TERREUR NOCTURNE

Après cet échange, Mary et moi restons à nous observer quelques secondes jusqu'à ce qu'elle décide enfin de quitter la pièce. À cet instant, je réalise que je retiens ma respiration depuis plusieurs secondes, que je la relâche dans un soupir tremblant.

Cette conversation, aussi désagréable qu'elle ait été, m'a laissé un goût amer en bouche. Quelque chose est clair à présent, Mary ne sera jamais une alliée. L'expression de son visage continue de me hanter, et un horrible frisson me traverse, faisant se dresser les poils de mes bras. L'ambiance pesante de cette maison me donne la certitude que mon séjour ici ne sera pas des plus aisés.

Il faut que je découvre la vérité sur la mort de ma famille, et le plus tôt sera le mieux. Plus je réfléchis à cet endroit et à l'hostilité palpable de Mary, plus je sens l'urgence de ne pas rester ici plus longtemps que nécessaire. Cette maison me pousse dans mes retranchements, réveillant des pensées sombres que je croyais maîtriser.

Je le sais pourtant, ce désir de disparaître ne m'a jamais quitté. Il est toujours là, dans un coin de mon esprit, silencieux mais insistant, prêt à me happer à la moindre faiblesse. Mais une chose est claire : je resterai maîtresse de cette décision. Si je dois mettre fin à mes jours, ce sera par ma propre main, et personne ne me privera de ce dernier droit.

Mais pourquoi ces pensées m'envahissent-elles soudainement ? Est-ce dû à cet échange avec Mary ou à l'ombre inquiétante que j'ai lue dans son regard ?

Je chasse ces idées sombres de ma tête, du moins pour le moment, et retourne dans ma chambre. Je me glisse sous la couverture en espérant trouver le sommeil.

Allongée sur le dos, les mains croisées sur mon ventre, j'attends que le repos vienne. Peu à peu, mes paupières deviennent lourdes. Elles se ferment, se rouvrent légèrement, jusqu'à ce qu'elles se ferment définitivement.

« Il fait nuit, mais l'obscurité est lourde, presque étouffante. Tout autour de moi n'est qu'ombres et fumée. L'air est irrespirable, chargé de cendres et de chaleur suffocante. J'entends des cris déchirants. Des appels au secours. Des voix qui me transpercent l'âme.

— Valentina ! hurle une voix aiguë, désespérée.

Je tourne la tête, cherchant frénétiquement d'où vient ce cri. Mon cœur s'arrête net lorsque je l'aperçois : Javier. Mon petit frère, pris au piège par les flammes. Ses mains se tendent vers moi, implorant mon aide. Son visage est tordu par une douleur qui me glace le sang. Je veux courir, le rejoindre, mais mes jambes refusent de bouger.

— Aide-moi, s'il te plaît !

Je hurle, je tends les bras dans sa direction, mais c'est comme si une force invisible me retenait. Mes pieds semblent collés au sol. Chaque tentative de mouvement est un effort inutile, un supplice supplémentaire.

Le feu avance, vorace, insatiable, avalant tout sur son passage. L'air brûlant me fouette le visage, mes yeux me piquent, et les flammes dansent devant moi, comme pour m'empêcher de m'approcher.

— Valentina ! Où es-tu ?

La voix de ma mère résonne à son tour, faible, entrecoupée par une toux rauque. Je la vois à travers un rideau de fumée, tombant à genoux, le visage ravagé par la douleur et la panique.

— Maman ! Javier ! hurlé-je à en déchirer mes cordes vocales.

Mais aucun son ne semble leur parvenir. Je ne suis qu'une spectatrice, impuissante, forcée de regarder la scène se dérouler devant moi.

Javier hurle à nouveau, son visage marqué par une terreur que je ne pourrai jamais oublier. Les flammes l'encerclent, se rapprochent, le dévorent presque. Je tends mes bras plus fort, essayant de briser l'invisible barrière qui me retient.

— Non ! Javier, tiens bon ! Je viens te chercher, crié-je, ma voix se brisant sous le poids de ma panique.

Il me regarde une dernière fois, et ce que je lis dans ses yeux me brise. Ce n'est plus seulement la peur ou la douleur : c'est l'abandon. Il sait que je ne pourrai pas le sauver.

Les flammes l'avalent, et tout devient silence. »

Je me réveille violemment, le souffle court, les draps collés à mon corps trempé de sueur. Mes mains tremblent, et mon cœur bat à tout rompre, comme s'il voulait sortir de ma poitrine. Les images de mon cauchemar restent gravées dans ma rétine, aussi nettes que si je venais de les vivre.

Il me faut plusieurs minutes pour retrouver mes esprits et comprendre où je suis. Cette chambre, bien qu'étrangère, semble sûre. Du moins, je crois.

— Ce n'était qu'un cauchemar, murmuré-je, tentant de calmer ma respiration chaotique.

Je me lève mécaniquement et me dirige vers la salle de bains pour m'asperger le visage d'eau froide. La fraîcheur m'aide à remettre de l'ordre dans mes idées. Encore engourdie par le sommeil et l'angoisse, je descends à la cuisine pour me servir un verre d'eau.

Mais alors que je tiens le verre entre mes mains, des images du passé frappent brutalement mon esprit. Paralysée par cette intrusion soudaine, je reste figée, incapable de bouger. Je fixe un point invisible devant moi, comme si mon corps s'était déconnecté du présent.

— Valentina, est-ce que tout va bien ? demande alors une voix inquiète.

Rosita.

Elle est entrée dans la cuisine sans que je m'en rende compte. Je n'arrive pas à réagir. Mon corps refuse de bouger. Je suis figée, une statue de marbre incapable de répondre.

— Valentina, répète-t-elle en se rapprochant, son ton se faisant plus insistant.

Je ne peux toujours pas bouger. Mon esprit est prisonnier d'images et de sensations qui me submergent. Soudain, le verre glisse de ma main et s'écrase sur le sol, se brisant en mille morceaux. Le bruit me fait sursauter violemment, et je recule instinctivement, m'accroupissant contre un meuble, près du frigidaire.

Je croise mes bras contre moi, enfouissant ma tête entre mes genoux. Comme une enfant terrifiée, je me balance d'avant en arrière, essayant de me protéger d'une peur invisible.

Rosita, alarmée par ma réaction, se précipite vers moi. Elle pose ses mains sur mes épaules et me secoue doucement au début, puis plus fermement lorsqu'elle voit que je ne réagis pas.

— Valentina, reprenez-vous ! Vous êtes en sécurité, dit-elle d'une voix qui tente d'être rassurante, bien que teintée de panique. Regardez-moi !

Elle répète ces mots plusieurs fois, mais je reste enfermée dans ma torpeur. Finalement, elle me secoue vigoureusement en répétant mon prénom. Peu à peu, je sens la réalité revenir, et mes yeux retrouvent le contact des siens.

Lorsque je reprends pleinement conscience, je la vois. Ses mains sont toujours agrippées à mes épaules, et son regard, mêlé d'inquiétude et de choc, est fixé sur moi. Tout autour de moi semble étranger et flou, jusqu'à ce que mon regard tombe sur les morceaux de verre éclatés au sol.

Je comprends ce qui s'est passé : mon cauchemar s'est prolongé en une terreur nocturne éveillée.

Sans un mot, je me lève brusquement et détourne les yeux pour éviter toute question. Je récupère une pelle et une balayette dans le placard sous l'évier et commence à ramasser les débris. Rosita m'aide, silencieuse.

Une fois les morceaux de verre jetés et le sol essuyé, je me retourne vers elle et la salue d'un signe de tête, prête à quitter la cuisine.

— À l'avenir, soyez plus prudente, dit-elle soudainement, brisant le silence. Ne laissez jamais personne entrevoir vos faiblesses, ajoute-t-elle sur un ton étrange, entre mise en garde et conseil.

Ses mots me frappent comme une énigme. Que voulait-elle dire ? Dois-je me méfier de tout le monde dans cette maison ?

Malgré ma curiosité, je ne pose pas de questions. Je ne veux pas qu'elle se mette à fouiller dans mon esprit ou qu'elle soulève des questions auxquelles je ne suis pas prête à répondre. Je quitte la pièce en silence, laissant ses paroles résonner dans mon esprit.

De retour dans ma chambre, incapable de trouver le sommeil, je me blottis dans un coin, près de la fenêtre. Mes genoux repliés contre ma poitrine, j'enroule mes bras autour d'eux et laisse ma tête reposer contre le mur. Je ferme les yeux et inspire profondément. Peu à peu, le sommeil finit par m'emporter.

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