Chapitre 5

POV Steve

Pour une fois la journée d'hier était plutôt bonne, à une exception près. Tout d'abord j'ai eu une petite discussion avec Tony, même si j'étais dans la retenue tout s'est relativement bien passé. Vous vous demandez pourquoi je suis parti si vite ? J'aurais pu continuer à « discuter » avec lui mais il allait être en retard et moi aussi. Ce qu'il a dit hier m'a touché. Il aime mes dessins et veut en voir d'autres. Même Bucky ne s'y intéresse pas autant. Il a dit qu'il voulait en voir d'autres et qu'il était sincère. Quelqu'un se souci de ce que je fais et m'a même complimenté. C'est si rare, ça semble parfait et pourtant, je sens que je dois me méfier un peu. Je dois rester sur mes gardes... Je lui ai un peu montré que ça m'a fait plaisir mais rien de plus. Ça devrait lui suffire, avec le peu de chance que j'ai, il devrait au mieux se lasser et tout rentrera dans l'ordre. Je préfère ne pas prendre de risques, les fois où j'en ai pris... on s'est joué de moi et je l'ai amèrement regretté. Bref, ce n'était pas une si mauvaise journée jusqu'au soir...

~ Flashback ~

En arrivant à la maison, je vois que ma mère est déjà rentrée. Je me demande pourquoi elle est là si tôt ? Non pas que ça me déplait loin de là... elle a dû finir vraiment rapidement son travail pour avoir sa soirée. Elle est infirmière dans le seul hôpital de la ville. Elle a clairement dû demander sa journée, je pense. Je pose mes affaires à l'entrée et va la saluer dans le petit salon. On a juste une petite télévision et un canapé, faut dire qu'on n'a pas trop les moyens. Ce n'est pas bien grave, on ne passe pas trop de temps à la maison, et puis on n'aurait pas la place de toute manière. Je fis un grand sourire à ma mère et un petit coucou. Elle se leva immédiatement et me prit dans ses bras avant de commencer la conversation :

« Bonsoir Steve, comment a été ta journée ? » Me signa-t-elle vraiment contente. Je me demande ce qu'il s'est passé de son côté ? Elle a une bonne nouvelle à m'annoncer ?

« Bien Maman et toi ? Tu as l'air sacrément heureuse, il s'est passé un truc au travail ? » Demandai-je curieux en agitant mes mains. A la suite de cela, elle me fit asseoir près d'elle sur le canapé.

« Tout va très bien, en fait je suis devenue cheffe de services des infirmières, une petite promotion ! » Elle était vraiment ravie, et ça me fait plaisir que tous les efforts qu'elle a fait soient enfin récompensés. Elle le mérite amplement.

« C'est génial, il faut fêter ça maman ! » Souris-je, mais en la regardant bien je sais que ce n'est pas tout. « Il y a autre chose, c'est ça ? Qu'est-ce que c'est ? »

« Tu as vu juste qui dit promotion, dit forcément quelques heures supplémentaires... Et avant d'accepter, j'ai demandé à t'en parler en priorité. Qu'est-ce que tu en penses, Steve ? »

« Ça ne me dérange pas maman, mais je ne veux pas que tu en fasses trop non plus. Tu me promets d'y aller doucement ? Je m'inquiète un peu, j'ai peur que tu sois surmenée... »

« Je ferai très attention si c'est ça qui te porte soucis. Je te le promets, mon fils. » Elle m'embrassa la joue. « Et toi, alors ? Raconte-moi un peu, on ne se parle plus trop ces temps-ci. » Demanda-t-elle curieuse tout d'un coup.

A partir de là, je me suis mis à penser à Tony et ce qu'il m'a dit. J'ai donc raconté à ma mère tout ce qu'il a fait jusqu'à présent : mon livre, le fait qu'il veuille devenir mon ami et qu'il semble accroché à cette idée sans penser une seule seconde à tout ce que ça implique. Toutes les difficultés qu'il y a lorsque l'on commence à me côtoyer. Je lui ai aussi dit qu'il est attiré d'une façon ou d'une autre par mes dessins. Évidemment, je lui ai avoué que ça m'étonnait et que c'est une des rares fois où on m'a dit cela. J'ajoutai aussi comment, argument en sa faveur, qu'il a insisté sur le fait qu'il a dit qu'il est sincère... Bref, je lui ai dit ce que je pense de tout ça et que je ne veux pas trop m'impliquer dans une relation amicale qui ne tiendrait, sans doute, pas plus d'un mois ou deux. Je lui ai dit que j'en ai assez d'essayer pour qu'ensuite on me rejette, parce que je ne suis pas marrant et assez ennuyeux. Ce n'est pas ma faute, si je n'arrive pas à suivre une conversation avec plusieurs interlocuteurs, ça demande énormément d'énergie de lire sur les lèvres de plus d'une personne à la fois. C'est très fatigant de garder un telle niveau de concentration aussi longtemps. Je n'ai jamais demandé à naître presque sourd, mais ça, on ne veut pas le comprendre... tout comme le fait que je ne puisse pas communiquer avec ma propre voix. Je ne l'ai jamais entendu, mais maman ne m'a jamais dit si je parlais quand j'étais tout petit. Quoiqu'il en soit, j'ai bien essayé de m'intégrer mais sans réel succès.

Après lui avoir dit ce que j'ai, en quelque sorte sur le cœur, même si ce n'est pas tout, ma mère essaya de me convaincre d'essayer une nouvelle fois.

« Ça fait longtemps Steve que tu n'as pas réessayer de te faire un ami en plus de Bucky. Tu sais, je serais tellement plus rassurée que tu n'aies pas à compter uniquement sur lui. En avoir un autre de plus peut-être une bonne chose. Je sais que tu ne veux plus souffrir de tes différences mais, tu as grandi et tu es un lycéen. Les mentalités changent un peu entre le collège et maintenant. » M'expliqua-t-elle doucement et distinctement.

« Et si encore une fois je me trompe et que finalement, on me laisse encore tomber ? Et si on se moque de moi parce qu'on me prend pour un gogol... ? Je ne veux pas revivre ça encore une fois... » Signai-je soigneusement.

« Tu ne peux pas le savoir tant que tu n'as pas essayer et puis, n'est-ce pas toi qui vient de me dire qu'il pensait sincèrement ce qu'il te disait ? » En me souriant. Elle a toujours su comment me parler pour me faire réfléchir dans son sens.

« Je vais y réfléchir plus attentivement, maman. Mais, je ne te promets rien. »

Le fait que ma mère obtienne ce qu'elle mérite me ravi au plus haut point. Cependant, tout le reste de la soirée, je me suis posé les bonnes questions. Faut-il vraiment que j'essaie ? Est-il vraiment quelqu'un de fiable ? Bucky m'a certifié qu'il crée des problèmes... mais pourtant, à première vue, il n'a pas l'air de pouvoir faire du mal à une simple mouche. Enfin, je ne crois pas. Je le suppose sans vraiment le connaitre, je ne sais rien de lui à part son nom, son prénom et à quoi il ressemble. Je ne sais pas ce qu'il aime à part mes dessins, si je dois le croire. J'avoue avoir bien du mal. Est-ce que je risque gros ? En soit non, mais le peu de fierté qu'il me reste, je le perdrais très certainement. De plus, mon estime de soi en prendrais encore un coup, déjà qu'elle est bien basse... Pour ma confiance, n'en parlons même pas... Je pourrais potentiellement tout perdre sur ce coup-là...

Une fois la soirée finie, ma mère alla se coucher tranquillement me laissant ainsi tout seul, dans le salon avec la télévision pour seule compagnie. Je regarde l'émission du vendredi soir en replay, avec les sous-titres afin de ne pas trop me concentrer. Il est tard et je n'ai pas l'énergie nécessaire à lire sur les lèvres du présentateur, ni à essayer de distinguer un son d'un autre. Poursuivant ainsi l'émission, c'est après quelques minutes que mon téléphone se mit à vibrer. Je le pris en main et regarde avec attention qui cela peut être. C'est Bucky qui m'envoie un message, je me mis alors à le lire et à ma grande surprise, c'est une mauvaise nouvelle... Enfin pour moi, pas pour lui :

Salut Steve, on n'a pas pu trop se voir aujourd'hui, j'en suis désolé. Je t'envoie ce message pour te prévenir que demain on fait une sortie avec ma classe. Je ne serais donc pas présent. Je sais que c'est difficile pour toi quand je ne suis pas dans les parages, c'est pour cela que j'ai préféré te le dire pour que tu ne sois pas surpris. Tu pourras ainsi décider si tu vas en cours demain ou non. A plus mon pote.

Je ne le prends pas mal, ce n'est pas de sa faute si une sortie est prévue au dernier moment. Seulement, demain je suis obligé d'y aller, j'ai des contrôles dans trois matières. Je ne peux pas les rater... Sans le savoir à proximité demain, ça va être compliqué. Et si je me mets à paniquer et qu'il n'est pas là ? Je vais faire comment ? Je n'ai personne vers qui me tourner... Je vais essayer de prendre sur moi juste pour une journée. Il le faut.

~ Fin de Flashback ~

Hier soir, cette nouvelle m'a fait l'effet d'une bombe atomique. Je me suis reçu ça un peu dans la figure et j'ai été pris au dépourvu. Tant pis, va falloir faire avec. Je pars en route pour ma salle de classe, tranquillement. Je suis en avance comme chaque jour. Je n'aime pas être en retard et puis franchement, quel manque de politesse. Je m'installe à ma place à côté de la porte au cas où je dois sortir en urgence. Je suis tout devant, pour à peu près entendre le cours sans demander à chaque phrase ce que le professeur vient de dire, deux secondes auparavant. Personne n'est assis au bureau accolé au mien. Ce n'est qu'un détail et très clairement ça n'a aucune importance que je sois à côté d'un camarade ou non, je suis habitué. La solitude est ma plus fidèle amie, on se connait depuis si longtemps maintenant. Je prépare mes affaires pour le cours et regarde mon téléphone en attendant. Bucky m'a envoyé un message assez tôt ce matin pour me dire de passer une bonne journée et de tenir le coup juste pour cette fois. J'espère que je vais réussir. Je dois arrêter de me reposer uniquement sur lui. Je dois me débrouiller seul.

Les cours de la matinée se sont bien passés, je n'ai pas eu de problèmes. Je pars donc en direction du self, j'ai grandement faim. Me connaissant je ne vais pas m'empiffrer mais manger juste le nécessaire pour tenir le reste de l'après-midi. Ça me suffit amplement. Je m'avance pour me servir alors que des bruits stridents commençaient à me gêner. Mes oreilles me font mal. J'entends des cris sourds venir du réfectoire et des bruits de chaises, si je déduis bien. Des gens devaient se battre. Je n'arrive pas à supporter ça en temps normal, j'essaie d'éviter ces moment-là le plus possible. Pourquoi ça doit arriver et plus particulièrement pourquoi aujourd'hui ? Je ne suis pas prêt... Pas maintenant...

Je suis complètement perdu, je vois une bande de gars se battre au self et ça m'angoisse. Je ne peux pas y aller tout seul... et tous ses bruits désagréables me rappellent de mauvais souvenirs, que je veux oublier à tout prix. Mais ils me rattrapent, je dois vite partir. Pour cela, je pose le plateau et sors de cet enfer le plus rapidement possible. Il ne faut pas qu'il me rattrape. J'ai besoin de Bucky, mais il n'est pas là... Il n'est pas ici... et je panique ! Je suis perdu, je ne sais même plus où je suis... j'ai du mal à reprendre mon souffle, ma poitrine se serre toute seule, l'air ne veut plus passer. Je me force à respirer le plus possible mais rien n'y fait, et je suis tout seul... Je ne peux pas appeler à l'aide... Je ne peux rien faire seul. Je suis en train de mourir à cause d'une crise de panique, que je ne peux contrôler... J'utilise les dernières forces que j'ai pour sortir, dans l'espoir de trouver quelqu'un, quelque chose pour m'aider. Je m'appuie contre tout ce que je trouve et je ne me sens vraiment pas bien. Le monde tourne autour de moi. Qui peut bien me venir en aide alors que tout le monde est censé manger ?

Inconsciemment, mes pas m'ont mené vers ce chêne que j'aime tant. Celui qui n'a pas besoin de m'écouter pour avoir une conversation, j'ai juste besoin de toucher son écorce afin de comprendre un peu plus ce qu'il subit chaque jour. Les tags et les coups de couteaux pour avoir de ridicules inscriptions en guise de décoration. Je me tiens à lui et cherche de plus en plus l'air... Je me laisse tomber à ses pieds et pose ma tête contre lui, mais rien n'y fait... Je n'entends plus rien du tout, je suis littéralement devenu sourd, avant l'heure. Je suis emprisonné dans mes pensées... Je suffoque de plus en plus et personne n'est là. Merde, merde, MERDE ! Je n'ai tellement plus la notion du temps, que je n'ai même pas senti les deux mains qui sont sur mes épaules.


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