncer dans un mur et d'attendre le jour où Louis comprendra que je m'attache un peu trop à lui, à sa présence. Je ne vois pas comment ça pourrait bien terminer.

-« Hey! » Lance Lenny en me voyant arriver.

Tout le groupe tourne alors la tête vers moi et je les salue avec un signe de la main, gardant ma capuche même une fois abrité. J'arrive en plein milieu d'une conversation et je vois Ava complètement excitée. Face à mon air perdu, elle me rappelle:

-« Ça y est. On a accroché les affiches. »

Oh. J'avais tellement de choses en tête que j'avais complètement oublié ce détail plus qu'important. Instinctivement, je regarde vers l'entrée du lycée où certains élèves en sortent, l'air surpris, avant d'aller rapidement dire à ceux qui arrivent ce qu'il se passe à l'intérieur. Ils doivent se demander si c'est organisé par le lycée. Si le site est tenu par la proviseur. Si c'est juste une blague.

-« Attendez, Louis n'est pas là? » Demande Zayn en arrivant juste après moi.

On se regarde tous et c'est finalement Charlie qui répond:

-« Il n'est pas encore arrivé. »

Zayn hoche la tête, les sourcils froncés, et je ne peux m'empêcher de lui demander:

-« Tu as eu des nouvelles de lui, hier soir?

-Non. Mais il était avec toi, non?

-Oui. » Je réponds d'une voix basse.

Je détourne ensuite le regard, ne voulant pas raconter notre fin de soirée. Je sens le regard insistant de Zayn sur moi et lorsqu'il prend son téléphone je devine que c'est pour envoyer un message à Louis, chose que je suis incapable de faire actuellement. Je suis beaucoup trop gêné et perdu à l'idée de ce que pourrait penser Louis de notre dernière conversation.

-« Ils doivent tous être en train de découvrir les affiches. » Lance Manël en regardant l'entrée du lycée.

-« On devrait y aller aussi. » Intervient Liam.

-« On attend pas Louis? » Demande Niall.

-« Il nous rejoindra. Les cours commencent dans pas longtemps, en plus. » Répond Ava.

Nous nous dirigeons donc tous en direction de l'entrée mais, juste avant de rejoindre les autres, je ne peux m'empêcher de regarder en direction du parking dans l'espoir d'y trouver la voiture de Louis et de le voir en sortir. C'est étrange, cette sensation de redouter le retrouver et d'avoir en même temps l'impression qu'il me manque.

-« Tu t'inquiètes pour lui? » Me demande Zayn en passant devant moi.

Je déglutis en le regardant et me contente de hocher positivement la tête. Cette réponse fait légèrement sourire Zayn qui finit par me dire:

-« T'as pas choisi le mec le plus simple. »

Mais, la seconde d'après, il rajoute en me regardant:

-« Mais c'est quelqu'un de bien. Alors il vaut la peine qu'on se batte pour lui. »

Surpris par la déclaration de Zayn, je réalise seulement maintenant à quel point l'amitié qu'il ressent pour Louis est extrêmement forte. Et il a raison. C'est ce que je ressens au fond de moi. Vouloir me battre pour comprendre Louis et pour être à ses côtés, même s'il souhaite garder ses secrets pour lui, même si ça doit prendre du temps, même si nos routes doivent finir par se séparer.

Mon coeur se serre à cette pensée, qui est pourtant la possibilité la plus probable, mais heureusement nous entrons dans le lycée et j'arrête de penser à Louis le temps d'un instant. Je regarde les nombreuses affiches collées aux casiers ou directement sur les murs, sur les portes des classes. Beaucoup d'élèves s'arrêtent pour les lire, même certains professeurs dont la directrice madame Smith qui tourne la tête vers nous en nous voyant regroupé en plein milieu du couloir.

-« Ok. Restez naturels. » Chuchote Niall en se mettant dos à madame Smith. « Elle a l'air en colère?

-Pas vraiment. » Répond Lenny. « Elle regarde l'affiche devant elle mais elle nous a regardé aussi.

-« Elle sait que c'est nous. » Panique Niall.

-« Elle a pas de preuves. » Tente de se rassurer Liam. « Vous avez laissé aucunes preuves, hein? » Il demande en regardant Ava et Zayn.

-« Si bien sûr, j'ai laissé une fiche avec nos noms, prénoms et adresses. » Ironise Zayn en levant les yeux au ciel.

-« Moi je pense qu'on devrait lui dire que c'est nous. » Dit soudainement Ava.

-« Mais t'es folle! » Chuchote Niall.

-« Pourquoi tu penses ça? » Demande Manël sans aucune once de jugement.

-« On a besoin d'un allié si on veut pouvoir continuer notre mission sans l'angoisse de nous faire virer. En étant au courant, madame Smith pourrait nous aider et couvrir nos arrières!

-Oh, comme le professeur dans la Casa De Papel. » Lâche Niall avec de grands yeux.

Charlie rit face à sa réaction, ce qui fait rire Niall avec elle.

-« En vrai, ça passe ou ça casse de lui dire la vérité. » Dit Liam, stressé.

-« Et on pourra pas faire machine arrière. » Complète Zayn.

-« On a qu'à attendre un peu et voir ce que compte faire madame Smith par rapport aux affiches. Si elle aime bien l'idée ou si elle fait tout retirer. » Propose Manël.

-« Ouais, on peut attendre un peur. » Confirme Ava en hochant la tête.

-« Alors on fait comme si de rien n'était pour l'instant? » Demande Niall.

Ava et Manël hochent la tête et tout le monde semble être d'accord avec l'idée d'attendre un peu. Comme pour conclure cette conversation, la sonnerie retentit, nous avertissant du début des cours. On se dit alors tous à plus tard, à midi pour certains, sinon à ce soir pour le groupe de soutien.

Lorsque je me retrouve seul, je regarde une affiche collée juste à côté de mon casier.

-« Je me demande si j'ai raté certains de tes messages... » Je murmure, le coeur serré.

Puis je repars en direction du cours de français. Celui que j'ai en commun avec Louis.

Mais la place à côté de moi reste vide.

(Colors-Stripped_Halsey)

Louis.

Message de Zayn:

Hey mec tu viens pas aujourd'hui?

Harry s'inquiète pour toi c'est trop mignon ;)

Mon coeur se serre et se réchauffe en même temps que je lis les messages de Zayn qui datent de ce matin. La dernière phrase me retourne l'estomac. Une part de moi est reconnaissant qu'il s'inquiète pour moi, je n'ai pas l'habitude qu'on remarque mon absence, et d'un autre côté je culpabilise. Je me dis qu'il doit aussi s'inquiéter de ne pas me voir par rapport à ce qu'il s'est passé hier soir. Je m'en veux de ne pas avoir eu d'autre choix que de le laisser seul avec ses parents en crise. Mais surtout de le laisser après ce que j'ai appris. Sa soeur jumelle est morte.

J'y ai pensé toute la nuit. Je me suis imaginé vivre ça avec Lucia et j'ai senti mon coeur se briser en mille morceaux. Je comprends mieux la peine immense que Harry porte sur son visage ainsi que sa présence au groupe de soutien. Son déménagement ici, est-ce que c'est aussi due au décès de sa soeur? Je me surprends à vouloir qu'il me parle d'elle, qu'il me parle de leur relation, mais je n'oserais sûrement jamais lui demander ça. Je me demande comment il était lorsqu'elle était encore là? Souriant? Heureux? Extraverti?

Et comme il est à cet instant? Je l'imagine seul à notre cours de français ce matin et je surprends mon coeur se serrer. C'est horrible de réaliser que j'aimerais être avec lui, là maintenant. Que j'aimerais être sur ce toit, en train de répéter notre exposé sur le Petit Prince qui approche avec la fin du trimestre. Même après ce qu'il s'est passé hier soir, j'aimerais juste être avec lui. Qu'il me parle ou non de sa soeur. Qu'on parle ou non, d'ailleurs. Juste être à côté de lui.

Je sors de mes pensées lorsque la portière côté passager s'ouvre soudainement. Je tourne rapidement la tête pour voir ma mère entrer avec un gros sac rempli de vêtements qu'elle balance sur la banquette arrière avant de me regarder dans les yeux. Son visage est moins marqué mais ses yeux semblent toujours aussi fatigués. La personne en face de moi n'est plus réellement ma mère depuis un moment.

Depuis le jour où elle a frappé Lucia devant moi.

-« Coucou chéri! » Elle lance joyeusement en me regardant.

Je lui rend un regard froid avant de tourner la tête et d'allumer le contact.

-« Super accueil.

-Mets ta ceinture. »

Même si je ne la regarde pas, je l'imagine lever les yeux au ciel tout en soupirant avant de se retourner pour attraper sa ceinture et l'accrocher.

-« Matthew t'as donné un sachet pour moi?

-Wow tu auras donc tenu dix secondes après être sortie de cure de désintox.

-Je sais que tu en as rien à foutre, Louis. »

Alors que je m'apprêtais à quitter le parking, je freine brusquement, envoyant ma mère légèrement vers l'avant. Elle me regarde, surprise, alors que je lui lance un regard rempli de dégout en même temps que je lui dis:

-« Avant, j'en avais quelque chose à foutre. Parce que je m'inquiétais pour ma mère avant de réaliser que, de toute façon, elle faisait tout pour nous mettre encore plus dans la merde. Avant que tu t'en prennes à Lucia et que tu deviennes rien d'autre qu'un monstre à mes yeux. Que tu te drogues aujourd'hui? Ouais, j'en ai rien à foutre. Mais tu pourrais au moins rester enfermé ici parce que, comme d'habitude, tu me gâches la vie dès que tu en sors. En commençant par aujourd'hui où je rate les cours ainsi que mon entraînement de foot alors que chaque absence met en péril ma bourse et ma seule chance de nous sauver, Lucia et moi. Tu sais, les enfants que tu as mit au monde avant de leur pourrir la vie.

-Alors pourquoi tu ne me dénonce pas? » Elle me lance, sûre d'elle.

Je ris nerveusement en secouant la tête. Elle sait très bien pourquoi.

-« Parce que Lucia croit encore que tu vas changer. Et que je ne veux pas qu'elle ait un second parent en prison. »

Mais aussi parce que Matthew serait capable de littéralement me tuer.

-« C'est pourtant drôle des réunions de famille au parloir. » Est la seule chose que ma mère trouve à dire.

Mes doigts se resserrent autour du volant et je sais que la meilleure solution à cet instant est le silence. Parce que je pourrais pleurer, hurler, supplier ma mère de se reprendre qu'elle n'y arriverait pas. Qu'elle ne le voudrait pas. On parle d'instinct maternel et pourtant la seule personne en qui j'ai cru est mon père. Alors que Lucia, elle, se force à croire encore en notre mère. Et c'est ce qui me fait le plus mal.

-« Tu sais que Lucia va vouloir savoir que je suis rentré.

-Je lui annoncerais la mauvaise nouvelle, oui. »

Ma mère rit face à ma réponse pourtant plus que sincère. Tandis que je tente de cacher la tristesse qui m'empare face à la future conversation avec ma soeur. Quelques heures de route me séparent de cette conversation pour l'instant mais ça va arriver. Et, comme toujours, je vais devoir prendre sur moi.

Je me demande ce que a ressenti Harry lorsqu'il m'a avoué pour sa soeur.

Est-ce que dévoiler un secret fait plus mal que de le garder?

-« Tu ne rentre pas avec moi à la maison? » Me demande ma mère lorsque je me gare devant chez Matthew.

-Ce n'est pas ici, ma maison.

-Parce que tu penses en avoir une, alors? »

Ma mère me sourit méchamment avant de claquer la porte de la voiture. Je la regarde en faire le tour avant d'ouvrir la porte de chez Matthew. Je sais déjà ce qui les attend. De l'alcool, de la drogue, du sexe. Vivre sous le même toit que Matthew et Andy est assez horrible comme ça, alors  avec ma mère en plus, ça va être invivable.

C'est pourquoi une valise avec mes affaires se trouve dans le coffre de ma voiture.

Même si ma mère a raison. Je n'ai pas de maison. Mais partout sera toujours mieux qu'ici. Je suis prêt à dormir dans ma voiture toutes les nuits sur un parking et à me démerder pour trouver à manger. J'ai une autre idée, mais je ne sais pas si j'aurais le cran. Je ne veux pas déranger.

Je finis par reprendre la route jusqu'au collège privé où se trouve Lucia. Lorsque je me gare devant, je la remarque directement dans la cours où seul un grillage en fer la sépare de moi. Elle est belle, dans son uniforme, en train de rire avec des camarades. Je culpabilise déjà de faire disparaître son sourire dans quelques secondes. Mais je lui ai promis de ne rien lui cacher. Mentir à tout le monde s'il le faut mais pas à elle.

Lorsque je m'approche du grillage, elle tourne la tête en ma direction et son regard s'illumine en me voyant. Je ne peux m'empêcher de sourire malgré tout et de rire légèrement en la voyant abandonner ses amis pour courir vers moi.

-« Louis! » Elle s'exclame joyeusement en passant ses doigts dans le grillage.

-« Hey, Luz. »

Je lui souris tendrement en posant mes doigts sur les siens même si ce foutu grillage m'empêche de la prendre dans mes bras comme je le souhaiterais. Je viendrais la voir ce week-end. Je sais qu'on en aura tous les deux besoin.

-« Ça a pas l'air d'aller... » Elle remarque immédiatement en perdant son sourire.

Mon coeur se serre douloureusement et, même si j'aurais aimé qu'elle garde son sourire un peu plus longtemps, je lui avoue directement, comme un pansement qu'on enlève sans hésitation:

-« Maman est rentrée à la maison. »

La réaction de Lucia ne se fait pas attendre. Ses yeux s'écarquillent et je sais qu'elle est tiraillée entre la joie et la peur, l'espoir et la réalité. Elle reste muette un instant avant de me demander:

-« Est-ce qu'elle va mieux.

-Elle s'est drogué sur le chemin du retour. » Je lui avoue.

Et ça fait tellement mal de voir l'espoir s'envoler aussi vite des yeux de ma petite soeur. Son regard se fait plus brillant et je tente de passer un peu plus mes doigts entre les espaces du grillage pour serrer sa main.

-« Je suis désolé, Luz. »

Elle hoche la tête, essuyant rapidement ses larmes alors que la pluie continue de tomber sur nous. Mais on s'en fiche complètement à cet instant. C'est comme si on ne la sentait pas. A force d'encaisser le pire, on finit par ne ressentir notre coeur qui bat beaucoup trop douloureusement.

-« Je veux pas que tu retournes là-bas. » Elle me dit tristement.

C'est ce qu'elle me dit à chaque fois que je la vois. Mais, aujourd'hui, ma réponse sera différente:

-« Je n'y retourne pas. Pas tant que je n'y suis pas obligé en tout cas.

-Où est-ce que tu vas? » Elle demande avec de grands yeux.

-« Je ne sais pas. Partout mais pas là-bas. Je compte demander à Zayn et sa mère s'ils seraient d'accord de m'accueillir contre une aide financière pour les courses et le loyer et si c'est pas possible je dormirais dans la voiture, je sais pas...

-J'espère que Zayn et sa mère seront d'accord. » Me coupe désespérément Lucia. « J'aimerais tellement que tu sois ici avec moi. Qu'on soit de nouveau ensemble.

-Je sais... Moi aussi j'aimerais beaucoup. Et c'est pour ça que je me bats. Pour qu'on parte faire notre vie, tous les deux. Mais il faut tenir encore un peu, ok?

-Ok. » Elle murmure alors qu'une nouvelle larme coule sur sa joue.

Je retiens les miennes, tentant de lui offrir un sourire sincère pour la rassurer. J'ai toujours su protéger Lucia. La seule fois où j'ai raté ma mission, c'était il y a trois ans. J'étais dans la cuisine et elle dans le salon. Ma mère est rentrée complètement défoncée et bourrée et alors que Lucia a voulu lui prendre son sac pour le ranger, ma mère a levée la main sur elle. J'étais trop loin pour arriver à temps. Elle a frappé ma soeur au visage. J'ai directement repoussé ma mère, ayant l'habitude de prendre les coups à la place de Lucia.

J'ai vu ma petite soeur complètement choquée. Sa lèvre était en sang à cause des bagues de ma mère mais Lucia avait plus mal au coeur que au visage. Comme si elle réalisait que, non, sa mère ne ferait pas d'exception pour elle non plus. Et que si elle l'avait pas frappé avant, c'est juste parce que j'arrivais toujours à temps jusqu'à maintenant.

C'est là que j'ai prit la décision de travailler comme un acharné pour payer un pensionnat à Lucia et l'emmener loin de cette maison.

Même si ça devait aussi signer notre séparation.

La sonnerie de son collège retenti et je vois ma soeur fermer les yeux de douleur en comprenant qu'elle doit repartir et moi aussi.

-« Je passerais te voir ce week-end, d'accord?

-Je peux t'avouer quelque chose, Louis? »

Je fronce les sourcils, surpris, alors que les larmes ne s'arrêtent plus de couler sur les joues de Lucia en même temps qu'elle me dit:

-« A chaque fois que tu repars, j'ai peur de ne plus jamais te voir. Que je ne sache pas que c'était la dernière fois. Comme papa. »

Son aveu est comme un coup de poignard en plein coeur. Mon visage se fige et mes yeux se remplissent d'eau sans que je ne puisse le contrôler. Je me remémore la dernière fois que j'ai vu mon père sans savoir qu'il ne reviendrait pas. Mais surtout, je pense à toutes les fois où, sous les coups de Matthew, je me suis dit c'est peut-être la fois de trop, la dernière fois, et je ne pourrais pas dire au revoir à Lucia.

-« Alors ne reste pas seul, s'il te plaît. Promets-moi de ne plus rester seul. » Elle me supplie.

Je relève les yeux vers elle, ne sachant plus si ce qui coule sur mon visage sont des gouttes de pluie ou des larmes.

-« Promets-le moi. T'es la dernière personne qu'il me reste.

-Je te le promets. » Je murmure en serrant ses doigts maintenant froids.

Lucia lâche un sanglot de soulagement et me murmure une dernière fois avant de devoir s'en aller:

-« Merci. »

Appelée par les surveillants, Lucia me lance un dernier regard avant de devoir retourner dans l'établissement. Je reste jusqu'à ce que je ne puisse plus la voir et jusqu'à ce que ça ne soit plus que des gouttes de pluie sur mon visage.

Lorsque je retourne à l'intérieur de la voiture, je suis trempé. Mais je m'en fiche. Des centaines d'émotions et de pensées me traversent en même temps. Je regarde rapidement l'heure sur mon téléphone. Il n'est pas trop tard.

Pas trop tard pour réaliser la promesse faite à Lucia.

Ne plus rester seul.

(Meet Me In The Hallway_Harry Styles)

Harry.

C'est épuisé que j'entre dans le gymnase où tout le groupe est déjà présent pour la séance du soir. Madame Smith et monsieur Thomas sont en train de discuter un peu plus loin et, au vu des plots et du parcours installés dans le gymnase, je comprends qu'aujourd'hui sera une séance de sport et sûrement d'esprit d'équipe. On fait surtout ça depuis le début. Madame Smith nous a dit qu'il fallait apprendre à se faire confiance avant de faire des séances plus intenses. Elle a raison. On est pas encore tous prêts à parler de nos secrets et pourtant on l'est déjà un peu plus qu'à la rentrée où on arrivait à peine à se parler.

Mais le groupe n'est pas au complet et mon moral en prend un coup. Je n'ai fait que penser à lui toute la journée. Encore une fois, c'est plus fort que moi. C'est horrible de s'inquiéter sans pouvoir le contrôler, de n'avoir aucunes nouvelles mais de ne pas savoir si on est en position d'en demander non plus.

-« Ça va? » Me demande Lenny en s'approchant de moi.

-« Louis me manque. »

Je ne pensais pas réussir à le dire à haute voix et pourtant c'est sorti tout seul. Lorsque je relève le regard vers Lenny, il sourit, attendri, avant de me demander:

-« Tu n'as pas de nouvelles? »

Je secoue négativement la tête, ne précisant pas le fait que je n'ai pas envoyé de messages non plus. Plus loin, je vois Zayn discuter avec Manël et Liam. Je me demande s'il a eu des nouvelles lui? Si Louis a répondu à son message?

-« Je suis sûr qu'il va réapparaître. » Me rassure Lenny en posant sa main sur mon épaule.

Au même moment, mon téléphone vibre dans ma main et l'écran s'illumine pour afficher un message. Je baisse instinctivement la tête et mon coeur rate plusieurs battements. Lenny, qui a aussi baissé la tête, me murmure en riant:

-« Je pensais pas avoir raison aussi rapidement! »

Message de Louis: Je suis devant le lycée.

Je suis tellement surpris que je relis plusieurs fois le message. Pendant un instant, je me demande pourquoi il m'envoie juste cette information mais la seconde d'après je prends ça comme une invitation. Et même si ça en était pas une, c'est pas possible que je reste là. J'ai trop besoin de le voir.

-« Tu peux dire à madame Smith que je reviens?

-Bien-sûr. » Me répond Lenny. « Fonce! »

Retrouvant soudainement le sourire, je ris et récupère ma veste que j'enfile par dessus mon sweat en même temps que je quitte le gymnase. Je suis tellement pressé que je ne réponds pas au message et que je me mets à courir dans les couloirs, comme si j'avais peur que Louis me file de nouveau entre les doigts.

Une fois en dehors du lycée, je ne prends même pas la peine de rabattre ma capuche sur la tête. Il pleut toujours mais je m'en fous complètement parce que, en seulement quelques secondes, je remarque Louis sur le parking. Et le simple fait de tourner la tête et de le voir pour la première fois de la journée me réchauffe le coeur. L'appréhension réapparaît aussi, évidemment, mais elle n'est pas grand chose face à mon rythme cardiaque qui s'accélère en voyant Louis se diriger vers moi.

Je m'avance aussi vers lui et nous nous retrouvons rapidement face à face, sous la pluie et pas loin de l'entrée du lycée. Son regard s'ancre dans le mien et, pendant un instant, j'ai l'impression qu'il pleure. Comme la première fois que je l'ai vu sur le toit. Ou alors c'est la pluie? Son regard est si intense que je n'arrive pas à réfléchir correctement. Mon regard scrute chaque partie de son visage, glissant sur ses lèvres avant que je ne me reprenne pour le regarder à nouveau dans les yeux.

-« Je veux bien te confier un seul secret, finalement. Même si je viendrais peut-être à le regretter. »  Il me dit soudainement.

Surpris, je fronce doucement les sourcils en le regardant. Je le vois serrer nerveusement ses doigts et hésiter quelques secondes. Ces quelques secondes où je réalise ce qu'il vient de dire. Mon estomac se retourne, mon coeur s'arrête et je comprends que je ne suis peut-être pas le seul à commencer à lui faire confiance. A m'attacher plus que je ne le devrais.

-« A part Lucia, j'ai personne sur qui compter. » Il murmure en me regardant.

Dans son murmure, j'ai l'impression d'entendre la tristesse et la colère se battre en duel. Les traits de son visage sont moins froids, moins tirés, comme si la pluie faisait fondre son masque sous mes yeux. A l'entente de sa phrase, je repense à la fusillade où personne est venu le chercher.

-« C'est faux. » Je réponds instinctivement, comme un cri du coeur.

Cette fois, c'est Louis qui me regarde sans comprendre. Et, prenant mon courage à deux mains, je continue sans le lâcher du regard:

-« Tu peux compter sur moi.

-Pour?

-Pour être là. »

Un silence suit mon murmure. Mais pas un silence pesant. Un silence presque réconfortant. Un silence où je sens mon coeur battre rapidement et où je me demande ce que pense Louis en face de moi.

Mais mes questions s'envolent en même temps que les mains de Louis viennent encadrer mon visage pour l'approcher du sien. Un gémissement de surprise s'échappe de mes lèvres avant que je ne sente la chaleur des siennes. Et, oui. Ce baiser confirme à quel point il m'a manqué. Parce que je m'accroche presque désespérément à lui en même temps que je réponds passionnément à son baiser, frissonnant lorsque les gouttes d'eau glissent dans ma nuque.  Ses mains qui étaient sur mes joues descendent jusqu'à ma taille alors que les miennes s'échouent dans sa nuque. Nos lèvres ne veulent plus se séparer. Ce baiser me retourne complètement de l'intérieur et, lorsqu'on se sépare, c'est seulement par manque d'air et non par manque d'envie.

Je sens mes joues chauffer lorsque nos regards se retrouvent, nos visages plus proches que jamais. Un sourire tendre traverse mes lèvres alors que mes doigts caressent sa nuque du bout des doigts. Le visage de Louis se détend encore plus et, lorsqu'il m'offre un sourire sincère en retour j'aimerais que le temps s'arrête pour ne plus jamais le voir sans ce sourire là.

-« Je suis désolé pour ta soeur. » Il finit par me dire doucement, perdant son sourire. « Je...suis là aussi si tu as besoin d'en parler. »

Je ne savais pas jusqu'à maintenant que c'était tout ce dont j'avais besoin d'entendre. Qu'on me dise que je peux en parler si j'en ai besoin. Je ne le fais pas avec mes parents, par peur d'empirer les choses et de les blesser. Parce qu'on vit tous les trois ce deuil. Je ne l'ai pas encore fait avec un professionnel, comme si j'estimais ne pas avoir le droit d'aller mieux. Mais je m'imagine parler d'Aimée à Louis, et une chaleur réconfortante traverse ma poitrine à cette idée.

-« Merci. » Je lui réponds alors, sincèrement.

Et, sans réfléchir, je lui avoue en prenant mon collier entre les doigts:

-« Mon collier que tu avais retrouvé sur le toit, c'était en fait le sien. Elle adorait les papillons.

-Oh... » Il souffle, surpris.

Je souris tristement en le regardant et hausse simplement les épaules, ne sachant pas quoi lui répondre. Puis, juste parce que j'en ai envie, parce que j'en ressens le besoin, je me penche à nouveau pour l'embrasser. Louis vient alors frôler ma joue avec ses doigts, approfondissant notre baiser et faisant exploser mon coeur.

-« Madame Smith m'envoie vérifier si tout va bien et je te retrouve en train de galocher mon meilleur pote? »

Louis et moi sursautons violemment pour nous séparer et voir Zayn à l'entrée du lycée, complètement mort de rire. J'entends alors Louis rire légèrement contre moi, son souffle s'échouant contre ma joue. Je finis par rire également, malgré la frustration de ne pas l'embrasser plus longtemps.

-« C'est bien beau de s'embrasser sous la pluie dans les films mais là vous allez juste être malades bande d'idiots.

-Ta gueule. » Lui répond Louis alors qu'on retourne dans le lycée.

Zayn rit et passe un bras autour des épaules de Louis malgré le fait que ce dernier soit trempé. Je les laisse marcher devant moi et, alors que nous traversons les couloirs, je vois Louis regarder les nombreuses affiches. Elles n'ont pas été retirée pour l'instant alors on espère qu'elles restent encore un moment.

-« Il faudra que je te demande quelque chose, après. » J'entends Louis dire à Zayn.

-« Tu peux me le dire maintenant.

-T'es pas obligé d'accepter.

-Accouche, je vois la tête.

-T'es con! Enfin... En gros je cherche un endroit où dormir pour une durée indéterminée. J'ai pensé à chez toi, en aidant aux courses et au loyer mais si ta mère veut pas ou ne peut pas je comprendrais je resterais dans ma voiture le temps de trouver. »

Zayn s'arrête brusquement et moi aussi. Evidemment, je fais directement le lien avec ce qu'il m'a dit plus tôt. Qu'il ne pouvait compter que sur sa soeur. Je devine que la relation avec ses parents doit être catastrophique. Est-ce qu'il a été viré de chez lui?

Louis regarde Zayn en se mordant la lèvre avant de croiser mon regard à moi aussi.

-« Ne posez pas de questions, s'il vous plaît. » Il dit doucement.

Mon coeur se serre douloureusement et je comprends soudainement le refus de Louis hier soir. Si lui-même ne peut plus aller chez lui, il ne risquait pas de m'y emmener. Des milliers de questions me traversent mais je respecterais le silence de Louis. C'est déjà beaucoup de s'être un peu plus ouvert à moi il y a seulement quelques minutes.

-« Bien-sûr que tu peux venir chez moi, Louis. Comme si avec ma mère on allait te laisser dormir dans ta voiture!

-Mais elle va peut-être vouloir des explications...

-Si je lui explique que tu ne préfères pas en parler, elle comprendra. »

Louis hoche la tête et dans la façon dont ses épaules se baissent j'ai l'impression qu'un soulagement immense le traverse. Je suis rassuré, moi aussi, de le savoir chez Zayn. S'il n'avait pas pu, j'aurais proposé à Louis de venir chez moi mais j'imagine que, vu notre relation, ça aurait été peut-être rapide et gênant pour lui.

-« Merci beaucoup. » Il dit en regardant Zayn.

Ce dernier sourit tristement, tout aussi perdu que moi de savoir que son meilleur ami a de sérieux problèmes. Mais il respecte lui aussi son choix de ne pas en parler et se contente de passer de nouveau son bras autour des épaules de Louis pour le serrer contre lui. Nous marchons ainsi jusqu'au gymnase où le groupe nous attendait. Ils tournent tous la tête en nous voyant et c'est Niall qui gueule en premier:

-« Louis!

-Un revenant! » S'amuse Ava.

Louis rit légèrement alors qu'on s'approche d'eux. En relevant la tête, je remarque le regard inquiet que madame Smith pose sur Louis. Mais elle ne pose pas plus de question et nous laisse même discuter un instant. Lenny se rapproche de moi et me fait un clin d'oeil en remarquant mon sourire maintenant que je suis à côté de Louis.

-« Vous êtes trempés. J'ai des rechanges dans mon casier si vous voulez? » Propose Liam.

-« Je ne sais pas si on pourra se changer avant que la séance commence? » Demande Louis en regardant madame Smith.

-« Bien-sûr que si, vous pourrez. » Elle répond directement. « Mais je dois vous demander quelque chose avant. »

Un silence retombe dans le gymnase et on se regarde tous sans comprendre mais aussi en pensant à la même chose. Je vois Charlie se cacher derrière Ava alors que Manël échange un regard inquiet avec Liam. Louis tourne la tête vers moi et je me pince les lèvres en lui rendant le même regard perdu.

Jusqu'à ce que la voix de madame Smith se mette à résonner:

-« Vous avez déjà commencé à recevoir des témoignages sur le site? »

Nous ouvrons tous grand les yeux et Zayn tente de s'échapper en disant:

-« Quel site? »

Mais c'était sans compter sur Niall qui dit en même temps:

-« Vous allez être notre professeur comme dans la casa? »

Zayn lance un regard blasé à Niall et je surprends un léger sourire amusé de la part de madame Smith qui répond:

-« Je me trompe peut-être. Mais j'ai l'intuition que vous y êtes pour quelque chose. Zayn a les clefs du lycée en travaillant ici et Lenny a toujours eu de merveilleuses notes en informatique.

-Est-ce que vous nous en voulez? » Demande Ava, confirmant alors les doutes de madame Smith. 

-« Vous en vouloir de prendre l'initiative d'aider les élèves de ce lycée? Absolument pas.

-Et pour être entré dans le lycée par infraction? » S'inquiète Zayn.

Madame Smith tourne la tête vers lui et répond avec un sourire:

-« Quelle infraction? Les vidéos de surveillance ont été supprimées, je ne sais absolument pas qui ça peut bien être et je ne peux donc punir personne. »

Surpris, Zayn ne peut s'empêcher de sourire, comme nous tous, en comprenant que madame Smith est très clairement de notre côté. Tout comme monsieur Thomas qui reste encore discret mais qui fait aussi parti de l'équipe.

-« On a déjà des idées pour la suite. Notamment pour le bal d'hiver. » Confie Charlie.

-« Si vous avez besoin de quoi que ce soit, n'hésitez pas. » Nous dit madame Smith.

-« Pourquoi vous êtes comme ça avec nous? » Pense Louis à voix haute, à côté de moi.

La directrice ancre son regard dans le sien et son sourire se fait plus triste le temps d'un instant. Je ne sais pas si c'est moi, mais j'ai vraiment l'impression que madame Smith tient à particulièrement à Louis. Dans la façon dont elle le regarde à chaque fois. Puis, malgré toutes ses bagarres, il est toujours là. Elle ne l'a jamais viré.

Sans le lâcher du regard, elle lui répond:

-« Parce que je vous fait confiance, Louis.

-Et si on rate?

-Faire confiance à quelqu'un c'est aussi ne pas l'abandonner lors de ses défaites. Encore plus lorsqu'il a fait de son mieux. »

Louis ne répond plus rien, gardant son regard dans celui de madame Smith encore quelques secondes avant de tourner la tête vers Lenny lorsque ce dernier lance soudainement:

-« Je ne crois pas qu'on soit en train de tout rater. »

Le nez sur son téléphone, il nous montre l'écran où est affiché le site. Il s'est connecté et a sélectionné la messagerie que seuls nous pouvons voir. Rapidement, on se dirige vers lui pour l'entourer et tenter de voir un bout de l'écran malgré le fait que nous soyons nombreux.

-« On a déjà reçu quelques messages! » S'exclame Manël.

-« Seulement vingt. » Dit Zayn.

-« Vingt dès le premier jour! Monsieur pessimiste.» Lance Ava en regardant Zayn.

Ce dernier ne peut s'empêcher de sourire en la regardant en retour, lui donnant un coup d'épaule.

-« Je suis content qu'on ait des messages mais j'aurais préféré penser qu'aucun élève n'a de soucis. » Murmure Liam.

-« On a tous des soucis. » J'interviens.

Discrètement, Louis tourne la tête vers moi et me lance un sourire de réconfort. Un sourire que je lui rends. Parce que je comprends plus que tout aujourd'hui qu'il en a beaucoup aussi.

Mais je suis là.

Je lui ai dit.

Il peut compter sur moi.

Alors, que ça soit ces messages qui s'affichent sous nos yeux, ces mots que Louis m'a murmuré sous la pluie, l'aveu que je lui ai fait hier soir. Que ça soit le fait qu'il se sente plus seul que jamais, que ça soit Aimée que j'ai perdu à jamais, ou encore ces personnes autour de moi à cet instant. Je l'entends. J'entends ce son pour la première fois. Je le perçois comme le son d'une feuille qui se déchire, comme le grincement d'une porte en train de s'ouvrir, comme les gémissements de surprise qui s'échappent des lèvres de deux amants, comme le son de la pluie qui s'échouent contre la fenêtre...

Je l'entends pour la première fois et l'interprète de milliers de façons à la fois.

Le bruit du silence qui commence à se briser.

...

J'espère que ce chapitre vous aura plu...?

L'histoire avance un peu plus maintenant que Louis sait pour Aimée et que Harry sait que Louis est seul et n'a pas de chez-lui.

Notre groupe de soutien avance aussi et on va voir dans les prochains chapitres qu'ils vont encore évoluer...! Tout comme Harry et Louis...!

On se retrouve très vite pour le prochain chapitre et encore merci infiniment pour tout. Je vous envoie plein d'amour.❤️

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