Amélia foudroya Saiko du regard, méfiante. Après tout ce qui venait de se passer, elle avait l'impression que tout autour d'elle n'était qu'une machinerie. Et si son rôle de Reine n'était qu'une supercherie ?

Amélia eut une idée. Elle inspecta le regard de Saiko qui paraissait sincère. Mais elle aussi pouvait être une bonne actrice ! Elle plaqua son front contre celui du garçon et laissa exploser les fils de ses pensées qui se rattachèrent à l'esprit de l'Ange Noir. En cherchant dans la tête de celui-ci, elle entendit ces dernières phrases, en écho avec ses anciennes pensées : '' Laissez-moi rester en contact avec vous ! Pour mieux vous protéger... C'est pour empêcher Samaël de recommencer. Pour ne pas qu'il vous fasse du mal...''

Elle décolla sa tête et lui tourna le dos. Tout ce qu'il avait dit était donc vrai. Elle laissa les longues files invisibles de ses pensées s'ancrer autour de la tête du garçon :

- Merci ! Sourit-il.

La jeune fille refusa de se tourner vers lui, vexé de ne pas avoir gagné. Mais elle ne voulait pas revivre ce qui s'était passé quelques heures plus tôt. Elle se mordit la lèvre en repensant à la sensation d'être contrôlé par une voix mystérieuse ; l'intérieur de son corps s'était comme déchiré à cet instant. Elle avait l'impression d'entendre de nouveau la voix suave et enjôleuse qui faisait courir dans son dos des frissons qui l'a dégoûtés au plus haut point. Après cet événement, elle s'était retirée un instant pour s'habiller mais ça ne lui avait pas suffi pour oublier.

Elle s'attrapa les épaules pour contenir sa peur. Une main se posa sur elle. Elle sursauta, mais ne se retourna pas, conscient qu'il ne s'agissait que de Saiko :

- Vous vous faites du mal inutilement !

Amélia ne bougea pas, les yeux scrutant le néant de son esprit. Ozrins s'éclaircit la gorge :

- bien, étant donné que tu as ta petite escorte, tu vas pouvoir venir avec moi ! Broh, Saiko je vous charge de retrouver la trace de Samaël, le temps que je lui fasse la visite.

Les deux hommes acquiescèrent avant de rejoindre l'escalier du fonds. La jeune fille observa l'Ange de la Mort d'un air noir, visiblement méfiante. Elle n'arrivait pas à écarter sa théorie de la supercherie ; même si ce qu'elle avait vu dans les pensées de Saiko lui prouvait le contraire.

Ozrins ne captait pas ses pensées, mais il parvenait à lire la méfiance dans ses yeux. Il ne put s'empêcher de sourire, il avait l'impression d'être face à une tigresse prête à mordre. D'un geste du bras, il l'invita à passer devant lui et à monter l'escalier. Elle obéit docilement, à présent qu'elle était connecté à Saiko, elle allait devoir faire attention à ce dont elle pensait.

Tandis qu'elle suivait Ozrins, qui avait pris la tête, elle se concentra pour détacher le fil de sa réflexion. Ainsi elle pouvait penser librement tout en restant connectée. Elle allait ainsi pouvoir contrôler, à peu de choses près, ce que Saiko entendait. En y pensant, elle se dit que cette connexion devait être douloureuse pour le garçon. En voulant alléger sa souffrance, Amélia remonta le flux de la connexion :

- Ne vous en faites pas pour moi, c'est supportable !

La voix de Saiko la rassura. Elle laissa son esprit regagné son corps, qui marchait toujours aux côtés d'Ozrins. Celui-ci eut un petit sourire malicieux :

- J'espère que tu n'essayes pas de te mettre mon capitaine dans la poche ? !

Amélia suivit son petit jeu et sourit d'un air innocent. Sans savoir pourquoi, elle commençait à l'apprécier :

- Lui et Broh son mon bras droit et mon bras gauche ! Les plus forts et les plus fidèles de tous !

Un brin de fierté, qu'Amélia n'avait encore jamais vu chez lui, flottait dans ses yeux et sa voix. Elle savait qu'elle ne pourrait pas corrompre qui que ce soit. Malgré le fait qu'elle soit entourée de Démons, ceux-ci avaient une certaine fierté et une fidélité à toute épreuve. Elle n'arriverait jamais à ses fins ainsi.