Chapitre 78 Olivia
Je fermai mon casier et m'appuyai contre celui qui se trouvait à côté, une pochette entre mes bras et mon sac pendouillant à moitié vide sur mon épaule.
Depuis que je m'étais réveillée ce matin, tout me semblait différent, j'éprouvais une sensation que j'avais cru perdre à jamais : l'espoir. Car oui, après mon entretien la veille avec Porter, en quelques heures, j'avais la sensation que ma vie avait pris un virage de cent quatre-vingts degrés.
Avec un peu de chance, Alex sortirait dans une semaine de prison et tout redeviendrait petit à petit à la normal. Malgré le fait que je n'aie parlé que deux fois avec Graham, je lui faisais confiance, ce mec dégageait une assurance monstre, ainsi qu'énormément de sincérité. Cole avait beau le traiter de trouduc à tout va, je n'étais définitivement pas d'accord.
— À quoi tu penses ? Tu as l'air complètement ailleurs, me sortit Ivy de mes contemplations.
Cette dernière avança vers moi et sourit de toutes ses dents en voyant mon accoutrement. En effet, aujourd'hui, j'avais échangé mes jeans et mes t-shirts pour une petite robe à bretelles de saison bleu ciel aux imprimés floraux et au décolleté en cœur, avec une jupe à volants m'arrivant au-dessus du genoux. Ce matin en me réveillant, j'avais tout simplement eu envie de changer par rapport à d'habitude.
Lorsque j'étais arrivée près de la voiture, alors que Cole était déjà à l'intérieur en train de m'attendre, il m'avait pour ainsi dire « bouffé avec le regard ». Il ne s'était pas gêné et avait bugué pendant quelques instants, avant de bégayer un « jolie tenue », pour ensuite nous mettre en route pour le lycée.
Lorsque le regard d'Ivy se posa sur mes pieds, elle éclata de rire : je portais des converses. Eh oui, on ne pouvait pas changer totalement du jour au lendemain non plus.
À vrai dire, je n'avais rien d'autre à me mettre, c'était ça, soit des talons et je refusais d'en porter au lycée. Alors, je m'étais tout simplement rabattue sur ma paires de vieilles converses fétiches. Le plus important, c'était que je me sente à l'aise dans mes baskets, sans mauvais jeux de mots.
— On ne peut pas changer du jour au lendemain, commenta-t-elle, joyeuse.
— T'as tout dit, je n'ai rien à ajouter.
Sans trop savoir pourquoi, je m'approchai d'elle et la pris dans mes bras, je me rendais compte que j'avais toujours tenu une certaine distance physique avec elle et je voulais y remédier.
— Que me vaut ce plaisir ? ricana-t-elle en me tapotant doucement le dos.
Je n'étais pas du genre câlin, je devais bien l'avouer, mais j'aimais montrer mon affection aux gens qui comptaient pour moi et Ivy en faisait partie, quoi qu'en dise Jake, c'était une fille superbe, avec ses secrets certes, mais quelqu'un de formidable de toute façon. J'étais également certaine qu'Alex l'apprécierait.
Je m'écartai d'elle et lui souris, de tout mon cœur. Depuis hier, tout me semblait beaucoup plus beau que d'accoutume, c'était sans doute le fait de savoir que mon frère serait à nouveau à mes côtés qui me rendait aussi heureuse.
— Je n'en sais rien, j'avais juste envie de t'enlacer, répondis-je tout simplement en haussant les épaules.
— Il s'est passé quelque chose que je devrais savoir ?
Oui, en effet, il s'était déroulées certaines choses ces dernières semaines et j'avais hâte de pouvoir tout lui raconter, que ce soit au sujet de mon frère ou de Cole. J'aurais voulu lui en parler tout de suite, mais je préférais le faire une fois qu'Alex serait sorti de prison. Et pour ce qui était de Cole...
En parlant du loup, ce dernier passa à côté de nous et son regard lorgna sur moi, d'une manière pas discrète du tout. Ivy le remarqua et en voyant que je ne m'emportais pas ou commençais à le traiter de tous les noms d'oiseau qui me passaient par la tête, elle écarquilla les yeux et ouvrit sa bouche, avant de pousser plusieurs petits cris suivis par de « Oh mon dieu ! Oh mon dieu ! ». Sa réaction me fit marrer, mais je la pris du poignet afin de la trainer jusqu'aux toilettes les plus proches, là où il n'y aurait personne, ou du moins, beaucoup moins de monde.
Je lançai un coup d'œil par-dessus mon épaule et vis cet imbécile heureux ricaner bêtement, avant de me faire un clin d'œil. Il était parfaitement au courant qu'à cause de ses regards lascifs et de mon inaction, Ivy venait de comprendre pour nous.
Une fois dans les sanitaires, je vérifiai dans les quatre cabines, en mettant de légers coups de pieds au portes, qu'elles étaient belles et bien vides. Nous pourrions ainsi parler sans se faire surprendre par de sales fouineurs, dans le genre d'Amber.
— Toi... toi et... et LUI ?! s'écria-t-elle, visiblement surprise. Depuis quand ?
Son visage était tellement expressif que ça provoquait mon hilarité, elle semblait tellement choquée par la nouvelle, que c'en était drôle.
— Deux semaines, soupirai-je en m'appuyant contre le lavabo et en me rappelant ensuite de ne surtout pas faire ça.
Je me trouvais dans les toilettes du lycée et même s'ils avaient un aspect convenable, je n'étais pas disposée à choper des saloperies. Tout le monde savait ce qui se déroulait dans ces lieux pendant les pauses ou même pendant les cours, d'ailleurs, il ne valait mieux pas que j'y pense, sinon, je ne remettrais plus jamais un seul pied ici.
— Waouh... ça m'étonne, avoua-t-elle, et en même temps, pas tant que ça.
Vraiment ? Avait-elle vu la flamme avant nous ?
— Je veux dire que ça se sentait un peu dans l'air, la façon dont il a commencé à te traiter peu à peu, continua-t-elle, j'ai vu un certain changement. Puis, n'oublions pas que vous vous êtes embrassés et que ça t'a complètement déboussolée.
Je fronçai les sourcils et piquai un far.
— Je... je n'étais pas déboussolée, marmonnai-je.
— Mais bien sûr ! ricana-t-elle. À d'autres, cocotte ! Je n'ai peut-être pas d'expérience avec les garçons, mais je sais reconnaître une fille amoureuse lorsque j'en vois une. Il te plaisait même avant que tu n'en sois vraiment consciente.
J'aurais aimé pouvoir réfuter à ça, mais ça m'était complètement impossible, sachant parfaitement qu'elle avait raison sur toute la ligne.
Elle me posa plein de questions et je finis par lui révéler que nous ne voulions que personne au lycée ou ailleurs ne sache pour nous, à cause de nos parents respectifs, sans pour autant rentrer dans les détails. Elle me promit de ne jamais rien révéler et je lui demandais également de ne surtout rien dire à Sojiro, avec lui, j'étais certaine que toute la ville serait au courant en moins d'une journée. Je l'aimais bien, mais c'était un journaliste et sa curiosité en devenait maladive parfois, alors je préférais qu'il ignore absolument tout de ma relation avec Cole. Pour le reste du monde nous n'étions que le petit riche et la fille de sa femme de ménage, rien d'autre.
— C'est avec lui que tu as passé la nuit l'autre jour, pas avec Jake, je me trompe ? devina-t-elle.
— Je plaide coupable.
— Et... alors ?
J'arquai un sourcil. Ivyann Keller s'intéressait donc à ce qui était arrivé dans cette chambre ? Franchement, j'étais choquée... en réalité non, ça me faisait juste rire. Elle cachait bien son jeu finalement, comme quoi, elle était comme n'importe quelle autre adolescente de notre âge, curieuse par rapport à tout ce qui touchait le sexe. Toutefois, j'allais être dans l'obligation de la décevoir.
— On a juste dormi.
Elle parut étonnée, comme si elle ne me croyait pas.
— Je peux comprendre que tu ne veuilles pas en parler, après tout, c'est privé, ça ne me regarde pas, continua-t-elle en baissant le regard et en s'empourprant.
— Je suis sérieuse, il ne s'est rien passé. On a dormi dans les bras l'un de l'autre, c'est tout.
Mon amie plissa le front, déconcertée, après tout, je me doutais parfaitement de l'image qu'elle avait de Cole, elle n'était pas très flatteuse. Il avait dû faire pas mal de conneries par le passé pour qu'elle ait ce concept de lui et pour être honnête, je ne tenais pas à avoir les détails. Je savais que plusieurs filles étaient passées dans son lit, pas non plus un nombre exorbitant, mais quelques-unes. Il me l'avait lui-même avoué.
— Il ne veut pas aller aussi vite, expliquai-je, ce qui sembla la surprendre d'autant plus.
Moi aussi ça m'avait pris de court lorsqu'il me l'avait dit, mais désormais, je comprenais pourquoi. Il ne me voyait pas comme une personne qu'il voudrait utiliser puis s'en débarrasser, non, il souhaitait forger une véritable relation avec moi et avant de passer à l'acte, il y avait plein d'étapes auparavant. Même si cela ne nous empêchait pas de faire certaines choses, comme ce qui était arrivé lorsque nous avions décidé de mener cette « relation » en secret. Une chose n'empêchait pas l'autre, même si je me doutais que ce n'était pas facile de ne pas franchir cette limite. Lorsqu'on était avec une personne qu'on aimait, qu'on désirait, se retenir et rester simplement à l'étape des préliminaires était très frustrant, je devais bien l'admettre.
Mais depuis cette fois-là où nous nous étions un peu emballés, nous avions ralenti la cadence et tout s'enchainait beaucoup plus doucement. C'était ce qu'il voulait et je respectais sa décision, même s'il fallait bien avouer que ce qu'il m'avait fait cette nuit-là me hantait, je rêvais de recommencer. Ça avait été tellement intense, que rien que d'y penser, je me sentais décoller.
— Jayden Coleman serait donc un gentleman ? me taquina Ivy en me sortant de mes pensées lubriques.
— Plus qu'il n'y parait, avouai-je. Il est doux, attentionné et je crois bien ne jamais avoir connu un garçon comme lui.
Non, en effet, jamais je n'avais connu ou connaitrai un autre garçon comme lui, j'en étais sûre et certaine. Nous avions tellement de choses en commun que cela pourrait en être effrayant, mais c'étaient ces similitudes qui faisaient que nous comprenions aussi bien. Il ne fallait jamais cacher les blessures de l'âme, ou les renier, mais les accepter et apprendre à vivre avec elles.
— J'ai du mal à le croire, j'ai l'impression que tu me dépeins quelqu'un de complètement différent. Mais si tu le dis, je te fais confiance. J'espère vraiment que ça se passera bien entre vous, conclut-elle au même moment où la sonnerie du début du prochain cours retentit. Je dois y aller, on se voit à midi ?
Je hochai doucement la tête et lui souris alors qu'elle s'éloignait déjà pour rapidement sortir des toilettes, me laissant ainsi ici toute seule.
Soudain, mon téléphone se mit à vibrer dans mon sac et je le sortis afin de lire le message qui s'affichait sur l'écran.
Cole message envoyé à 10h58
Ça te dit de sécher le journalisme cet aprèm?
Je m'empressai de lui répondre.
Olivia Vega message envoyé à 10h59
N'as-tu pas deux heures de colle jusqu'à la fin de l'année ?
Rien ne me ferait plus plaisir que sécher et partir quelque part avec lui, surtout que depuis que j'étais punie, j'avais à peine le temps de le voir. Les seules fois où nous pouvions être ensemble, c'était dans l'espace confiné de la voiture pendant le trajet jusqu'au lycée, ce qui ne nous laissait pas énormément de temps.
Cole message envoyé à 10h59
Tu me connais mal si tu crois que j'en ai quelque chose à foutre. Allez, je dois aller chercher Ronnie à 20h chez elle en plus, il y a cette fête débile à laquelle elle veut aller. Dis à ta mère que tu as un travail de journalisme à finir et que tu dois rester jusqu'à tard aujourd'hui, ou je ne sais pas, invente-toi une excuse, tu es douée pour ça.
Son offre était des plus alléchantes, vraiment, mais j'avais vraiment peur que ma mère ne me croit pas, après tout, cela faisait plusieurs fois que je m'excusais de mes retards ou de mes absences à la maison grâce à divers « travaux » pour le lycée. Ces deux derniers jours, elle semblait beaucoup plus relax, mais samedi dernier, après que je sois rentrée de la prison, elle m'avait passé un sacré savon, ce qui était justifiable. Je n'oubliais pas que la veille j'avais complètement éteint mon portable et qu'elle n'avait plus de nouvelles de moi pendant deux jours. J'assumai mes erreurs, voilà pourquoi lui mentir encore une fois pour disparaître avec Cole ne me semblait pas correct, même si je n'avais aucune envie d'aller en cours de journalisme pendant deux maudites heures.
Mon smartphone vibra encore une fois tandis que j'essayais de prendre une décision, voulant me comporter comme une adulte – pré-adulte – responsable.
Cole message envoyé à 11h00
Nous serons seuls, rien que tous les deux. Tu ne le regretteras pas.
Je poussai un soupir pendant que mon imagination allait bon train, je trouvais sa proposition de plus en plus intéressante. On pouvait dire qu'il savait comment attiser ma curiosité et annuler toute ma bonne volonté de vouloir être une bonne fille.
Olivia Vega message envoyé à 11h00
Arrêt de bus de Green Valley Road, 15h15
Normalement, nous partions ensemble les jours où je devais me rendre au country club, mais aujourd'hui n'était pas un de mes jours de travail, je préférais prendre le bus et le retrouver à l'arrêt plus tard. C'était peut-être une prudence un peu inutile, mais moi, elle me rassurait.
Lorsque j'arrivais avec lui au lycée, j'avais toujours la sensation d'être épiée par tout le monde. Mais à vrai dire, ce n'était pas une sensation, mais bien un fait réel. Tous les regards étaient toujours rivés sur nous lorsque nous étions dans ce bahut, que ce soit sur le parking, dans les couloirs ou même dans la cafétéria. Les mouvements de Jayden Coleman étaient contrôlés par tout le monde, visiblement, personne n'avait de vie propre ici.
Voilà pourquoi je devenais parano et prenais tellement de précautions, et désormais, encore plus.
Quant à ma mère, je trouverais bien une excuse, tant que je rentrais à l'heure à laquelle je lui annonçais, je pensais qu'il n'y aurait vraiment aucun problème.
Je rangeai mon portable dans mon sac sans attendre la réponse de Cole et filai en cours, j'étais déjà assez bien en retard comme ça.
***
Après une longue journée de cours, et même si c'était déjà le week-end, me retrouver couchée sous le soleil était vraiment un superbe plan. Je laissai ses rayons réchauffer ma peau, même si l'intensité de ces derniers diminuait au fil des heures qui passaient.
Cela faisait bien maintenant deux heures que Cole et moi nous retrouvions sur la colline, celle-là même où nous avions été une semaine plus tôt, là où nous nous étions avoués nos pires secrets. L'endroit était très beau, puis surtout, tranquille ainsi que désert.
Après être allés en ville chercher des cafés au Starbucks du coin, il m'avait emmené manger une superbe glace italienne au chocolat et à la crème. Bon, nous en avions partagés une extra-grande, et l'avions terminée en un temps record, car il faisait tellement chaud, qu'après être sortis de chez le marchand de glace, elle avait commencé à fondre instantanément.
Je m'en étais mise partout sur les mains, mais heureusement, ma robe avait pu être épargnée, ce qui n'était pas le cas du t-shirt de Cole. Après être arrivés sur la colline, je lui avais dit de l'enlever et je l'avais rincé un peu avec l'aide d'un peu d'eau. Désormais, il séchait posé sur un rocher, non très loin de nous.
Couchés sur une nappe, je m'étais endormie pendant un instant, c'était l'effet que les rayons du soleil avaient sur moi, ça me donnait sommeil et j'en ignorais les raisons. Peut-être était-ce à cause de cette relaxation extrême, je n'en savais rien.
Ici, j'avais l'impression d'être coupée du reste du monde. Pas un son ou une odeur ne me laissait penser qu'à quelques mètres en-dessous du précipice, Fairfield était parfaitement visible. Je m'imaginais que nous étions sur une île déserte, rien que lui et moi.
Je poussai un soupir de bien-être et m'étirai doucement en émergeant de ma petite sieste. Visiblement, mon corps en avait grandement besoin, ces dernières semaines n'avaient pas été de tout repos, je devais bien l'admettre. À vrai dire, rien n'avait été de tout repos depuis que les incidents avec Nat étaient survenus, depuis, tout était parti en vrilles, donc on pouvait dire que mon corps avait ressentis tous les effets du stress. Même mes cheveux y étaient passés, je n'oubliais pas que j'en avais perdu une grande quantité lors des premiers mois.
Bref, avec mon frère sur le point de sortir de prison, mon corps se détendait complètement et en profitait pour récupérer.
— Comment vous allez faire ? demanda Cole.
J'ouvris les yeux et me tournai vers lui, afin de le regarder. Il était toujours torse nu, même si j'étais certaine que son t-shirt avait séché depuis belle lurette. Toutefois, sa question m'échappait.
— De quoi tu parles ? répondis-je en m'approchant un peu plus de lui jusqu'à reposer ma tête contre son biceps et embrasser sa peau réchauffée par le soleil.
Il passa un bras autour de ma taille et me serra doucement contre lui. Je plaçai doucement ma main sur son torse imberbe et commençai à tracer des petits cercles sur son épiderme du bout de mes ongles. Je me sentais si bien contre lui, mon cœur tambourinait dans ma poitrine et mon sang pulsait dans mes veines. Son odeur alléchante m'enveloppait et je me perdais dans l'intensité de ses caresses, comme en cet instant où il effleurait simplement mon bras nu. À chaque fois qu'il me touchait, c'était la révolution dans mon corps, je n'arrivais à absolument plus rien contrôler. Celles qui avaient les commandes en cet instant, c'étaient mes hormones d'adolescente follement amoureuse.
— Je suis vraiment heureux qu'Alex sorte de prison, vraiment, mais...
Il se tut et se mordit l'intérieur de la joue, comme s'il avait peur de continuer.
— Mais ? le poussai-je à poursuivre. Tu peux être franc avec moi, tu le sais.
— Vous allez partir du manoir ?
Je fronçai les sourcils et m'appuyai sur mon coude afin de me relever un peu pour pouvoir le regarder en face. Pourquoi pensait-il une chose pareille ? Avec ma mère, nous n'avions jamais évoquée cette possibilité. Le fait que mon frère soit libre ne changeait rien par rapport à la vie que nous menions actuellement.
— Il n'y a pas assez de place au manoir pour une personne en plus ? plaisantai-je, voulant enlever de l'importance à l'affaire.
— Ce n'est pas ça, tu sais très bien que ce n'est pas une question d'espace, rétorqua-t-il, un poil agacé.
Il ferma les yeux et serra les mâchoires, il y avait visiblement une pensée qui le tracassait et lui turlupinait depuis un petit moment l'esprit. Peut-être était-ce même à cause de ça qu'il avait gardé le silence pendant tellement de temps, avant de se décider à en parler.
— Mais vous aviez une vie à Los Angeles, vous allez sûrement vouloir la récupérer, non ?
Alors c'était ça ? Il pensait qu'une fois qu'Alex serait de retour, j'allais l'abandonner ? Nous n'avions jamais réfléchi à cette possibilité avec ma mère. Pour moi, L.A faisait partie du passé et mon présent ainsi que mon futur se trouvaient à Fairfield, près de lui. Et combien même mon frère voudrait retourner dans notre ancien quartier et récupérer notre ancienne vie, cela lui serait impossible.
— Notre vie est à Fairfield désormais, Cole, le rassurai-je. Rien ne changera. Tu as peur que je parte ? le questionnai-je.
Cole ouvrit les paupières et tout comme moi, il se tourna sur le côté et s'appuya sur son coude, les dents serrées et le regard grave. Doucement, il leva sa main libre et vint effleurer ma joue, pour ensuite la glisser vers mon cou et commencer à caresser tendrement ma peau au niveau de la naissance de mes cheveux.
— J'ai peur de tellement de choses, si tu savais, murmura-t-il en baissant les yeux.
Oui, ses craintes étaient fondées et je le comprenais, mais jamais je ne l'abandonnerai, je ne partirai pas, à moins qu'il ne veuille plus de moi.
— Moi aussi j'ai peur, avouai-je, mais tout va bien se passer, d'accord ? Tu crois que ma mère pourrait rester dormir dans le manoir et mon frère et moi dans la pool-house ?
Ma question le dérida et il ricana ouvertement, avant de déposer un baiser sur mon front, à mon plus grand malheur. Depuis mercredi, lorsque nous avions eu ce petit moment à nous dans la cuisine tard dans la nuit, nous ne nous étions plus embrassés, et ce petit bisou sur le front ne faisait que me frustrer davantage.
— Patrick est un connard, mais un connard qui comprendra sans aucun problème pourquoi ton frère a fait ce qu'il a fait, du moins, la version officielle. Il sera même enchanté d'avoir quelqu'un d'autre à la maison. Quant à Piper...
Il soupira et se laissa retomber sur le nappe. Comme toujours, parler de cette garce lui plombait le moral, tout comme à moi. La veille, alors que je revenais de cette partie de golf avec Graham Porter, elle était là, adossée contre le comptoir du bar, en train de contempler Cole qui parlait gentiment avec Ronnie. J'avais fait semblant de ne pas la voir et étais partie me changer au plus vite.
— On s'en fout d'elle, décrétai-je, ne voulant surtout pas qu'elle vienne s'immiscer dans ce petit moment rien qu'à nous.
— Tu as raison, admit-il en arborant un sourire en coin. Elle ne gâchera pas les moments que je passe avec toi.
— Sage décision, déclarai-je en me couchant à mon tour et en posant ma tête contre son torse.
Sa main s'enfouit presque instantanément dans ma crinière et il commença à caresser l'arrière de mon crâne, provoquant des frissons de plaisir tout le long de mon échine dorsale. J'adorais ce genre de petits massages, comme les caresses sur le dos, c'était quelque chose de tellement agréable.
— Pour le quatre juillet, on viendra ici toi et moi, dit-il tout à coup. On achètera des feux d'artifices et on les allumera.
Je souris face à l'idée de passer cette date avec lui. Avec ma famille, on faisait toujours quelque chose de spécial, comme un repas ou encore partir en pique-nique toute la journée dans un parc, afin de voir les feux d'artifices qui avaient lieu la nuit tombée. Passer ce moment avec lui me ferait vraiment très plaisir, mais je voudrais également le passer avec mon frère, c'était comme une tradition et je ne voulais surtout pas la briser.
— Ça te gênerait si mon frère venait ? On fête le quatre juillet ensemble depuis toujours et je n'ai pas envie que cela change.
— Bien sûr, je dirais même à Ronnie et Eli de venir, il pourrait même emmener Jake. Dis à Ivy de se joindre à nous, si tu veux.
Je grimaçai, j'ignorais si c'était une bonne idée que Jake et mon amie se retrouvent ensemble quelque part. Nous n'aurions plus besoin de feux d'artifices pour voir des explosions, c'était même clair. La haine qu'ils se vouaient mutuellement me dépassait, surtout du côté de Jake, Ivy semblait être plus passive, même si elle m'avait mise en garde contre lui.
— C'est une longue histoire, mais il ne vaut mieux pas que Jake et Ivy se retrouvent ensemble, crois-moi !
— Si tu le dis, soupira-t-il sans chercher à en comprendre les raisons.
Je savais parfaitement qu'il n'en avait rien à faire et qu'il le disait juste pour me faire plaisir, car après tout, tous deux étaient mes amis, même s'il ne les portait pas forcément dans son cœur. Mais j'étais certaine qu'avec le temps, nous deviendrions tous proches, une fois que les barrières seraient tombées.
J'ignorais quelle heure il était, mais j'étais certaine que l'heure de rentrer approchait à grands pas. Nous avions passé ici de nombreuses heures en nous la coulant douce, couchés sur le sol en train de profiter des rayons du soleil.
Mais avant notre départ, j'avais envie de faire certaines choses, je n'avais cessé d'y songer de toute la journée et avec ces douces caresses qui me rendaient folle, je n'y songeai que davantage.
Lentement, ne voulant pas être brusque, je relevai la tête et au moment où mon regard croisa celui de Cole, il cessa ses effleurements sur l'arrière de ma tête. Mes yeux étaient rivés sur ses lèvres et il ne lui était aucunement difficile de deviner ce que j'avais en tête. Cette bouche, bon sang, je mourais d'envie de la goûter et de la dévorer, de mordre ses lèvres, de les sucer, de les taquiner et de les lécher. Mais avant ça...
En un mouvement rapide, je me mis à califourchon sur lui, m'asseyant tout juste au-dessus de son bassin. Étant donné que je portais une robe, je pouvais absolument tout sentir, son jean, ses formes, entre mes cuisses. C'était plat, mais j'étais certaine que ça ne le resterait pas longtemps.
Cole me contemplait, yeux écarquillés et bouche-bée, ayant du mal à déglutir et pendant un moment, il cessa de respirer. Je posai mes mains sur son torse, d'abord près de son cœur – que je sentis rater quelques battements – et finalement, je les descendis tout le long de son abdomen.
Ses mains étaient hésitantes, mais où était donc passé le garçon qui m'avait fait l'amour avec sa bouche deux semaines auparavant ? J'aimais ce petit côté timide en lui, mais l'entreprenant me plaisait tout autant dans ce genre de circonstances. J'imaginais qu'il faisait attention pour ne pas déraper, mais c'était ce que je voulais. Je souhaitais déraper avec lui de toutes les manières possibles.
La lueur dans son regard changea, surtout, lorsque je commençai des petits frottements de mon bassin contre le sien. Je désirais le titiller, le mener à bout et qu'il en fasse de même avec moi. Ce jeu était vraiment très audacieux et j'adorais y jouer.
Ses mains se placèrent sur mes genoux et remontèrent le long de mes cuisses, jusqu'à s'engouffrer sous ma robe, pour finalement, agripper mes fesses doucement, tendrement, avec une délicatesse inouïe. Je pouvais sentir son entre-jambe se dresser contre la mienne, il commençait à être à l'étroit dans son pantalon. Je me penchai en avant tandis que ses mains remontèrent jusqu'au creux de mes reins et déposai enfin mes lèvres sur les siennes.
Elles avaient encore le goût de chocolat, je pouvais le sentir du bout de ma langue et lorsque la sienne vint à sa rencontre, je lâchai un soupir rempli de bien-être, pesant de tout mon poids sur lui et en passant un bras autour de son cou, en même temps qu'il me serrait contre son corps.
Les positions s'inversèrent rapidement et je me retrouvai couchée sur le dos, avec Cole entre mes jambes, sans pour autant avoir lâché mes lèvres ne serait-ce qu'un instant. Une de ses mains longea mon corps et se retrouva précipitamment sous ma robe, caressant l'intérieur de mes cuisses, sans pour autant remonter plus haut. Il jouait avec moi comme je l'avais fait avec lui plus tôt, c'était sa petite vengeance.
— Tu es cruel, l'accusai-je lorsqu'il rompit notre baiser.
Il sourit, l'air vraiment fier de son coup.
— C'est toi qui as commencé. Je savais que tu étais une petite joueuse, mais pas à ce point.
Ce fut là qu'il effleura mon intimité à travers le tissus de mon sous-vêtements. Ça avait été presque imperceptible, mais suffisamment pour que cela fasse monter mon désir en flèche.
— Qu'est-ce que tu veux, Liv ? continua-t-il en déposant un tas de baisers langoureux au niveau de mon cou et en baladant sa main sur mon corps, sans s'attarder réellement nulle part, me frustrant plus que jamais.
— Toi, fut la seule chose que je fus dans la capacité de répondre. Je te veux toi.
Il s'arrêta et releva son visage afin de me regarder droit dans les yeux. Il semblait surpris de ma sincérité, ainsi que flatté, mais je voyais parfaitement que ça n'arriverait pas et je l'acceptais. Je ne souhaitais surtout pas qu'il se sente obligé de faire quoi que ce fut, je respectais ses choix et je m'y tiendrais. C'était juste que j'avais envie de revivre ce qu'il m'avait fait ressentir lors de notre première fois. J'avais trouvé cette connexion, ces sensations, tout bonnement merveilleuses.
— Tu m'as déjà, soupira-t-il en effleurant mes lèvres du bout de ses doigts.
— Je sais, murmurai-je, un peu humiliée par ce doux rejet.
— Crois-moi, rien ne me ferait plus plaisir que de faire l'amour avec toi, tout de suite, en plein milieu de cette colline, tenta-t-il de s'expliquer. Mais... en même temps, je ne veux pas.
— On s'est emballés la dernière fois, raisonnai-je.
Nous avions été pris d'une espèce de frénésie où tout était très confus entre nous, où l'attirance physique prédominait avant toute chose. Nous nous étions laissés emporter.
— Ce n'est pas ce que je veux dire, Olivia. Ce qui s'est passé ce soir-là, c'était complètement dingue, j'y repense sans cesse, tu peux me croire. Mais je ne suis pas certain de pouvoir m'arrêter à nouveau à de simples préliminaires.
Son aveu me surprit. Alors... il en avait également envie ?
— C'est dur pour moi, car je voudrais toujours plus et je ne veux vraiment pas brûler les étapes. J'ai fait ça pas mal de fois et je ne veux pas que ça se passe comme ça entre nous, tu vois ce que je veux dire ?
Je hochai la tête. La dernière chose que je désirais, c'était le faire souffrir. J'ignorais que c'était aussi dur pour lui de s'abstenir, comme quoi, il avait fait un sacré effort cette nuit-là. Il s'était occupé de moi et m'avait offert ce que Nat m'avait refusé pour ma première fois. Il m'avait fait là un merveilleux cadeau, mais je n'étais consciente que maintenant à quel point ça avait dû être difficile pour lui de se contrôler.
— Désolée, je ne voulais pas te torturer.
— C'est un genre de torture très exquise, ricana-t-il en frottant son nez contre le mien, avant de déposer ses lèvres sur les miennes. On peut jouer, mais il y a des limites à ne pas dépasser, d'accord ? Je te demande juste un petit peu de temps en plus.
— Je ne veux pas que tu te sentes pressé, me hâtai-je de dire. Je peux parfaitement attendre, ne t'en fais pas pour moi !
Il ricana et s'assit sur ses genoux, même s'il se trouvait toujours entre mes jambes. Je me redressai à l'aide de mes coudes et repliai mes jambes contre mon torse, afin de les entourer de mes bras. Je ne voyais pas ce qu'il y avait de drôle dans ce que je venais de dire, c'était l'entière vérité !
— On ferait mieux d'y aller, déclara-t-il en se relevant, il est bientôt l'heure pour toi de rentrer à la maison et moi, je dois aller à cette fête avec Ronnie.
Je me mis également debout et ramassai la nappe sur laquelle nous avions été couchés pendant toutes ces heures afin de la plier. Alors que je me dirigeai vers la voiture et Cole vers le rocher où se trouvait son t-shirt en train de sécher, il m'attrapa tendrement par le bras et plaqua ses lèvres les miennes. Je fermai les yeux et me perdis dans l'intensité de ce baiser qui prenait de plus en plus d'ampleur à chaque seconde qui passait.
— Je t'aime, déclara-t-il avant de me relâcher et de me laisser complètement pantelante en plein milieu de cette colline.
Notre colline.
***
Je remontai l'allée principale d'Eastridge Hills, il était près de vingt heures et j'arrivais pile poil au moment où j'avais annoncé à ma mère que je serais de retour. La batterie de mon portable était au point mort et j'ignorais depuis combien de temps, mais en voyant l'heure sur le tableau de bord de la Jeep, j'avais été drôlement soulagée.
Cole était directement parti chez Ronnie, nous avions convenus qu'une fois qu'il serait rentré, il m'enverrait un message. Avec cette harpie de Piper dans le coin, il lui était impossible de venir dans la pool-house en douces et je regrettais énormément sa compagnie une fois la nuit venue. Nos nuits ensemble me manquaient vraiment, même si ça ne faisait qu'une semaine.
Je bifurquai vers la rue où se trouvait le manoir et vis Aiden sortir de sa voiture. Je fis comme s'il n'existait pas et traçai ma route, je n'avais vraiment aucune envie qu'il vienne m'aborder. La dernière fois qu'il s'était approché de moi, il m'avait pincé les fesses et je lui avais mis une baffe en pleine face. Je me souvenais encore de ce qu'il avait dit la fois où il m'était tombé dessus en pleine nuit, comme quoi il savait certaines petites choses sur moi. Vu qu'il n'avait rien tenté, j'en déduisais que ce n'était rien d'autre que du bluff afin de me faire peur, toutefois, je restais sur mes gardes. Quant à sa chère cousine, je l'évitais également comme la peste, moins je la croiserais au lycée, mieux je me porterais. Le fait de voir sa tête et ses sales manières me donnait des envies de meurtre.
Une fois arrivée devant le manoir, je ne pris même pas la peine d'entrer par la porte principale, mais pris directement la direction du jardin, afin d'atteindre la pool-house le plus vite possible.
Et alors que je traversai la pelouse et longeai la piscine, ma mère sortit en trombe de notre maison, son sac à la main, fouillant à l'intérieur de manière désespérée. Elle avait l'air complètement hystérique et lorsque je m'approchai d'elle, je vis que ses yeux étaient étonnamment rouges et brillants : elle avait pleuré. Qu'est-ce qui se passait ?
— Maman...
— Mais où diables étais-tu passée ? hurla-t-elle avant que je ne sente sa main percuter ma joue. Pourquoi ne réponds-tu jamais au téléphone ?
Je portai une main à mon visage et la fixai, complètement perdue. Elle avait répondu à mes messages, elle savait vers quelle heure j'allais revenir, alors pourquoi elle réagissait de manière aussi extrême ? Jamais elle n'avait levé la main sur moi, alors qu'est-ce qu'il lui prenait ?
— Je n'avais plus de batterie. Qu'est-ce qu'il se passe ?
Elle ne me répondit pas, toujours aussi désespérée à fouiller l'intérieur de son sac. Mais que cherchait-elle donc ?
— Maman, tu me fais peur...
Je tentai de lui toucher l'avant-bras, mais elle recula, avant de commencer à se mettre à pleurer à chaudes larmes. Bordel, ça commençait sérieusement à m'inquiéter cette histoire, qu'est-ce qu'il se passait ?
— C'est Alex, dit-elle après de longues secondes d'un silence insoutenable.
Mon sang se glaça dans mes veines en entendant le nom de mon frère franchir ses lèvres et en voyant l'état de désolation dans lequel elle se trouvait.
— Il a été poignardé en prison et il a été transféré aux urgences de Vacaville, dans un état critique ! Mon bébé est en cet instant dans un bloc opératoire, pendant que toi, tu faisais je ne sais quoi avec je ne sais qui !
Puis une nouvelle gifle percuta ma joue, que je me fis un plaisir de recevoir, car elle avait raison. Je n'avais aucune excuse et cette douleur me rattachait à la réalité. Le sang qui bouillonnait sous ma peau et mon épiderme qui commençait à me brûler à cause des deux coups que je venais de recevoir, c'étaient eux qui me disaient que c'était bien la réalité et que je n'étais pas en train de faire un mauvais rêve.
Un sanglot s'échappa de ma gorge tandis que je n'arrivais plus à respirer, ni même à bouger et que tout un tas d'images se bousculaient dans ma tête.
Si mon frère mourait, je ne m'en relèverais jamais.
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Voilà ! J'espère que ce chapitre vous a plu !
Retournement de situation. Pourquoi Alex s'est-il fait poignarder en prison ? Des théories ? Pensez-vous qu'il va s'en sortir ?
On se retrouve LUNDI PROCHAIN à 20H pour la publication du chapitre 79, qui sera un point de vue de Cole ! La fin du tome approche à grands pas, conseil d'écrivain, accrochez-vous !
Passez une bonne semaine ! (oui, je sais ô combien cruel c'est de vous souhaiter ça après la fin de ce chapitre, mais la politesse avant tout lol)
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