Chapitre 75 Olivia

Il ne restait que dix minutes pour qu'il fut neuf heures, heure à laquelle Jake devait venir me chercher devant Eastridge Hills. Mais cette fois, Cole se tenait à mes côtés.

Nous n'avions pas fermé l'œil de la nuit, ne cessant de parler et de nous faire des confidences, en nous regardant tendrement dans l'espace confiné de sa Jeep. Je lui avais raconté que Sheppard était au courant pour Alex, sans pour autant savoir la réelle vérité, et qu'il m'avait offert son aide en me conseillant un avocat. Il se trouvait que Cole le connaissait et même s'il disait que c'était un vrai trou du cul, il était le meilleur dans le domaine et que je devais en parler à ma mère le plus vite possible pour foncer afin de faire libérer mon frère. Ayant entendu parler de lui tout au long de ces deux dernières années, il certifiait que Graham Porter adorait les défis, mais que pour le coup, dans le but d'avoir une bonne défense, mon frère et moi devrions lui dire la vérité, car cacher ce genre d'informations à l'avocat pouvait s'avérer préjudiciable.

Nous avions parlé également de Piper et du fait que lui comme moi pensions qu'elle n'allait pas se tenir tranquille. Elle tenterait à nouveau quelque chose, ce genre de prédatrices ne s'avéraient jamais vaincues, elle trouverait une nouvelle manière de le piéger afin de l'obliger à continuer dans la même dynamique. Selon Cole, si la veille elle avait désisté, c'était parce que ça l'avait prise par surprise et qu'elle s'était vue désemparée, mais il n'était pas stupide.

— Nous devons trouver une manière de la coincer, avais-je dit.

— Nous ?

— Hors de question que je te laisse faire ça tout seul, tu as tout mon soutien.

Il avait semblé y réfléchir pendant quelques instants, sans répondre à ma proposition, pourtant, cette dernière était plus que sincère. Je l'aiderais quoi qu'il veuille faire, même s'il voulait l'emmener au fond des bois, l'obliger à creuser un trou et l'enterrer vivante. Elle n'en méritait pas moins.

— Nous devons être plus malins qu'elle, avait-il fini par dire. On ne doit pas se précipiter et nous devons être avisés, je ne veux pas qu'elle s'en prenne à toi ou à ta mère. Si elle apprend ce que tu représentes vraiment pour moi, elle fera tout pour t'éloigner de moi, alors...

— Nous devons continuer à garder notre relation secrète, en avais-je déduit. Jake le sait déjà et mon frère va le savoir.

— Ça, je m'en fiche. Mais le dire à ta mère serait imprudent, Liv, ça vous exposerait. J'ignore de quoi cette garce est capable...

— Vu ce qu'elle te fait subir depuis des mois, elle serait capable de tout.

Il avait serré les dents et fini par hocher la tête. Je ne pouvais pas le nier, il avait raison, même si notre relation devait rester secrète pour notre bien à tous les deux, nous pouvions au moins le dire aux personnes à qui nous faisions confiance. Pour ma part, mon ange gardien narcissique le savait déjà, mon frère le saurait aujourd'hui et il ne manquait plus qu'Ivy. Quant à Cole, il s'agissait d'Elijah et Ronnie. Toutefois, nous n'entrerions pas dans les détails du pourquoi nous gardions notre relation secrète aux yeux des autres.

Ce n'était pas parce qu'il m'avait confié ce que cette salope lui avait fait qu'il voulait pour autant que le reste du monde sache, du moins, pour le moment.

— Je suis désolé de t'embarquer là-dedans, tu as déjà assez de...

Je l'avais fait taire en me penchant sur lui et en l'embrassant, je ne voulais pas qu'il dise des âneries. Si nous étions ensemble, alors c'était pour de vrai, pas juste pour se défouler et se faire du bien mutuellement. Pour moi, lorsqu'on souhaitait vraiment être avec une personne, on prenait le bon comme le mauvais de sa vie. Et moi, je le désirais tout entier.

— Je sens que je vais me faire tabasser, marmonna-t-il en me ramenant au moment présent.

Nous attendions à quelques pas de l'entrée de la zone résidentielle et nous nous tenions à une certaine distance l'un de l'autre, appuyés contre sa voiture qui était garée juste à côté.

Nous aurions pu directement nous rendre à Vacaville, mais comme j'avais un marché avec Jake, j'avais trouvé en un premier lieu qu'il serait plus judicieux d'y aller avec lui et de tout lui expliquer tout en route. J'espérais par-dessus tout qu'il se tiendrait tranquille et qu'il ne ferait pas l'idiot comme la veille.

— Il ne te fera rien, dis-je en essayant de le rassurer, même si je n'étais vraiment certaine de rien.

Vu la haine viscérale que Jake semblait lui vouer, tout était possible. Quoi qu'il en fut, si jamais il tentait quelque chose, il aurait affaire à moi. Après tout, je pensais sincèrement que le message était parfaitement passé la veille, de plus, il n'était pas au courant de ce qui était arrivé après notre discussion. Si ça avait été le cas et que je lui avais confié tout ce que j'avais cru voir, en ce moment, Cole serait sans aucun doute à l'hosto.

— Tu lui fais confiance, dit-il d'un ton posé, mais j'y descellai une pointe de jalousie.

Ça me fit sourire, mais il pouvait être tranquille, jamais je n'avais vu Jake de cette manière. Je n'allais pas dire non plus que je ne le trouvais pas séduisant et très bien fichu, je n'étais pas aveugle et je n'avais aucune raison de mentir, mais en toute honnêteté, je ne ressentais aucune attirance pour lui. 

— Oui, en effet, mais ça s'arrête là, le rassurai-je en ayant du mal de ne pas me moquer de lui.

Visiblement, je cachais très mal mon amusement, parce qu'il se renfrogna et laissa échapper une sorte de grognement qui m'arracha un éclat de rire sans que je ne le veuille vraiment.

Mais mon hilarité cessa rapidement lorsque la Camaro de Jake entra dans mon champs de vision et s'arrêta à quelques mètres de nous, le moteur toujours en marche. Depuis là où je me trouvais, il ne me fut pas bien difficile d'observer l'ahurissement de mon ami. Il serra le volant ainsi que les dents et finalement, coupa le moteur pour sortir de la voiture et se diriger vers nous, d'un pas décidé.

Lorsqu'il fut tout proche, je sentis Cole se tendre tel un arc, paré à toutes les éventualités, mais rapidement, je posai une main sur son avant-bras afin qu'il se calme. Le savoir sur la défensive ne détendrait en aucun cas l'atmosphère.

— Olivia, commença Jake une fois en face de moi et visiblement, en faisant un effort considérable pour ignorer la présence de Jayden, t'as complètement déconné, dis-moi ?

— Il vient avec moi, l'informai-je.

Je n'avais pas besoin de lui expliquer que je lui avais absolument tout raconté, c'était assez évident comme ça. Puis après notre conversation d'hier où il m'avait reproché de ne pas lui faire véritablement confiance car sinon je lui aurais parlé d'Alex, il devait se douter que c'était désormais chose faîte.

— Tu te rends seulement compte de ce que tu fais ? Tu confies ta vie ainsi que celle de ton frère à un type que tu connais depuis à peine un mois et qui, je te signale, a été un véritable connard avec toi. On ne peut pas changer en deux semaines !

— Ce n'est pas comme si elle te connaissait depuis plus longtemps, rétorqua Cole.

— Ferme ta gueule, au moins moi, je ne l'ai jamais malmenée !

— Qu'est-ce que tu peux en savoir ?

Jayden s'avança d'un pas et Jake en fit de même, ils se regardèrent en chien de faïence pendant des secondes qui me semblèrent interminables.

— Suffisamment, sale fils de...

— Stop ! m'interposai-je entre les deux, littéralement parlant.

Je les séparai et m'éloignai avec mon ami de quelques pas, tandis que Cole tentait de se calmer et de faire redescendre la pression. Il y avait visiblement trop de testostérone dans l'air, après tout, deux mâles alphas ne pouvaient pas co-exister.

— S'il te plait, Jake, arrête. Cesse de le juger alors que tu ne sais rien sur lui, je t'en supplie ! Fais-moi confiance !

J'étais consciente que nous en étions arrivés à ce point par ma faute, si je n'avais jamais rapporté tout ce qui s'était passé au début à Alex, cette situation n'aurait pas lieu d'être. Mais si je ne l'avais pas fait, Jake ne serait sans aucun doute pas là non plus.

Il serra les mâchoires et ferma les yeux, avant de se détourner et d'aller vers Cole d'un air menaçant. Et alors que je le voyais déjà le frapper, il s'arrêta à un pas de lui, le pointa du doigt et dit :

— Si jamais tu lui fais du mal, je te brise les deux jambes. Me suis-je bien fait comprendre ?

Cole le fixa et sembla prendre son avertissement très au sérieux, il enfouit les mains dans ses poches, poussa un long soupir et en le regardant droit dans les yeux, lui répondit :

— Si jamais ça venait à être le cas, je te donne la permission pour me briser tous les os du corps. Ça marche, Diego ?

J'aurais dû intervenir et bien faire comprendre que personne n'allait casser les os de personne, mais vu qu'ils se défiaient du regard, je me disais qu'entre hommes, ils étaient sans aucun doute en train d'arriver à un certain accord qui m'échappait totalement.

Les mecs et leur virilité à deux balles finiraient définitivement par avoir ma peau !

Jake se retourna sans ne rien dire et alla vers sa voiture, avant de monter. Voyant que nous ne bougions pas d'un pouce, il baissa sa vitre et nous héla :

— Vous attendez le dégel ? Montez !

Cole et moi nous regardâmes pour nous exécuter ensuite, ne voulant vraiment pas faire attendre mon ami qui avait l'air déjà assez à fleur de peau comme ça.

Une fois installés sur la banquette arrière, Jake alluma le moteur et enclencha la marche arrière tout en marmonnant : « Alex va sauter de joie ».

***

Même si le frère d'Elijah avait dit plus d'une fois que plus jamais il ne remettrait les pieds dans une prison, aujourd'hui, il avait fait une exception à cette règle.

Nous avions gardé le silence pendant tout le trajet, tout comme la distance entre Cole et moi. Jake nous observait à travers le rétroviseur, il n'était définitivement pas commode et il ne cherchait à aucun moment à dissimuler son malaise face à la présence de l'ami de son frère dans sa voiture.

J'espérais toutefois que ses préjugés s'envoleraient et qu'il pourrait voir au-delà du statut social et économique de Cole, ce n'était pas juste de juger quelqu'un pour ça. L'inverse était tout aussi terrible. Je savais parfaitement que lui et sa famille n'avaient pas vécu des moments très prospères, ce qui l'avait poussé à dealer, mais ce n'était pas une raison pour en vouloir à Cole, il n'en était pas responsable. Ce n'était la faute à personne d'ailleurs, simplement les circonstances.

J'avais aussi eu des préjugés par rapport aux gens fortunés, je n'allais pas le nier, et je les avais sans doute encore, mais je m'étais simplement rendue compte qu'il ne fallait pas mettre tout le monde dans le même sac.

Assise sur l'un de banc de la salle de rencontre de la prison de Vacaville, j'attendais que les gardiens emmènent Alex, comme à chaque samedi depuis plus d'un mois. Cole se trouvait tout juste à côté de moi, tandis que Jake était derrière nous, appuyé contre un mur, l'air plus nerveux que jamais. Ça devait lui rappeler de très mauvais souvenirs.

Je lui avais pourtant dit qu'il n'avait pas à faire une chose pareille, mais il ne m'avait pas laissé le choix. Qu'est-ce qu'il pouvait être entêté franchement ! C'en était exaspérant !

S'il faisait ça parce qu'il pensait que mon frère allait mal réagir face à la présence de Cole, il se trompait lourdement. Jamais il ne tenterait de faire du mal à quelqu'un qui comptait pour moi, car cela reviendrait à me blesser. Et contrairement à lui, je savais qu'il comprendrait beaucoup mieux. Nous étions jumeaux et nous avions un lien particulier, parfois, le fait de parler n'était pas nécessaire, un simple regard suffisait. Contrairement à Cole, Jake ne pouvait pas saisir le sens d'un tel lien et ce que cela impliquait.

Cela ne voulait pas dire que lorsqu'il arrivait quelque chose à mon frère à distance, je pouvais le ressentir et vice-versa, non, loin de là, il ne s'agissait pas de quelque chose de mystique, simplement qu'on se comprenait d'une certaine manière qui échappait au reste du monde. Et seul un jumeau en ayant un lien étroit avec sa moitié pouvait en saisir toute l'ampleur.

Toutefois, même si je me disais ça, il n'empêchait que j'étais nerveuse et que je n'y pouvais absolument rien.

Me voyant trembler par moments, Cole posa tendrement sa main sur ma jambe, tout juste au-dessus de mon genoux, et la serra, interchangeant parfois la pression par de douces caresses. Je la lui saisis et la serrai dans la mienne avant de tourner mon regard vers lui. Contrairement à moi, il avait l'air drôlement à l'aise, mais j'étais consciente qu'il bluffait, pouvant sentir son pouls battre la chamade lorsque j'effleurai l'intérieur de son poignet.

— Olivia ? me sortit la voix d'Alex de mes contemplations.

Je relevai la tête et le vis à quelques mètres de nous, encore accompagné du garde tandis qu'il nous fixait chacun à tour de rôle. D'abord moi, ensuite Jake, puis finalement, Cole.

En me levant d'un bond, j'allai à son encontre et le serrai dans mes bras. Je sentis rapidement les siens entourer mon corps et caresser tendrement mon dos. Il déposa un baiser sur ma tempe et je me séparai de lui après quelques instants. J'avais toujours adoré me blottir dans les bras d'Alex et ces derniers me manquaient énormément depuis qu'il était enfermé ici.

— Mec, dit-il en s'adressant à Diego, je croyais que tu ne poserais plus jamais les pieds dans cette prison !

Son ami sourit et s'avança vers nous afin de lui donner une accolade. Pendant ce temps, je vis Cole se lever et venir également à notre rencontre. Mon cœur commença alors à battre à tout rompre et je retins ma respiration pendant quelques instants. Il ne fallait surtout pas que je panique, d'ailleurs, c'était complètement débile de le faire.

Hésitant, Jayden se plaça à côté de moi tandis qu'Alex et Jake discutaient, alors, je saisis sa main et enlaçai mes doigts aux siens. On était déjà là, on n'allait quand même pas se défiler, non ?

Mon frère remarqua nos mains entrelacées et cessa la conversation avec son ami, pour me fixer avec les sourcils froncés.

— S'il te plait, Olivia, soupira-t-il, sois gentille et dis-moi qu'il n'est pas celui que je crois.

Lors de ma dernière visite, nous avions parlé de Cole et du fait d'avoir enterré la hache de guerre. Ça ne faisait qu'une semaine, pourtant, les choses avaient changé de manière drastique, il devait être complètement à l'ouest. Il avait déjà senti quelque chose, mais je m'étais empressée de démentir ses insinuations. Mais à qui voulais-je donc mentir ? Alex me connaissait par cœur, alors sans doute, au fond de lui, ça ne l'étonnait même pas.

— Si, avouai-je, c'est Cole.

— Je t'avais dit de garder tes distances avec lui, continua-t-il d'un ton accusateur, très paternaliste.

Je haussai les épaules et espérai de tout cœur qu'il ne ferait pas une scène comme Jake la veille. J'étais consciente que s'il était derrière les barreaux, c'était à cause de moi, mais cela ne lui donnait pas pour autant le droit de me dire ce que je devais faire. Je pouvais écouter ses conseils, les prendre en considération, mais à la fin, le choix me revenait entièrement. Personne n'avait rien à redire, c'était ma vie et même si j'avais fait certaines erreurs, le fait d'être avec Cole ne voulait pas pour autant dire que j'allais les commettre encore une fois. La situation n'était tout simplement pas comparable.

— Alex, commença Jayden à ma plus grande surprise en s'avançant d'un pas et en relâchant ma main, je me doute qu'Olivia s'est confiée à toi par rapport à nos débuts difficiles et aujourd'hui, j'ai vraiment honte de m'être comporté comme je l'ai fait.

Mon frère le jaugea, mais ne dit cependant rien du tout. Il l'observait dans les moindres détails, sans piper mot, toutefois, son regard était suffisant pour moi pour savoir ce qui lui traversait l'esprit : il ne faisait en aucun cas confiance à Cole et il m'en voulait de l'avoir emmené avec moi. Enfin, c'était l'impression que ça me donnait.

— Il sait tout, Alex, avouai-je.

— Qu'est-ce que tu as fait, Liv ? continua-t-il en se tournant vers moi. Je pensais qu'on devait faire profil bas. Maman sait ce qui se passe entre vous deux ?

Oui, notre mère, voilà qui allait devenir un sujet épineux. J'avais tellement de choses à raconter à Alex, pourtant, pour le moment, je devais me limiter au stricte minimum.

— Je ne lui ferai jamais de mal, promit Cole en une tentative d'approche.

Mais cela ne sembla pas convaincre mon jumeau, qui encore une fois, le fixa comme s'il cherchait à entrer dans sa tête afin d'y desceller ses véritables intentions.

— Ne fais jamais des promesses que tu ne peux tenir.

Son ton froid m'arracha un frisson et je commençai sérieusement à me dire que c'était une mauvaise idée d'avoir emmené Cole ici. J'aurais peut-être dû attendre encore un peu, préparer le terrain lors de mes visites et peut-être que d'ici quelque temps, l'information serait mieux passée. Je m'étais sans doute précipitée en voulant que deux personnes très importantes dans ma vie se rencontrent.

— Olivia, soupira mon frère, on peut parler seuls ? Comme à notre habitude ?

Sa demande m'étonna, surtout, parce que le ton de sa voix avait complètement changé par rapport à comment il s'était adressé à Cole. Alors, je me contentai de hocher la tête. Jake proposa à Jayden d'aller attendre dehors, dans le parking, pendant que nous parlions et le garçon qui faisait battre mon cœur s'exécuta aussitôt, respectant ainsi les volontés d'Alex. Avant de sortir de la salle, il se tourna une dernière fois vers moi et esquissa un léger sourire en coin, comme pour me souhaiter bonne chance.

Alejandro poussa un soupir et m'invita à m'asseoir, mais cette fois, au lieu de le faire en face de lui, je pris place à ses côtés, afin d'être le plus proche possible.

Il garda le silence, perdu dans ses pensées et je me contentai de guetter ses réactions. Pour le moment, même s'il n'avait pas été très ouvert par rapport à Cole, il n'était pas sur la défensive, comme Jake.

— Je ne comprends plus rien, Liv, commença-t-il, perdu. Je pensais que tu le détestais...

— Je t'ai déjà dit la semaine dernière qu'on avait enterré la hâte de guerre.

— Oui, d'accord ! Mais de là à te pointer ici avec lui, main dans la main, en vous regardant avec des yeux de merlan frit, tu m'excuseras, mais il y a une sacrée marge !

Oui, je comprenais sa confusion et moi-même j'avais été complètement paumée en un premier temps. Les choses s'étaient déroulées à une vitesse grand V, je l'admettais, mais je n'y pouvais rien. C'était ainsi, point, il n'y avait pas grand-chose à expliquer d'autre. Parfois, la vie nous surprenait de différentes façons, moi, ça avait été avec Cole. En le rencontrant quelques semaines auparavant, ce scénario ne m'aurait même pas effleuré l'esprit.

Toutefois, j'essayai de lui expliquer du mieux que je pouvais ce que j'éprouvais à chaque fois que j'étais avec lui. Le fait de me sentir à nouveau vivante et heureuse de me rendre compte que j'étais capable de faire confiance à quelqu'un, à un garçon en l'occurrence, à celui pour qui mon cœur battait la chamade. Je lui racontai également les nombreux points communs que nous avions, je lui parlai d'Amara et de la terrible perte que Cole avait subi alors qu'il avait dix ans. Les maltraitances répétées par son beau-père, le fait que son propre père n'ait jamais été vraiment présent pour lui, ainsi que la culpabilité qui le rongeait de ne pas avoir pu sauver sa sœur. Sur ce plan, je lui racontai tout ce que je savais, mais pour ce qui était de Piper, c'était beaucoup plus compliqué et je doutais que Cole soit près à le dévoiler à quelqu'un d'autre, alors je gardais ça pour moi.

Je souhaitais simplement qu'il cesse de le voir comme une menace. Alex était sans aucun doute la personne que j'aimais le plus au monde, alors, avoir son approbation était très importante pour moi. Je désirais qu'il voit Cole tel que moi je le voyais, j'aurais tellement aimé pouvoir lui faire lire la moindre de mes pensées et lui montrer à quel point il me faisait du bien.

— Et maman ne le sait pas, je ne pense pas lui dire pour le moment. Nous préférons garder ça pour nous, pour l'instant.

— Il ne veut donc pas que les gens sachent qu'il apprécie un peu trop la fille de sa bonne ? demanda-t-il, cinglant.

— Ce n'est pas ça, c'était mon idée, mentis-je à moitié. Tu sais bien que lorsque les adultes s'en mêlent, tout devient plus compliqué et s'effondre.

Après tout, j'étais celle qui avait stipulé que notre relation devait rester secrète. Ça remontait à une semaine, mais désormais, cette règle était encore plus de mise à cause de Piper.

— Mouais, grommela-t-il. Je veux simplement que tu sois consciente de tes choix, Olivia. Je ne te reproche pas ce qui est arrivé avec Nat, si ce type était cinglé, ce n'est pas ta faute, c'est juste... que je ne veux plus avoir à revivre ce que j'ai vécu cette nuit-là, tu comprends ?

Je serrai les dents et fermai les paupières, je voyais parfaitement ce qu'il voulait dire. Il ne m'était vraiment pas difficile de me souvenir de son air grave lorsqu'il m'avait retrouvée dans ma chambre, couchée par terre, le visage rué de coups et le haut de mon pyjama déchiré.

J'avais encore l'améthyste dans la main lorsque j'avais recouvré connaissance, il me l'avait alors prise des mains et avait laissé ses empruntes dessus, afin de me protéger. Je me souviendrai à jamais des mots qu'il avait prononcés.

— T'inquiètes pas petite sœur, je m'occupe de tout.

Ne pouvant pas prononcer un seul mot, je n'avais pas pu m'opposer à la décision qu'il avait prisé. Tout s'était passé très vite ensuite, ma mémoire me faisait défaut par endroits, mais il m'avait fait promettre de ne jamais dire à notre mère la vérité et de suivre ses instructions au pied de la lettre : Nat allait me tuer, Alex était arrivé et m'avait sauvé en cognant mon agresseur avec la première chose qui lui était tombée sous la main. La police y avait cru, à vrai dire, elle n'avait eu aucune raison pour ne pas le faire.

— En arrivant dans cette chambre, j'ai vraiment cru que tu étais morte, murmura-t-il, sa voix se brisant à la fin de la phrase.

J'avais vraiment cru mourir moi aussi.

— Cole n'est pas Nat, certifiai-je. C'est l'une des meilleures personnes que je connaisse, Alex. Jamais il ne me fera de mal.

— Ça, tu n'en sais rien. Peut-être pas physiquement, mais sa vie... il est instable, Olivia.

Et il avait toutes les raisons de l'être. Peut-être l'était-il avec les autres, mais pas avec moi. J'étais l'exception à la règle et ça m'allait parfaitement.

— S'il te plait, fais-moi confiance.

Mon frère serra les mâchoires et finalement, planta ses iris dans les miens, avant de dire :

— C'est à lui que je ne fais pas confiance.

Je savais qu'il ne cherchait qu'à me protéger, tout comme Jake, mais je ne pouvais pas me fermer au monde sous-prétexte d'avoir eu une mauvaise – très mauvaise – expérience avec quelqu'un.

— Mais... si c'est ce que tu veux vraiment, je ne suis personne pour t'interdire quoi que ce soit. Tu es grande, si c'est ce que vous voulez tous les deux, c'est votre problème.

Sa réponse me surprit grandement, mais me fit extrêmement plaisir. Je ne lui demandais pas d'accepter Cole les bras ouverts, simplement de lui donner une chance. Après tout, nous la méritions tous.

— Seulement, ne te fais pas prendre par maman, d'accord ?

Sans même y réfléchir deux fois, je me jetai dans ses bras et le serrai de toutes mes forces contre moi, tandis qu'un énorme sourire se dessinait sur mon visage. Mon cœur tambourinait de joie dans ma poitrine et j'avais envie de sautiller sur place telle une gamine de cinq ans ayant atteint son but.

— Merci, murmurai-je à son oreille.

— Je veux juste ton bonheur, hermanita, tu le sais, n'est-ce pas ? poursuivit-il en me pressant contre lui.

Oui, je le savais parfaitement et moi, je ne souhaitais que le sien.

Ainsi, je me séparai de lui, posai mes mains sur ses épaules, lui souris d'un air empli d'espoir et lui dis :

— Je crois avoir trouvé la solution pour te sortir de ce trou. 

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Voilà ! J'espère que ce chapitre vous a plu ! 

On se rapproche dangereusement de la fin du tome, je pense qu'il doit rester pas plus de quatre ou cinq chapitres, c'est à voir ! Mais je connais déjà la fin (depuis un bon moment déjà même) et je peux vous le promettre, vous n'êtes pas prêts ! Mouhahaha ! 

Sinon, je serai curieuse de voir comment vous imaginez la fin du tome, je serai vraiment ravie d'entendre vos idées et de savoir si vous êtes sur la bonne voie ou complètement à côté de la plaque. Alors, LÂCHEZ-VOS THÉORIES EN COMMENTAIRES ! 

On se retrouve lundi prochain à 20h pour la publication du chapitre 76 ! 

Je vous souhaite une bonne semaine ! 

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